Chapitre 1 : Atelier Full'ame, maîtres d'armes

17ème siècle, Camden Town, au nord de Londres. C'était là le quartier à éviter pour tout bon anglais qui se respecte. Dans les rues, les égouts s'écoulaient, les filles de joie riaient entre elles et la drogue circulait à tout va. C'était aussi le repère des voleurs, des anciens prisonniers et des criminels.

Harry Potter, un jeune garçon de 17 ans, marchait très vite dans Buck Street. Il déambulait entre les passants, cherchant à rejoindre au plus vite la place Stuckley où se trouvait l'atelier de son maître Lucius Malfoy, maître d'armes de son état. Oui, dans le quartier de Camden Town se trouvait aussi un atelier d'armes.

Harry ne se préoccupait pas des personnes qu'il pouvait croiser. Il était déjà tard et il savait qu'il était connu puisqu'il fréquentait le quartier depuis sa naissance. Il avait été abandonné à la porte de Lucius quand il avait à peine deux ans. Lucius l'avait recueilli, élevé et éduqué et lui avait enseigné dès son plus jeune âge les rudiments des armes blanches, les duels à l'épée, et l'entretien des lames. Depuis il s'évertuait à s'améliorer, apprenant les bottes secrètes des plus grands duellistes. Il était plutôt bon dans ce domaine. A la réflexion, c'était peut-être aussi pour cela que les gens du quartier le respectaient. Un jour, un étranger, sortant du World's End le pub du coin, s'était mis en travers de son chemin. Le soûlard avait dû penser qu'il serait facile d'impressionner ce gamin de quatorze ans pour lui piquer son argent. Malheureusement pour lui, Harry transportait alors une commande pour le sergent Thomas, un magnifique Fleuret très léger à manier. Harry avait donc porté l'estocade à ce rigolo devant la moitié du peuple de Camden. L'ayant laissé pour mort, il s'en était allé livrer sa commande. Au retour à l'atelier, Lucius l'avait mis aux travaux forcés pour le punir d'avoir abimé la commande de Sir Thomas mais Harry avait vu la fierté briller dans les yeux de Lucius. Depuis, le mot était passé, personne ne se mettait plus en travers du chemin d'Harry.

Au croisement de Buck Street et de la place Stuckley, Harry vit de loin Lucius parler avec un cocher. Il se dépêcha de les rejoindre.

- … Il faut donc que tout soit prêt pour son arrivée, dit le cocher. Le Maître ne tolèrera aucun retard, aucun désagrément.

- J'ai bien compris, lui répondit Lucius, je mettrai tous mes hommes au courant, tout sera prêt pour demain. A quelle heure doit-il arriver ?

- Son bateau rentrera de France demain dans l'après-midi, donc il sera là vers les seize heures.

- Entendu. Merci beaucoup, à demain.

- A demain.

Harry était resté en retrait de la conversation, il s'avait que Lucius n'aimait pas être dérangé lorsqu'il était avec un collaborateur. Néanmoins, voyant que leur échange prenait fin, il se permit de faire remarquer à Lucius sa présence.

- Ah, Harry. Content de te revoir ! Où étais-tu donc passé ?

- Désolé, je m'entrainais avec Ron Weasley à la feinte.

- Ron Weasley… Tu sais que je n'aime pas trop que tu fréquentes cette famille, les roux n'ont jamais porté bonheur lors d'un duel.

- Lucius, vous dîtes n'importe quoi ! Ron est un très bon adversaire, et je choisis seul mes amis, merci !

- Bien, bien, ne t'énerve pas, j'ai d'autres choses à penser pour le moment de toute façon. Tu vois le cocher qui vient de nous quitter ? C'est celui de Sir Severus Snape.

- Snape ? Le propriétaire de votre atelier ? Que vient-il faire ici ?

- D'abord, comme tu le dis si bien, c'est le propriétaire. Il a donc tous les droits de venir ici. En fait, il vient faire une visite d'inspection. Il est déjà venu les années précédentes mais je m'arrangeais pour t'envoyer en courses ou je demandais à ton précepteur de te donner cours et ainsi tu n'avais aucune chance de rencontrer Severus.

- Pourquoi m'empêcher de le rencontrer ? C'est un grand homme qui pourrait m'apprendre beaucoup et c'est l'un de vos plus proches amis !

- Oui mais tu es trop téméraire et bien trop curieux aussi. Tu n'aurais pu t'empêcher de lui poser des questions, et à vrai dire, Severus est quelqu'un de très froid au premier abord, et très facilement irritable, surtout lorsqu'il s'agit d'un beau et jeune garçon posant trop de question. J'avais peur qu'il me demande de te renvoyer. Tu es mon fils adoptif, je n'aurais pas pu te laisser seul dans la rue avec les autres gamins qui finissent par se regrouper en bande pour voler. Mais j'aurais dû choisir entre l'atelier et toi, et malheureusement mon choix n'aurait pu se porter sur toi.

Ils venaient d'entrer dans l'atelier de Lucius, Full'ame. Harry s'arrêta et observa. Il voyait tous ces hommes, ses compagnons, qu'il côtoyait tous les jours. Il vit les reflets des lames danser devant lui, il les entendit s'échauffer les unes contre les autres. Puis il ferma les yeux et senti. Ça sentait la transpiration, la paille, que l'on mettait au sol pour amortir les chutes, et ça sentait le vin que les hommes buvaient pour se ragaillardir un peu. Et là, il comprit. Bien sûr, il savait depuis le début que s'il devait faire un choix, son choix serait Full'ame, quel que soit l'autre proposition, mais maintenant il en était sûr : jamais il ne pourrait quitter cet endroit. C'était sa vie, il était fait pour vivre ici, fait pour manier les armes. Il regarda Lucius.

- Demain, je ferai ce que vous voudrez.

Lucius le regarda à son tour. Il semblait vraiment fier de ce qu'était devenu Harry.

- Bien, passe voir Dobby à la cuisine pour prendre ton repas. Mais ne traine pas trop cette fois ! Demain, tu devras te lever tôt pour m'aider à tout préparer. Nous déciderons alors de ce que l'on fera une fois que Severus sera là. Va vite te coucher.

- D'accord, Lucius, bonne nuit.

Harry courut en direction des cuisines. S'il y avait une chose au monde qu'il aimait autant que l'apprentissage des duels, c'était bien la nourriture. Et Dobby le cuisinier était l'un de ses plus grands amis.

Douglas Bylbarrough, Dobby pour les intimes, était un petit homme assez maladroit en général mais très doué en cuisine. Il était entré au service de Lucius alors qu'Harry n'avait que douze ans. Dobby s'était tout de suite pris d'affection pour ce petit garçon, pourtant déjà plus grand que Dobby, aux grands yeux verts et aux lunettes toujours de travers. Il l'emmenait souvent avec lui au marché de Camden Lock et ils prévoyaient tous les deux les repas pour la semaine. Un jour, alors qu'ils achetaient leurs provisions, un des marchands refusa de rendre la monnaie à Dobby sous prétexte que, pour quelqu'un d'aussi hideux que lui, les aliments étaient plus chers. Dobby n'osait jamais répliquer lorsqu'on lui manquait de respect, il préférait s'en vouloir plutôt que d'en vouloir à la personne fautive. Harry n'avait jamais aimé ce trait de caractère chez son ami, lui il était plutôt brave et courageux « comme un petit lion » lui disait sans cesse Dobby. Aussi, Harry, n'écoutant que son courage du haut de sa douzième année, cria sur le marchand, ameuta toute la population, et annonça que jamais, au grand jamais, on n'avait osé manquer de respect comme ça à un membre du personnel du Maître Lucius Malfoy, c'était un vrai scandale ! Lucius étant très connu, très respecté et redouté, le marchand rendit la monnaie à Dobby et s'excusa. Plus personne ne le revit au marché après cet épisode. Dès lors, Dobby vouait une admiration sans fin à Harry et ne cessait de lui préparer ses plats préférés.

Pourtant, Harry dut écourter le repas en expliquant à Dobby qu'il devait se lever tôt le lendemain pour préparer l'arrivée du Maître Severus Snape. Dobby, qui avait perçu l'agitation des autres compagnons, comprit. Harry monta dans sa chambre sous les toits en se demandant à quoi pouvait bien ressembler Severus Snape et comment se comporter en sa présence. Tout ce qu'il savait, c'est qu'il ne devait pas paraître trop curieux. Mais, comme d'habitude, il y avait une grande différence entre ce qu'il savait qu'il ne devait pas faire et ce qu'il faisait.