Crédits : tous les personnages, à quelques exceptions près, appartiennent à Maki Murakami, nous nous contentons simplement de les emprunter.


PROLOGUE

« Dépêche-toi, Misako ! Si on arrive trop tard, on sera tout au fond et on ne verra rien ! »

La prénommée Misako, une adolescente petite et légèrement boulotte, vida d'un trait son gobelet de bubble tea, aspirant bruyamment les dernières perles de tapioca colorées qui en tapissaient le fond, puis jeta le verre vide dans un grand bac à poubelles et adressa un sourire au garçon qui la regardait d'un air insistant.

« Voilà, voilà, j'arrive. On a encore le temps, tu sais. » Elle se retourna et désigna un vaste chapiteau rouge, à une centaine de mètres de là. « En plus, j'aurais voulu voir les Bad Luck, ajouta-t-elle d'un ton boudeur.

- On les verra une autre fois, la pressa son camarade. Maintenant on y va, le Mokuto tei n'est pas tout près. »

Avec un coup d'œil de regrets à la grande structure de toile rouge vif, Misako s'éloigna de l'aire Oasis, dans laquelle se pressaient plusieurs centaines de personnes, de tous les âges et de toutes les nationalités. Chaque année, le Fuji Rock Festival s'imposait comme l'événement musical de la fin juillet et attirait des spectateurs, ainsi que des artistes, du monde entier. Pendant trois jours, la station de Naeba, au cœur des montagnes de la préfecture de Niigata, se transformait en gigantesque scène à ciel ouvert où se brassaient les cultures et les influences musicales les plus diverses, dans la plus grande convivialité.

Scène couverte d'une capacité de cinq mille places, le Red Marquee, immense salle de toile rouge, accueillait cette année-là plusieurs poulains de N-G Productions. Pour Tohma Seguchi, rater l'opportunité que représentait un tel festival aurait été une hérésie, aussi, depuis des années, y envoyait-il plusieurs de ses artistes en ce bel été de l'année 2011, les Bad Luck côtoyaient donc des pointures du calibre de Radiohead et Coldplay. À leurs côtés, et nullement intimidées par la portée de l'événement, se trouvaient les Bloody Jezabel, cinq lolitas gothiques aux compositions très rock, les Ghost, dont la chanteuse cultivait un savant trouble sur son identité sexuelle, et DJ Froïde, jeune prodige de la scène électro. C'était d'ailleurs lui qui, à l'instant où Misako déplorait de ne pas pouvoir assister au concert des Bad Luck, occupait la scène et faisait bouger le public nombreux venu l'écouter.

XXXXXXXXXX

« Ça va bientôt être à nous. J'ai hâte d'y être ! En plus, des gens du monde entier sont venus pour nous voir, ça va être énorme ! » Shuichi chassa un grain de poussière imaginaire du devant de son tee-shirt bleu nuit et adressa un sourire radieux à ses deux collègues. « J'en ai des fourmis dans les jambes !

- Il y a trois ans, j'étais ici comme spectateur, avec mon frère, relata Hiroshi avec un sourire rêveur. Et maintenant, c'est nous qu'on vient applaudir. On a beau avoir fait des tas de concerts l'année dernière, j'ai presque du mal à croire que nous allons entrer en scène dans quelques instants.

- Pour moi, ce n'est qu'un début, répondit Suguru qui, par habitude, tenait sur ses genoux un roman qu'il ne lisait pas. L'année prochaine, nous pouvons viser la White Scene ou la Green Scene, dont la capacité est nettement supérieure. Après tout, Bad Luck est encore loin d'avoir tout montré. »

Plus jeune des membres du groupe, Suguru en était, et de loin, le plus ambitieux. Le plus rigoureux aussi, qui savait qu'en musique, comme partout, le talent seul ne suffisait pas. Si Tohma Seguchi leur offrait l'opportunité de se produire dans un événement aussi réputé, il fallait la mettre à profit et en décupler les effets.

« Relax, Fujisaki ! s'exclama Shuichi en lui tapotant amicalement l'épaule. Carte diem, comme on dit.

- D'abord c'est carpe diem, et puis… »

Des cris affolés, provenant de l'extérieur de la loge, interrompirent tout net la discussion.

« Au feu ! Au feu ! »

Les trois garçons échangèrent un coup d'œil interrogateur, plus surpris qu'alarmés.

« Le feu ? » répéta Shuichi en se dirigeant vers la porte. Un piétinement confus se faisait à présent entendre, le bruit d'une course précipitée le long du couloir.

« Ça sent la fumée, non ? » releva Hiroshi, l'air un peu inquiet. Sans plus attendre, Shuichi ouvrit la porte de la loge. Le couloir était envahi par une fumée grise, relativement peu opaque mais âcre et irritante. Alors que deux personnes passaient devant lui en courant, l'éclairage vacilla puis s'éteignit, plongeant toute cette partie des coulisses dans l'obscurité.

« Hiro ! Fujisaki ! Il faut partir d'ici ! » cria Shuichi en bondissant dans le couloir, imité aussitôt par ses deux collègues. Comme ils se précipitaient au jugé vers la sortie, trébuchant dans le noir, ils butèrent – au sens propre – sur un groupe de filles qu'ils manquèrent renverser.

« Hééé ! Faites un peu attention ! protesta l'une d'elles.

- Aïe ! Désolé mais…

- Ah bon sang, mais dégage du milieu, toi ! »

Près de la sortie, la cohue était indescriptible, d'autant que la fumée était beaucoup plus dense. Deux hommes revêtus de gilets fluorescents canalisaient les gens vers l'extérieur tout en les exhortant au calme.

« Ne vous inquiétez pas, les pompiers sont là, dirigez-vous calmement vers la sortie… Par ici, ne vous bousculez pas s'il vous plaît… »

Quelques instants plus tard, les Bad Luck, ainsi que toutes les personnes présentes dans les coulisses, avaient rejoint l'air libre, clignant des paupières sous le vif soleil de ce milieu d'après-midi. Des badauds s'étaient attroupés aux abords des loges, attirés d'abord par l'agitation puis la vue des artistes qui venaient d'émerger, toussant et éternuant.

« Tu as vu ? C'est Shindo, là-bas !

- Et derrière lui, c'est Yukari, des Bloody Jezabel !

- Ils n'ont pas l'air blessés, heureusement. Qu'est-ce qui s'est passé, exactement ?

- Je ne sais pas, il y a peut-être le feu, des pompiers sont là… »

Déjà, des membres du service de sécurité avaient formé un cordon autour du périmètre où oeuvraient les pompiers, secondés par leurs collègues attachés à la surveillance du festival. Rapidement, tout le monde fut entraîné vers le PC de sécurité pour y être examiné. C'est là que K et Sakano retrouvèrent leurs poulains, le premier l'air satisfait et le second hystérique de frayeur.

« Vous êtes là ! explosa le producteur. Que tous les kamis soient loués, j'ai eu si peur quand on nous a annoncé qu'un incendie s'était déclaré dans les coulisses du Red Marquee ! J'ai aussitôt imaginé le pire. Est-ce que ça va ? Comment vous sentez-vous ? Vous n'êtes pas blessés, au moins ? balbutiait-il fébrilement, passant de l'un à l'autre des garçons.

- Tout va très bien, monsieur Sakano, le tranquillisa Suguru. Nous avons déjà discuté avec un médecin, vous n'avez pas à vous en faire. »

En effet, peu de temps après, tout le monde eut l'autorisation de quitter le poste de secours, sauf quelques personnes que la fumée avait légèrement intoxiqué. Un responsable de l'organisation annonça que les concerts prévus dans le Red Marquee n'étaient aucunement remis en cause par le début d'incendie, par ailleurs presque immédiatement maîtrisé. Les spectateurs qui assistaient à à la prestation de DJ Froïde ne s'étaient même rendus compte de rien.

« Vous êtes certains que vous vous sentez de passer sur scène ? insista Sakano, toujours prompt à imaginer le pire.

- Mais oui, tout va bien, assura Shuichi. On sent un peu la fumée mais rien de plus grave. On est des pros, oui on non ? On va assurer, vous allez voir !

- Parfait. Dans ce cas, c'est à vous », conclut K en désignant le grand chapiteau rouge qui se dressait non loin. Fidèle à leur réputation de jeune groupe qui en voulait, les Bad Luck délivrèrent une excellente prestation, ainsi que le lendemain pour leur deuxième et dernier jour de présence sur le festival.

XXXXXXXXXX

COUP DE CHAUD À NAEBA !

Un court-circuit, causé sans doute par un problème dans une armoire électrique, a provoqué jeudi un début d'incendie dans les coulisses du Red Marquee, l'une des scènes du Fuji Rock Festival qui se tient chaque année depuis quinze ans dans la station de Naeba, préfecture de Niigata. Plus de peur que de mal cependant, car le sinistre s'est déclaré dans l'aile abritant les loges, et tous les artistes, ainsi que le personnel technique et quelques employés attachés au service et à l'entretien, ont pu être évacué rapidement et sans difficultés.

L'intervention très rapide des pompiers et des équipes de secours a permis d'éviter le pire, et on ne compte que deux personnes intoxiquées par la fumée, ainsi qu'une autre légèrement blessée à la tête suite à une bousculade, mais ses jours ne sont pas en danger.

Saluons donc les organisateurs de ce festival qui accueille chaque année des milliers de personnes sans qu'aucun incident notable n'ait été à déplorer depuis sa création.

XXXXXXXXXX

CHAPITRE PREMIER

Un an plus tard…

Un air de bienheureuse stupidité peint sur le visage, Hiroshi embrassa une dernière fois son téléphone avant de raccrocher. Suguru leva discrètement les yeux au ciel. Décidément, le guitariste et son collègue chanteur lui apparaissaient comme deux étranges phénomènes qui ne donnaient certainement pas envie de tomber amoureux. Certes, on pouvait dire que Shindo était idiot de nature, mais quand on l'entendait converser avec Eiri Yuki, c'était encore pire. Même Nakano plaquait un sourire béat sur ses lèvres quand il avait sa petite amie Ayaka au téléphone. L'amour abêtissait-il ? Il haussa les épaules. Ce genre de frivolité ne l'intéressait pas, seule la musique comptait.

Il soupira.

K, leur manager, avait encore embarqué les Bad Luck dans une de ces aventures au postulat grotesque que lui seul semblait avoir le don de dénicher : Tropical Hotel Paradise.

Tropical Hotel Paradise, ou « THP » comme disaient déjà les médias, était une nouvelle émission de télé-réalité qui allait se dérouler sur Mimata-jima, une petite île dans la mer d'Amakusa, au sud de Kyûshû. Le principe était simple : pendant quatre semaines, en compagnie de neuf autres personnalités du monde du spectacle, il faudrait remplacer le personnel d'un petit hôtel. Chaque candidat se verrait attribuer une fonction particulière trois professionnels, ainsi que le public, seraient chargés de les noter à intervalle régulier. Au terme du jeu, le vainqueur remporterait une somme de dix millions de yens qui serait versée à une association caritative.

Suguru avait choisi de représenter une association qui aidait les enfants hospitalisés (prise en charge des parents pour qu'ils accompagnent leur enfant, moyens pour divertir les jeunes malades, facilité pour consulter des spécialistes parfois hors du pays) Shuichi, lui, était l'emblème d'une association pour la défense des animaux, quant à Hiroshi, il oeuvrait pour l'environnement, les événements dramatiques survenus à Fukushima quelques mois auparavant ayant ébranlé les mentalités.

Si l'idée de soutenir une association était séduisante, celle de jouer les GO l'était nettement moins les Bad Luck avaient d'abord tenté de protester, arguant que l'émission n'avait rien de musical, mais K avait fini par imposer son point de vue, salve de coups de feu dans le plafond à l'appui. Sponsorisée par une grande chaîne hôtelière implantée dans toute l'Asie, Tropical Hotel Paradise était pour lui un excellent moyen de se faire de la publicité à peu de frais. « Vous me remercierez quand les ventes de votre dernier album auront doublé », avait-il conclu avant de se lancer dans un topo détaillé du programme de l'émission.

C'est ainsi que les Bad Luck faisaient route vers le Grey Mountain Hotel afin de rencontrer les autres participants au jeu, même si leur identité avait déjà été dévoilée dans la presse écrite et sur Internet. Ils devaient aussi suivre une journée complète de formation avec des professionnels de l'hôtellerie et, le lendemain, passer un test en « conditions réelles » afin de mettre leurs compétences à l'épreuve.

Enfoncé dans le siège du minivan, Suguru arborait un air rien moins que renfrogné. Ni lui ni ses compagnons ne savaient encore de quelle manière ils allaient avoir à se compromettre, mais il s'attendait déjà aux pires pitreries. Quand donc K leur dénicherait-il une véritable activité musicale pour assurer leur promotion ?

Le Grey Mountain Hotel se trouvait à une cinquantaine de minutes de Tokyo, au nord de Yokohama. C'était une petite résidence coquette qui comprenait une piscine, un spa et un terrain de jeux.

Dans le parking, devant un minibus très semblable à celui des Bad Luck, cinq filles s'affairaient à décharger une impressionnante pile de bagages. Les garçons les reconnurent pour les Bloody Jezabel, produites elles aussi par N-G Productions. S'ils avaient eu l'occasion de régulièrement se croiser au gré de festivals et émissions télévisées, ils n'avaient jamais vraiment noué de relations.

« Supeeeer ! Des garçons ! s'écria une demoiselle aux cheveux teintés de bleu, que lesdits garçons identifièrent comme étant Yukari Honda, la bassiste du groupe. Ça tombe bien, ils vont porter nos bagages. Hein, beau gosse ? roucoula-t-elle avec une œillade à l'adresse d'Hiroshi.

- Vous avec pris tout ça pour un week-end ? s'étonna ce dernier dont le seul bagage, comme celui de ses deux collègues, était un sac à dos.

- Il faut bien parer à tout. Des fois qu'on rencontre l'homme de sa vie… ronronna la jeune fille.

- Oui, peut-être. Bonne chance, alors. »

Il se retourna vers le minivan mais K et Sakano avaient disparu. Les Bloody Jezabel, quant à elles, se remirent à leur déchargement sans leur accorder davantage attention. Quelques minutes plus tard, un homme d'une trentaine d'années, qui se présenta comme un membre de l'équipe de tournage, vient les accueillir.

« Bonjour et bienvenue, les salua-t-il avec un large sourire. Je suis Yazuru Oga, l'assistant de production de THP. Il ne manquait que vous. Suivez-moi, et n'oubliez pas vos bagages. »

Les trois garçons s'éclipsèrent aussitôt sans demander leur reste. Attitude fort peu galante, certes, mais la prochaine fois les filles réfléchiraient avant de déménager l'intégralité de leur garde-robe.

Après qu'ils aient déposé leurs affaires, Yazuru Oga les guida jusqu'à une salle d'information, au rez-de-chaussée de l'hôtel. Là, ils reconnurent DJ Froide, un DJ très à la mode dans les boîtes de nuit de la capitale, et Chisei Miyamoto, le leader androgyne de Ghost. Le premier était grand et sec, le teint pâle mais avenant, le menton orné d'un petit bouc. Quant à Chisei Miyamoto, des rumeurs prétendaient que c'était bien une fille, détails sordides dévoilés – ou inventés – par le personnel de certaines salles de concert ou de pseudo partenaires sexuels. En attendant, la personne qui se tenait devant eux avait une allure indéniablement masculine. Elle n'était ni particulièrement grande ni costaude, mais tous les garçons n'étaient pas nécessairement bodybuildés non plus.

Une dizaine d'autres personnes se trouvaient dans la pièce les professionnels qui allaient les préparer ainsi que des membres de l'émission.

« Bien, tout le monde est là. Tout d'abord merci au Grey Mountain Hotel et à son personnel de nous recevoir et de donner de leur temps pour initier nos dix candidats à leur future profession. Bien sûr, ils n'acquerront pas votre expérience en un jour, mais au moins ils auront quelques bases. » Un petit rire courut parmi l'assemblée, puis tout le monde se présenta brièvement.

« Parfait. Il est temps maintenant de procéder à l'attribution des tâches que chacun de vous allez avoir à effectuer tout au long du jeu. Je tiens à préciser que la répartition va se faire de manière tout à fait aléatoire par le biais d'un tirage au sort. »

Une dame en yukata fit son entrée dans la pièce, portant deux petites boîtes en carton qu'elle déposa devant l'assistant de production. Si personne ne fit de commentaire, en revanche chacun se crispa intérieurement. Avec un sourire paterne, Yazuru Oga plongea la main dans une des boîtes et en sortit un rectangle de papier plié en deux.

« Entretien intérieur et extérieur », annonça-t-il, et la dame en yukata le consigna soigneusement sur une feuille. Oga piocha successivement deux papiers dans la deuxième boîte, expliquant que pour ce travail, deux personnes étaient requises.

« Miki Watanabe et… Mao Takeda. »

Après un court instant de surprise, les deux jeunes filles, respectivement batteuse et guitariste des Bloody Jezabel, poussèrent un petit piaulement de joie au moins, elles resteraient ensemble. Yazuru Oga se remit à son tirage.

« Intendance et accueil… Fumie Yamaguchi. Service de chambre… Chisei Miyamoto. Fitness… Suguru Fujisaki. »

Ce dernier faillit s'étouffer. S'il y avait une activité qu'il exécrait, c'était bien le sport. En outre, que diable allait-il être contraint de faire ? Des abdos ? Des pompes ? Rien qu'à l'imaginer, il en avait des sueurs froides. Il ouvrit la bouche pour protester puis se ravisa il était plus mature que ça. Nana Ito, la chanteuse et leader des Bloody Jezabel, laissa échapper un gloussement moqueur et déclara que « ça promettait ». Quelle sale peste !

« Animations pour les enfants… Nana Ito. »

La jeune fille cessa aussitôt de rire et son visage se fit orageux. Au tour de Suguru de sourire à bien y réfléchir, il y avait deux activités qu'il exécrait, et la pire des deux venait d'être attribuée à cette idiote. Son envie de se plaindre s'évanouit aussitôt, d'autant que Nana ne l'entendait pas de cette oreille.

« Non mais attendez ! C'est pas possible ! gronda-t-elle. Je supporte pas les mioches. Ça crie, ça pleure, ça pue. Je vais jamais y arriver ! Vous n'avez qu'à tirer autre chose.

- Désolée, mademoiselle Ito, on ne peut pas changer, intervint une jeune femme.

- Je vais les tuer, sérieux. Je peux pas piffrer les marmots !

- Mademoiselle Ito, un peu de tenue s'il vous plaît, insista l'assistante d'un ton plus ferme.

- Putain, j'ai pas de bol ! Je parie que c'est truqué, votre tirage pourri », maugréa-t-elle en se renfonçant dans son siège. Yazuru Oga la considéra un court instant sans rien dire puis enchaîna :

« On poursuit, si ça ne vous gêne pas. Aromathérapie et soin du corps… Hiroshi Nakano. Ah, petit veinard ! Espérons que les demoiselles soient au rendez-vous.

- Je suis fiancé, expliqua le guitariste avec un sourire bienheureux. Peu m'importe.

- Il ne faudrait pas que ça crée des tensions dans ton couple, beau gosse, gloussa Yukari. Ce serait dommage. »

Hiroshi perdit son sourire. Effectivement, il allait falloir faire attention, même si Ayaka n'était pas du genre jaloux.

De son côté, Nana ruminait toujours sa mauvaise fortune. Sa vie allait être un enfer, elle exigeait de parler à son manager. Où était-il passé, d'ailleurs, dans un moment pareil ?

« Lingerie… DJ Froïde. Et enfin, au service et en cuisine : Yukari Honda et Shuichi Shindo », conclut Oga. Claviériste et guitariste de Bad Luck pâlirent de concert.

« Mais… c'est impossible ! On va tous mourir empoisonnés ! s'exclama Suguru, alarmé.

- Shu en cuisine ? Vous êtes sûr ? renchérit Hiroshi, l'air soudain préoccupé. Peut-être que Ito pourrait échanger avec lui, ce serait bien mieux pour tout le monde.

- Arrête, Hiro, je vais assurer, intervint le concerné d'un ton confiant.

- Pas de changement, répéta fermement Yazuru Oga. Maintenant, mesdemoiselles et messieurs les candidats, à vos postes ! On se retrouve ce soir pour un bilan ! »

Chacun des participants au jeu rejoignit son tuteur et tous quittèrent la pièce, l'air plus ou moins anxieux – ou renfrogné – selon la fonction qui leur avait été dévolue. Cependant, les formateurs ne tardèrent pas à mettre leurs apprentis à l'aise, et à midi, tout le monde déjeuna dans une bonne humeur retrouvée, tous ayant des anecdotes amusantes à raconter, à l'exception de Nana, complètement braquée.

L'après-midi s'écoula rapidement et, au soir venu, les discussions furent encore plus animées. Si Nana semblait ne pas avoir surmonté sa phobie des enfants, Suguru était légèrement plus serein que le matin. Pour l'instant, il préférait ne pas penser au lendemain, où tous allaient devoir mettre leurs nouvelles compétences en pratique. Comme le disait un certain adage, à chaque jour suffisait sa peine.

À suivre…


Bubble tea : Le bubble tea, aussi appelé thé aux bulles, thé aux perles ou boba tea, est une boisson d'origine taïwanaise. C'est un mélange de thé froid ou chaud, de lait, parfumé de diverses saveurs, et de boules de tapioca, qui donnent son nom au thé aux perles. Celles-ci s'aspirent généralement au moyen d'une paille de diamètre hors normes.