Bonjour, bonjour !
Je n'ai pas pu m'en empêcher avant la reprise demain ! :D
Un bonus en cinq chapitres qui sera assez court !
Bonne lecture :)
Je suis obligée d'en parler. Je n'ai pas le choix. Mes pas sont lourds jusqu'à l'infirmerie, mais je relève la tête, prête à affronter mon propre vécu. Je passe la porte et le vois, le docteur Carson avec son regard bienveillant. Il me fait un signe de tête afin que je me calme. Je prends place devant lui, les mains posées sur les genoux :
- Parlez moi de lui, de tout ce que vous avez sur le cœur. Cela vous fera le plus grand bien. Décrivez le moi en cinq lettres, les premières choses qui vous viennent à l'esprit.
Anxieuse, j'inspire profondément. Après tout, le médecin ne me souhaite aucun mal, il veut m'aider. Juste m'aider. Prête à revivre mes douloureux souvenirs, je commence mon récit, le ventre noué.
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Negan est... nerveux.
Qui pourrait garder son sang froid face à l'épidémie qui a bouleversé le monde ? Personne. Chaque individu en proie aux cadavres qui se relèvent de la mort ne peut garder une conscience un temps soit peu saine et sensée. Il arrive un moment où il faut agir. Il arrive un moment où il faut franchir les limites. La peur de la perte, la peur de la mort. La peur de ne pas être à la hauteur, la peur de souffrir. Voilà ce qui tracasse tant l'esprit humain en pleine apocalypse. La survie forge les âmes et oblige une adaptation extrême.
Negan est l'un de ces hommes qui a dû faire face rapidement. En tant que leader né, il a été obligé de prendre les armes pour affronter le Nouveau Monde au lieu de se faire dévorer comme la plupart des vivants. Néanmoins, la nervosité l'habitait bien avant tout ceci. Combien de fois avait-il tapé son poing sur la table sur un simple élan de colère ? Combien de fois avait-il provoqué des disputes terrifiantes ? Combien de fois s'était-il battu pour un regard de travers ?
Le sang bouillonnant et la patience mise à rude épreuve, il est le genre de personnage à relever la tête pour se mesurer à la mort en la regardant droit dans les yeux. Armé d'une rage profonde, alimentée par une force brute, Negan explose en quelques secondes. S'il n'obtient pas ce qu'il souhaite, ou s'il se sent malmené, gare à celui qui le prend de haut. Il ne respecte pas les règles et n'écoute que son intuition. Ses propres lois. Il ne supporte pas la désobéissance à son égard et encore moins la lâcheté. S'il faut punir, il est le premier à appliquer la sentence, la plus lourdement possible. Toute erreur doit servir de leçon. Toute erreur doit être retenue.
J'en ai déjà payé les frais, et je me souviens parfaitement de ces moments, où je me suis vue mourir à ses pieds. Negan ne m'a jamais fait de mal réellement, mais ses pulsions colériques ont fini par me faire redouter la personne qu'il est. A mes côtés, il oscille entre bourreau et amant. Je ne sais plus ce qu'il ressent pour moi, et ce qu'il serait capable de faire. Il peut se montrer docile et tendre, pour me menacer la minute suivante en grognant de rage. Au fond, je ne pourrais jamais vraiment le connaître, et croire le contraire alimente ma douce illusion.
Il n'a pas peur de se mesurer aux plus grands car il sait qu'il finira par arriver à ses fins. La patience n'est pas son point fort, mais le jeu, si. Et il adore jouer. La nervosité tiraillée par ses élans de nonchalance et de mesquinerie, il peut attendre longtemps. Longtemps jusqu'à épuiser mortellement son rival. Il connaît parfaitement les personnalités pour les manier à son avantage, et s'il doit faire cracher le morceau par la force des mots, ou la force physique, il agit. Il agit toujours. Il sait comment laisser son empreinte.
En tant que chef des Sauveurs dans un premier temps, j'ai deviné qu'il ne fallait jamais le contrarier et aller dans son sens. C'est ainsi qu'il aime les choses, Negan contrôle et je dois suivre la danse. S'il décide de faire des prisonniers ou de ravager une communauté pour le bien du Sanctuaire, ne surtout pas envisager de s'opposer à ses choix. Je me souviens de cette femme en pleurs alors qu'il venait de tirer en pleine tête du père de famille, trop brave pour ne pas s'opposer. Ou de cet enfant plongé dans la noirceur de sa névrose, qui assistait à l'incendie de sa maison. Il n'y avait pas de place pour la compassion et les pillages laissaient ses victimes dépérir par la suite. Ahurie, je l'avais interpellé, la peur au ventre. Bien sûr qu'il l'avait ressenti, je transpirais la crainte à plein nez. Un sourire carnassier s'était étiré sur son visage. Et il avait haussé les épaules devant mes accusations, pour monter dans son grand camion noir, nonchalant.
Negan ne se laisse pas devancer et c'est grâce à l'intimidation qu'il obtient la domination sur le Nouveau Monde. L'impulsivité le rend redoutable et même ses hommes se voient trembler sous ses silences. Car lorsqu'il se tait, les foudres s'abattent violemment. Il a du mal à maîtriser ses coups et nombreux sont ceux qui se sont retrouvés le visage écrasé par ses poings, ou directement dans la tombe. Il ne faut pas jouer au plus malin avec lui, car l'on finit par perdre à coup sûr. Les jeux de pouvoir et la provocation excitent son âme. Plus la résistance est forte et plus il y prend goût. Cependant, il ne faut pas exagérer et penser remporter la victoire. Il finit toujours par s'insérer dans une faille et détruire ses opposants.
En tant qu'homme, il ne m'a pas fallu beaucoup de temps pour comprendre comment il fonctionnait. Il agit à l'instinct, sous l'impulsion de ses désirs, qu'ils soient sanguinaires ou plus intimes. Negan a fini par laisser sa marque en mon esprit, à partir du jour où je l'ai vu se lever brusquement pour se ruer sur moi. Je ne lui avais rien annoncé de grave, mais à ses oreilles, ce n'était pas une discussion favorable. Avec violence, il avait plaqué mon corps contre le mur en me retenant par les épaules sous le poids de sa force. Je me souviens encore de son regard amer, dans lequel venait s'ajouter une touche de folie morbide. Et pourtant, je n'avais pas résisté, la femme que j'étais tentait de me raisonner en m'obligeant à ne pas rivaliser avec lui. Pour ma survie, je ne devais pas bouger et suivre ses instructions. Il me lâcherait lorsqu'il l'aurait décidé. Puis, mon cœur s'était emballé. Ma poitrine s'était serrée au moment où il avait prononcé les mots, des menaces, comme à son habitude. Ses doigts avaient enroulé avec tact et précision ma gorge. En mon regard, Negan avait pu voir l'effrayante possession qu'il avait sur moi, et il en riait. Sournois et vicieux, je ne quittais pas ses yeux. Sa paume avait appuyé sur ma bouche, insistant un peu plus sur la domination qu'il exerçait sur moi, et il m'avait annoncé ses conditions, d'une voix glaciale. A cet instant, je ne savais plus vraiment qui j'étais. Un jouet, à coup sûr. Paralysée, mes muscles se contractaient par défense. La respiration haletante, j'essayais de lui prouver mon tempérament tout aussi brûlant. Le silence pesant qui suivait alors qu'il sondait mon être en dévisageant mon corps me pétrifiait, mais je restais de marbre. Je ne devais pas plier. Toutefois, ressentant la dangerosité de ses pensées, il m'avait lâché après m'avoir volé un baiser passionné. En réalité, il ne souhaitait pas me faire souffrir, simplement jouer à sa manière, à moi de m'adapter. Et j'avais résisté, fièrement. Il m'avait laissé seule en quittant la pièce, soudainement amusé. Je l'entendais glousser dans le couloir. J'avais glissé contre le mur en éclatant en sanglot sous l'appréhension de la mort. Car entre ses mains, je savais que je n'étais qu'une chose vulnérable, à moi de trouver le bon équilibre pour le dompter avec le temps. J'en étais persuadée, la brutalité de ses gestes étaient camouflés par un désordre qui n'appartenait qu'à lui, et il finirait par courber l'échine. Pour l'heure, je demeurais celle qui amadouait ses nerfs, ou qui lui servait de passe-temps quand la solitude empoisonnait trop intensément son âme : j'étais et je reste la femme de Negan.
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Ma voix tremble. Je me sens sale. Carson n'a prononcé aucun mot et a inscrit des notes dans son carnet. Je peux sentir les larmes monter depuis le début de mon histoire et me lève pour quitter la pièce, honteuse. La prochaine séance sera pire, je ne dois pas me faire d'illusion.
