La lumière matinale filtrait gracieusement à travers les épais rideaux, éclairant la petite pièce d'une douce lueur jaune/orangée. Des figurines d'hélicoptères de tous modèles étaient soigneusement alignées par dizaines sur les étagères et projetaient leurs ombres allongées sur le mur. Il faisait encore frais, ce qui avait poussé les deux formes groggys et fatiguées à se recroqueviller un peu plus l'une contre l'autre sous leur fine couverture.
Le Gâteau de Riz était allongé sur le dos et fixait sagement le plafond, ses bras fermement maintenus le long de son corps par la camisole de force qui lui servait aussi de pyjama. Sa poitrine se gonflait et se dégonflait au rythme d'une respiration à la fois lente et calme. Cela faisait quelques semaines déjà que Kriss l'avait autorisé à ne plus dormir enfermé à la cave mais dans une véritable chambre; au prix du port constant d'une camisole pour l'empêcher de se faire exploser à tout bout de champ. C'était un peu contraignant mais c'était le prix à payer pour rester avec Hélicouptère qui, justement, émit un couinement en se serrant contre l'onigiri. Sentant le junkie frissonner à nouveau, la Bêtise Pure se contorsionna légèrement et posa son menton sur son front.
Contrairement à l'autre fou, le drogué à la casquette était encore à moitié endormit. Il se cramponnait paresseusement au tissu de la camisole, son visage enfouit dans l'épaule du Gâteau de Riz et ses yeux peinant à s'ouvrir. Son chapeau était tombé durant son sommeil, laissant à découvert ses cheveux en bataille tandis que l'air frais caressait ses bras et ses jambes laissés nus par son t-shirt et son short de pyjama. Hélicouptère cligna des yeux un bref instant avant de se blottir un peu plus contre le Gâteau de Riz.
Ils étaient bien, tout les deux.
Leur relation était probablement l'une des plus innocentes de la famille Papillon: ils passaient leur temps à se tenir la main, se câliner, se faire des papouilles et 'glousser comme deux abrutis'; pour citer le Syndicaliste. Ils n'avaient jamais eu de relation charnelle- n'en avaient pas besoin de toutes façons. Kriss ne les avait pas créé avec ce genre de désirs alors se faire des petites papouilles en gloussant joyeusement leur suffisait bien.
Le junkie s'étira avec un nouveau couinement aigu avant de se relever sur ses coudes au dessus de son compagnon de chambre et, constatant que celui-ci était réveillé, lui sourit. Il se pencha pour rapprocher leur visage et frotta tendrement son nez contre le sien. Deux gamins dans des corps d'adultes, comme disait M. Dada… Mais c'était comme ça qu'ils étaient le plus heureux.
«Hihihi, je suis un Gâteau d'Riz!»
Hélicouptère se recula légèrement et pencha la tête sur le coté.
«Hihihi, je suis un Gâteau d'Riz! Qui n'est plus fatigué!»
Le junkie jeta un bref coup d'œil à son réveil: 7h23.
«Hihihi, je suis un Gâteau d'Riz! Qui n'est plus fatigué! Et qui veut un bisou!»
Un nouveau sourire éclaira son visage et il se pencha immédiatement pour l'embrasser, sentant avec satisfaction l'onigiri sourire contre sa bouche. Le Gâteau de Riz appuya un peu plus le baiser avant de se reculer. Il se tortilla pour se relever (bah oui c'est dur sans les bras, eh), tourna ses jambes et se mit debout, rapidement imité par Hélicouptère.
Les deux fous se regardèrent un bref instant avant de se diriger vers la porte.
Se sourirent.
«-HELICOUPTERE! HELICOUPTEEERE!
-HIHIHI JE SUIS UN GÂTEAU D'RIZ!
-PUTAIN MAIS FERMEZ VOS GUEULES!»
Et sortirent en hurlant dans le couloir.
Faire la grasse matinée, c'était pour les couples saints d'esprit.
