Tackle le terrain

Esquive. Passage. Courir. Le plus vite possible, sans se faire attraper, les pas rapides foulants le gazon vert du stade. C'est ce qu'il faisait, et il y arrivait plutôt bien. Même très bien, vu le score qui était affiché : 21 - 0, au bout de 10 minutes de jeu. Il fallait dire que les passes calculées et maîtrisées du dossard 1, les interceptions dignes des plus grandes acrobaties aériennes du 80, les kicks monstrueux du 11, les blocages plus qu'efficaces de la ligne, et les percées instopables du 21 contribuaient plus que permis à une victoire. D'une désorganisation des plus totale, étant dûe à une équipe constituée à la va vite, c'était devenue une machine implacable, bien huilée. Dans tous les mouvements, que se soient ceux répétés en entraînement ou les improvisations du capitaine, il y avait comme une poésie, l'impression que tout prenait forme. Tout avait sa place.

Cela avait beau sembler simple : prendre le ballon et l'emmener dans le camps adverse, le football américain n'en était pas moins stratégique, et demandait un minimum de ses capacités : puissance, tactique et vitesse. Et Sena Kobayakawa ressentait une certaine fierté d'être un représentant de cette dernière. Dire qu'il était le plus important dans l'équipe ne serait que mensonge et vanité. Tous les joueurs de l'équipe étaient importants. Mais évoquer le fait qu'il ai permis la "formation" (l'équipe était déjà formée avant, mais ne s'est vraiment fait connaître que lors de son arrivée.) des Devil Bats n'était pas totalement faux. Il avait été un des premiers à s'y inscrire (en tant que secrétaire...). Mais la renommée du running back n°21 des Deimon Devil Bats avait suffit à apporter de nouveaux joueurs prometteurs et passionnés. Oui, le numéro 21 était devenu son numéro. Dès le début d'ailleurs. Il revoyait encore le petit adolescent chétif à l'entrée du lycée, cherchant avec Mamori le numéro 021, qui indiquait son inscription dans cet établissement. Ironie du sort ? Depuis le début il était le 21. Eyeshield 21.

Mais il n'était pas devenu ce grand coureur rapidement et facilement, au contraire il avait encore beaucoup de choses à apprendre. De pars son caractère timide, le fait de se faire brutaliser non pas parce qu'il était chétif mais parce qu'il en avait envie car il affrontait des joueurs beaucoup plus musclés, grands, forts... Était impensable avant ! Et puis petit à petit il avait pris confiance, à la fois en ses capacités et en ses coéquipiers. Plus que de la simple confiance même, c'était un sentiment beaucoup plus fort qui s'était installé. Vivre ensemble la marche funèbre, perdre ensemble, rire ensemble, remporter la victoire des fois sur le fil, ensemble, combattre de puissantes équipes ensemble, les avaient rapprochés.

Tout se chemins fait avec pour base un mensonge, et une phrase marquée au stylo indélébile : "tackle le terrain". Et c'était ce qu'il faisait, tous même. Ils jouaient avec leurs tripes, chacun à son poste. Et ils gagneraient encore et encore. Tous ensemble.

Contact. Passe. Touchdown. Le score à la fin du match est de 121 à 0. Victoire écrasante des Deimon Devil Bats. Vivas de la foule, accolades musclées entre coéquipiers, coup de pied de félicitations et rires.

Le joueur dossard 21 enleva son casque, et par extension la visière qui lui attribuait le surnom d'Eyeshield pour dévoiler deux grands yeux marron étincelant de joie, et affichait un sourire faisant trois fois son visage quant il regardait ses camarades. Oui, il était content de jouer avec eux. Vraiment content. Et il espérait qu'il pourrait jouer encore longtemps ensemble.

RICE

« Je sors Rice ?

- Non c'est bon, on n'a plus besoin de lui. »

Rien que de dire cette simple phrase me rend tout chose. Pas que je sois un grand sentimental adepte de l'eau de rose, mais ça me fait bizarre. On a Rice depuis quoi, un bail ? Pas plus de deux ans et je m'y était (presque) attaché. Autant que l'on pourrait s'attacher à un morceau de bois avec un gars mal dessiné dessus et qui était destiné à recevoir des passes lancées par ma personne. Mais sachant qu'on se débarrassait de lui parce qu'on avait un receveur rendait cette séparation beaucoup plus joyeuse. Ça me rendait content. Ouais, content. Au début de l'année on trouve un petit runner aux jambes d'or, capable de tenir tête à Seijuro Shin on rénove le local (aux frais du directeur dont les distractions sont effectivement très intéressantes.) et maintenant on trouve un macaque nain qui rattrape les balles aussi efficacement qu'on ramasse un objet au sol. C'est que ça commence à prendre forme cette histoire ! Rien que de voir le nabot qui commence à prendre confiance en lui (vu comment il a passé Habashira et que celui-ci après ne savait plus quoi faire, c'était tordant !).

Grande retrouvaille sur le terrain pour les funérailles de Rice. Sur ce même terrain où il n'y a pas si longtemps nous ne jouions qu'à deux… ça va pas me manquer tiens !

Je commence l'oraison funèbre avec un chapelet de balles. A toi Rice, qui a gentiment réceptionné mes balles, réceptionne celle là et tu peux crever en paix.

Et vu le carton que viens de lui mettre le fichu gros lard, il ne va pas s'en remettre.

« Hé vous autres, cassez lui la gueule aussi, à Rice ! »

Je vois bien que les mioches hésitent, et je trouve qu'ils devraient participer à la cérémonie. C'est aussi celle annonçant un nouveau départ pour les Devil Bats.

Nos p'tites recrues toutes mignonnes et adorables… ont chipé mon lance missile pour un tirer un sur les restes de Rice… joli tir ! Vraiment ils me les coupent là !

Bataille de coups en tout genre avec maniement des armes du mioche au pansement. Et la manager qui finit le tout au lance-flammes, au grand étonnement de celle-ci.

Content comme pas deux, je me mets à vociférer comme un fou pendant que je tire et que les autres tentent d'éteindre le feu. Parce que je tire des feux d'artifices qui alimentent le feu de joie sur les cendres de Rice. Mais qu'ils pensent aussi à éteindre les cheveux de Kurita. Maintenant que l'équipe est en marche, je veux pas perdre un joueur, surtout à cause de ça !

-Ici repose un gros lard qui a brûlé après que la manager de l'équipe de football américain est utilisé un lance-flammes sur un morceau de bois du nom de Jerry Rice-

Je vois déjà la taille de la tombe… et bonjour la pub ! Déjà que je participe de façon des plus actives à donner à l'équipe une image de démolisseur, faut pas en plus que l'on passe pour des détraquer ! En tout cas, bonne mort Rice ! A jamais !

LA FIERTE DES BROSSES A CHIOTTES

Ils s'étaient fait traités de « brosses à chiottes », insultés, traînés dans la boue, « ciel azurés »… Ils avaient horreur de ça. Alors ils allaient profiter de leur victoire de la ligne de Deimon face à celle de Taiyo pour pouvoir se venger. Se positionnant devant le dossard 66 des Sphinx, ils se rappelèrent à la grande joie du joueur à terre, le dominant de toute la hauteur qu'ils le pouvaient. Le grand lecteur de manga à lunettes à l'arrière, le blondinet à la cicatrice au milieu de la joue droite, et le gars avec les gros sourcils devant :

« Ha !

- Haa ?!

- Haaaa ? »

Cris de surprise apeurée du surnommé 'tortue'.

Cris de joie intérieure du trio. Et ils comptaient bien à ce que se ne soit pas la dernière humiliation qu'ils lui ferons subir. Parce qu'ils en avaient marre de perdre, de se sentir inférieur.

C'était la vengeance des trois frères !

« On est pas frères ! »

GLACONS

Pff…beaucoup moins nombreux que je le voulait : les deux mioches, le mini Kurita, les frères Haha, et c'était tout. Bah, au moins les restants on des tripes. Je continuais de m'occuper des données des joueurs, pendant que les deux goinfres finissaient de manger la glace pilée. Il en restait une telle quantité que je me demandais si ils n'allaient pas finir avec les cerveaux gelés. Les deux nabots, eux, regardaient la vue depuis les jumelles de la tour. Les trois frères étaient partis depuis un moment déjà. En bref une ambiance très calme régnait en ses hauteurs, contraste évident avec la journée qui s'était déroulée. L'ascenseur émis le doux (agaçant) bruit annonçant l'arrivée d'une personne, ici la manager. Qui indiqua qu'il ne restait personne.

Des sans ou des molles, on en a pas besoin. On allait partir lorsqu'un adolescent dégarni nous tomba littéralement dessus. Il faisait partis des lycéens voulant rejoindre le club, en attestait la poche devant contenir des glaçons.

Petite épreuve de mon crû, soit dit en passant : faire monter les recrues potentielles la tour de Tokyo avec un sac de glaçons salés (pour qu'ils fondent plus vite, khé khé khé…), en les faisant passer par différents points stratégiques tel le 'chien de garde des enfers'. Sans vouloir me vanter, j'en suis assez fière. C'est un peu comme mon p'tit braillard… vu comment il a réussit à en faire fuir plus d'un, on est bien de la même famille ! Bien évidemment, épreuve compliquée = but simple. Il faut juste que quant on atteint le haut, il y ai encore un glaçon dans la poche. Simple non ?

Mais il semblerait que le dégarni n'en ai pas ramené un seul… Ma bonté me perdra. Il me plait bien. Pas physique, mais assez endurant, ou du moins persévérant, et intelligent. J'apprécie.

Ni vu ni connu, je déposait un glaçon dans le seau, annonçant qu'il y en avait encore un et qu'il avait réussi l'épreuve. Maintenant, va falloir faire tes preuves, Manabu Yukimistu.

MADE BY CERBERUS

Lors du match contre les Sphinx, c'était Cerberus qui prenait les photos, par un ingénieux procédé. Bizarre ? Vous n'avez pas vu les photos prises alors, là vous pouvez trouver ça bizarre. Totalement. Mamori, curieuse comme nous autres, avait demandé à Sena les photos qu'il avait soit disant prises. Soit disant, parce qu'à ce moment là il était en train de jouer, et de passer Bamba. Mais il ne voulait surtout pas le dire à la manager. Il lui montra donc les photos qu'il avait eues d'Hiruma (celles qu'a prises Cerberus, vous suivez ?), qui ne les avaient pas regardés. Sinon il aurait bien rigolait, surtout en imaginant les réponses qu'aurait pu donner le petit running back.

La première photo était la tête, ou plutôt les cheveux de Kumabukuro. Questionné par rapport à cet intérêt capillaire, Sena réfléchis très rapidement pour trouver l'idée : ça amortirait bien les chocs !

Ilico presto, il se retrouvait avec cette même coupe… Bon, ça commençait bien. Le problème se compliqué après. La deuxième photo était un plan rapproché des… attributs féminins des supportrices des Sphinx. Le plongé sur les décolletés attira sur Sena le regard et le sourire de Mamori. Nouvelle excuse : c'est le bronzage ! Et il se retrouva avec le même teint que les surfeurs. Cela aurait pu s'arrêter là, avec un Sena en coupe afro et bronzé. Mais non, il y en avait encore. Une, bien significative en faite. On y voyait dans un coin du petit carré élevé dans les airs un amas de matière formant une belle spirale et sûrement odorante. Vous avez deviné ce que c'est, non ? Parce que Mamori, si. Et c'est un petit brun criant au malentendu qui s'occupa de lui expliquer que c'était un malentendu. Un simple malentendu… Ne plus jamais laisser Cerberus faire les photos… Jamais !