Hello ! Me voilà de retour pour le troisième volet de ma saga librement adaptée des Hunger Games de Suzanne Collins. Les personnes principaux appartiennent à Suzanne Collins, les autres sont de ma création.
Je vous conseille de lire Révolution et Anniversary avant de vous attaquer à cette histoire, les liens entre les personnages et surtout les vivants et les morts étant sensiblement différents de l'histoire originale.
Pour tous ceux que je retrouve ici pour une nouvelle aventure, bonne lecture et n'hésitez pas à me laisser vos commentaires, ça me fera plaisir !
A bientôt
Chapitre 1
J'ouvre doucement les paupières, gênée par le rayon de soleil qui baigne mon oreiller. En émergeant d'un rêve agité, je perçois le chant d'un oiseau, perché sur la gouttière de notre toit. Je reconnais son cri vif et joyeux il doit nicher non loin car c'est notre maison qu'il choisit tous les matins pour saluer le lever du soleil.
Je soupire doucement. Je sens le souffle de Peeta, chaud et régulier, contre mon épaule. Il est très tôt. Je m'efforce de ne pas bouger, retenant mon souffle, ne remuant pas un cil, pour préserver la douceur éphémère de l'instant. Mes pensées dérivent un instant sur la journée qui m'attend. Et je réalise que c'est enfin le jour J. Celui que nous préparons tous depuis des semaines.
Aujourd'hui, ma petite sœur se marie.
Une vague de bonheur et de stress m'envahit comme à chaque fois que j'y pense. Presque comme si c'était moi qui me mariait à nouveau.
Un baiser se pose sur mon épaule, suivit d'un autre, au creux de mon cou. J'étouffe un rire et me love un peu plus contre le corps de Peeta, allongé près de moi.
— Bonjour, mon amour… murmure-t-il à mon oreille.
— Bonjour, toi…
Je me retourne lentement dans ses bras pour lui faire face et pouvoir l'embrasser. Je croise ses yeux, si bleus qu'ils me font vaciller. Il y a toujours cette même lumière d'autrefois dans son regard lorsqu'il le pose sur moi. Je crois que je ne m'en lasserai jamais. Sa main effleure ma joue, écarte une mèche de mes cheveux d'ombre, caresse le renflement de ma pommette. Peeta me sourit, comme si j'étais la plus belle créature au monde. Ce que je suis si j'en crois les toiles qu'il cache dans son atelier et qui me représentent, parfois à demi-nue, comme une déesse chasseresse, ou quelque chose qui s'en rapproche. Il croit que je ne le sais pas. Je ne suis pas sensée avoir vu ces tableaux… Mais, j'ai fouillé par mégarde dans son atelier il y a un mois, à la recherche d'un cadeau à envoyer à Annie pour son anniversaire. Les toiles étaient soigneusement dissimulées derrière un tas d'autres tableaux, empaquetées dans un drap propre. Je n'en suis pas revenue. Je suis restée longtemps à les contempler, ne parvenant pas vraiment à me reconnaître dans ces femmes si belles, si puissantes, si radieuses. Mais, mon cœur savait que Peeta les avait peintes en pensant à moi, cela ne faisait aucun doute.
J'ai opté pour un paysage de bord de mer, tout remis soigneusement dans l'ordre et suis partie comme si rien ne s'était passé. Mais, la beauté de ses toiles n'a pas quitté mon esprit. Un jour, il faudra que je lui en parle, que je lui avoue que j'ai fouillé dans ses affaires. C'est un peu comme si j'avais par mégarde lu son journal intime…
Peeta m'embrasse et chuchote :
— Tu m'as l'air préoccupée, est-ce que tout va bien ?
Je me ressaisis.
— Oui, c'est juste… enfin, tu sais…
Je bredouille et il éclate de rire.
— Oui, je sais. Ta sœur se marie aujourd'hui. Mais ne t'inquiète pas, je suis sûr que tout sera parfait ! D'ailleurs, il faut que j'y aille si vous voulez avoir un gâteau ce soir !
Il dépose un dernier baiser sur mes lèvres et avant que j'aie eu le temps de le retenir, il est déjà en train de foncer à la salle de bain. Il laisse toujours la porte ouverte, même quand je suis là. Je crois que plus encore que moi, il déteste les endroits clos et confinés. Je l'entends siffloter doucement tandis qu'il se rase. La place à mes côtés est encore chaude de sa présence. Je roule doucement de son côté du lit et m'installe à plat ventre. J'enfonce mon visage dans son oreiller, pour respirer l'odeur de sa peau, restée sur le tissu. L'eau de la douche coule un moment encore et je me laisse dériver dans un demi-sommeil.
Lorsque Peeta émerge de la salle d'eau, une serviette autour des reins, je l'entends soupirer.
Je tourne la tête, intriguée. Ses cheveux s'égouttent encore sur son torse musculeux et bronzé. Il a travaillé toute la journée dans notre jardin dimanche dernier et sa peau en a gardé une belle teinte hâlée. Il est sexy en diable et brusquement, je n'ai plus du tout envie qu'il parte. Tant pis pour le gâteau de Prim… Je tends la main en direction de Peeta et ce dernier soupire à nouveau. Il me dévore littéralement des yeux.
— Tu ne m'aides pas, là, tu sais, bébé ?
Un sourire taquin gagne mes lèvres.
Il s'avance vers moi et s'assoit au bord du lit. Ses doigts frais courent dans mon dos, jouent avec les bretelles de ma chemise de nuit, écartent les boucles brunes qui s'étoilent autour de mon visage. Ma peau frémit à son contact. Il se penche, dépose une pluie de petits baisers sur mes omoplates puis me susurre :
— Je dois y aller mais tu ne pers rien pour attendre…
Cette fois, c'est moi qui soupire :
— Des promesses, toujours des promesses…
Mon rire est étouffé par l'oreiller qui vient d'atterrir sur mon visage. Je le repousse en riant de plus belle et le lui lance dessus tandis que mon mari récupère ses vêtements dans l'armoire.
Annie et Finnick sont arrivés hier au soir, avec leurs deux enfants. Ils dorment dans la chambre d'amis, au bout du couloir. Annie m'a proposé de me garder Tehani et Manu le temps que j'aide Prim à se préparer. Lorsque je descends à la cuisine préparer le petit déjeuner, Peeta est déjà parti travailler mais il m'a laissé un mot plié, accroché sur le réfrigérateur. J'attrape le morceau de papier, le cœur battant comme une écolière. Je le déplie d'une main fébrile et lis ces mots tout simples mais qui résonnent en moi avec force : « je t'aime mon ange ».
Même si je sais qu'il est loin et qu'il ne m'entendra pas, je réponds dans un souffle :
— Moi aussi, je t'aime, mon amour.
Je ne m'autorise à dire ces mots que lorsque je suis sûre qu'il ne les entend pas. J'ai toujours autant de mal à exprimer ce que je ressens en face des gens que j'aime. Et les Hunger Games n'ont rien arrangé. Je me débrouille toujours pour éluder, pour trouver un moyen de lui transmettre ce que je ressens sans avoir à le dire vraiment. Peeta ne semble pas m'en tenir rigueur il sait à quel point je suis tordue et compliquée…
Heureusement que je l'ai. Je ne sais pas si j'aurai survécu sans lui.
Parfois, il m'arrive de me demander ce qu'il serait advenu de moi si j'avais été envoyée dans l'arène avec un autre que lui. Un autre qui n'aurait pas survécu. M'en serai-je sortie ? Bien sûr, il est possible que ma volonté de revoir Prim et ma mère m'ait gardée en vie, mais après ? Une fois sortie de l'arène, livrée en pâture à la folie du Capitole, qui serais-je devenue ? Probablement une droguée psychotique, effrayée par son ombre… comme l'était cette fille dans l'arène Horloge, celle qui a donné sa vie pour sauver Peeta.
Je soupire, essaie de chasser de mon esprit les spectres du passé et glisse le papier dans ma poche. Je mets tranquillement la cafetière en route et dispose les tasses sur la table.
Aux premiers gargouillis de l'eau passant au travers du filtre, Annie apparaît, fraîche et rayonnante. Elle porte une robe d'été à fleurs rouges et un fichus assorti retient ses cheveux en arrière pour dégager sa nuque. C'est vrai qu'il fait déjà chaud. Nous sommes pourtant à la frontière de l'automne mais pas une goutte de pluie n'est tombée depuis des mois. La terre est sèche, craquelée par le soleil ce qui n'est pas arrivé depuis au moins quinze ans dans notre district. L'herbe de la prairie est rousse, comme après un trop long hiver.
Nous avons dû dresser un immense chapiteau dans le Pré, pour protéger les invités de la chaleur mais je commence à me demander si nous aurons assez de glace pour rafraîchir les boissons…
— Bonjour Annie ! As-tu bien dormi ?
— Oui, merveilleusement. Finnick est en train de s'habiller, il arrive. Peeta est déjà parti ?
Je hoche la tête tout en m'affairant à disposer sur la table beurre et confiture maison.
Annie m'aide et nous papotons tranquillement en servant le café au moment où Finnick passe la porte. Il enlace sa femme en passant près d'elle avant de me serrer à mon tour dans ses bras puissants, me soulevant presque de terre, comme à l'accoutumé.
Je ris et il me repose, comme si de rien n'était. Je dois bien avouer que cela me fait du bien de les avoir quelques jours chez nous. Nous sommes restés très proches tous les quatre mais les occasions de nous voir demeurent trop peu nombreuses.
Le temps que nous avalions notre petit déjeuner, je regarde la pendule : bientôt neuf heures. Je devrais déjà être chez Prim…
Annie lit dans mes pensées car elle pose sa main sur mon bras et me dit sereinement :
— Tu devrais y aller. Je vais réveiller les petits et les faire manger. On te retrouve pour le déjeuner ?
— Oui, merci. Tu es sûre que tu vas t'en sortir ? Sinon, je peux demander à ma mère de passer t'aider…
Mais Annie me rétorque de son calme légendaire :
— Ne t'inquiète pas, tout va bien. Et s'il y a le moindre problème, tu n'es pas loin. Allez, file !
Je l'embrasse pour la remercier une nouvelle fois et m'en vais sans attendre.
Depuis leurs fiançailles, Cinna et Prim ont acquis une petite maison récente à l'entrée de la ville, en dehors de ce qu'il reste des vestiges du village des Vainqueurs où nous habitons toujours. Cinna y a pris ses quartiers depuis un mois, pour terminer les menus travaux d'aménagement à l'intérieur et surtout, pour éviter de s'attirer les foudres de ma mère, en vivant sous le même toit que Prim.
Ma petite sœur a donc passé sa dernière nuit dans la maison de notre mère.
En quittant ma demeure et en traversant la rue, je laisse mon regard errer sur le village des Vainqueurs, immobile et silencieux en ce petit matin.
Une brume de chaleur flotte au-dessus de la rivière qui serpente en lisière de la forêt. Ses doigts de coton blanc se prennent aux branches des frênes et des chênes centenaires comme si des fantômes s'y balançaient. Tehani adore terrifier son petit frère en lui racontant ce genre d'histoires.
Au-dessus de moi, le soleil règne en maître dans un ciel d'un bleu aveuglant, annonçant une belle journée. Mes yeux se posent sur les bâtiments familiers qui m'entourent et tout à coup, je m'immobilise. La bâtisse où habitait Haymitch se dresse, toujours au même endroit, au bout du chemin de terre, immuable malgré les années. Peeta l'entretient régulièrement sans que personne ne le lui ai demandé. Il a transformé la bicoque insalubre en une sorte de musée à la gloire de notre ancien Mentor. Quelques touristes, attirés par la légende qui nous entoure, viennent parfois se promener dans le Village et photographie cette maison et son parterre de fleurs. Peeta a accroché une plaque devant la porte mais je n'ai jamais osé m'approcher suffisamment pour lire l'inscription. Trop de souvenirs douloureux sont encore rattachés à cet endroit pour que j'aie la force d'y pénétrer.
En fermant les paupières, je me revois encore, tant d'années après, pénétrer dans le salon empuanti par l'odeur de l'alcool et réveiller notre Mentor en lui jetant un verre d'eau au visage. Je me souviens de ses colères, de sa rage, de ce que j'avais pris pour de la haine envers nous. J'ai compris bien plus tard que tous ces sentiments négatifs n'étaient pas tournés vers nous, mais vers lui-même. Il s'en voulait de ne pas pouvoir plus nous aider d'être obligé chaque année de voir de nouveaux jeunes courir à la mort sans rien pouvoir faire pour empêcher ce drame.
Peeta et moi avons tout changé en gagnant les jeux. Par deux fois nous avons défié la Mort et nous avons triomphé. Et derrière la rancœur et les vapeurs d'alcool, j'ai découvert la tendresse et l'amour de celui qui aurait pu être mon père.
Mon cœur se serre douloureusement dans ma poitrine. Les années ont beau passer, le chagrin de sa perte demeure en moi. Intense, violent, presque insoutenable. Il broie mon cœur à l'intérieur de ma poitrine, me coupe le souffle, me fait monter les larmes aux yeux.
Je me force à inspirer profondément, pour chasser ce brusque accès de tristesse qui étreint mon être. Il ne voudrait pas me voir ainsi, larmoyante et faible. Il a fait de moi le Geai Moqueur je lui dois au moins ça.
Je me remets à marcher et, le temps, de grimper les marches du perron de ma mère, mon chagrin s'éloigne et s'effiloche, comme si je refermais la boîte qui le contient dans mon cœur.
Je toque doucement et la porte s'ouvre sur le visage rayonnant de ma mère. La chatte de Prim se glisse entre ses jambes en se frottant au passage contre ses mollets et m'accueille avec une série de miaulements enjoués.
— Bonjour Maman !
— Bonjour ma chérie, tu vas bien ?
Je hoche la tête.
— Elle est réveillée ?
— Non, ta sœur dort encore.
— Tu plaisantes ?
Ma mère rit en dodelinant de ma tête.
— Bon, je monte, dis-je en riant à mon tour.
Comment peut-elle dormir un jour pareil ? Moi, je n'ai presque pas fermé l'œil de la nuit la veille de mon mariage tellement j'étais excitée et stressée ! Prim ne fait décidément jamais rien comme tout le monde. En même temps, son métier de médecin doit lui procurer suffisamment de raison d'avoir des nuits blanches sans s'en rajouter d'autres…
En arrivant à l'étage, j'entrebâille la porte de la chambre de ma sœur et glisse un œil discret à l'intérieur de la pièce plongée dans une douce pénombre.
Prim repose, roulée en boule comme un chat, le dos en direction de la lumière pour fuir la clarté du matin le plus longtemps possible. Je souris, envahie par un flot de tendresse.
Je m'assois tranquillement au bord du lit et passe mes doigts dans ses longs cheveux d'ombre, si semblables aux miens. Elle sent ma présence et se réveille. Elle m'offre son plus beau sourire en m'apercevant et je me peux m'empêcher de murmurer :
— Allez, mon petit canard, il faut se lever. C'est un grand jour aujourd'hui.
Mes paroles la font se redresser brusquement dans son lit, comme aiguillonnée. Une lueur danse dans ses yeux et les derniers doutes que j'aurais pu avoir quant à ce mariage relativement précipité s'envolent. Elle est pleinement heureuse, cela crève les yeux.
Brusquement, elle regarde la pendule posée sur sa table de nuit et pousse un petit cri étranglé.
— Déjà ! Mais, je ne serai jamais prête !
Je lui pose une main apaisante sur le bras et me lève en déclarant :
— Mais si… Ne t'inquiète pas, tout sera parfait.
Je souris intérieurement en songeant que ce sont les mots de Peeta…
Alors commence la plus joyeuse frénésie que j'ai connue depuis des années. Pendant que ma mère s'occupe des fleurs, je prends en charge la coiffure de ma sœur. Et tandis que je me bats avec le fer à friser et les épingles à chignon, je repense avec tendresse à mes amis du Capitole, Octavia, Flavius et Effie. Sous leurs doigts magiciens, cette coiffure serait déjà terminée depuis au moins une heure. Mais, je persévère, calmement, attachant et bouclant mèche à mèche, pour que ma petite sœur soit la plus belle des mariées.
Un peu avant midi, Prim est enfin coiffée et maquillée.
Des fleurs et des perles ceignent ses cheveux un des colliers de ma « collection privée » orne son cou. C'est un cadeau de Plutarch Heavensbee pour se faire pardonner de nous avoir envoyés dans cet enfer lors des jeux de l'anniversaire. Le bijou est délicat et scintillant, parfait pour le cou gracile de Prim. Le centre est serti d'un diamant ovale étincelant de mille feux.
Tandis que notre mère monte nous prévenir que le repas est prêt, je surprends ma sœur à la fenêtre qui jette un coup d'œil dehors, vers la ville. Maman suit mon regard et soupire. Elle sait parfaitement ce que cherche ma sœur au-dehors : Cinna. Mais, il ne se montrera pas avant la cérémonie. Il est prévu qu'il déjeune avec Peeta et Finnick.
— Tu viens, Prim ? Nous n'avons pas le temps de traîner ! la houspille notre mère.
Je descends la première, attirée par les voix et les rires des enfants, déjà attablés. Je pénètre dans le salon où Maman a dressé sur la grande table un pique-nique de fortune. Les fenêtres de la maison sont grandes ouvertes tellement il fait chaud mais l'air qui y pénètre est tiède, parfumé de l'odeur des rosiers en fleurs postés en massifs devant la maison. Mon fils a déjà la bouche pleine et il tient dans sa main droite un muffin aux fruits plus gros que sa paume. Ses lèvres sont barbouillées de chocolat et son regard prend, en me voyant, une teinte d'indicible culpabilité.
Je ris et m'approche pour embrasser mes petits anges. Ma fille est la plus sage, trop peut-être. Elle attend posément que ma mère lui tende une assiette garnie de mets colorés et appétissants : petites quiches au jambon de pays, brochette de légumes, tartelettes aux fruits, gâteau au chocolat, chips…
Nous trouvons chacun un endroit où nous asseoir, certaines chaises étant trop encombrées par les cadeaux et les préparatifs pour nous permettre de nous y installer. J'opte finalement pour le rebord de la fenêtre. Je m'y installe, mon assiette à la main, ni vraiment dedans, ni complètement dehors et je grignote, tout en laissant mes yeux vagabonder sur le jardin. Tehani vient s'asseoir près de moi, appuie sa tête contre ma poitrine et pique discrètement des chips dans mon assiette. Je fais mine de ne rien voir et la câline tendrement, imprimant à mon corps un doux mouvement de balancier.
Je termine ma part de gâteau lorsque les premiers flonflons me parviennent du Pré. Les musiciens commencent à répéter pour ce soir. Un air de fête se répand en ville. Je perçois des éclats de voix dans le lointain, des rires aussi.
Une bouffée d'adrénaline s'empare alors de ma sœur qui se redresse et abandonne sur un coin de la table son assiette à laquelle elle a à peine touché.
— Oh…Katniss… gémit-elle d'une voix étranglée en jetant un regard paniqué à son peignoir.
J'éclate de rire et attrapant ma sœur par la main, je l'entraîne vers l'étage pour achever de la préparer.
Je contemple mon œuvre avec satisfaction tandis que Prim descend lentement l'escalier, soulevant le bas de sa robe dans sa main pour éviter de tomber. Ma mère et Annie, à mes côtés, retiennent leur souffle. Les enfants qui jouaient bruyamment sur les tapis du salon s'immobilisent, fascinés et suivent le moindre mouvement de Prim. Ses pas font onduler le satin de sa robe ivoire dont le bas est surmonté de trois volants de dentelles. Le corsage bustier est piqué de perles et de brillants qui dessinent de délicates arabesques en suivant le cœur du décolleté. J'ai ajusté un voile court dans ses cheveux de manière à ce qu'il tombe au milieu de son dos.
La robe est une création de Claudia, la styliste d'Annie et, je dois reconnaître qu'elle est du plus bel effet. Prim en paraît encore plus délicate et fragile qu'à l'accoutumé sa silhouette gracieuse est soulignée par le bustier et allongée par la traîne interminable en dentelles que j'étale délicatement derrière ma sœur lorsqu'elle arrive au bas de l'escalier.
— Tu es magnifique ! s'exclame Annie.
Ma mère, émue aux larmes, lui prend simplement les mains, trop bouleversée pour pouvoir parler.
Les yeux de Prim se voilent à son tour et je la réprimande gentiment :
— Ah non ! Ton maquillage !
Ma sœur éclate de rire et se ressaisit au moment où l'on toque à la porte.
Ma mère ouvre c'est Peeta. Il m'apparaît, dans un costume gris impeccable. Chemise blanche et cravate, je le trouve encore plus séduisant qu'autrefois, sous le feu des projecteurs du Capitole. Finnick apparaît à son tour dans l'embrasure de la porte et s'exclame, sourire aux lèvres :
— Allez, mesdames ! Tout le monde en voiture !
Une carriole tirée par quatre chevaux blancs et décorées de fleurs et de rubans est sagement garée dans l'allée du jardin. Le Pré n'est qu'à trois cents mètres mais Cinna a voulu les choses en grand.
J'aide Prim à s'installer dans la calèche tandis qu'Annie et moi montons face à elle. Ma mère nous suivra à pieds avec les enfants. Finnick et Peeta grimpent à l'avant et Finnick prend les rênes pour nous conduire à travers la ville.
Les habitants se sont attroupés sur le chemin et ils jettent des brassées de fleurs et de pétales de rose sur le cortège.
En arrivant en vue du Pré, j'aperçois le chapiteau et, à côté, l'allée bordé de bancs qui conduit à l'autel. Les invités sont déjà amassés dans les rangées et tous les visages se tournent vers nous en entendant l'attelage arriver. Finnick immobilise les chevaux en haut de l'allée et nos deux hommes nous aident à descendre. Le temps que je rajuste le voile et la traîne de Prim et ma mère est là. Elle confie les enfants à Finnick et Annie qui vont s'installer au premier rang.
Ma mère prend le bras de Prim pour la conduire à l'autel tandis que Peeta et moi remontons l'allée en premier pour nous installer de part et d'autre des mariés puisque nous serons leurs témoins. Je croise le regard de Cinna en arrivant à sa hauteur. Il est splendide dans un costume noir sur mesure, une orchidée ivoire passée à la boutonnière. Je lui adresse un clin d'œil complice en voyant qu'il se force à inspirer lentement.
Puis, tout à coup, son visage se détend, ses yeux s'illuminent, son corps se redresse fièrement et je devine que Prim se met en position à l'autre bout de l'allée.
Les premières notes de musique s'élèvent et ma sœur s'avance, d'abord un peu tremblante puis, rayonnante et légère, comme si elle volait sur le tapis d'herbe et de fleurs, à mesure qu'elle s'approche de l'autel. Prim et Cinna ne se quittent pas des yeux, comme si la force de leur amour pouvait bâtir entre eux un pont indestructible, comme si le reste du monde disparaissait autour d'eux.
Il n'y a plus qu'elle et lui.
Le pasteur commence son discours j'essaie d'y porter attention mais mes pensées dérivent et s'effilochent. En face de moi, Peeta me fixe, au lieu de regarder les mariés. Un sourire léger aux lèvres, il détaille ma robe fourreau bleu-nuit qui semble particulièrement lui plaire. Je détourne les yeux en sentant le rouge monter à mes joues et me concentre à nouveau sur le discours du pasteur. Ma sœur et Cinna échangent leurs consentements puis leurs anneaux. Lorsque l'alliance glisse au doigt de Prim, Cinna porte sa main délicate à ses lèvres et dépose un baiser brûlant sur la bague, comme pour sacraliser le serment qu'il vient de prononcer. Emue, Prim tend son autre main vers le visage de son mari et pose sa paume contre sa joue. L'assistance est debout et applaudit ce geste de tendresse et d'amour si éclatant que nul ne se risquerait plus à les critiquer. Cinna attire Prim vers lui et l'embrasse, délicatement, prudemment, comme s'il risquait de la briser. Il semble immense à côté d'elle mais, elle ne l'entend pas de cette oreille et, se dressant sur la pointe des pieds, lui rend un baiser fougueux.
Peeta éclate de rire et Cinna rend les armes.
Pour le meilleur et pour le pire, ils ne font désormais plus qu'un.
