Dans le coeur des morts
Chapitre 1
Je suffoquais.
La douleur était terrible, je me sentais comme coupé en deux par un sabre.
J'avais l'impression que mon cri de souffrance n'était pas même assez désespéré et puissant pour exprimer cette horreur.
Je ne devais pas crier pourtant, je m'étais juré de ne pas crier pour n'alarmer personne. Mais au fond, dans cette tempête qui faisait rage, qui m'entendait?
Non, personne n'y faisait attention, parce que personne ne se soucie de moi. Et probablement que ce sentiment d'être ignoré m'avait empêché d'appréhender mon geste. Après avoir sauté du haut de la falaise, je m'était retrouvé empalé dans les rochers en contrebas. J'avais senti les pierres effilées comme des rasoirs s'enfoncer en quelques secondes dans ma peau et mes os.
Le goût du sang remontait dans ma bouche et je ne contenais aucun autre hurlement. Ma tête tournait tant j'avais mal. Je ne pouvais plus bouger alors que je voulais me tordre de souffrance. Tellement douloureux!
Tellement douloureux...
Tellement... Bête... De ma part.
...
"Son état est stable, mais je ne pense pas qu'il puisse bouger à nouveau." "Je ne sais pas s'il pourra parler non-plus." "À mon avis on ne peut rien. On va essayer mais..."
Des voix brouillonnes résonnaient autour de moi. Je ne les connaissais pas, et même, je doutais que ce soit des voix. Mon ouïe revenait lentement et je constatais que oui, c'en était. Je ne comprenais pas ce qu'ils disaient. juste du brouillon. J'avais envie d'ouvrir les yeux et me lever, mais seul la première action me fut possible Le temps que je me soit exécuté, les voix avaient disparues.
J'étais dans une salle blanche. Je fixais -visiblement- le plafond, tout aussi blanc. je voulais tourner la tête, mais je ne pouvais pas. Comme si j'avais un mur de chaque côté et qu'on les avaient serrés de façon à me bloquer. J'ai tenté alors de me lever, bouger mes jambes et mes bras, mais je ne pu. Je ne sais quoi m'empêchais tout mouvement, à part mes yeux qui restaient capable de se mouver et mon torse qui se levait et s'abaissait au rythme de mes respirations. On m'avait bloqué? Qu'est-ce qu'il y avait qui pouvait me maintenir ainsi?
Je me posais ces questions sans réponse,cherchant une explication. La porte près de moi s'ouvrit et une des voix que j'avais entendu précédemment revint.
"- Monsieur Vargas? Je tournais le regard vers la source du bruit, avec difficulté, et voyant mon effort, on s'approcha de moi. je vis alors qu'il s'agissait d'un médecin en blouse blanche, avec une étiquette indiquant "Ergothérapeute*" et là je flippais. Qu'est-ce qui m'arrivais, là?! Monsieur Vargas, je suis content que vous vous soyez réveillé. Nous devons parler de quelques choses... Il sembla lire sur mon visage que je me posai des questions puisqu'il ajouta de suite; J'espère que cela répondra à vos interrogations. Je ne dis mot, prêt à l'écouter. Après votre chute, enfin, si vous vous en souvenez, vous avez été rapidement trouvé par un de vos amis qui nous a alerté. Heureusement, nous avons su vous garder en vie, comme vous le voyez. Malheureusement, vous avez une fracture à la première vertèbre thoracique, vous avez une tétraplégie incomplète. Vous ne pouvez plus bouger mais vous ressentez encore quelques choses. Un tout petit peu. Je le regardai, surpris. Tétraplégique? Comme paralysé? Je sais, c'est peut-être un peu rapide pour vous mais nous sommes en train de chercher une solution. Ne vous en faites pas Vargas, nous ferons autant d'efforts que nous le pourrons." Il patienta un court instant avant de quitter la pièce sans la moindre salutation. Je pris un air désespéré et recommençai à fixer mon plafond en cherchant à nouveau des réponses. Tétraplégique hein? Quelle merde.
J'étais voué à une vie de marionnette à présent. Pourquoi n'ai-je pas disparu plutôt? Pourquoi me garder en vie dans cet état de légume? Je suis comme mort, c'est de l'inutilité.
Me garder en vie, quelle idée idiote.
Je lançais un regard à droite, à gauche, cherchant un quelconque divertissement. Je voyais mes perfusions du coin de l'œil, l'électrocardiographe qui affichait mon rythme cardiaque constant et un chaise roulante couverte de ceintures et de protections. Ils comptaient vraiment me flanquer là dedans?
Après quelques minutes qui passaient comme des années à mes yeux, la porte s'ouvrit à nouveau. Pas le médecin cette fois, non des agents de police. Ils m'encerclèrent et l'un d'eux me lança d'une voix qui se voulais rassurante;
"- Pouvons-nous vous poser quelques questions? Je n'en n'avais pas envie, et je savais -du moins je croyais savoir- la raison de leur présence. Je fis une moue résignée pour leur montrer que je ne pouvais -voulais plutôt- pas leur répondre. Bien... Vous pouvez sourire et froncer les sourcils? Un code hein? Je m'exécutais pour leur montrer que oui. Si vous souriez, cela veut dire oui. Si vous froncez les sourcils, c'est un non. D'accord? Je souris. Un sourire crispé et forcé. C'était de votre plein gré, ce qui est arrivé? Je gardais mon sourire. Autant être honnête. Et vous l'avez fait pour quelle raison? Vous aviez des problèmes financiers? Je fronçais les sourcils. Relationnels, un amour perdu? Je restais statique. Des ennuis avec la Cosa Nostra? toujours pas de changement. Vous étiez en difficulté familiale? Un déclic. Mon expression se décrispa et je laissai la question sans réponse concrète. Avec votre père? Votre frère? À la seconde proposition, je souris pour indiquer ma réponse positive avant de laisser une vague expression de colère me barrer la face. Il se tourna vers les autres gendarmes puis sortirent. Lorsqu'ils revinrent, ils tinrent un discours digne d'une série policière. Nous allons le trouver et lui faire passer un interrogatoire. Nous reviendrons le plus vite possible pour vous passer des nouvelles. En attendant, nous espérons que vous irez mieux d'ici la fin de l'affaire." Ils repartirent après avoir échangé trois mots avec le docteur.
Cette fois je fus vraiment seul. Plus personne ne vint de la journée qui a passé pour moi comme cent ans. J'ai dormi plusieurs fois, tenté de parler, mais seul des gémissements pathétiques sortaient de ma gorge. Je ne me plaignit pas du fait que personne ne se souciait de moi, enfermé dans cette chambre blanche sans aucune occupation. De toute manière, à part Gilbert, personne ne me tenait compagnie.
C'était l'habitude au fond.
oOo
Alors? Comment avez-vous trouvé ce premier chapitre?
Oui, le domaine médical est un peu compliqué, c'est pourquoi je vais vous expliquer quelques mots.
Ergothérapeute: C'est une sorte d'aide quotidienne aux personnes handicapées.
Tétraplégique: C'est une paralysie des quatre membres (bras et jambes) qui arrive quand la ou les vertèbres en dessus de la zone touchée sont brisée. Dans le cas de Romano, c'est la première vertèbre thoracique, la première (T1) des douze vertèbres au milieu du dos (Au niveau de la cage thoracique).
Cosa Nostra: La mafia sicilienne NDT.
Voilà pour le vocabulaire, et maintenant? Qu'avez vous donc pensé de ce début de fiction? C'est pas très cool ce qui arrive à Romano, tétraplégique et en plein conflit...
Bref, Ciao, Piccolini Ragazzi e Ragazze!
- Romano
