Style : Yaoi, espionnage

Inspiré de : Alex rider

Couple : Alex rider X Yassen Gregorovich

We feed the world

Cette histoire se déroule après ma première fic « Moscou Blues », SPOILERS au sujet de jeu de tueur et de Yassen Gregorovich.

Huan Ye était l'agent le plus silencieux de son service. Elle avait été formée à l'infiltration très jeune par les triades, et avait débuté comme voleuse au service de la mafia chinoise. Elle avait toujours refusé de tuer. Même pour se défendre.

Glissant sa carte pass dans le détecteur, elle se glissa à l'intérieur de la résidence, sans cesser de tendre l'oreille. Elle avait déjà endormi les deux gardes à l'extérieur, et avait soigneusement calculé pour ne pas être surprise lorsque l'un d'eux se réveillerait. D'après ses sources, trois autres hommes devaient l'attendre à l'intérieur, mais il lui restait suffisamment de dards hypodermiques pour en faire son affaire. Il s'agissait d'hommes bien entraînés, mais dont la surveillance s'était relâchée.

Après tout, la villa de Toya Nakakura était réputé comme inviolable, normal pour un yakuza aussi renommé : maître de la zone de Tokyo et principal actionnaire du shinkansen qui connectait le Japon du Nord et le Japon du Sud, il avait de bonne raisons – et les moyens – de vivre dans un bunker.

Souplement, Huan Ye s'accroupit et roula sur elle-même pour ne pas toucher les faisceaux laser qui barraient l'accès au salon. Elle se releva et poursuivit son chemin, ignorant les vitrines et les différentes statuettes difformes et monstrueuses qui pavaient la pièce, chacune devant valoir le prix d'un petit appartement à New York. Elle n'était pas ici pour ça.

Huan Ye était entré aux services secrets Japonais pour pouvoir utiliser ses dons dans de bonnes causes. Voler, piller, détruire, se battre ne la dérangeait pas pourvu que la finalité lui convienne. Son supérieur lui avait calmement expliqué son but et elle avait aussitôt accepté : même lorsqu'on avait été formée à avoir le cœur froid, il y avait des choses qu'on ne tolérait pas. Et ce que faisait Nakakura était une de ces choses.

Les trois gardes se trouvaient entre la cuisine et le jardin arrière, en train de deviser. Huan Ye vit nettement qu'il s'agissait d'occidentaux. Ce n'était pas normal…jamais un yakuza n'emploierait des gaijins pour veiller à sa sécurité. Elle devait faire son rapport le plus vite possible et tendit l'oreille.

Pas d'erreur possible : ils parlaient une langue du nord, du norvégien ou du hollandais, peut-être. Elle n'avait pas le temps de perdre son temps à l'analyser : elle ne s'était pas risquée dans cette forteresse pour espionner ou rapporter des informations. Pas dans l'immédiat en tout cas. Tirant sa sarbacane de sa ceinture, elle la chargea.

Son tir fut précis et l'effet immédiat : les gardes sentirent tout juste une légère piqûre et basculèrent dans l'inconscience sans même avoir le temps de comprendre ce qui leur arrivait. Plus de doute : ces types n'avaient certainement pas été formés par les yakuzas ou une branche mafieuse. Ils n'étaient pas assez sur le qui-vive. Huan Ye se redressa et tendit à nouveau l'oreille : elle avait beau être silencieuse, elle se méfiait de l'instinct, cet instinct qui, chez certaines personnes, prévalaient sur les cinq sens. La jeune chinoise n'ignorait pas que Nakakura n'avait pas engagé n'importe qui comme bras droit.

Parvenir à la chambre lui prit presque autant de temps que de passer le portail d'entrée : bien qu'elle ait appris la topologie par cœur, elle n'avait pas le droit de tout faire rater par un empressement stupide et injustifié. Les gardes en avaient encore pour une bonne heure avant de commencer à reprendre conscience, et probablement une deuxième pour retrouver tous leurs moyens. Huan Ye arriva finalement devant la porte et entra sans faire de bruit. Comme prévu, il était là.

« Taï ? » Souffla la chinoise avant de s'approcher du lit.

Elle n'eut pas le temps de tendre le bras et se figea soudain en émettant un cri étranglé.

Le couteau de lancer lui avait sectionné une partie des cervicales, en s'enfonçant à l'arrière de sa nuque. Elle voulut faire volte-face mais un second couteau la toucha en haut de la colonne vertébrale alors qu'une voix très douce s'élevait derrière elle :

« Taï n'est pas là. En revanche, je vous attendais. Quel dommage que vous deviez déjà partir, j'ai si peu de compagnie… »

Huan Ye voulut parler mais le sang avait déjà empli sa bouche. Elle s'effondra sans un cri.


« Tu m'accompagnes au Virgin ? »

Alex fit un signe de dénégation à Tom.

« Je te rappelle que Jack m'a demandé de rentrer tôt ce soir. Depuis ces histoires d'enlèvement, elle est persuadée que la planète m'en veut. »

« Franchement, je vois pas pourquoi elle s'inquiète. Tu n'as plus six ans et tu es ceinture noire de karaté. »

« Tu sais, Tom, contre trois ou quatre types armés, même mon karaté ne peut pas grand-chose. Je suis pas Bruce Lee non plus et je n'ai pas envie de me faire remonter les bretelles par Jack. » Répondit Alex Rider avec un mince sourire

« Elle fait des arts martiaux, elle aussi ? »

« Ouaip. Ceinture noire en engueulade et maîtresse de la consignation à vie dans ma chambre. J'adorerais t'accompagner, Tom, mais je n'ai aucune envie de passer le reste de la semaine avec mon poster de Sin City comme seule horizon. »

« C'est pas comme si tu étais en taule, Alex ! »

« Non, pas vraiment. »

Alex connaissait parfaitement la sensation d'être vraiment enfermé.

« Sorry, mais là je peux vraiment pas. »

Il ne disait pas toute la vérité à Tom : Jack lui avait bel et bien demandé de rentrer tôt mais ce soir il avait une excellente raison de manquer à sa promesse.

Le matin même, il avait reçu un SMS plutôt curieux.

« La banque souhaite vous voir. »

En numéro caché, inutile d'être voyant pour comprendre : le MI6 lui donnait rendez-vous…ou lui imposait, plutôt. De toute manière, Alex n'aurait pas décliné : il s'ennuyait à mourir depuis la rentrée.

Et puis il y avait Yassen Gregorovich.

Repartir en mission, cela signifiait peut-être le croiser, ou en tout cas avoir une occasion de le contacter sans avoir les services secrets britanniques sur le dos : Alex les soupçonnait de contrôler ses courriers et ses appels depuis les événements de Moscou. Ils en auraient été tout à fait capables, après tout, à leurs yeux, Alex était à leur disposition, que ça lui plaise ou non.

Et ça lui plaisait rarement, surtout après ce que Yassen lui avait appris au sujet de son père. Seulement, le russe n'avait pas eu le loisir de lui en dire davantage et en attendant, Alex était toujours sous la tutelle du MI6. Il en aurait hurlé.

Jetant son sac sur son épaule, Alex remonta lentement l'avenue. Jack ne serait pas contente, le MI6 allait sûrement le retenir, voire aller directement l'envoyer de l'autre côté de la planète ! Pour le coup, il rentrerait tôt…Le mois prochain. Il bifurqua et s'engagea dans une des ruelles adjacentes, en direction de la « banque », passant à côté d'une énorme lincoln noire, incongrue de luxe dans cette rue si étroite.

En entendant crisser les pneus dans son dos, il comprit pourquoi la voiture était là. On l'attendait, et à en juger par la vitesse de la lincoln, pas pour son bien. Il voulut plonger à l'abri des poubelles et entendit le déclic d'une portière. Une main l'attrapa au col, une seconde par les cheveux et il fut happé dans l'énorme voiture, jeté sur la banquette arrière et immobilisé, les bras douloureusement tordus derrière le dos.

« Démarre, on l'a. »

Second crissement de pneus et la lincoln repartit. L'enlèvement n'avait pas duré une minute. Alex n'avait même pas crié.

« Tu es sûr que c'est lui ? » Fit une voix féminine depuis la place avant.

On releva le visage d'Alex, qui put contempler un de ses agresseurs : un homme, apparemment sud-américain, souriant et propre sur lui.

« Blond, yeux noirs…ça ressemble bien à la description. Tiens, Jix, son sac. Vérifie ses papiers mais je ne pense pas qu'on se soit trompés. »

Le visage de la femme à l'avant contempla Alex quelques secondes alors qu'elle attrapait le sac à dos. Elle avait elle aussi le type sud américain, de grands yeux noirs et une peau hâlée, une vilaine cicatrice courant de sa gorge à son front.

« Voyons…Alex Rider, né à Londres, 14 ans. C'est bien lui, Manuel. Explique-lui pourquoi il est là. »

« Je ne pense pas que ce soit à moi de le lui dire, Jix. Il verra bien une fois arrivé. Nikos, déserre un peu, je crois que tu lui fais mal. »

Celui qui maintenait Alex relâcha légèrement sa prise et le dénommé Manuel sourit à nouveau :

« Excuse-le, petit. Nikos n'a pas l'habitude des enfants et il ne sait pas y faire. Par contre, il sais que tu n'es pas n'importe qui, comme nous tous, alors je vais t'expliquer exactement comment nous procédons avec les colis remuants. »

Il prit une petite boîte métallique sur la plage arrière et l'ouvrit.

« Vois-tu, j'ai ordre de ne pas t'abîmer. Pour ma part, te briser une jambe serait la méthode la plus efficace pour que tu ne files pas, mais il paraît que je n'ai pas le droit. J'ai donc opté pour ça. »

Il exhiba devant les yeux d'Alex une longue seringue.

« Si tu bouges un cil, si tu ouvres la bouche pour crier, si tu te débats, ou quoi que ce soit qui puisse me contrarier, je t'injecte une dose de lolo qui te fera dormir une bonne semaine, tu peux me croire sur parole, chiquito. »

Alex regarda l'aiguille danser devant ses yeux et acquiesça.

« Je suis content que tu le prennes comme ça. Je ne sais pas faire de piqûre et ça n'aurait pas été agréable pour toi. »


Madame Jones raccrocha avec un soupir. Derrière elle, assis à son bureau, les mains croisées, Alan Blunt attendait, le sourcil arqué en signe de mécontentement. Il était très rare qu'il soit mécontent ou plus exactement en avait tellement l'air en permanence qu'il était difficile de voir la différence.

« Il s'agissait de Melle Stabright. Alex Rider n'est pas rentré chez lui. »

« Et si j'en juge par ses horaires de cours, il aurait du être ici depuis bientôt une heure. »

« Peut-être s'est il arrêté en route pour flâner ? »

« Ridicule. Ce garçon sait pertinemment qu'une convocation au QG ne peut souffrir d'aucun retard. »

« Ce garçon a 14 ans et se fiche de ménager notre sensibilité, vous savez. »

Alan Blunt pinça les lèvres et inspira profondément.

« Il est vrai qu'il est d'une…incorrection…et d'une insolence... Je ne comprends pas que Ian Rider ait pu le laisser prendre de telles habitudes envers ses supérieurs. »

« Nous ne sommes pas ses supérieurs, justement. »

« Mais c'est tout comme. Dans tous les cas, il n'est pas venu, pas retourné chez lui. Ses professeurs sont sûrs qu'il a quitté son établissement à l'heure ? »

« Formels. Le concierge l'a vu sortir à 16h30 précises. Et depuis plus de nouvelles. Je crains qu'il n'ait été enlevé… »

« C'est fâcheux…et récurrent en ce moment. Nous devrions peut-être lui faire suivre un stage pour palier à ce genre d'inconvénients, cela fait deux fois en moins de six mois qu'on nous le kidnappe. Vérifiez tout de même qu'on ne trouve pas son corps dans une ruelle sordide. On ne sait jamais. »

« Et pour l'opération, que fait-on ? »

« Il est vrai que la disparition d'Alex Rider nous met dans l'embarras par rapport à nos collègues nippons, surtout avec les derniers événements…Mais que voulez-vous ? Autant attendre qu'il s'évade, il y arrive toujours assez rapidement. »

Sur ces bonnes paroles, Alan Blunt prit sa tasse de thé et l'avala d'une traite.


« Entre là. »

La lincoln avait roulé jusqu'à la banlieue de Londres et s'était finalement arrêté devant une usine grisâtre dégageant une épouvantable odeur de goudron. Le dénommé Nikos avait alors traîné Alex en lui maintenant les mains bloquées, jusqu'à une sorte de vestiaire, probablement réservé aux employés.

« Si tu bouges… »

« Oui, je sais. Dodo une semaine. » Rétorqua Alex. « De toute façon, avec vos battoirs, vous m'aurez cassé quelque chose. Je sentirais plus la piqûre. »

Manuel avait ri : « Il a une sacrée langue, ce petit anglais ! T'inquiètes pas, chiquito, tu resteras pas ici longtemps. On va venir te chercher. »

« On ? »

« Notre commanditaire. »

« Celui qui vous a demandé de ne pas me briser les jambes ou celui qui vous a ordonné de me piquer ? »

« Ecoute, petit, on a rien contre toi. On nous a demandé de te ramasser par tous les moyens, avec ou sans discussion. Et j'ai pour principe de ne jamais discuter avec les gens quand je peux simplement les enlever. »

« Et votre commanditaire, il va faire quoi ? M'inviter à manger une glace ? »

« S'il le fait, ce sera entre quatre murs munis d'une porte très solide. » Se mit à rire Manuel. « J'espère que tu n'avais rien de prévu dans les prochains jours. »

« Ca dépend…si vous m'aviez prévenu, je serais passé prendre ma brosse à dents. »

La porte se referma et Alex entendit encore Manuel rire. Quoi que puisse lui vouloir son « hôte », on ne le relâcherait pas de sitôt. Il examina rapidement sa cellule improvisée. Pas de fenêtres. La seule issue était la porte, et Alex se doutait bien que Nikos l'attendrait juste derrière. Qu'avait-il a disposition ? Les casiers étaient encastrés dans les murs, ouverts et vides. Ni clé, ni cadenas. Même les bancs avaient été enlevés et l'accès aux douches condamné. Il était bloqué et on tenait à ce qu'il le reste…Un examen détaillé de l'intégralité du vestiaire ne put que lui confirmer cette triste réalité. Les portes des casiers étaient solidement scellées…Quant à son sac, la dénommée Jix l'avait gardé.

Massant ses poignets endoloris, Alex s'assit sur le sol cimenté et s'adossa au mur en soupirant. D'ordinaire, il parvenait à s'en tirer par ce que ceux qui l'entouraient le sous-estimaient. Mais à en juger par l'attitude de Manuel et de Nikos, leurs méthodes et le dépouillement total du vestiaire, cette fois on ne le sous-estimait pas, au contraire. Un cercueil de béton n'aurait pas été plus infranchissable. Pour un peu, ses kidnappeurs l'auraient laissé en sous-vêtements…

Vêtements ?

Alex s'agenouilla devant la porte et examina ensuite le casier grand ouvert à sa droite. Finalement, il y avait peut-être une solution…Jouant avec la poignée du casier, il testa sa solidité. Cela suffirait. Restait à espérer que sa corde improvisée tienne.

Il sortit sa chemise de son pantalon et défit sa ceinture. Heureusement, Jack avait toujours l'espoir de le remplumer et lui achetait sans cesse des ceintures avec un maximum de crans. Pour une fois, il n'allait pas plaindre. Il bloqua la boucle dans la poignée du premier casier et fit un nœud avec la seconde extrémité au second casier, tendant sa ceinture au-devant de la porte, le plus bas possible. Il dut s'y reprendre à plusieurs fois pour être absolument sûr qu'elle ne céderait pas. Si jamais elle se détachait, Manuel lui offrirait une longue sieste. Pour avoir déjà goûté aux sommeils « cadeaux », qu'ils soient chimiques ou contondants, Alex savait qu'il n'avait pas envie d'une piqûre.

Après avoir testé une dernière fois la solidité de ses nœuds, il s'assit près de la porte et attendit. Enfin, il entendit la voix de Manuel :

« Il va arriver et il veut voir le muchacho à l'étage. Il n'avait pas l'air content que tu l'ais un peu secoué. »

« Tu l'as entendu. Son muchacho n'est pas un ange, il nous aurait filé entre les doigts si on ne lui avait pas donné une bonne trouille. »

« Essaie de l'immobiliser sans lui faire mal. C'est un service qu'on lui rend, pas une raison pour saloper le travail. »

La porte s'ouvrit et Alex retint son souffle.

« Où est-il passé ? »

Nikos avança d'un pas rapide…exactement ce qu'Alex attendait. Le colosse alla donner de la tête en avant et s'écroula en jurant. Alex contourna la porte et se retrouva face à Manuel, à qui il administra un coup bien placé, juste entre les jambes.

« Cabronada di cipote !!!!! » Gronda Nikos en se redressant

Alex se mit à courir en direction de la sortie, mais vit une ombre passer sur son visage. Le coup manqua sa tempe de peu et l'envoya rouler sur le sol poussiéreux de l'entrepôt. Jix ne l'avait pas raté. Elle tenait encore la batte à la main :

« J'ai horreur de ce genre d'arme, mais je ne connais rien de mieux pour calmer un petit morveux comme toi. » Fit-elle en s'approchant d'Alex « Debout. »

Etourdi, Alex tarda à obéir, et sentit qu'on l'attrapait par le col.

« Cette fois, je vais le… » Eructa Nikos

« Tu ne vas rien du tout. Il va venir récupérer son petit scorpion, que j'ai déjà suffisamment amoché. Je savais que la douceur ne servirait à rien. »

« Justement… » Fit une vois étranglée de douleur. Manuel chancelait encore du coup reçu entre les jambes « Tu l'as déjà abîmé, et je vais lui faire payer ce qu'il vient de me faire. Tiens-le, Nikos. »

« Avec plaisir. »

Jix jeta un regard de biais à Alex, puis haussa les épaules.

« Je m'en lave les mains. Vous vous débrouillerez avec lui quand il arrivera. »

« Aucun problème. »

Nikos fit agenouiller Alex et Manuel tira un cran d'arrêt de sa poche.

« Tu vois, petit, tu n'as pas très bien estimé à qui tu avais affaire. »

« Des tarés, manifestement. » Grogna Alex, encore sonné.

« Nous sommes colombiens, tous les trois. Nous sommes ici pour affaire et un collègue très cher à notre cœur – et à nos affaires – nous a demandé de te ramener. Je l'ai prévenu que si tu nous causais du tort, il t'aurait dans un état passable. »

« Fallait m'envoyer une invitation. Je suis bien élevé. »

« Tu as de l'humour, c'est bien. Comme je manque de temps, je vais aller vite…Une cicatrice au visage suffira…En pénétrant suffisamment loin dans l'épiderme, on peut marquer quelqu'un à vie, même de ton âge. »

Alex pâlit et voulut cabrer, mais Nikos le maintint si fermement qu'il comprit que c'était sans espoir de ce côté-là. Il jeta un regard affolé à Jix, qui rétorqua :

« Tu choisis mal ton issue de secours, Muchacho. C'est Manuel qui m'a fait ce que tu vois là… »

Elle redessina sa cicatrice du bout des doigts.

« Tu l'as cherché. »

« Non !!! Vous êtes dingues !!! »

« Si tu bouges, je risque de te sectionner un muscle facial…mais ça n'a pas d'importance… »

Alors qu'il approchait la lame de la joue d'Alex, il y eut deux détonations sourdes à l'entrée de l'usine, derrière Manuel. Les trois colombiens relevèrent les yeux.

« Puis-je savoir ce que vous faites ? »

« Cosaque ! »

Alex releva la tête lui aussi. Yassen Gregorovich se tenait dans l'encadrement de lumière et son regard était plus glacé que jamais.

« Je vous avais dit de ne pas le toucher. »

« Ce gosse est enragé, il a failli me castrer ! » Gronda Manuel en envoyant une gifle à Alex.

La réaction de Gregorovich fut si rapide qu'elle parut simultanée. Il administra au colombien un coup de crosse en plein visage. Alex entendit un craquement écoeurant et préféra fermer à nouveau les yeux.

« Nikos, lâche-le. » Fit Jix sans bouger.

« Cosaque, tu n'a pas le droit ! Il a blessé Manuel, il doit payer. »

Yassen s'agenouilla devant Alex et examina ses poignets violacés.

« Je vous avais dit d'y aller doucement, il me semble. Je considère la blessure de Manuel comme un dédommagement. »

Alex se laissa soulever sans protester. Sa tête le faisait souffrir.

« Tu n'avais qu'à y aller toi-même, Cosaque ! »

« Tu sais pertinemment que c'est impossible, Nikos. Personne ne doit savoir que je suis à l'origine de cet enlèvement. »

« Qui est-ce pour que tu veuilles tant le récupérer, Cosaque ? Ce n'est qu'un mioche, tu ne peux même pas en tirer une rançon. » Intervint Jix.

« C'est le fils de Hunter. »

Il y eut un silence, interrompu par les gémissements de douleur de Manuel. Puis, Nikos s'inclina :

« C'est bon, Cosaque. Nous sommes quittes. »

« Je crois bien. Je l'emmène. Je vous reverrais pour le deuxième chargement. »

Portant Alex en mariée, le russe sortit de l'usine et l'installa dans une petite jaguar.

« Yassen… » Murmura Alex, le regard trouble de larmes.

« Il a encore fallu que tu fasses des tiennes…Mais c'est fini, maintenant. »

Gregorovich attacha Alex sur son siège et démarra.

« Où va-t-on ?»

« Dans ta nouvelle maison. »


La maison était lumineuse, de plein pied. Elle se trouvait à plus de vingt kilomètres de Londres et était totalement isolée. D'apparence, elle était tout à fait quelconque. Mais à l'intérieur, elle était truffée d'appareils électroniques, qu'il s'agisse d'équipement de surveillance ou de confort. Yassen avait installé Alex sur le sofa et s'employait à nettoyer la blessure que lui avait infligé Jix.

« Elle a retenu son coup. Sinon tu aurais un concert de cloches sous le crâne, à l'heure qu'il est. »

« J'ai quand même les répétitions. »

« Comment tu as fait ça ? »

« J'ai utilisé ma ceinture pour faire tomber Nikos. C'était le seul que je ne pouvais pas battre au corps à corps, même avec l'effet de surprise. »

« Effet de surprise qui a profité à Jix, surtout, et qui a failli te coûter cher. »

« Je peux savoir pourquoi tu m'as envoyé ces trois molosses ? »

« Par ce que je manquais de temps, Alex. Et puis, après les événements de Moscou, je voulais éviter à tout prix qu'on établisse un lien entre toi et moi, cela t'attirerait de sévères ennuis. »

« C'est sûr que c'est mieux de se faire tatouer au cran d'arrêt. »

« Alex…tu n'es pas content de me voir ? »

La mauvaise humeur d'Alex fondit à ces mots…il en oubliait presque que quelques heures auparavant, il espérait cette rencontre. Yassen lui sourit et lui tendit les bras.

« Allons, viens. »

Alex ne se fit pas prier et se réfugia dans le giron du russe, ravalant ses griefs, enfouissant son visage contre son torse, les yeux mi-clos. Gregorovich lui caressa les cheveux, puis, se penchant, lui souffla à l'oreille :

« Ca me rappelle…à Petrozavosk. Tu sais ce que j'y ai préféré ? »

Alex rougit mais garda le silence, embarrassé. Cela sembla amuser le russe, qui poursuivit :

« Après l'amour, quand tu t'endormais contre moi…tu ne sais pas que c'est le meilleur moment ? On sait que l'autre nous fait confiance, qu'il est heureux contre nous. Je crois que tu n'as jamais si bien dormi que ces quelques minutes, je me trompe ? »

Alex fit la moue. Yassen le connaissait si bien que c'en était presque vexant.

« Je ne me trompe pas. »

« J'aurais continué à bien dormir si tu étais venu me voir. »

« Alex…qu'est-ce que je t'ai déjà dit au sujet des caprices ? »

« Je ne fais pas un caprice ! » Se rembrunit-il.

« Oh ? Et comment appelles-tu ça ? Tu sais qu'il était imprudent pour moi de venir simplement sonner à ta porte. Mais assez parlé. Tu es sale, fatigué et je pense que tu as besoin de te détendre. Suis mois. »

Alex quitta à regret les bras qui l'enlaçaient pour emboîter le pas à Gregorovich. Les couloirs blancs, lisses, modernes, le mettaient mal à l'aise. Cette maison n'avait rien à voir avec le petit appartement dans lequel lui et Yassen avait passé quelques jours à Moscou. C'était impersonnel.

« Voici ta chambre. »

La pièce était plus chaleureuse : les draps étaient colorés et un poster avait été placardé au mur. Le sac d'Alex reposait déjà sur le bureau.

« Tu la décorera comme tu voudras : il y a Internet et le téléphone, si tu en as besoin. La salle de bains est juste en face. »

En fait de salle de bains, cela s'apparentait plutôt à un jacuzzi…de plus en plus mal à l'aise, Alex commençait à se demander à quoi rimait cette comédie : il avait l'impression d'être dans un palace conçu spécialement pour lui.

« Quelque chose ne va pas, Alex ? »

« Cette maison… »

« Oui, je sais. Elle est intimidante. Je n'y viens que rarement, c'est pour ça. »

« Mais…elle est à toi ? »

« Oui. »

« Tu as encore beaucoup de résidences comme ça ? »

« Pratiquement une dans chaque pays. Il me faut des points de chute partout dans mon métier. Tu as envie d'un bain, peut-être ? »

Alex baissa les yeux sur ses vêtements. Lorsqu'il avait tenté d'échapper aux colombiens, il s'était roulé dans la poussière, sans compter les gouttelettes de sang qui avaient taché le col de sa chemise au moment où Jix l'avait frappé :

« Euh…oui. Pour commencer…Je crois que c'est allé trop vite aujourd'hui. »

Yassen lui sourit et l'embrassa sur la tempe, là où la bosse se formait.

« Je suis désolé. Je vais me faire pardonner, Alex, c'est promis. Est-ce que tu serais d'accord pour te baigner avec moi ? »

Yassen n'avait pas cessé de sourire, toujours calme, sans qu'aucune autre expression que la douceur ne vienne modifier son visage.

A SUIVRE…

( En espagnol : saloperie de gosse)