Te voir
me tue
chaque jour
et chaque jour
j'attends de mourir
Bats, bats, bats contre moi

C'est une carte qui fait monter le rouge aux joues. Son destinataire regarde furtivement autour de lui, avant d'enfouir le billet dans sa robe noire.

La Grande Salle est traditionnellement recouverte de rose en ce 14 février. Des pétales de fleurs tombent du plafond à la place de la fine pluie qui aurait dû refléter le temps gris du Parc.
Les élèves s'agitent plus que d'habitude, de grandes cartes chantantes et colorées dans les mains. Ils passent de table en table, les joues aussi roses que les murs. Certains s'éclipsent plus ou moins discrètement. Des élèves cachent un air sombre en taquineries à l'encontre de celles et ceux qui ont reçu des cartes, contrairement à eux.

Des âmes évitent soigneusement de se regarder. Leurs amis les taquinent, on évoque en riant les petits parchemins qu'ils ont glissé fébrilement dans la poche intérieure de leur robe. De qui viennent-ils ? Pourquoi les cacher ? C'est la journée des amours, de tous les amours, montrez-vous, montrez-vous au grand jour !

Mais les amoureux le savent bien : leur affection ne peut s'étaler sous les pétales qui tombent du plafond.

Peut-être, un jour, ce petit billet sera-t-il retrouvé dans une vieille robe. Peut-être le sorcier la froissera-t-il pour se lever brutalement. Peut-être sa cape frappera-t-elle le sol telle une vague, battant furieusement sur son passage, sur son chemin, vers l'auteur de ces mots.

Peut-être sera-t-il jeté dans les flammes d'une grande cheminée, comme pour se débarrasser du mauvais deuil et des larmes qui l'accompagnent.
Peut-être aura-t-il le goût de baisers furtifs, d'admirations muettes, de regards.

Peut-être.

Pour l'instant, il bat, tel un cœur, contre leur poitrine.