Bonjour à toutes (tous) !
Me voilà de retour pour une fiction à chapitres. Je sais que je n'ai encore pas terminé la précédente mais j'ai besoin d'en passer par là avant. Besoin de faire ressortir des choses dans ce récit que je ne peux pas faire ressortir dans « Une rencontre » pour celles (ceux) qui connaissent.
J'ai délibérément utilisé la 2eme personne du singulier et ''copié'' en quelques sortes vu que c'est le style utilisé dans room 47 de Little Normandy (mais après tout, la forme d'un récit n'appartient à personne).
J'espère que vous prendrez autant de plaisir que j'en ai à l'écrire.
Sur ce, amusez vous bien!
Et surtout, un conseil avant la lecture, faites preuve de patience ;)
1- Le retour...
Une sonnerie de réveil difficile à éteindre. Un sommeil impossible a abandonner. Des sombres pensées qui émergent dans ta tête à une allure folle que tu ne contrôle pas. Un lit refroidit par l'absence. L'envie d'un corps chaud contre le tient. La souffrance de constater que tu es presque seule.
C'est un de ces matins où tu préfèrerais rester au lit a flemmarder, blottie dans les bras de Morphée, et blottie contre ton chien qui te sert de bouillotte. Mais c'est encore un de ces matins où tu es obligée de t'extirper de ton sommeil profond et libérateur pour aller travailler. Travailler, encore et toujours plus si tu veux pouvoir continuer à vivre dans ton loft de deux cent mètres carrés, profiter de ton abonnement illimité au Spa, de ta manucure hebdomadaire, de la vie dont tu as toujours rêvé. Une vie qui ne te rend pourtant pas plus heureuse que quand tu vivais dans ton vingt mètres carrés dans la banlieue de New-York avec ton chien, a manger des biscottes le soir et à sortir toi même les poubelles. Pas de Spa, pas de champagne plein le frigo, pas de robe hors de prix. Rien de tout ça, mais tu étais amoureuse, enfin tu crois. Et puis tu as voulu plus, alors tu as travaillé dur pour parvenir à tes fins. Tu as tout écrasé sur ton passage, même ton histoire d'amour. Enfin tu crois que c'était une histoire d'amour. Rien n'a résisté au rouleau compresseur que tu es devenue, sauf Jessie, ton chien bouillotte, seul être fidèle de ton existence en dehors de tes parents. C'est pas non plus comme si tu ne l'avais pas cherché. Tout le monde t'a tourné le dos et il y a une raison alors pourquoi continuer à te plaindre? Tu n'as pas d'autre choix que d'assumer ta solitude et ton sentiment d'échec.
Tu traînes des pieds parce que tu n'y arrives plus. Tu n'as plus l'envie. Ton boulot te plaît mais pourtant tu as l'impression de tourner en rond, tant de sacrifices pour un simple rang social digne de toi. Mais tu es qui au juste? Tu es à la tête d'un empire cosmétique qui vaut des milliards mais qui ne t'appartient pas, une PDG réputée et respectée par l'ensemble de ses collaborateurs, mais la femme que tu es est détestée. Des fois tu as l'impression d'être l'héroïne de cette série télé des années 90 dont tu ne loupais aucun épisode, cette femme puissante, avide des autres et surtout de ce que les autres ont. Cette femme qui détruit tout sur son passage. Tu as l'impression d'être dans la peau d'Amanda Woodward joué par Heather Locklear dans Melrose Place. Quel modèle! Mais ne finit-elle pas heureuse sur une île déserte avec l'homme qu'elle aime, coupée du monde mais satisfaite de peu? Il y aurait donc encore de l'espoir te concernant?
Tu en es arrivée à un point où tu ne te reconnais plus toi même. Tu ne t'aimes plus alors que tu aimais celle que tu étais avant. La Santana de l'Ohio, cette pompom girl sexy qui rêvait en secret d'embrasser sa meilleure amie et qui n'a jamais osé lui avouer qu'elle l'aimait. Tu as aujourd'hui trente ans, sans véritables amis, tu n'as personne qui t'attend le soir à la maison, tu fais semblant d'apprécier des gens et en même temps tu fais exprès d'irriter ceux qui pourraient te vouloir du bien par peur de les faire souffrir. Tu as coupé les ponts avec tous tes amis d'enfance, même ta meilleure amie Brittany, celle que tu aimais en secret et en silence. Celle qui n'a jamais vraiment quitté tes pensées, même lorsque tu vivais avec Emily. Emily, cette femme d'une infinie douceur et d'une gentillesse à renvoyer mère Térésa au rang de délinquante. Elle qui a donc fini par te quitter tellement tu étais devenue détestable. Tu as fini par être cette personne que l'on fuie pour ne pas souffrir et tu n'en peux plus. Tu es belle, intelligente, séduisante, mais tu es aussi imprévisible et invivable. Tu n'es plus cette jeune femme drôle, attentionnée, fidèle, perspicace et généreuse qui avait tout le monde à ses pieds simplement parce qu'elle était quelqu'un de bien. Tu avais déjà ce caractère fort et difficile à cerner et cette rage en toi mais tu savais faire la part des choses et être toi même avec les gens que tu aimais vraiment. Tu n'es plus que l'ombre de toi même et ça te fait peur. C'est ça en fait. Tu as peur. Peur de retourner en arrière. Peur de finir seule. Peur de tout perdre et de ne pas te faire à ton ancienne vie. Peur de réaliser tes rêves. Quinn avait raison. Tu avais des rêves. De vrais rêves.
L'air est froid quand tu sors dans la rue. Nous sommes début décembre et porter une jupe en plein hiver à New-York ça ne pardonne pas. Tu ne te vois pourtant pas porter autre chose qu'un de ces ensemble classe et sexy. Tu te dois de toujours faire bonne impression, d'être séduisante. Tu as besoin de te sentir en position de force, d'être celle qui tient les rênes. Être affublée ainsi te donne cette sensation de dominer le monde. C'est peut-être ridicule, mais à chacun sa manière pour se rassurer. Alors tu as enfilé un de ces fameux ensembles hors de prix, du sur mesure acheté chez un grand couturier et qui met ta silhouette en valeur. Tu sais que ton apparence attirera les regards d'hommes en rut et celui envieux de certaines femmes dont certaines seront séduites. Tu aimes plaire aux hommes même s'ils n'ont aucune chance de t'avoir dans leur lit, mais tu te sens flatter. Et quand une femme ose t'aborder tu n'as qu'une envie, c'est de faire chavirer son cœur et son corps l'espace d'une nuit. Juste une nuit car tu ne peux pas leur donner plus, tu t'en sens incapable. Incapable de ne pas les décevoir. Alors tu prends l'affection qu'elles ont a te donner, tu t'en nourrie autant que tu peux, tu te rassasie et tu pars sans te retourner, sans t'inquiéter de ce qu'elles ressentent. C'est toi ça, c'est ce que tu es, peu importe que ça te plaise ou non.
Il fait froid mais ça n'est rien comparé au vent glacial qui te transperce de l'intérieur. Tu fais les quelques pas qui te séparent de ton café habituel à vive allure. Et comme tu n'es centrée que sur toi même, tu entres sans faire attention à ce qu'il se passe autour de toi. Tu ne fais pas attention à la personne qui sort lorsque que tu t'introduis dans le café. Tu la bouscule mais tu te permets quand même de lui reprocher à elle de ne pas faire attention. Mais si toi tu avais fait plus attention tu l'aurais évité. Et si tu avais été un peu plus sympa tu aurais sans doute pu t'excuser. Elle avait l'air mignonne en plus du peu que tu en as vu. Va savoir, tu aurais peut-être pu entamer la conversation avec elle et l'inviter à boire ce café avec toi. Prendre le temps pour une fois, quitte à arriver en retard au travail. Elle aurait pu devenir ta petite amie, le hasard fait parfois bien les choses. Tu ne le sauras jamais. Tout ce que tu pourras retenir d'elle qu'elle sentait bon. Qu'elle sentait bon? Non mais depuis quand tu fais attention à ce genre de détail Santana? Mais c'est vrai qu'elle sentait bon. Son parfum a laissé une trace après son passage. Quand tu t'es enfin retournée, elle avait déjà passé la porte, cherchant surement à te fuir le plus vite possible. Les vapeurs de son parfum t'ont alors captivé. Tu ne sais pas pourquoi, mais cette odeur te paraît familière. Sans doute un parfum dont tu vantes les mérites mais que tu n'auras jamais porté car tu es du genre fidèle. Fidèle au même parfum depuis que Brittany te l'a offert le jour de tes dix huit ans. Tu as beaucoup de défauts, mais l'infidélité n'en fait pas parti. Tu préfère quitter avant de trahir.
Le trajet jusqu'à tes bureaux ne te prends que cinq minutes mais tu arrives frigorifiée. L'hôtesse d'accueil assise derrière son comptoir te salut avec son sourire habituel mais sincère. C'est difficile pour toi de l'admettre, mais tu l'aimes bien. Elle t'est agréable même si tu ne le lui feras jamais ressentir. Par ailleurs, tu ne lui as jamais fait ressentir non plus que tu ne l'aimais pas et c'est sans doute pour cette raison qu'elle reste agréable et souriante en te voyant. Tu devrais peut-être l'appeler par son prénom au moins une fois, avoir une parole gentille et sincère envers elle. Ce soir peut-être en partant, si tu ne pars pas après elle. Peut-être, tu verras bien.
Tu te permets quand même un sourire.
Tu t'approches de l'ascenseur où une dizaine de personnes attendent également, pour ne pas arranger ton humeur déjà exécrable. Avant qu'il ne s'ouvre, l'hôtesse te récrie et tu entends le bruit de ses talons qui frappent le sol en marbre du hall d'entrée. Tu reconnais sa voix parce que tu l'entends tous les jours depuis plus de quatre ans.
« Melle Lopez! »
Tu te retournes, étonnée.
« Oui Sarah? »
Elle a un mouvement de recul, comme prise par surprise.
« Vous connaissez mon prénom? » .
Tu te rends compte qu'elle paraît vraiment surprise.
« Évidemment! Pourquoi cette question? » Dis tu, comme si tu ne le savais pas.
« C'est juste que je trouve ça dommage. »
Tu ne comprends pas ce qu'elle veut dire par là. Elle doit s'en rendre compte car elle continue.
« C'est mon dernier jour ici et du coup je trouve ça dommage que ça ne soit qu'aujourd'hui que vous m'appeliez par mon prénom. »
Tu te rend comptes que tu es triste, sans comprendre pourquoi.
« Pourquoi je ne suis pas au courant que vous partez? »
« J'ai traité directement avec votre directeur des ressources humaines. J'ai appelé votre secrétaire et vous lui avais dit que j'aille voir directement Mr Wilson. C'est donc ce que j'ai fait. En même temps c'est logique, il est là pour ça, mais j'avais envie de vous le dire en personne. Et puis comme vous ne m'avez fait aucun commentaire je me suis dit que ça vous était égal. »
Et là tu ne sais pas ce qu'il se passe mais tu as une envie soudaine de pleurer. Comme si l'idée de perdre le point de repaire qu'est Sarah t'arrachait le cœur. Un point de repaire. C'est exactement comme ça que tu la vois depuis tout ce temps. Et dieu sait que tu as besoin d'un point de repaire pour ne pas te perdre complètement.
« Je suis désolée, j'ignorais tout ça. Je suis vraiment navrée. » Et tu le penses.
« C'est pas grave. Sachez en tout cas que j'ai été ravie de travailler pour vous. Je pourrais dire ''J'ai travaillé avec Santana Lopez, celle qui a révolutionné la beauté des femmes'' »
« N'exagérez pas non plus. Je ne fais que mon travail et je n'ai rien inventé. En plus si vous dites ça tout le monde vous regardera comme si vous arriviez d'une autre planète puisque personne ne me connait.»
« Dans tous les cas, je vous le dis sincèrement, j'ai beaucoup appris ici. Et puis vous avez toujours été gentille avec moi, je dois surement m'estimer heureuse.» te dit-elle avec un léger sourire d'apréhension.
« On peut dire ça comme ça oui » approuves tu.
« Donc si jamais je ne vous revois pas de la journée, merci encore de m'avoir donné ma chance. »
« C'est moi qui devrais vous remercier. Vous avez fait du très bon travail, c'est tout ce qui compte. Je vous souhaite tout le bonheur du monde pour l'avenir. »
Tu n'as pas envie de la laissé partir sans en savoir plus sur elle, sans la remercier pour sa bonne humeur chaque matin. Mais pour la première fois tu hésites, est-ce vraiment approprié?
« Sarah, ça vous direz de venir dîner chez moi ce soir? Je ne peux pas vous laissé partir comme ça. J'ai envie de vous connaître un peu mieux. Je sais que c'est un peu tardif mais il vaut mieux tard que jamais non? Je suis sûre que nous avons plein de choses à nous dire. »
« C'est un rendez vous Melle Lopez? » te dit-elle, malicieuse. Tu sens que la situation a pris un virage à 360 degrés, comme si vous étiez transportées dans une autre dimension. Tu décide de rentrer dans son jeu car après tout, tu aimes jouer.
« Pas encore. Nous verrons bien ce que l'avenir nous réserve. En tout cas si ça vous dit je vous emmène avec moi ce soir en sortant. Je ferais en sorte de sortir tôt. Vous m'attendrez? ». Tu as presque envie de la supplier, prête à tout pour ne pas passer une nouvelle soirée esseulée dans ton habitation trop grande pour Jessie et toi.
« Avec grand plaisir... » te répond t-elle gaiement. Tu la regardes repartir vers son box, tortillant ses fesses rien que pour toi, et jetant un dernier regard par dessus son épaule, avec un sourire qui t'est entièrement destiné. Tu comprends mieux maintenant pourquoi elle a toujours été aussi gentille avec toi. Et tu comprends aussi mieux pourquoi toi tu n'as jamais été désagréable avec elle. Tu souris à l'idée de passer une bonne soirée en sa compagnie. Cette idée te réjouie et te redonne du baume au cœur. Tu te rends compte qu'il y a bien longtemps que tu n'avais pas fait preuve d'autant d'impatience à l'idée de dîner avec une femme, de le faire avec envie plus qu'avec une arrière pensée. Tu mentirais si tu disais qu'elle ne te plaît pas, mais ton idée première était vraiment de passer une simple soirée avec une jeune femme charmante et agréable.
Pendant votre discussion l'ascenseur s'est ouvert à deux reprises et tu dois attendre la troisième pour enfin espérer accéder au dernier étage où se trouvent ton bureau. Ça devrait prendre cinq bonnes minutes. Un laps de temps suffisant pour imaginer ton arrivée le matin sans Sarah et t'imaginer exécrable avec sa remplaçante. Tu sais déjà que ça ne sera pas pareil sans elle.
Tu as encore cette envie de pleurer qui te revient, tu es à fleur de peau, c'est insupportable.
L'ascenseur s'arrête enfin et tu n'as qu'une envie: redescendre et dire adieu à tout ça. Mais tu ne le feras pas parce que tu tiens trop à toutes ces choses matérielles et superficielles qui dirigent ta vie.
Tu saluts brièvement tes collaborateurs et demandes à ta secrétaire qu'elle fasse venir ton directeur des ressources humaines dans ton bureau, « immédiatement !»
Il arrive deux minutes après, essoufflé. Tu ne daigne pas lever le nez de ton magazine.
« Encore en train de te faire sucer par ta secrétaire Wilson? »
« Santana! Parles moins fort bon sang? » te dit-il en refermant la porte derrière lui, les lèvres pincées.
Tu es amusée. Toujours prêcher le faux pour avoir le vrai. Il se trouve pourtant que là tu avais vu juste.
« T'es au courant Ben que tu pourrais être attaqué pour harcèlement et moi aussi par la même occasion? Alors tu arrêtes tes conneries ou je n'aurais aucun problème à parler encore plus fort de tes PETITS EXTRAS...voir d'en parler directement à ta femme. Et tu sais que je n'aurais aucun état d'âme, c'est pas mon genre.
Tu le sens agacé mais il ne dira rien. Comme toujours. Pourtant des fois tu aimerais qu'il se rebelle, ça te ferait un peu de distraction.
« Tu voulais me voir pour quoi? » dit-il, pressé de passer à autre chose.
« A l'avenir, je veux que tu me dises quand une personne décide de quitter l'entreprise et je veux la voir dans mon bureau pour tenter de la convaincre du contraire, c'est bien compris? Je viens d'apprendre que Sarah nous quitte et je dois avouer que je suis triste à l'idée qu'elle ne soit plus là. »
Tu le sens hésitant. Tu ne peux pas le blâmer, toi même tu ne connais pas le prénom de la moitié des gens qui se trouvent autour de toi. Encore que lui devrait le savoir étant donné sa fonction. Fichu pistonné.
« Notre hôtesse d'accueil Ben! »
« Oooooooh! Oui...Très bien, j'y manquerais pas à l'avenir. »
« Tu as trouvé une remplaçante? »
« Oui... »
« Fais la venir à 7h30 demain matin. Je comptes sur toi pour l'accueillir avec ta ''secrétaire''. Qu'elle lui fasse une formation expresse mais essentiel pour pouvoir débuter. La logique aurait voulu qu'elle commence aujourd'hui et qu'elle apprenne avec celle qui est encore présente pour quelques heures en bas, mais la logique et toi ma foi...J'arriverais avant l'ouverture également pour me présenter sans qu'elle soit débordée. »
Tu ne sais pas pourquoi mais tu as envie d'être agréable, sans doute la bonne humeur communicative de Sarah et l'excitation de passer la soirée avec elle.
« Euh...Ok! » te répond t-il, empreint de surprise tout autant que tu l'es.
« Je sais, c'est pas habituel. Mais c'est ainsi. J'ai envie de m'intéresser un peu plus aux gens qui travaillent pour moi. »
« En même temps, c'est pas comme si c'était un poste clé en bas. En plus tu ne collabores pas vraiment avec elle. » se permet-il de te dire.
« Détrompes toi Monsieur j'ai la bite à l'air! »
Tu es amusé quand tu le vois baissé les yeux sur ses parties intimes. Ce type te dégoûte chaque jour un peu plus, mais tu es obligée de travailler avec lui, c'est le fils d'un ami à ton patron .
« Aller c'est bon, tu peux retourner ''travailler'' , du vent! Et je te préviens, pas de dérapage sinon je te fais la promesse que même ton petit papa ne pourra rien pour toi. » tu termines, vindicative.
La journée ne passe pas à la vitesse que tu le souhaiterais. Le temps s'est comme arrêté, te laissant tout le loisir de penser à la soirée qui se profile. Tu passes plusieurs coups de fils pour que ce soit parfait le soir venu. Hors de question pour toi de faire appel à un traiteur, tu aimes bien trop cuisiner et en plus tu es douée. Tu donnes ta liste de courses ainsi que ton numéro de carte de crédit à l'épicerie qui se trouve en bas de ton immeuble. Ils ont l'habitude. Ils laisseront tout au gardien de ta résidence et ce dernier se chargera de monter les sacs et même de les ranger dans ta cuisine. Il a l'habitude lui aussi. Tu cuisineras un repas simple mais gouteux pour Sarah. Peut-être même qu'elle t'aidera ou bien tu lui proposeras d'aller se détendre dans un bain bien chaud en attendant. Elle préfèrera sinon regarder la télé ou simplement te regarder à l'œuvre. Tout ce que tu sais c'est que toi tu cuisineras et tu passeras un bon moment parce que c'est ce que tu aimes faire par dessus tout. C'est sans doute le seul moment où tu retrouves vraiment celle que tu es.
Après une réunion d'un ennui sans nom, deux conférences téléphoniques et un rapport de budget pub à boucler, te voilà prête à partir. Tu rassembles tes affaires, éteints les lumières et te glisses hors de ton bureau. Tu croises ta secrétaire qui n'ose plus faire un geste, dans l'attente d'un nouvel ordre.
« Camille, je pars tôt ce soir, je vous laisse prendre les messages urgents et me les transférer par mail. Et pouvez-vous appeler Sarah de l'accueil pour lui dire que je suis là dans cinq minutes.»
« Sarah? Heu...Oui. » Décidément, tout le monde paraît surpris aujourd'hui
« Vous avez bon goût, Sarah est très jolie et elle est adorable. »
« Je me passerais aussi de vos commentaires Melle Lasland » Tu la vois rougir et prendre le téléphone précipitamment afin de mettre un terme à cet échange dans lequel elle pourrait s'embourber.
« Tu pars déjà? » Ton adjoint, tout autant infidèle que ton DRH se permet de porter un jugement sur ton heure de départ, celui là même qui s'octroie les idées des autres et les honneurs qui vont avec. Tu trouverais ça presque agaçant si tu n'étais pas aussi enjouée par la soirée qui se profile.
Tu te retourne vers lui avec un sourire faussé, décidée à lui fermer son clapet pour la soirée.
« Oui, je pars déjà! Tu n'es pas le seul a aimer la compagnie des jeunes femmes Arthur. » Tu le sens se tendre car tu sais que Camille est une pipelette et qu'elle pourrait très bien creuser pour savoir de quoi tu voulais parler. En même temps, Camille est quelqu'un de perspicace, elle est sans doute déjà au courant, même bien avant toi. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'elle est à cette place et que tu l'as choisis elle. Mais c'est aussi quelqu'un de droit qui n'irait pas foutre la vie de quelqu'un en l'air. Il n'a donc aucune raison de s'inquiéter.
« J'ai fait venir notre nouvelle hôtesse d'accueil pour t'éviter de venir trop tôt demain matin. Ben m''en a parlé et je me suis dit que c'était une bonne idée. Elle verra les bases ce soir avec Sarah et on terminera la formation demain matin avec Jessica. »
« Sacré Benjamin... sa prise d'initiative me va droit au cœur, vraiment mais surtout elle me fait doucement rire. Il fait passer ça comme un service que qu'il me rend, mais en fait c'est pour lui éviter à lui de venir trop tôt. Comme c'est adorable! Et toi, en homme complice tu accepte, sans prendre le soin de voir avec moi. »
« Parce que c'est ce que j'ai toujours fait à ta demande personnelle, car, je cite, ''tu as autre chose à faire que de t'embêter avec les petits problèmes de personnel'' »
Tu le tuerais bien sur place mais tu préfère changer de sujet, sans en rajouter.
« J'ai des projets pour ce soir et Sarah aussi puisque nous dînons ensemble. Donc tu peux renvoyer ta gentille demoiselle d'où elle vient, je la verrais demain matin, comme c'était prévu. »
Tu sens la colère dans ses yeux mais il n'en fera rien lui non plus.
« Hum..Ok, ok. Mais avant de partir je dois te présenter celle qui va bosser avec toi sur la mise en scène de la soirée pour la sortie du prochain parfum. Tu m'as demandé de trouver la meilleure et je penses avoir touché le gros lot!»
Tu l'imagine la tête enfoncée dans le mur derrière lui, débarrassée de sa présence et libre de partir.
« Ok... je vais tenter d'être un peu plus claire..Au cas où tu ne l'aurais pas encore compris, je m'en vais, j'ai des projets et une jeune femme m'attend en bas, désespérée de ne pas me voir arriver. Alors ta perle rare, je la verrais elle aussi demain matin. Au revoir! ».
« Santana, tu peux pas faire ça! C'est une pro! »
Tu te rapproche de lui, un air triomphant dans les yeux.
« Oh mais je peux le faire si. Et tu vois... je le fais.»
Tu tourne les talons, un grand sourire sadique sur les lèvres, décidée à quitter le plus vite possible cet endroit qui te sépare de ta soirée. Soirée qui bizarrement t'excite comme si tu allais à ta première boom.
Tu viens de faire seulement quelques pas lorsqu'une voix t'interpelle. Une voix que tu reconnaîtrais parmi des milliers d'autres. Une voix que tu n'avais pas entendu depuis très longtemps et qui fait exploser la carapace que tu as mis tant de temps à construire .
« Santana? »
Tu n'en reviens pas. C'est pas possible...
Tu ne sais plus bouger, tu ne sais pas quelle direction prendre, quelle réaction tu dois avoir, quel sentiment doit t'envahir. Le bonheur, la peur ou la peine?
Tu dois faire face pourtant. Tu ne peux pas fuir à nouveau. Tu ne peux pas être lâche comme tu l'as été en quittant l'Ohio et tous les gens qui tenaient à toi.
Alors tu prends une grande respiration.
« Santana c'est bien toi? »
Tu fermes les yeux. Tu retiens même des larmes.
Tu te retourne et tu lui fais face.
C'est bien elle. Elle est là, devant toi, tel un ange tombé du ciel. Sa chevelure blonde dispersée sur ses épaules, ses yeux d'une tendresse infinie, ses lèvres d'une luxure indéniable...Ses jambes d'une élégance rare. Elle est égale à elle même. Encore plus belle. Encore plus resplendissante. Encore plus attirante que quand elle n'était encore qu'une adolescente.
« B..Brittany? Qu..ici? Mais... » Tu pose un regard interrogateur sur Arthur qui ne comprend pas non plus ce qu'il se passe.
« C'est bien moi oui... » Son sourire s'agrandit encore un peu plus.
Elle te prend dans ses bras avec l'enthousiasme que tu lui connaissais déjà. Tu sens son souffle dans ton cou, sa peau contre la tienne et il n'en faut pas plus pour te faire flancher. Son odeur ravive des sentiments enfouis depuis si longtemps. Et là tout te revient en pleine figure. C'était elle ce matin devant le café. Tu reconnaitrais son odeur parmi des milliers d'autres, même si ce matin il t'était impensable que ça puisse être elle. Tu te sens presque défaillir lorsqu'elle se retire de l'étreinte qu'elle a initié. Elle te manque déjà.
« C'est à toi tout cet immeuble San? »
C'est comme si vous vous étiez vu la veille. Rien n'a changé, le temps s'est figé.
« Oui et non... » Tu as cet air perdu que l'on a lorsqu'on ne sait pas où l'on se trouve au réveil. C'est comme si tu venais de tomber nez à nez sur un fantôme. Tu es sur pilote automatique.
C'est à peine si tu entends Arthur te parler.
« Mme Elroy est donc le directeur artistique de la prochaine campagne ''Blue eyes'' »
Mme Elroy? Elle s'est mariée? C'est un deuxième coup de poignard pour toi. Elle est mariée. Elle a sans doutes des enfants. Elle a une vie qui doit la combler pendant que toi tu rumine un passé que tu ne retrouveras jamais intact.
« Tu ne danses plus? » C'est ta première question. Tu préfères éviter de lui demander quoi que ce soit sur le changement de nom. Tu veux fuir cette réalité là, tu ne veux pas t'accabler plus que tu ne l'es déjà.
« Bon.. je vais vous laisser alors... » Arthur est là mais tu ne le vois plus. Tu ne vois qu'elle. Tu l'entends vaguement qu'il te parle, mais tu es perdue dans ses yeux toujours aussi bleus.
« On a tellement de choses à se dire San. Tu veux pas plutôt qu'on aille dans ton bureau? »
C'est à cet instant que tu entends le bruit de l'ascenseur qui arrive à destination. La porte s'ouvre.
« Santana? »
Sarah. Tu l'avais déjà oublié.
Tu sors soudainement de l'endroit imaginaire où tu te trouvais en compagnie de celle que tu aimais étant jeune. Car tu ne l'aime plus, c'est évident. Comment serait-ce possible après tant d'années? Tu es simplement troublée par sa beauté et par l'image du passé qu'elle te renvoie.
Tu te retournes vers l'ancienne standardiste. Elle aussi est jolie. Elle aussi est blonde. Elles sont souvent blondes d'ailleurs, comme si tu avais cherché toute ta vie un visage familier.
Tu fais de nouveau face à Brittany. Tu dois te ressaisir. Tu as une vie à vivre. Elle a la sienne. Ça ne servirait à rien de retrouver un passé qui a disparu. Ça ne servirait à rien non plus de vouloir le changer.
« Écoutes Brittany, j'ai un rendez-vous ce soir et je ne peux pas lui faire faux bon. Et je ne peux pas la faire attendre non plus, ça ne se fait pas, tu comprends? »
Elle a cet air déçu qui abîme son sourire et ça te déchire. Tu ne peux pourtant pas te permettre de rester là à discuter avec elle de sa vie parfaite pendant qu'une jeune et charmante demoiselle t'attend afin de passer une soirée agréable en ta compagnie.
« On se voit demain d'accord? S..Si tu veux on va boire un café ensemble avant que je vienne au bureau. Et puis comme ça on pourra venir ici ensemble et commencer à travailler sur cette campagne. »
« Ok » Elle est d'accord mais en même temps tu sens bien qu'elle espérait mieux de ta part.
« Le même café que celui où je t'ai bousculé ce matin. »
« C'était toi la méchante personne qui m'a mise de mauvaise humeur? »
Tu souris. Elle a sa façon à elle d'être énervée, elle est unique.
« Je sais Brit et je suis désolée. Je me ferais pardonner demain en t'invitant pour le petit déjeuner. 8H ça te va? Dis moi oui, je t'en prie. Et je te promet que tu ne le regretteras pas. » Tu mens, car tu n'en sais rien, tu ne peux pas savoir et tu ne peux pas promettre ce genre de chose. Pourtant tu l'as fait et tu ne peux pas revenir sur une promesse, sauf en ne la tenant pas.
Elle doit vite te répondre car tu te dois de t'enfuir de là. Tu ne peux plus respirer. Tu tentes de faire bonne figure, autant pour elle que pour Sarah. Cette rencontre te coupe le souffle et tu ne peux pas. Tu ne peux tout bonnement pas. Pas ce soir en tout cas. Pas par surprise.
Elle laisse planer un long silence avant de te répondre, comme si la réponse lui demandait un effort de réflexion intense, comme si la réponse n'était pas évidente. Comme si elle était face à un dilemme.
« Ok, demain 8h. Passes une bonne soirée San. » Elle te répond mais tu sais qu'elle est déçue et ça te fait chier. Ça te fait chier parce que tu as toujours tout fait pour qu'elle soit heureuse, tu t'es toujours employée par le passé à rendre sa vie meilleure, parfois même sans qu'elle le sache. Elle fait sa moue tant redoutée, celle qu'elle faisait toujours quand elle voulait obtenir ce qu'elle voulait de toi. Et elle l'obtenait toujours. ''C'est injuste ce que tu fais Brit'' voilà ce que tu lui répondais à chaque fois. Mais cette fois tu ne flanches pas. Tu ne dois pas.
Tu es montée dans l'ascenseur avec Sarah pour fuir ce passé que tu voulais encore retrouvé ce matin. Elle t'a pris la main mais tu n'as pas ressenti le grand frisson. Tu t'es retournée et tu as vu le visage rempli de déception de Brittany avant que les porte ne se referment. Cette vue de Brittany déçue a fait des ravages au plus profond de ton cœur et autrefois tu aurais tout fait pour gommer la tristesse dans ses yeux. Mais ce soir tout est différent. Ce soir ta vie commence.
