14 septembre 1943


La vie est une pute.

Une phrase semblant bateau pour le commun des mortels. Une phrase trop souvent utilisée pour décrire une mauvaise journée ou une période assez sombre mais temporaire de notre vie. Elle a été tant utilisée que les vrais miséreux n'osent plus la prononcer tant elle fait perdre toute crédibilité à la personne damnée par le destin.

Mais comment décrire une vie, où tu n'as jamais eu ton mot à dire ? Une vie où tout tes actes t'ont été dictés et ce depuis ta création. Une vie où des personnes de confiance n'étaient proches de toi que pour enfoncer le couteau plus profondément dans ton dos. Et quand tu penses que cet enfer est terminé et que tu penses enfin pouvoir passer le reste de cette vie à savourer et apprécier ses rares et magnifiques aspects, cette garce te rappelle au front pour te prouver qu'elle n'est pas là pour te faire de cadeaux. Elle veut simplement que tu souffres et ce jusqu'à la mort qu'elle t'entraîne à rencontrer.

Si ça ce n'était pas un comportement de sombre catin, Romano ne savait pas comment décrire sa vie. Réfléchissant du haut de son balcon, habillé d'un pyjama des plus ridicules, un ensemble vert sapin en matière " pilou pilou " ornés de petites tomates brodées à la main que Romano s'amusait à toucher, trouvant la sensation des fils cousus côte à côte sans aucun espace entre eux drôle et apaisante. Le minuscule balcon laissait très peu de place pour plus d'une personne. Pour ne pas être dérangé lors de sa pause cigarette, Romano envahissait encore plus l'espace en s'accoudant sur le rebord de la rembarde pour pouvoir se pencher, ses jambes et son derrière occupant désormais le rare espace encore disponible. Ce balcon du troisième étage était composé d'une simple barre horizontale de fer noire branlante sous le poids du jeune homme, accompagné de quelques colonnes toutes aussi fines. La majorité des fenêtres du Palazzo Zuccari étaients équipées de ce style de protection, Romano avait cependant choisi le seul balcon tremblant de la bâtisse uniquement car il donnait la meilleure vue d'ensemble sur la somptueuse Trinita dei Monti, la place parfaite pour en finir devant un public romain pour qui la mort sans la volonté de Dieu est pêché. Ainsi installé sur un endroit pouvant causer sa perte certaine, le jeune Italien pouvait déverser sa fumée toxique dans le ciel de la belle Ville Eternelle sans être interrompu.

A un détail près.

La porte-fenêtre, que Romano avait préalablement fermé en prenant soin de tirer le rideau pour qu'on le laisse tranquille, s'ouvrit d'un coup pour laisser apparaître le responsable de l'accoutrement ridicule du jeune homme. L'homme, qui venait de faire son apparition, ne dit rien pendant un moment, se contentant d'examiner la position de Romano et ce dans les moindre détails : jambes volontairement écartées par l'Italien pour ne laisser aucun espace et pour être plus à l'aise dans sa position, dos courbé et un fessier bien à la vue et totalement à la merci de quiconque s'en approchait. Un petit sourire en coin se dessina alors sur ses lèvres avant que ses yeux ne viennent rencontrer ceux du fumeur :

- C'est une invitation ?

- Ta gueule Spain, c'est pas le moment !

- A t'entendre ce n'est jamais le moment !

- Dans ma situation tu peux comprendre que je pense à autre chose qu'à plaisanter ou même à baiser avec toi.

- Je sais bien Roma, c'était une mauvaise blague. Mais.. pourrais-tu au moins rentrer? Il fait froid dehors, il ne faudrait pas que ton état s'aggrave d'avantage.

- Tss, même ma seule source de bonheur, je n'y ai plus le droit, décidément.

Romano était un gros fumeur, Spain le savait plus que quiconque et les récents évènements n'avaient fait qu'aggraver cette addiction.

L'italien écrasa avec agacement sa cigarette sur le balcon avant de finalement se retourner, s'adossant au balcon pour faire face à Spain. Son regard rempli de peine trahissait le sourire rassurant qu'il essayait de donner à l'une des rares personnes en qui il avait encore confiance. Spain connaissait mieux Romano que l'Italien ne se connaissait lui même. Peu importe les réactions du jeune home, l'Espagnol pouvait les comprendre et y remédier.

- Je vois que tu apprécies ton nouveau pyjama.

- Ce n'est pas comme si tu m'avais laissé le choix, t'étais tellement fier de ta création. T'aurais pleuré pendant trois jours si j'avais refusé de le mettre.. Et puis il n'est pas si désagréable à porter.

Romano rougit légèrement après sa réplique en admirant la matière qu'il touchait entre son index et son pouce. Ce vêtement crée et fabriqué par Spain portait encore l'odeur de toutes ses nuits blanches passées à le fabriquer, il pouvait distinguer les endroits où le châtain avait particulièrement pêté les plombs, des petits fils qui dépassaient au niveau des aisselles ainsi qu'une goutte de café sur le cordon du pantalon. Des petits défauts que Romano ne pouvait reprocher à l'Espagnol qui avait fait de son mieux pour faire rire son ami. Il ne lui avouera jamais qu'il avait lâché une petite larme, une fois à l'abri des regards, en voyant la tenue terminée.

- Je suis heureux qu'il te plaise. Maintenant rent..

- Spain ?

- Oui ?

- Comment je m'appelle ?

- Romano ?

- Je t'appelle Madrido peut être connard ?

Un rire s'échappa des lèvres des deux hommes. Spain reprit rapidement son sérieux, toussant pour clarifier sa voix.

- Désolé, Italy Romano ! corrigea t-il avant de tendre sa main vers l'Italien.

Spain n'eut pas le temps de tendre son bras en entier que le plus jeune lui fonça dessus, collant si fort son visage contre le torse de l'Espagnol que ce dernier put deviner un mince sourire sur le visage de la personne qu'il chérissait le plus. Il répondit aussitôt à son embrassade, entourant son dos de ses bras protecteurs tel un ange protégeant un innocent avec ses grandes ailes.

Les deux restèrent alors un long moment dans les bras de l'autre, incapable de se décoller, comme s'ils savaient que ce moment privilégié était probablement leur dernier.

- Spain Madrido ?

- Oui Italy Romano ? répondit-il avec son éternel air amusé.

- Quand je partirai, dis à mon petit con de frère de l'avoir sa putain de vie heureuse.

Un air plus grave traversa le visage de Spain pour finalement s'y installer définitivement. Le jeune homme ne préférait pas s'étendre sur le sujet, trop de larmes avaient déjà coulé lorsque lui et d'autres proches avaient appris la nouvelle. Il préférait envisager le futur de façon plus optimiste afin de ne pas penser au pire avant que le moment fatidique n'arrive. Il plaqua alors la tête de Romano contre son torse, pour l'empêcher à tout prix de voir son regard noir, une expression que Romano n'avait pas revu depuis longtemps et que Spain ne souhaitait pas qu'il revoit de si tôt.

- Evidemment qu'il va l'avoir sa putain de vie heureuse, avec nous tous et surtout avec toi. Juste après notre grand tour du monde que je t'ai promis pour après la guerre. Tu te souviens de cette chanson ?

- Hum.. Con.. te partiro. Paesi che non ho mai..veduto e vissuto con te !

Une voix faible émana des lèvres de Romano, la voix de casserole habituelle du jeune romain avait laissé place à une petite voix cristalline parfois cassée dû à la faiblesse du jeune homme et sa consommation abusive de tabac. La chanson dont les paroles étaient pourtant pleines d'espoir et de rêves d'aventure s'était transformé en chanson remplie de tristesse et sonnant comme un adieu lorsqu'elle était chanté par le châtain.

- .. No, no, non esistono più.

Romano arrêta alors net de chanter pour finalement rire contre Spain, un rire nerveux masquant le désespoir du jeune homme qui ne pouvait cacher ses larmes venant tremper la chemise de son ami.

- Des pays qui n'existent plus.. Quelle belle ironie.


Note de l'auteur

Ciao ! Vous, petites âmes hétaliennes, vous êtes paumés bien comme il faut pour tomber sur ma fic !

Con te partiro m'a été inspiré par la chanson d'Andrea Bocelli.. ce qui devait être un oneshot s'est transformé en gros bordel que je m'apprête à vous dévoiler. La fiction est noté M mais pas spécialement pour le sexe, elle l'est en particulier à cause des thèmes abordés ( mort, manipulation, dépression etc )

Comme la fiction est dans un contexte où les personnages sont vraiment les nations, j'ai fais de mon mieux pour ne pas faire d'erreurs historiques mais si jamais vous voyez des erreurs, n'hésitez pas à faire vos Jean-Histoire dans les reviews, c'est fait pour ça

Fusosososo à tous