L'inventaire

Ton nom

Personnage de base : Drago Malefoy

Résumé : Elle est partie, comme souvent après vos disputes. Elle te revient toujours. Du moins, elle est toujours revenue. Alors pourquoi doutes-tu soudain ?

A/N : «l'inventaire» vient d'une chanson du film les Chansons d'amour (film splendidement dérangeant s'il en est). «à l'heure de l'inventaire/ de quoi avons-nous l'air ?». Alors voilà, mes petites idées nées de ma frustration de l'épilogue ont commencé à oser prendre forme. Tout est conforme à la saga entière de JKR. Mais j'ai pleinement profité du blanc de 19 ans et du manque d'informations pour imaginer le destin de nos personnages préférés ou inconnus, peut-être haïs... Voilà, je ne prends pas plus de votre temps.

Bonne lecture !


Ton nom

Dans le silence parfait de cette nuit trop froide, tu viens de t'éveiller. Tu ne sais plus pourquoi, un rêve, peut-être... Il ne te reste que cette sensation d'être un peu ballonné, parce que tu as dormi sur le ventre. Probablement. Tu n'as pas envie de bouger, même si tu ne te rendormiras pas tout de suite. Tu restes-là, immobile, les yeux perdus dans les ténèbres. Le lit est trop grand pour toi seul, le manoir est silencieux, vide à cette heure de la nuit. Tu restes allongé sur le dos, et tu penses à elle. Elle est absente depuis deux semaines, sa présence te manque. C'était suite à une énième dispute, te remémores-tu, ces disputes qui surviennent brusquement, sans que tu ne les comprennes. Héléna te répond brusquement, avec sécheresse, et tu ne sais pas pourquoi, et tu continues, le ton monte... Elle si calme d'habitude, te fait face avec la familiarité de vos douze ans de vie commune, et tu ne comprends pas lequel de tes mots l'incite à continuer. Ce jour-là, tu disais simplement que tu espérait que Scorp' aille à Serpentard, et tu quêtais son approbation.

"Toutes les maisons se valent, affirmait-elle, les poings sur les hanches. Scorp' ira là où il voudra !"

Borné, tu as argumenté, elle ne connaissait pas Poudlard, elle ne savait pas ce qu'elle disait, les élèves étaient répartis selon leurs caractères, pas leurs choix. Elle t'a répondu avec une irritation croissante, tu ne sais plus ce que vous vous êtes lancés au visage, jusqu'aux cris, jusqu'à ce qu'elle s'exclame qu'il valait mieux qu'elle parte. Elle n'a pas pris de valises. Elle n'en prend jamais.

Depuis, Héléna ne t'a pas envoyé de nouvelles. Oh, tu sais très bien où elle se trouve, et ce qu'elle y fait, comme toujours après de telles disputes. Il n'y a guère que les premières fois où tu lui as envoyé des lettres rageuses, puis inquiètes, puis penaudes, puis jalouses lui demandant de revenir chez vous. C'était avant que tu ne comprennes qu'elle ira toujours dans sa résidence familiale, en Grèce, sa villa de pierre blanche, perdue sur une île des Cyclades dont tu ne retiens jamais le nom. Elle doit probablement être en train de jouer avec les mioches de ses cousins et cousines qui n'ont pas l'âge d'aller à l'école Magique d'Athène. Elle doit être taquine, folâtre, à genoux sur la terre sèche, sans un regard pour les épineux qui abiment sa robe et la poussière qui se dépose sur sa peau, sans un regard sur toute les règles de bienséance qu'elle suit, instinctivement, dès qu'elle repart de là-bas.

Tu as envie de la voir. De hâter le jour où elle reviendra à votre porte, sans un mot d'excuse, un léger sourire aux lèvres, en annonçant :

"C'est moi."

Elle est toujours revenue de toutes vos disputes. Tu t'y es habitué, à ces cris soudains, ces brusques départs, qui contrastent tellement avec son calme habituel. Presque. Tu as beau ne pas vouloir être touché par son absence, tu dors moins bien quand elle est là-bas après une dispute. Tu es plus irritable. Plus intraitable. Personne ne comprend pourquoi. C'est mieux ainsi. Un Malefoy ne doit jamais laisser voir à la fois son trouble et les causes de son trouble.

Pourtant, dans ce silence nocturne, dans la solitude de ton lit, tu as peur soudain qu'elle ne revienne pas. C'est idiot. Elle est toujours revenue jusqu'à présent. Elle reviendra encore. Pour toi. Pour Scorp'.

Mais peut-être maintenant ne reviendra-t-elle que pour Sorp' ? Comme tes parents l'ont fait pour toi, avant. Les Malefoy se doivent d'être une famille unie. D'en avoir l'image, du moins. C'est pour cela que ta mère ravalait ses doutes quand ton père parlait du temps où le Seigneur des Ténèbres serait au pouvoir. C'est pourquoi ton père ravalait son mépris envers l'attitude surprotectrice de ta mère. Oh, tu sais bien que tes parents se sont aimés. Quand ils se sont mariés. Ce n'était qu'une passade, bientôt ta mère tombait enceinte, bientôt elle fut délaissée, bientôt elle délaissa. Ce fut sans grands discours, dans cette entente implicite avec ton père pour ne pas faire d'éclats, pour afficher encore à la face du monde qu'ils formaient une famille unie avec toi. Est-ce cela qui vous attend aussi ? Un couple n'existant que par habitude, pour un fils chéri ? Tu pensais aimer Héléna quand tu t'es marié avec elle. Tu le crois toujours.

Elle est toujours revenue. Elle t'aimait toujours. Tu n'en n'avais jamais douté.

Et maintenant ?, songes-tu alors que tu te retournes dans le grand lit. Maintenant que tu doutes, maintenant que tu n'es plus si certain que ça de la revoir. Maintenant que tu songes que c'est peut-être votre dernière dispute ensemble... Que vas-tu faire ? C'est à toi de voir, à elle de choisir, à vous deux... Que veux-tu ?

Déjà, cette question en appelle une autre, sortie de ta mémoire. 'Que veux-tu, comme famille ?'. Tu te souviens, c'était un peu avant votre mariage. Vous preniez le thé, ici au manoir, tes parents vous avaient laissés seuls. Héléna avait posé cette question brusquement, maladroitement. Tu n'avais pas compris, elle avait expliqué :

"Tu rêves de quoi ? Une famille nombreuse, tout le tintouin... ?"

Tu avais à peine considéré la question.

"Un fils unique, pour hériter du nom Malefoy."

Elle avait bu une gorgée de son thé.

"Évidement."

C'était plus tard que tu t'étais souvenu de son émerveillement devant les mioches, que tu avais songé qu'elle, elle aurait bien voulu en avoir plus d'un. Tu n'avais jamais trouvé le moment pour l'interroger, et tu as ensuite rangé cette interrogation dans un coin de ta mémoire en la voyant reprendre sa potion de contraception dès la naissance de Scorp'.

En est-elle heureuse ? Tu te tourne dans ton lit et t'efforces d'oublier cette question de ton mieux. Si elle y tenait, à cette famille nombreuse, elle t'en parlerait, non ?

Quand le matin arrive, tu t'es rendormi durant quelques heures. Ton elfe de maison vient te réveiller à l'heure que tu lui as indiqué la veille, un plateau repas dans les mains. Tu manges rapidement et te prépares, tu n'as aucune raison de rester dans le manoir s'il n'y a personne. Tu as un rendez-vous avec un client dans la matinée, tu ferais mieux de t'avancer dans tes dossiers. Tu transplanes à ton bureau, vérifie que rien n'a changé dans ton emploi du temps et, sur une impulsion subite, annonce à ton secrétaire que tu prendras ton après-midi. Il le note diligemment après avoir vérifié que cela ne pose pas de problèmes majeurs.

La matinée traine en longueur, ton rendez-vous est ennuyeux à mourir. Ton client répète même chose que les fois précédentes, tu ne peux pas avancer plus pour le moment. Quand il part enfin, tu retiens un soupir de soulagement, regardes l'heure et te replonges dans tes dossiers. Tu ne relèves la tête que pour contempler les aiguilles de l'horloge murale avancer vers l'heure où tu pourras partir.

Enfin, tu peux quitter ton bureau. Tu attrapes de quoi te sustenter, prends le temps de tout mâcher, puis te diriges vers l'aire de transplanage international, la voix de ton père résonnant dans ta tête, affirmant que ce que tu veux faire est honteux, indigne. Elle réussit presque à te faire rentrer chez toi, mais déjà l'aire apparaît et tu la fais taire. Pour une fois.

Tu réapparais dans les roches ocres grecques. La chaleur de l'été qui se traîne t'étouffe, le sol est sec, dur, aride. La mer et le ciel se fondent en une ligne brumeuse, le soleil t'éblouit, t'étouffe, et tu te hâtes sur le chemin qui mène à la résidence, où l'air sera frais et respirable. Tu plains un instant les moldus pour ne pas avoir accès à ce confort, et tu les oublies bien vite alors que la villa de pierre blanche apparaît, encastrée dans la falaise contre la mer. L'avant est une large esplanade plane qui s'avance au-dessus des vagues. Des murs magiques évitent aux enfants de chuter d'une vingtaine mètres, dans les récifs. Il y a plus loin un renfoncement où poussent des herbes folles au printemps qui sèchent dès que l'été vient, et tu y perçois des rires d'enfants. Tu sais qu'elle est là, avec eux, derrière la pierre ocre. Tu ne l'appelles pas, tu le pourrais mais tu n'en as pas envie, alors tu t'avances sans te faire connaître. Héléna est bien là. Elle te tourne le dos, elle ne t'a pas vu et continue de faire des chatouilles à une nièce –tu crois, ou peut-être une petite cousine ?– qui se roule par terre, sa robe soulevant une fine couche de poussière qui se répand partout. Elle rit, ses cheveux auburns sont retenus dans un chignon lâche qu'elle fait tenir grâce à sa baguette. Elle rit, dans une robe large et usée dont la couleur indéfinissable vire à l'ocre de la poussière. Elle rit, sans bijoux précieux scintillants sur sa peau bronzée, sans aucun sort de beauté. Plus loin, deux autres mioches s'amusent avec des statuettes animées de Merlin qui s'envoient des sorts.

Héléna rayonne. Elle brille, comme ce jour où tu l'as croisée pour la première fois, dans les rues pittoresques du centre ville d'Athènes qu'elle faisait visiter à un enfant –de la famille, probablement. Tu avais d'abord remarqué son rire clair, sa robe blanche, sa taille fine, puis son visage ouvert, apaisant. Ses yeux lumineux Et puis tu l'avais croisée encore dans les couloirs de l'Université Magique de Droit, avais découvert qu'elle partageait nombre de tes cours mais qu'elle était de ces filles discrètes qui n'osaient pas encore être femme. Tu l'avais abordée, peut-être pour une difficulté sur le programme, sur un mot grec que tu ne savais plus traduire –une idiotie de sort de langue défectueux. Elle t'avait répondu avec calme, t'avait laissé parler sans rien dire. Elle souriait moins ce jour-là. Tu l'avais retrouvée ensuite dans une soirée de célébrités du monde magique grec où tu devais accompagner ta mère –ton père était encore à Azkaban. Elle semblait s'ennuyer dans ce monde de paillettes, et toi, tu le haïssais à ce moment-là pour toutes les responsabilités qu'il te faisait peser sur tes épaules. Tu devais réhabiliter les Malefoy. Tout un programme pour quelqu'un de dix-huit ans... Tu l'avais rejointe, et vous aviez parlé. Enfin, tu avais surtout parlé et elle te relançait de temps à autres. Elle t'écoutait attentivement, pourtant, mais ne disait rien. Tu t'étais laissé prendre à son silence, à ses yeux attentifs, à son sourire timide... Et surtout à cette étincelle dans ses yeux qui brillait parfois, l'illuminant.

En vérité, n'es-tu pas jaloux de cette lumière ? N'as-tu pas voulu la ravir, la lui voler, découvrir son mystère, pour savoir comment rayonner comme elle ? Elle qui s'est laissée prendre à tes yeux d'aciers, tes paroles trop soyeuses... Elle ne t'a jamais dit pourquoi, ni comment d'ailleurs. Pourquoi t'a-t-elle suivit dans ton monde, en Angleterre où tu t'es attelé à regagner l'estime de tes estimés compatriotes, à force de paroles mielleuses, de sourires hypocrites et de résolution de pacotille ? Tu n'as jamais demandé. Jamais.

Tu reviens au présent quand Héléna se tourne vers toi, te regarde. La nièce gigote entre ses doigts, oubliée. Elle se lève, son sourire remplacé par une expression de surprise, s'approche de toi, s'arrête à quelques pas. Ses mains s'agitent nerveusement.

"Pourquoi venir, Drago ?"

Elle n'est pas assez proche, tu as envie d'aller vers elle, tu ne bouges pas. Tu ne sais pas quoi répondre. Les mioches vous regardent, ils ne perdront pas un mot de votre conversation. Elle semble comprendre, soupire :

"Rentrons."

Tu la regardes alors qu'elle époussette sa robe de quelques mouvements inutiles et qu'elle prend la direction de sa villa. Tu tentes de retrouver dans ses yeux la lumière qu'elle avait encore il y a un instant. Elle te jette des regards en coin curieux, tente de deviner ce qui t'amène ici. Tu n'aimes guère passer du temps dans cette demeure de pierre blanche, si loin de tes racines. Vous traversez en silence les couloirs étroits aux murs épais, puis atteignez un petit salon, où elle ferme la porte derrière toi. Elle attend, elle n'est pas de celles qui abreuvent de questions. Que vas-tu dire ? Que peux-tu dire ? Les mots tourbillonnent dans ta tête, tous impossibles, ridicules, insignifiants. Seule la question amère monte à tes lèvres, en franchit la barrière.

"Es-tu heureuse ?"

Elle ouvre de grand yeux, et te fixe sans comprendre, prise de court. Tu attends, regrettant déjà tes mots, ne voulant les reprendre.

"Que veux-tu que je dise ?, te répond-elle enfin. Là, non, je ne suis pas heureuse. Tu le sais. Nous nous sommes disputés, j'ai pris la porte, Scorp' n'est pas là..."

Elle soupire. Tu ne la presses pas, pas encore. Elle se taira si tu ouvres la bouche, si tu brises son élan. Elle renfermera ses mots, ne les laissera pas sortir. Ne les laissera plus sortir. Et, tu en as honte, mais tu veux connaître sa réponse. Elle n'ose pas te regarder.

"Quand tu m'as demandé ma main, j'étais certaine que je serais heureuse avec toi. Même si je ne m'illusionnais pas, tu le sais. D'ailleurs, si tu voulais une adoratrice, tu aurais demandé à Pansy."

Elle a un geste de dérision, et tu te hérisses un instant.

"Je savais que tu étais hautain, égoïste, orgueilleux. Que tu n'étais pas un modèle de courage ou de loyauté ou d'acceptation. Je ne caressais pas le rêve de te faire changer, tu sais. Je ne suis pas idiote à ce point."

Elle fait une pause.

"Mais, vois-tu, j'ignorais que tu étais un Malefoy."

Elle grimace, et tu devines qu'elle s'attend à ce que tu ris, que tu balayes sa phrase d'un revers de main, et que vous repreniez vos habitudes, elle son silence, toi ta vie. Mais tu te contentes de hausser un sourcil étonné quand elle se retourne vers toi.

"À l'époque, tu n'étais pas un Malefoy. Tu venais de sortir de la guerre... Tu venais de voir ton père faillir, puis son procès. Tu te séparais de lui, de son aura... Tu étais à Athènes, loin de tes repères. Tu ne pouvais qu'être Drago."

Elle laisse planer un silence, et tu attends qu'il passe, qu'elle continue d'expliquer :

"Tu n'es pas vraiment pire en étant un Malefoy... Mais tu te conformes à tes vieilles traditions. Tu rentres dans ce monde qu'ils ont créé, ce monde bien ordonné qui t'aveugle !"

Elle se tait un moment et tu n'oses rien dire devant la colère qu'elle affiche. Tu ne comprends pas de quoi elle parle, tu ne peux pas. Tu as toujours été Drago Malefoy, avant et après Héléna, tu n'as jamais cessé de l'être, même en Grèce, la première année, quand tu faisais ces maudites études de droit et que c'était le même jargon qui revenait durant le procès de ton père, et qui l'amena à ces dix ans à Azkaban. Tu avais toujours le même projet de revenir en Angleterre, de reconquérir ton nom dans le monde qui se profilait, débarrassé de la peur du Seigneur des Ténèbres, qui célébrait le balafré qui voulait vivre sa vie loin de son succès. Toujours. Tu as toujours été Drago Malefoy.

Et elle t'a suivit dans ton monde sans rien dire. Elle aurait pu, tu le sais, elle est assez honnête pour te dire qu'elle n'appréciait pas cette vie, qu'elle souhaitait s'éloigner. Les premières années, surtout. Mais déjà, Héléna continue :

"Être là-bas, avec toi, dans ton manoir, me conformer aux règles de ton nom... Je m'en fiche, tu sais. Je l'ai fait depuis douze ans, je le ferai encore, jusqu'à ma mort. Je n'aurais pas de regret. Jamais. C'est la voie que j'ai voulu suivre, avec toi. J'ai voulu rentrer dans ton monde en sachant ce qui m'attendait... ce qui nous attendais. Et cela n'a aucune importance pour moi. Vraiment. Je suis satisfaite de cette vie, je te jure."

Elle soupire.

"Mais il y a Scorp', maintenant. Je veux tout lui donner, tu sais, toutes ses chances d'être heureux. Sans qu'il soit obligatoirement un Malefoy. Je ne veux pas lui offrir seulement la vie que nous vivons.

-Pourquoi ?"

Elle sourit tristement.

"Es-tu heureux, Drago ?

-Quel est le rapport ?!

-Es-tu heureux ?"

Tu veux hurler 'bien sûr que oui !' mais pas un son ne sort de ta bouche. Tu hésites, elle te regarde, le même regard un peu triste. Es-tu heureux ? Tu as réussi. Avocat renommé, tu as causé quelques scandales en protégeant des Sang... des Nés-Moldus. Et en gagnant leur procès. Tu as ta place au milieu des noms célèbres d'inventeurs fous, star de Quidditch, législateurs géniaux qui peuplent les soirées mondaines. On t'admire, on te craint. Comme ton père, peut-être, mais sans la répulsion de tous les biens-pensants. Tu as un fils qui promet d'être ton portrait craché. Et il n'y a pas d'Harry pour refuser de lui serrer la main. Tu as une femme, illustre éminence grise du Mangemagot...

Es-tu heureux ?

Mais, quand tu croises son regard, juste avant de répondre, elle te coupe et continue :

"Penses-tu que tes parents aient été heureux ?

-Ce n'est pas la même chose !

-Tu penses ?"

Elle soupire, passe une main fatiguée sur ses yeux.

"Je veux que Scorp' ait le choix. C'est tout... Qu'il soit libre de choisir, une fois qu'il commencera à mûrir... Même si cela lui fera peur, peut-être... Même s'il me reprochera de vouloir le faire douter."

Elle ferme les yeux, lasse, tu crois la voir chanceler. Quand tu ébauches un geste vers elle, pour la soutenir peut-être, elle a déjà reprit des couleurs.

"Laisse-moi, demande-t-elle. Je reviendrai, bientôt. Tu sais que je reviendrai toujours à toi..."

Elle tente un sourire, mais déjà ta main s'est égarée sur sa joue. Elle ouvre de grands yeux, tu ne sais plus comment sa main est arrivée là. Pourquoi êtes-vous si surpris d'un geste si banal ? Le silence qui vous entoure s'épaissit de secondes en secondes, tu ne bouges pas, Héléna non plus. Tu ne comprends pas ses doutes, non, où elle veut en venir. Mais pour une fois, ce n'est pas grave.

Si tu pars maintenant, comme elle le veut, tu sens confusément qu'elle ne reviendra pas, pas entière... Et tu ne veux pas qu'elle parte. Pas elle qui t'a vu dans ton orgueil blessé, te battant pour qu'on ne crache pas sur ton nom. Pas elle qui n'a pas peur de rester silencieuse quand elle n'a rien à dire. Pas elle qui n'a jamais eu peur de s'opposer à toi, de t'affirmer que tu te trompes. Pas elle que tu n'arrives toujours pas cerné, même après douze ans de vies communes, pas elle qui te quitte pour mieux te retrouver... Qui te revient toujours, fidèle. Sans raison.

Un souffle sort de ses lèvres, elle s'appuie un peu contre ta main, ses paupières clignotent, ses épaules se détendent.

"Veux-tu un autre enfant ?"

La question, risible, ridicule s'échappe de tes lèvres et brise le silence. Elle se relève, surprise, te regarde. Et elle rejette son visage en arrière pour éclater de rire. Tu ne bouges pas, affreusement vexé.

"Peut-être bien, fait-elle avec douceur."


A/N : Voilà, le premier one-shot est lancé. ^^ Pour les anecdotes : Héléna signifie... la Grècque. Je sais que JKR propose plus des noms tirés du latin pour ses personnages, mais bon, je trouvais que ça renforçait son image d'étrangère... L'île que je dépeins est l'île d'Amorgos, petite île perdue au fond des Cyclade dont il me reste quelques souvenirs flous. Pour ceux qui on regardé le Grand Bleu, il paraît qu'elle y apparaît à un moment, une énorme falaise avec un monastère orthodoxe, blanc éclatant perdu au milieu de la pierre ^^

Voilà. Le prochain chapitre qui ne sera pas publié avant la semaine prochaine (comme les réponses aux reviews d'ailleurs, désolée, je vais vous faire attendre ^^") se concentrera soit sur Blaise, soit sur Hermione et Ron ^^