EIGHON

La cité perdue

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Zelena était morte, Rumplestiltskin avait retrouvé ses esprits, tout aurait pu aller pour le mieux dans le meilleur des mondes de contes de fées à un détail près...

— Comment voudrais-tu que je me calme ? lança Blanche à l'attention de David. Ca va bientôt faire six mois que notre fille a disparu !

— Je sais, tenta le Prince. Mais te mettre dans cet état ne la ramènera pas.

Assise dans le fauteuil de son bureau, Regina Mills regardait son ancienne pire ennemie faire les cent pas devant elle.

— Asseyez-vous, bon sang ! Vous allez me donner la nausée.

Mary Margaret s'arrêta devant le bureau de Madame le Maire et l'accusa en la pointant du doigt :

— Tout ca c'est de votre faute !

— J'ai sauvé les habitants de Storybrooke, rappela Regina. Emma a pris ses responsabilités quand elle a décidé de sauter à travers ce portail.

Henry ne supportait plus cette situation, surtout de voir ses grands-parents se disputer avec sa mère adoptive. Il savait que la disparition d'Emma n'incombait pas à sa mère. Pour fuir en sentant la défaite, Zelena avait ouvert un portail, mais Emma, déterminée à la capturer, s'était jetée sur elle, se retrouvant elle aussi aspirée par le vortex.

— On sait qu'elle est en vie, dit-il en se voulant optimiste, c'est le plus important. Je sais que maman la retrouvera.

Voyant Blanche-Neige se calmer, Regina expliqua:

— J'ai trouvé une autre formule qui permettra d'ouvrir un portail identique à celui par lequel Emma est passée.

— Encore faudrait-il qu'elle fonctionne cette fois, accusa Blanche.

— J'ai bon espoir que cette formule soit la bonne, expliqua Regina. Contrairement à l'autre, le portail aspirera Emma où qu'elle se trouve pour la ramener à nous.

— Qu'attendez-vous pour le faire dans ce cas ? demanda Blanche.

— C'est précisément pour cette raison que je ne voulais pas vous en parler ! s'agaça la Reine. Il faut réunir de nombreuses conditions et elles le seront demain soir. Quand la lune sera pleine, les énergies seront propices et nous aurons toutes les chances de notre côté.

Blanche Neige détailla la Reine un instant. Elle savait que celle-ci faisait son possible pour ramener Emma, mais le temps se faisait long, six mois étaient passés et tout aurait pu arriver à sa fille entretemps.

— On va rentrer, dit David avant de regarder Regina. Où devons-nous vous rejoindre demain soir ?

— A ma crypte, tâchez d'arriver vers dix heures, dit-elle en se levant.

— Je pourrai venir ? demanda Henry qui passerait sa nuit chez ses grands-parents.

— Oui, mais tu resteras à l'écart, mon chéri, je ne voudrais pas que tu sois blessé s'il y a quoi que ce soit.

— Ok, merci, maman, dit Henry en venant l'enlacer.

Regina posa un baiser sur son front.

— A demain, profite bien.

— A demain, répondit-il en suivant Blanche et le Prince hors du bureau.

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La terre était aride et rejetait son souffle brûlant à travers de petits cratères. Pas une végétation, plus une plante ne poussait sur ce terrain. Les vapeurs nauséabondes de la vase noire envahissaient ses poumons et rendaient sa respiration plus difficile. La chaleur, l'humidité, la rugosité du sol de pierre, rien ne s'alliait à elle, tout devenait un danger potentiel. Son adversaire, trois à cinq fois plus gros qu'elle, l'examinait d'un œil aussi sombre que les larges flaques visqueuses remplies de vase. Sa peau se cachait sous une épaisse carapace fissurée par la température insupportable de la région. Ses mains à elles-seules auraient pu briser bien des cous. Mais elles ne lui avaient pas suffi. Sa massue portait encore les traces rouges sanguinolentes de ses derniers adversaires. Après un grognement, il chargea droit sur elle et la terre trembla sous ses pas. Si son poids ne l'aidait pas contre ce géant de granit, elle userait d'autres avantages. Sa petite taille n'était pas forcément signe de faiblesse et elle l'avait appris auparavant. Quand il fut à un mètre d'elle, elle roula entre ses jambes et évita son poing libre. Dans son dos, plus rapide que lui, elle fit un bond et s'agrippa à son cou, les bras enroulés autour de sa gorge. Il se démena dans de grands gestes, balança son bras vers l'arrière dans l'espoir de l'arracher à lui. Il gesticula encore et encore tel un troklon des forêts remplis de puces. La main fermée autour du manche de sa dague, sa jugulaire fut difficile à trouver. Elle referma son emprise pour stopper les rebonds qu'elle faisait contre son dos à la peau dure. Quand elle comprit enfin qu'il reculait à grandes enjambées vers un vieux tronc mort, elle lâcha prise et ramena les pieds sur ses épaules. Les mains autour de son crâne, elle eut à peine le temps de bondir avant qu'il ne percute le tronc avec son dos. De retour sur la terre abîmée, elle prit un instant pour récupérer un peu de son souffle. Le géant semblait assommé par le choc qu'il avait lui-même provoqué. Un signe évident qu'il pouvait être blessé, par conséquent, tué... Au moment où elle s'apprêtait à partir à l'attaque, un violent tonnerre gronda au-dessus de sa tête. Elle eut à peine le temps de lever les yeux au ciel qu'elle se retrouva aspirée par le portail qui venait de s'ouvrir...

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... Elle chuta lourdement sur le sol et ouvrit les yeux en sentant différentes odeurs. La fraîcheur de l'air, les senteurs naturelles et végétales la prirent d'assaut. L'oxygène emplissait déjà ses poumons, les gonflait. Elle se redressa d'un vif mouvement en réalisant qu'elle n'était plus dans les terres abîmées. Elle releva ses yeux sur le décor autour d'elle. Des arbres, de l'herbe, des plantes, de la terre humide.

— Maman ?

Elle fit volte face sur cette voix et riva ses yeux sur les personnes devant elle. Un petit garçon s'approcha aussitôt, mais elle le repoussa vivement dans un geste réflexe. Où était-elle ? Qui devait-elle combattre cette fois ?

Henry chuta sur le sol et Regina se précipita vers lui, effarée par la réaction qu'Emma venait d'avoir.

— Henry, tout va bien ?

Son fils se redressa, confus et un peu assommé.

— Oui... Mais... Pourquoi elle m'a frappé ?

Regina n'en savait rien. Elle venait de s'interposer entre Emma et leur fils, sous le choc de cette scène, incapable de comprendre la réaction de la Sauveuse. Tout comme Blanche Neige et David, elle était figée. Emma était là, devant eux, vêtue d'une étrange tenue ressemblant à du cuir dont un pourpoint à capuche sur lequel tombait ses cheveux blonds et particulièrement sales. Son visage suintait, taché de poussière, de sang, marqué d'une cicatrice partant de son front à sa pommette droite.

— Emma... Seigneur, où étais-tu ? fit-elle inquiète.

Blanche approcha, soulagée de revoir sa fille et incapable de rester loin d'elle.

— Emma, on t'a ramenée, tout va bien.

Mais en voyant Emma se redresser, armée d'une dague et prête à bondir, David retint sa femme avant qu'elle n'avance davantage. Sous le choc, Blanche ne bougea plus tandis que Regina la voyait se reculer. Quelque chose s'était passé mais la Reine ne savait dire quoi. Ils la virent alors se retourner puis s'enfuir à travers le cimetière.

— Emma ! appela Blanche. Reviens...

— Pourquoi maman a fait ça ? demanda Henry sans comprendre.

Regina n'avait pas de réponse, son regard tourné vers l'obscurité où la Sauveuse venait de disparaître.

— Je ne sais même pas si cette femme est ta mère, dit-elle à elle-même.

— C'était Emma, dit David, je suis sûr que c'était elle.

— Emma n'aurait jamais levé la main sur Henry, argumenta Blanche.

— Sauf si elle ne sait plus qui elle est ! corrigea Regina.

— Nous devons la retrouver, fit David, je vais prévenir les autres...

Regina ne sut si elle devait approuver cette idée mais jamais elle n'aurait pu soupçonner pareille réaction de la part d'Emma. Où était-elle allée pendant tout ce temps ? Qu'avait-il pu lui arriver pour qu'elle revienne dans un tel état ? Etait-elle seulement elle-même ou Regina avait-elle ramené une créature ayant l'apparence de la Sauveuse ?

Une demi-heure plus tard et malgré l'heure tardive, David avait réuni les nains ainsi que Robin et d'autres hommes qui sauraient pister Emma à travers le cimetière et dans la forêt adjacente. Peu importait qu'ils aient du réveiller la plupart d'entre eux. Chaque habitant de Storybrooke devait leur vie à Emma et David ne lésinerait pas sur les moyens pour retrouver sa fille.

— Vous devrez être prudents, expliqua David, elle est armée d'une dague et il se peut qu'elle ne vous reconnaisse pas.

— Pourquoi ne pas utiliser la potion de Gold qui lui avait rendu la mémoire ? interrogea Robin.

Rumplestiltskin qui était aussi présent, expliqua :

— Nous ne sommes pas sûrs que cette femme soit Emma Swan et quand bien même le serait-elle, ce n'est peut-être pas la magie qui l'a mise dans cet état.

David distribua plusieurs talkie-walkie.

— Formez des groupes de deux ou trois et nous resterons en contact radio.

Il revint vers Blanche et Henry.

— Attendez-nous là, on ne sait jamais, elle pourrait revenir sur ses pas.

— Je reste avec eux au cas où, lança Ruby.

Tous commencèrent à s'éloigner à travers la forêt, Robin près de Regina qui ajustait ses bottines.

— Tu es sûre de vouloir venir ? demanda-t-il.

— Je ne suis peut-être pas équipée, mais je ne vais pas laisser Miss Swan se promener avec une dague dans ma ville.

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Une main posée sur le tronc, accroupie sur la branche, la blonde observait le petit groupe s'éparpiller. L'homme qu'elle avait vu à son arrivée dans ce monde donna des ordres. Il était donc le chef de cette bande. Elle se redressa quand elle posa ses yeux sur la femme aux cheveux bruns près d'un autre homme. Tous les deux discutaient en s'écartant des autres. Elle fit quelques pas sur la branche, discrète, et les suivit des yeux. Elle bondit sur un autre arbre à côté du sien et se rééquilibra à son atterrissage. Cette forêt n'était pas bien différente de celle des Carnutes où vivaient les Hérotaures, Gardiens des bois. Mais pour l'instant, elle n'avait croisé aucune créature, pas même un Troklon. Devait-elle se battre contre ces hommes si chétifs et étrangement vêtus ? Le regard rivé sur le duo en contrebas, elle les suivait en passant d'arbre en arbre.

La femme aux cheveux bruns, aux parfums agréables, s'adressait à son ami d'un ton plus ferme. Attentive et prudente à la fois, elle écouta :

— Je n'ai pas dit que tu ne savais pas te défendre, justifia Robin, j'ai suggéré que tu restes en ville avec les autres...

— Avec les femmes, tu veux dire.

Un bruit de craquement se fit entendre et Robin arma son arc, vigilant.

Toujours perchée sur son arbre, à l'abri de son feuillage, Emma observa l'arme dans la main de l'homme. Cet arc était bien plus petit que ceux qu'elle avait maniés, la flèche plus fine. Immobile, elle se tenait prête à réagir en cas d'attaque. Mais la voix de la femme résonna une nouvelle fois.

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— Baisse cet arc, ordonna-t-elle. C'est d'Emma dont il s'agit, pas d'un singe volant.

— David a dit qu'elle était armée.

Regina posa sa main sur son bras pour le forcer à obéir.

— Une femme avec un couteau t'effraierait donc ?

Robin suivit Regina qui ne prenait pas la peine de l'attendre.

— Tout dépend de la femme, répliqua-t-il. La Sauveuse n'est pas vraiment une femme comme les autres.

— Nous sommes d'accord, approuva Regina. Mais elle est aussi la mère de mon enfant donc hors de question de la blesser.

— Et si elle nous attaque ? renchérit Robin. Aurai-je au moins le droit de nous défendre ? Ou vais-je devoir me laisser faire pendant que tu lui rappelles que ton fils est aussi le sien ?

Le ton de la voix de Robin s'était fait un peu plus cynique sur ces dernières paroles, sûrement du au fait d'entendre cette remarque au sujet de la parenté d'Henry à tout bout de champ. Il sut qu'il venait d'attirer l'attention de Regina parce que celle-ci se tourna vers lui, le regard perplexe et accusateur à la fois.

— Qu'est-ce que cela signifie au juste ?

Robin soupira, exaspéré de devoir se justifier à ce sujet.

— Que tu ne me laisses jamais agir. Tu restes indépendante quoi qu'il arrive, en toutes circonstances, et j'ai parfois l'impression que tu oublies que nous sommes ensemble, Regina ! Laisse-moi faire ma part.

Regina s'apprêta à répondre, mais fut brusquement interrompue par l'apparition d'Emma dans le dos de Robin. De toute évidence, celle-ci venait de sauter de l'arbre près d'eux.

Sans tarder, Robin se tourna vers elle et recula vers Regina pour la placer dans son dos. Dans un réflexe, il venait d'armer son arc en direction d'Emma.

Celle-ci garda ses yeux rivés sur le bout aiguisé de la flèche dirigée sur elle. Dans un mouvement, elle saisit le bras armé de l'homme, se détourna dos à lui et envoya son coude vers l'arrière. Il percuta son visage, le poussa à se reculer. Elle saisit son arc et fit volte face en le braquant vers la tête de l'homme à genoux devant elle. Plus léger que tous ceux qu'elle avait connus, cet arc semblait fait pour elle et cet homme serait mort dans les prochaines secondes.

Tout s'était passé si vite que Regina n'avait guère eu le temps de réagir. Un haut-le-cœur venait de la saisir quand Emma avait braqué la propre flèche de Robin sur lui. Sa main se posa aussitôt sur la sienne dont les doigts maintenaient la tension sur la corde, la flèche prête à partir.

— Emma, non !

Le regard bleu acier d'Emma remonta alors dans le sien. Si près d'elle, Regina voyait davantage ses traits marqués sous la lueur de la lune à travers les arbres. Cette même cicatrice qui partait de son front à sa joue droite évoquait bien des drames, autant que le reflet dans les prunelles azur d'Emma n'était plus celui que Regina avait connu.

— Je t'en prie, baisse cette flèche.

Emma fronça les sourcils. Pourquoi cette femme défendait-elle son adversaire ? Il était à genoux, elle l'avait soumis, il devait mourir. Pourtant, elle obéit, sans trop savoir pour quelle raison d'ailleurs. La corde tendue de l'arc se relâcha entre ses doigts.

Le nez en sang, Robin se redressa.

— Nom de Dieu ! lâcha-t-il, quelque peu vexé.

Emma reposa les yeux sur lui et décocha un revers du bras qui eut le mérite de l'assommer. Si elle ne l'avait pas tué, il n'avait quand même pas le droit de se relever devant elle. Elle se pencha au-dessus de lui, lui prit son carquois rempli de flèches et se redressa avant de poser ses yeux sur la femme aux parfums divins. Elle percevait une étrange sensation au creux de son ventre quand elle la regardait. Comment devait-elle réagir ? Elle capta quelques frémissements parmi les feuilles et détourna le regard vers la forêt. Les autres approchaient. Leurs odeurs portées par le vent parvenaient jusqu'à elle et lui indiquaient leur arrivée prochaine. Trop nombreux, elle ne pourrait tous les attaquer de front.

Regina la vit se retourner vers elle puis s'éloigner en courant à travers les arbres. L'humiliation qu'elle venait d'infliger à Robin l'avait stupéfaite, mais au moins, Emma l'avait épargné. La Reine n'avait pas la moindre idée de ce qu'il venait de se passer, mais une chose était sûre, cette femme était bel et bien Emma et quel que fut l'endroit où on l'avait envoyé, il l'avait littéralement changée.

— Où est-elle ? demanda aussitôt David en voyant Robin se relever.

— Elle a manqué de me tuer, fit ce dernier. Elle a pris mon arc et mes flèches.

— Qu'a-t-elle dit ? interrogea également Leroy.

— Elle n'a pas parlé, fit Regina dont le regard demeurait tourné vers les bois.

Elle fit finalement volte-face et reprit :

— Vous ne devez pas la traquer sinon tout ça va mal se terminer.

— C'est ma fille, dit David, je ne la traque pas, je veux la retrouver pour son bien.

— Elle ne sait même pas qui nous sommes, argumenta la Reine. Elle n'aurait pas hésité à tuer Robin si je ne l'avais pas stoppée.

— On parle d'Emma ! s'insurgea David.

— Qui a disparu pendant plus de six mois, rappela Regina. Elle est sale, blessée. Elle n'est plus la Sauveuse que vous avez connue. Si vous la traquez, elle vous tuera.

— Alors comment devons-nous nous y prendre ? demanda Leroy.

Regina n'avait pas encore de réponse à cette question. Seule évidence, si Emma s'en était pris à Robin, elle n'avait pas montré le moindre signe d'agressivité à son encontre.

— Nous allons devoir faire preuve de patience et regagner sa confiance.

Elle se remit en marche.

— Nous devons prévenir les autres et retourner en ville, Henry m'attend.

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A suivre

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