Bonjour bonjour !
Je suis de retour avec, pour une fois, une fic à chapitres ! Une vraie, pas un OS rallongé ;)
J'ai pris énormément de plaisir à l'écrire, alors j'espère vraiment qu'elle vous plaira. La rédaction est presque terminée, donc je devrais pouvoir publier tous les trois/quatre jours et avoir le temps de terminer l'écriture avant d'être à court de chapitres d'avance ^^
Je remercie Nalou pour ses coups de pied au cul réguliers, ses remarques précieuses et ses encouragements qui m'ont énormément aidée et motivée. Et adalas, dont l'impatience a fini par me faire craquer et publier le premier chapitre aujourd'hui (bon ok, j'étais impatiente de poster aussi) !
Dernière chose, le rating M est dû à certaines scènes pas entièrement propres. Je vous préviendrai en début de chapitre s'il faut vous cacher les yeux ;)
Allez, c'est parti ! Bonne lecture, et n'hésitez pas à laisser un petit mot pour me dire ce que vous en pensez, ça me fait toujours incroyablement plaisir de recevoir vos retours !
Flo'w
Je me sens vide. Non – non, ce n'est pas ça. Je ne sens rien. Je suis vide. Même mon esprit est silencieux. Toujours en état de marche, apparemment, mais sous contrôle. Ai-je déjà maîtrisé mon esprit à ce point ? Sans doute pas.
Le pire – enfin, le pire, façon de parler – c'est qu'être dans cet état ne m'inquiète pas. Ne me surprend pas, alors que c'est inattendu. Etre si vide devrait me donner la nausée, avoir l'esprit si calme devrait me ravir, mais… non. Il y a quelque chose qui cloche, un problème quelque part, mais ça ne m'intéresse pas. Pourquoi ça m'intéresserait ?
Il ne s'habituerait jamais à ce silence. C'était sa première pensée, chaque fois qu'il entrait dans le Diogene's Club, et ce jour-là n'échappa pas à la règle.
Pourtant, il devrait s'y être accoutumé. Il en avait connu tant d'autres... Le silence bercé des légers craquements de sa maison d'enfance. Le silence qui s'écoule, paisible, entre deux amis. Le silence de l'Afghanistan, assourdissant d'anticipation et de nervosité avant les attaques. Le silence plein de concentration du bloc opératoire, rythmé par les bips de l'électrocardiogramme. Le silence tendu, discret, lorsqu'il menait ses missions pour les Services Secrets de Sa Majesté.
Mais ce silence-là, celui qui régnait dans le Diogene's Club, était morne et forcé. Le personnel des lieux portait même des sur-chaussures en tissu – comme si la moquette n'étouffait pas assez le chuchotement de leurs pas. C'était un silence constamment agacé, qui vous valait des regards de reproche quand votre tasse avait le malheur de cliqueter sur la soucoupe, ou que votre journal se défroissait un peu trop bruyamment. C'était un silence lourd de secrets sous-jacents, qui n'avait rien de calme, et dont on ne voyait pas la fin.
Oui, vraiment, John Watson détestait le silence du Diogene's Club. Et il prenait un malin plaisir à racler sa cuillère contre la porcelaine, à s'éclaircir la gorge régulièrement et à taper légèrement du talon contre le pied de son fauteuil, récoltant les airs furieux des autres membres avec un sourire narquois jusqu'à ce qu'enfin, on lui indique que Mycroft Holmes était prêt à le recevoir.
Mycroft le convoquait rarement. Le plus souvent, John recevait directement ses ordres de mission par son assistante personnelle, une certaine Anthea, une jeune femme toujours plongée dans son BlackBerry. Lorsqu'il se déplaçait jusqu'au bureau de Holmes au Diogene's Club, c'était soit pour une raison indépendante de son travail, soit pour une mission particulièrement confidentielle.
Alors qu'il suivait Anthea le long du couloir richement décoré, John se demandait ce sur quoi il allait tomber. Depuis l'affaire Moriarty, des bruits couraient sur Mycroft Holmes – ce qui déjà en disait long, l'homme étant un secret entouré de secrets – disant qu'il avait changé, son caractère froid devenant plus austère encore, ses yeux perçants vides de toute émotion, désertés même par l'arrogance et le dédain que l'on pouvait y lire habituellement.
Anthea le laissa entrer et referma le lourd battant de bois massif derrière elle en sortant de la pièce, le laissant seul avec son supérieur. Et John, immédiatement, comprit les rumeurs.
Le regard de Mycroft Holmes n'était pas seulement vide. C'était l'homme tout entier qui avait disparu, laissant une coquille creuse parcourue de courants d'air. Le léger surpoids, les sourires mielleux et les gestes maniérés avaient laissé place à une colère et une détermination glaciales. Mycroft Holmes n'était pas dans l'œil du cyclone – il était l'œil du cyclone. Le monde pouvait s'effondrer autour de lui sans qu'il ne batte d'un cil pour l'en empêcher. Il regarda John Watson s'approcher et s'asseoir dans le fauteuil de cuir vert sombre qui faisait face au bureau d'acajou, et attendit qu'il soit installé pour prendre la parole.
« Watson.
John hocha la tête en guise de salut.
- Monsieur.
La voix de John sembla réveiller un peu de vie au fond des iris pâles de Mycroft, et il fit glisser un mince dossier vers lui. Alors que l'agent allait le saisir, il le retint sous ses doigts fins.
- Avant que vous ne preniez connaissance des documents, j'aimerais vous expliquer moi-même de quoi il retourne. Vous ne consulterez le dossier que si vous acceptez la mission.
John opina à nouveau.
- Je vous écoute, Monsieur.
- Il s'agit d'une affaire… particulière. Les personnes au courant se comptent sur les doigts d'une main. En fait, jusqu'ici, deux doigts suffisaient. Que savez-vous de James Moriarty ?
L'ex-médecin militaire haussa un sourcil.
- Moriarty ? Pas grand-chose. Je n'ai été affecté à aucune mission le concernant. Je ne sais que ce qui est paru dans la presse, et Dieu sait qu'on ne peut pas toujours s'y fier, répondit-il avec un demi-sourire.
Le coin des lèvres de l'autre homme tressauta. C'était une vieille plaisanterie entre eux.
- Je sais simplement qu'il a disparu depuis… quoi, deux ans ? continua John. Avec Sh…
Il s'interrompit brusquement, prenant conscience de ses mots, mais Mycroft termina à sa place.
- Avec Sherlock Holmes. En effet. »
John resta silencieux. Que dire à l'homme dont le frère était parti avec un de ses pires ennemis ? Sur ce point, il pouvait faire confiance aux journaux – il y avait des images. Des photos de James Moriarty et Sherlock Holmes sur le toit de l'hôpital St Bartholomew, des photos de l'hélicoptère qui s'était posé à côté d'eux, et même une vidéo des deux hommes montant à bord avaient circulé sur le net. Confirmant ainsi les pires soupçons de la police et de la population – Sherlock n'avait jamais été détective. Simplement un criminel plus malin que les autres. Et à présent, il avait rejoint l'empire Moriarty, que Mycroft s'efforçait déjà de démanteler avant même que Sherlock ne commence à s'intéresser aux enquêtes de la police.
« Watson, reprit Mycroft en se levant pour marcher vers la cheminée où le feu mourait lentement, vous êtes mon meilleur agent, le plus à même de mener à bien cette mission. Vous savez déjà que vous êtes tenu au secret. Vous n'aurez jamais à effectuer de mission plus confidentielle que celle-ci.
Il jeta un coup d'œil à John toujours assis, et reporta son regard sur les flammes vacillantes, qui projetaient d'étranges reflets orangés sur son visage pâle.
- Moriarty a été localisé. Une transaction en lien avec un des comptes surveillés liés à son organisation a eu de légères complications – je vous épargne les détails financiers – et nous sommes parvenus à retracer la piste jusqu'à l'origine. Nous avons obtenu des coordonnées GPS relativement précises, qui indiquent un point au milieu de nulle part dans les Alpes suisses – probablement un ancien bunker anti-nucléaire. Nous avons la quasi-certitude qu'il s'y trouve.
John sourit. Il aimait ce moment où on lui dévoilait ses objectifs. Il avait toujours une légère poussée d'adrénaline, anticipant l'action.
- Je dois le trouver et le ramener ? interrogea-t-il en se levant à son tour, mais resta à côté du bureau, appuyant une de ses hanches contre le bois exotique.
- Ne vous ennuyez pas à la ramener entier. Son cadavre suffira.
L'agent des Services Secrets émit un doux sifflement en inspirant entre ses dents. Mycroft avait toujours eu un humour sombre et particulier auquel il était difficile de s'habituer, mais il avait apparemment atteint un nouveau niveau.
- Bien, fit John, mais Mycroft le retint.
- Ce n'est que le premier objectif.
- Oh ?
- Moriarty n'a pas emmené Sherlock pour le laisser partir ou juste le tuer. Il est donc possible qu'il se trouve avec lui en Suisse.
John haussa les sourcils.
- Et si c'est le cas… ?
Mycroft Holmes sourit aux flammes, un rictus qui n'avait rien de joyeux, une grimace qui respirait le désespoir.
- Si c'est le cas, et s'il s'avère que Sherlock Holmes s'est associé avec James Moriarty, abattez-le également.
Lorsqu'il tourna la tête, son expression était à nouveau vide et indifférente. Et dans ses yeux, John ne lut pas la moindre équivoque.
Malgré ses innombrables entraînements et formations, qui l'avaient doté d'une rapidité d'esprit et de réflexes à toute épreuve, John fut incapable de garder un visage neutre. L'homme venait de lui ordonner froidement de tuer son propre frère, sans sourciller, sans le moindre battement de cils, et l'aplomb que Mycroft réussissait à conserver le figea pendant une poignée de secondes.
Il était encore sous le choc après la lecture du dossier, et hésita au moment de signer le contrat de mission.
« Watson, un problème ?
John fronça les sourcils.
- Non, monsieur.
- Ne me mentez pas, Watson, rétorqua Holmes, glacial. Vous avez le droit de refuser cette mission.
- Je n'ai pas dit que j'allais la refuser. Simplement... Je voudrais ajouter une clause dans le contrat.
Mycroft lui lança un regard surpris.
- Je ne me rappelle pas vous avoir déjà vu discuter mes ordres. Que manque-t-il dans ce contrat qui ne soit pas à votre goût ?
John pondéra un moment sa réponse, puis décida d'être franc.
- A vrai dire, étant donné nos positions respectives, je doute que ça ait vraiment un impact, mais pour le principe... Monsieur, je suis un simple agent, et j'effectue les missions que l'on me donne. Je n'irai pas jusqu'à dire que je suis bête et discipliné, mais... Vous m'envoyez assassiner votre propre frère, Monsieur. Et bien que je comprenne les enjeux sécuritaires et politiques ayant entraîné cette décision, je voudrais m'assurer que l'homme derrière le stratège est conscient que ce contrat me délie de toute responsabilité concernant... la mort dudit frère. »
Brusquement, le masque impassible posé sur le visage de Mycroft se fissura, et John le vit déglutir. Ses yeux pâles se posèrent sur le dossier, où une photo de Sherlock dépassait de sous le contrat.
« Parfois, j'aimerais que vous ne soyez pas si clairvoyant, Watson. »
Il se leva brutalement et commença à faire les cent pas dans la pièce, puis revint face à l'ancien militaire, et posa ses poings sur le bureau.
« Cette décision n'est pas la mienne. Watson, j'ai les mains liées, je n'ai aucune marge de manœuvre. Malgré les apparences, j'ai également un supérieur, et je reçois des ordres, moi aussi... Le stratège, comme vous dites, approuve ce choix, il est réfléchi et pertinent. Même enfermé, Moriarty est trop dangereux, les ramifications de son réseau sont bien trop nombreuses. Tant qu'il sera vivant, il sera impossible de le démanteler. Si Sherlock a bien rejoint son bord, ils sont capables – et je pèse mes mots – de conquérir le monde. Je suis probablement le seul à être plus intelligent et rapide que mon frère, mais allié avec Moriarty ? Je ne peux rien.
- Et vous estimez que moi, je peux quelque chose ?
- Votre objectif n'est pas de battre leur intellect, Watson, vous devez simplement les tuer.
John hocha la tête.
- Certes... Votre unique problème est donc de savoir si Sherlock a bel et bien retourné sa veste.
- Exactement, approuva Mycroft en se rasseyant lentement. Et c'est à la fois un problème majeur et un atout. Problème, car avec le scandale de l'hélicoptère sur le toit de Bart's, personne n'accorde le bénéfice du doute à Sherlock. Et convaincus de son changement de camp, on vous ordonne de l'abattre.
- Et l'atout ?
- C'est ici que j'ai légèrement contourné les ordres de mon supérieur. Oh, rien de remarquable, c'est une simple question de formulation, vous voyez... Votre contrat stipule que vous devez tuer Sherlock s'il s'avère qu'il est passé à l'ennemi. Mon supérieur étant persuadé de la chose, cette phrase n'a pas d'importance à ses yeux.
- Mais pour vous qui êtes persuadé du contraire, cette phrase offre une porte de sortie à Sherlock.
Mycroft secoua la tête.
- Je ne suis pas persuadé du contraire, Watson. Je n'ai pas envie de croire qu'il ait changé de camp, mais je n'ai aucune certitude. Comme tout le monde, j'ai vu les images – des images de caméras gérées par mes propres équipes, nom de Dieu ! Et il est clair que Sherlock monte de son plein gré dans cet hélicoptère. Watson, je doute, et le doute est le pire paralysant qui existe.
John pinça les lèvres.
- Que voulez-vous que je fasse, dans ce cas, Monsieur ?
- Suivez vos ordres de mission, Watson. A la lettre. »
La suite dans quelques jours ! Merci d'être passé par là !
