Disclaimer : Les personnages et les lieux appartiennent à JKR.

L'orgueil irréparable

« Non »

Tu ne l'a dis qu'une seule fois. Tu n'a dis qu'un seul mot.

Mais les milliers d'échos qui passaient dans tes yeux ont été assez durs pour me blesser à mort.

Ta voix était douce, ferme, laissant le dernier n s'écraser contre les murs de la pièce. Ton regard accablé, abattu, m'a dévisagé durant un long moment. Je crois que tu essayais de savoir … Tu a toujours su deviner lorsque je te mentais.

C'est vrai, j'aurais pu le faire pour James. Une idée parmi d'autres … un pari. Oui, c'est tout ce que j'ai trouvé pour justifier mon geste, pour calmer mon orgueil. Tandis que mon âme meurtrie se courbait sous la dureté de ton visage, de ton expression insondable, ma dignité hurlait à ma place les phrases qui m'achevaient.

Cette fois pourtant tu m'as pris au sérieux.

Cette fois tu m'a cru, Remus, tu m'a cru. Tu avais refoulé mon étreinte, repoussé mon amour, mais ton ego écrasé s'était incliné devant ma défense minable.

Tu m'a regardé pendant longtemps, et puis tu as tourné les talons, tu as dit « Tu ne changeras jamais », et tu m'a laissé, avec mes remords, mon incertitude, avec mon dégoût de moi, cette angoisse terrible.

Tu avais l'air épuisé lorsque tu as gravi les marches, tu t'accoudais à la rampe. Un coup de plus. J'aurais voulu te rattraper, te convaincre, implorer ton pardon. Tu marchais presque au ralenti, avec le recul il me semble que tu guettais le bruit de mes pas venant t'arracher à ta douleur.

Tu ne t'es pas retourné. Tu as continué a poser un pas devant l'autre, à t'éloigner de moi, et je pleurais. Sirius Black pleurait seul devant la cheminée de la salle commune un 25 Décembre a deux heures du matin. Mais mon poing écrasé contre ma gorge n'a pas laissé passer le moindre sanglot et tu as disparu dans notre dortoir, silhouette fantomatique, si loin de mon désespoir meurtrier.

Dans un sursaut de fierté, j'ai senti la panique m'envahir. Et si tu en parlais à James ? Et si tu lui faisais une remarque ? S'il comprenait, et si …

C'était déjà assez dur comme ça, trop pour que je puisse supporter les sarcasmes de mon meilleur ami. Même en rêve il n'aurait pas osé embrasser un garçon. Même pas pour rire. Il tenait bien trop à sa réputation. Nous tenions à notre réputation.

Nous ? Qu'avais-je fait ? Quel acte irréfléchi avais-je failli commettre ?

Je ne t'aimais pas Remus. Je ne t'aimais pas.

Je voulais juste sentir ton cœur battre tout contre moi. Tes mains glacées se poser sur mes hanches, tes cils battre trop vitre et s'emmêler aux miens. Tes lèvres …

Tes lèvres sur mes lèvres, ta langue qui jouait dans ma bouche, caressait mes dents et mon palais, ton souffle m'effleurer les joues, et le cou, et …

« Non. »

C'est tout ce que tu as dit. Tu es monté. Moi je suis resté là. Je n'ai pas bougé de la nuit.

On en a jamais reparlé. Le lendemain tu m'avais souris.

Tu m'avais dit « encore là ? »

Je m'étais levé, on était descendus ensemble.

Tu as tourné les talons, il se fait tard, demain tu pars en mission. Bonne nuit.

Un dernier regard, un geste vague de la main, tes cernes qui dissimulent tes yeux trop gris, trop sombres. Tu me laisses, comme ce jour là, tu me laisses seul dans la cuisine du square Grimmaud. On a changé. Tu ne marches plus aussi lentement, mais tes mouvements sont ancrés d'une torpeur pesante. Je t'entends dans le couloir, tu ouvres une porte.

Je me sers une tasse de café, il a un goût atroce.

Bonne nuit, Remus, ce jour là je t'aimais pour toujours.

FIN