Hello Hello.
Voilà une petite fic écrite au fil de la plume, en attendant de publier un plus gros projet (à la rentrée au plus tôt). Rien d'autre à ajouter quant à mes motivations. C'est juste pour le plaisir.
A l'intention de toi, lecteur :
1 : ceci est un UA (univers alternatif), ce qui est une première pour moi, n'en étant pas friande en théorie. Pas de ninja, pas de Konoha, l'histoire se passe dans notre monde, avec nos repères, à notre époque. CEPENDANT, je prends certaines libertés. Par exemple, je n'ai jamais visité l'hôtel dont je parle (et qui existe bel et bien), ce que je décris est parfois de l'ordre de la fantaisie.
2 : les personnages sont plus âgés que dans le manga. De dix ans, à peu près.
3 : je vous préviens, cela risque d'être un poil à l'eau de rose, sans que ce ne soit trop cliché (du moins, je l'espère). Je réserve le fight et le politique pour mon gros projet à venir.
Sur ce, je vous souhaite une très bonne lecture !
...
Ah nan, attendez, j'allais oublier :
Disclaimer : j'emprunte les personnages que vous reconnaitrez à monsieur Kishimoto. J'emprunte aussi le décor. Ma fiction n'est en aucun cas une source de revenu ni une pub géante.
Oh captain !
N'as tu jamais eu l'impression d'avoir tué dans l'œuf cette plus jeune version de toi, dont l'idéalisme nourrissait les ambitions les plus insolentes ? Ne t'est-il jamais arrivé de te lever un matin, de regarder autour de toi, et de ne pas reconnaître ton rêve d'enfance au milieu de toute cette réalité d'adulte ? Et de te dire : mec, putain, t'en n'as pas branlé une.
Un sérieux doute s'empara de Deidara, qui finit par rayer la dernière phrase du carnet gris. Il y allait un peu fort. A vingt-neuf ans, atteindre son niveau de carrière relevait presque de la fantaisie. Il referma son carnet et le glissa dans la pochette devant lui, puis s'enfonça confortablement dans le siège d'avion. Le capitonnage crème ne parviendrait sans doute pas à absorber la tension en haut de son dos, malgré le moelleux du cuir made-in business class et la coupe de Ruinart blanc de blanc à portée de doigts. Sasori lui avait bien refourgué le « guide pour une vie zen et équilibrée », ramassis d'astuces phyto-aroma-feng-shuistiques en tout genre pour l'aider « à digérer le stress du quotidien » et à « le transformer en énergie positive ». Des trucs de nanas, se dit l'homme aux longs cheveux blonds.
« Page vingt-trois : comment retrouver une cambrure naturelle grâce aux exercices de respiration, » s'éleva une voix à sa droite.
Deidara tira le rideau qui les séparait dans un geste d'irritation, peu enclin à écouter son ami déblatérer ses conneries habituelles. Il regrettait de ne pas être protégé par un écran acoustique. La voix de Sasori ne tarda en effet pas à revenir à la charge.
« J'en connais un qui s'est levé du mauvais pied ce matin. »
Excédé, Deidara tira de nouveau le rideau et lança un regard mauvais à Sasori.
« Ce matin ? » ragea-t-il. « Il est putain de cinq heures du matin ! Tu m'as tiré du lit à trois heures, merde ! C'est pas le matin, ça, c'est la nuit ! »
Les lèvres du rouquin s'étirèrent dans un sourire amusé. Dieu qu'il aimait l'emmerder. Il aurait très bien pu choisir un horaire de départ plus tardif, mais il ne se serait pour rien au monde privé de l'air ahuri et massacrant de son ami de toujours. Il tira le rideau à son tour, repu du spectacle. Ces vacances feraient un bien fou à Deidara, même si ce dernier ne l'accepterait jamais. Du soleil, de la mer, un palace : que demander de plus ?
« T'emballe pas, » le menaça le blond, qui lisait sans doute dans ses pensées. « Je sais très bien pourquoi tu m'emmènes là-bas. »
Sasori ne discernait pas sa silhouette à travers l'épais rideau de lin.
« Je t'ai accrédité, » annonça-t-il, l'air de rien.
Le rideau ne lui renvoya que du silence.
« Pas la peine de me rembourser, c'est cadeau. »
Un tintement de verre à champagne lui parvint toutefois aux oreilles.
« Je te rembourserai, » répondit finalement Deidara, le nez contre le hublot et la coupe aux lèvres. Après tout, son planning était désespérément vide.
En sortant de l'avion, il eut l'impression de rentrer dans un four. S'il y avait un truc que Deidara ne supportait pas, c'était bien la chaleur étouffante des climats désertiques, dont la lourdeur lui collait les cheveux au front. Tous deux trainaient péniblement leurs valises dans les couloirs méandreux de l'aéroport à la recherche d'une borne de taxis*, et cela dans le silence le plus pesant. Leurs baskets rencontrèrent bientôt l'asphalte cuisant d'une station, où de nombreux taxis attendaient en file indienne de charger les touristes fraichement débarqués. Au-dessus, sur le fronton de l'infrastructure aéroportuaire, le nom de Dubaï en lettres capitales. Destination prisée, néanmoins méprisée par l'artiste aux cheveux rebelles. Non pas qu'il méprisât la ville en elle-même. Juste qu'il cherchait constamment l'inconnu, le moins commun, et donc fuyait les destinations « à la mode ». Cette fierté mal placée, engendrée par sa vision d'esthète, gâterait ses vacances, et cela, Sasori n'en doutait pas.
Après avoir abordé un taxi en tête de file, ils balancèrent leurs lourdes valises dans le coffre et s'engouffrèrent dans le fournaise automobile qui les conduirait à destination : le fameux Burj al Arab Hotel. Perspective qui n'enchantait certainement pas Deidara et qui laissait Sasori de glace. Leur âme d'artiste tendait à fuir les palaces, trop aseptisés malgré une volonté esthétique souvent poussée. Mais leur embourgeoisement récent, lié au mode de vie de plus en plus élevé qu'ils pouvaient désormais se payer, les poussait à tromper quelque fois leurs convictions de départ. C'est avec une réticence malhonnête, feinte, résidu d'un idéal stoïcien depuis longtemps délaissé, qu'ils se vautraient dans l'indécence du luxe. L'excuse qui leur donnait le feu vert pour accepter les petites intentions de bienvenue dignes des hôtels les plus réputés (une coupelle ciselée en argent débordant de thé fumant, accompagnée de dattes des Aurès) : la convention d'artistes qui aurait lieu là, dans les jours à venir.
Des années que l'on attendait cette convention, réunissant les artistes contemporains les plus convoités en ce début de siècle. Mi-artistiques, mi-humanitaires, les thèmes moteurs tournaient autour d'enjeux de prime importance comme le sida et la famine. Pour l'occasion, les murs somptueux du Burj al Arab exposaient des photographies du monde entier, mettant en scène la famine, la guerre, la pauvreté, mais aussi l'espoir international d'une solution globale, un message fort. Message contenu entre les murs bleus, blancs et or du palace, à l'écart de la lie de l'humanité. Une contradiction qui reflétait bien l'élitisme du milieu artistique en ce vingt-et-unième siècle. L'indécence souleva le cœur de Deidara, qui sirotait à contrecœur le thé sirupeux, tandis qu'un membre du personnel de l'hôtel leur faisait visiter les lieux. Les clapotis de la fontaine centrale et l'entassement infini de balconnets dans l'atrium leur signifiaient l'entrée dans un autre monde : celui du rêve à prix d'or, du plaisir coupable, du péché de gourmandise visuelle. Elévation en même temps que les jets d'eau scintillants, gonflement de l'estime de soi, sentiment d'appartenir à quelque chose de spécial. Deidara ne put s'empêcher de ressentir cette bulle d'éblouissement qui enfle dans le creux des poitrines privilégiées. Le dégoût lui crispa les doigts autour de sa coupelle et il mastiqua ses dattes plus vivement.
Dernière étape de cette longue visite guidée : la suite numéro 207. Deux chambres, un lounge fidèle aux couleurs de l'hôtel, deux salles de bain luxueuses, robinets à têtes en or vingt-quatre carats s'il vous plait. Les tissus orientaux renforçaient le sentiment onirique et chaud insufflé dès la porte d'entrée. Après avoir inspecté les lieux à la loupe, à la vaine recherche du moindre défaut, Deidara se jeta dans un fauteuil, les bras croisés sur les yeux, et s'accorda quelques minutes de répit. Sasori quant à lui continuait son tour de la suite, quelque peu fasciné par la décoration. Tout ce qui lui évoquait le désert, la chaleur, l'orient le satisfaisait.
« Pas mal, hein ? » articula-t-il.
Son compagnon émit un grognement du fond de son fauteuil. Un début de migraine lui compressait les tempes.
« Je ne voix pas pourquoi tu veux que je t 'accompagne, » marmonna-t-il. « C'est toi qu'ils veulent voir. »
« En effet, » répondit simplement Sasori, peu soucieux de le blesser dans son amour-propre.
Deidara retira avec irritation ses bras de devant ses yeux.
« Tu es un artiste accompli, Sasori, » lâcha-t-il. « Tu n'as pas besoin d'un pouilleux comme moi. »
Sans lui accorder un seul regard, le rouquin se retourna et partit inspecter les salles de bain. Sa voix ricocha contre le marbre, les mosaïques bigarrées et parvint jusqu'aux oreilles fumantes de Deidara.
« Voilà que tu es déraisonnable, comme d'habitude. » Il essuya du bout d'un doigt le rebord d'un placard à serviettes, qui s'avéra exempt de toute trace de poussière. « Aucun pouilleux n'est colonel dans l'armée de l'air à même pas trente ans. »
Deidara se tenait désormais devant l'immense baie vitrée du salon, derrière laquelle l'océan s'étalait indécemment, à perte de vue. Le scintillement bleuté des eaux lui rappelait les longues heures passées dans les airs, à bord de son Mitsubishi F-2, qu'il surnommait affectueusement « ocean bird ». Cette impression de liberté était peut-être l'unique raison qui l'empêchait d'accomplir son rêve : devenir un artiste. Et non plus un militaire artiste à ses heures perdues. On ne pouvait pas dire qu'il aimait l'armée. Il affectionnait surtout ces moments de quasi-solitude sur fond sonore de course motorisée et de déchirement de l'air marin. Il interprétait son incapacité à démissionner comme de la lâcheté, voire pire… une absence de passion réelle. Cette crise existentielle l'empoisonnait progressivement, emplissant son cerveau d'une fumée d'idées toxiques.
« Tu as plus de mérite que moi à leurs yeux, » lui dit Sasori, de retour dans le salon. « Ils seront honorés de t'avoir à leur table. »
Après un lourd silence, Deidara dézippa rageusement la poche avant de sa valise et en sortit une casquette blanche à rebord bleu marine, qu'il enfonça sur son crâne. Il retourna à son poste, devant la grande baie vitrée, réajusta sa casquette, abaissa la visière de façon à ce que celle-ci dissimulât en partie ses yeux vifs. Aucune parole ne franchit ses lèvres, mais Sasori comprit qu'il s'était rendu.
Ses cheveux roses virevoltaient devant ses yeux comme un feu follet, agités par la puissance des hélices. Chancelante du haut de ses petits talons, qui menaçaient de se coincer dans la ferraille alvéolée du marchepied, la jeune femme s'accrocha tant bien que mal au bras qui s'offrait à elle. Ses yeux rencontrèrent le regard sombre de son partenaire. Elle lui sourit.
« Merci, Gaara. »
Il lui rendit son sourire, avant de l'entraîner à l'intérieur de la tour. Sakura jeta un dernier coup d'œil à la vue, impressionnante depuis l'hélisurface de l'hôtel. Le soleil mourant déversait dans le ciel un dernier rayon suave. Le clic-clac maladroit de ses Ferragamo résonnèrent sur le marbre tandis qu'elle s'émerveillait devant l'éclat des lieux qui constitueraient le décor des deux semaines à venir. Son attention fut attirée par la silhouette aimable d'un homme d'âge mûr venu à leur rencontre. Ce dernier tendit une main avenante, brièvement empoignée par Gaara.
« Sir Gaara du désert, » initia-t-il avec un fort accent écossais. « Quel plaisir de vous accueillir ici. »
Il se tourna vers Sakura, qui venait de se mettre à la hauteur de son compagnon. La jeune femme déposa sa main délicate dans celle un peu rustre du conseiller, qui souriait à pleines dents.
« Madame Gaara, je suppose. »
« Vous supposez bien, » lança Gaara, désireux d'aller droit au fait.
Mademoiselle Haruno, aurait voulu corriger Sakura. Le trio se mit en branle, conduit par le conseiller improvisé en guide, qui montrait d'une main gantée les différentes galeries rouges et dorées de l'hôtel. Après un rapide tour dans un ascenseur des plus tape-à-l'œil, ils se dirigèrent vers le restaurant Al Mahara.
« Vos bagages ont déjà été pris en charge, » dit le conseiller, les invitant à entrer.
Un immense aquarium trônait au centre du restaurant, dont les tons rouges et or, ainsi que les motifs orientaux en pagaille, donnaient à la fois une impression de chaos maîtrisé et de chaleur. Du moins, c'est ainsi que Sakura le ressentait. Hagarde, elle s'assit sans même s'en apercevoir sur la chaise qu'on avait tirée pour elle, trop occupée à assimiler le moindre détail de la décoration. Elle ne parvenait pas à savoir si elle lui plaisait. Son regard tomba sur l'ombre d'un poisson biscornu qui slalomait sereinement entre les diverses plantes aquatiques.
« Sakura »
La voix de Gaara la tira hors de ses pensées. Elle se rendit alors compte qu'ils étaient enfin seuls. Elle fit glisser une mèche indisciplinée derrière son oreille et posa sa main sur celle de l'homme qui lui faisait face.
« Cet hôtel est impressionnant, » hasarda-t-elle, un sourire timide en coin.
Gaara lui adressa à son tour un sourire furtif.
« Un peu kitsch, non ? » dit-il.
« C'est ce que je me disais aussi. »
Ils rirent de conserve. Le menu et la carte des vins firent un bref passage entre les doigts effilés de Gaara, qui commanda pour eux deux. Peu de temps après, une soupe épicée, bordée de quelques coquillages, fumait paisiblement sous le nez de Sakura.
« Je pense que tu t'ennuieras moins ici, » annonça-t-il d'un ton neutre entre deux bouchées de tajine au pruneau. « Tu sais que je n'aurai pas beaucoup de temps pour toi. »
Sakura remua sa soupe du bout de sa cuillère en argent. Elle avait l'habitude, de toute façon. Elle soupira intérieurement en regardant l'homme qui partageait sa vie saucer son assiette avec beaucoup de concentration. Combien de temps cela faisait-il, déjà ? Cinq ans, qu'ils étaient ensemble ? Elle avait eu le temps de voir sa carrière prendre le dessus sur leur couple. Gaara était un homme de très grande importance, maintenant. Le poids de la bague lourdement sertie pesa soudain sur son annulaire.
« Tu peux monter dans la suite, » lui proposa Gaara, qui s'essuyait déjà la bouche avec un coin de serviette. « J'ai quelques affaires à régler ce soir. »
Il se leva.
« Le lèche-botte de tout à l'heure t'attend dans l'entrée. »
Il fit le tour de la table, planta un baiser sur les lèvres de sa fiancée, et sortit. La jeune femme effleura distraitement ses lèvres avant de se décider à terminer sa soupe, seule.
* ou uber, comme vous préférez :p
Premier chapitre : check ! Le reste n'a pas encore été écrit, mais cela ne saurait tarder.
