Chapitre 1 :
...
C'était bête, bordel. De perdre espoir pour si peu.
Quoi, pour si peu, vraiment ? C'était quoi, si peu, déjà ? Mais mince, il allait mourir. Il avait ce putain de cancer qui lui rongeait la vie et qui s'amusait à déguster les restes. Ouais les restes. Il était déjà bien arrangé, le pauvre.
Le voilà chancelant avec une bouteille à la main, jurant au ciel d'aller se faire foutre. Son portable hurlait dans la poche intérieure de son chic et précieux costume du travail. Avec des larmes de rage, il arracha sa cravate et balança son portable au loin.
Il savait vraiment pas ce qu'il faisait, pour le coup. Il allait mourir et puis allez, avec quoi, de la chimio de merde il pourrait survivre une ou deux années de plus. Une ou deux années à faire quoi ? A suer sa race derrière un bureau, toujours accoutré d'un stupide costume, à sourire à de sombres connards qui s'en foutaient royalement de lui.
C'était bête, bordel. De perdre espoir pour si peu.
Il ne voulait pas que les choses se finissent ainsi, et Pepper méritait pas de s'inquiéter dans leur maison moyenne, de classe moyenne. Pepper méritait pas de rassurer leur fils à coup de « T'inquiète pas mon chéri, papa est retenu au travail c'est tout, » alors même qu'un autre petit arrivait.
C'était pas juste et c'était bête.
Mais Tony s'en foutait, pour le coup. C'était sa vie qui allait cesser, et il voulait pas qu'on choisisse pour lui.
Son enveloppe -son corps si vous préférez, quelle différence de toute façon, quand on va crever, les mots, les mots, ce ne sont rien que des mots- chancelait dangereusement sur le bord de la route. Oui, il avait décider de s'arrêter, parce que les larmes de rage brouillaient sa vue et il risquait l'accident.
Ouais, il savait que c'était con d'avoir peur d'un accident lorsqu'on allait crever d'un cancer des poumons.
« Excusez moi, monsieur ? »
Tony se retourna brusquement. Il croisait tellement personne sur cette route qu'il avait sursauté, en fait. Une petite route de campagne bien pourrie, où seuls les habitués circulaient -ou les villageois qui connaissaient ce raccourci sinueux.
A bord d'une Chevrolet, une camionnette, il y avait un petit groupe. Quatre en fait. Tous plutôt jeunes. Au volant, c'était un type avec des cheveux blonds qui portait une chemise bleue. A côté de lui, une rousse qui mâchait paresseusement une chewing gum. Derrière eux deux, un type silencieux aux cheveux corbeau qui lisait sûrement un vieux bouquin, et un type avec des lunettes. Plutôt sage, lui.
« Il reste une place. On vous dépose ? »
Et puis, là, Tony se dit ''Mince quoi. Qu'est-ce que j'ai à perdre ?''
Il ne songea pas à Pepper -oui c'était un véritable connard, un enculé tout ce que vous voulez ok-, ni à leur fils Happy, ni au petit qui allait arriver.
De toute façon il allait mourir.
Il voulait de l'aventure, avant d'y passer.
Il se débarrassa de sa veste de costume, ouvrit les deux premiers boutons de sa chemise et la sortit de son pantalon avant de se diriger lentement vers la camionnette.
Il voulait savoir ça faisait quoi de se sentir vivant.
Vivre avant de mourir. Pour lui, ''vivre'' avait toujours été quelque chose de vague. Quelque chose comme ça.
…
A suivre.
