Chapitre 1 : Je déteste le matin

Bip… Bip…

Gné ?

Bipbipbip… bipbipbip…

Mwouarf…

Bipbipbipbipbipbipbipbipbipbip… BAM !

Un de plus au paradis des réveils. Il l'a cherché aussi. Connerie d'engin.
J'ai pas envie de me lever. Plutôt de me pendre. La perspective de passer 2 semaines avec mes cousins me provoque souvent cette sensation.

- Lys, lève-toi, ou ton frère va manger tout le nutella !

Merde.
Je me lève en quatrième vitesse, me viande dans le couloir, me rétame dans les escaliers, me ramasse lamentablement sur le carrelage de la cuisine.
Jamais je ne laisserai mon pot de nutella bien aimé aux mains de cette chose.

- T'arrives trop tard. Je viens de finir le pot, m'annonce mon cher frère, avec un sourire aussi large qu'une banane.

Connard.
Je suis tentée de le suspendre par son tee-shirt trop grand à la lampe de la cuisine. Mais comme je suis une gentille fille, généreuse, calme, pleine de bon sens, faux-cul et j'en passe, je laisse de côté mes ardeurs meurtrières et me venge sur le pot de confiture qui ne m'a rien fait, mais bon, que voulez-vous, la vie est injuste.

- Maëllys, tu as fait ta valise j'espère ? me demande ma mère d'un ton entendu.

Gloups. Il me reste juste à mettre mes affaires dedans. Ca ne prendra pas bien longtemps.

- Tu l'as bien faite ? insiste t-elle.
- Hmmm… moui.
- Elle ment.

Merci Maël. Je t'aime, mon seul et unique frère bien aimé. Accepte donc cette tarte dans ta gueule de faux jeton.
Ah oui, il s'appelle Maël. Maël/Maëllys pour des frères et sœurs, nos parents sont pleins de créativité, vous ne trouvez pas ?

- Enfin ! Maëllys ! Tu savais que nous partions aujourd'hui !
- Oui… mais...
- Il serait temps que tu deviennes un peu plus responsable… que tu cesses avec ton attitude ridicule…

Et gna gna gna. Ce discours, mon père me le sert au moins 6 fois par jour.

- … gna gna... caprices… c'est comme pour tes percings…

Ah, je savais qu'il allait en parler. Comme toujours. Il y a 2 ans, j'ai demandé l'autorisation à mes parents de me faire faire un percings à l'oreille. Bien entendu, ils ont refusé. Je me suis donc fait percer en cachette. Ma mère a sauté au plafond en le voyant. Mon père m'a hurlé dessus.
6 mois plus tard, par pur esprit de contradiction, je me faisais de nouveau percer… cette fois-ci au nombril.
Un an plus tard, c'était mes cheveux que je tentais en bleu.

Bref, depuis, je passe pour une petite rebelle aux yeux de tout le monde, au grand damne de mes parents, qui me rabache tous les jours à quel point je suis une honte. Heureusement qu'ils ne savent pas encore pour le petit A d'anarchie que je me suis tatoué sur le ventre la semaine dernière.

- … et bien évidemment, tu n'écoutes pas ! J'en ai assez de ton attitude dédaigneuse ! Vas faire ta valise ! Tout de suite !

Ouf, c'est terminé. Je suis tellement heureuse de me soustraire à cette avalanche de reproche que j'en oublie ma tartine. Pas grave, j'aime pas la confiture. Et puis, autant ne rien manger, je ne dégueulerais pas à la figure de mes cousins en les voyant.

Poum poum poum… que vais-je donc pouvoir mettre dans cette valise ?
Des vêtements, déjà. On est en hiver, et la ville d'Hambourg ne me semble pas plus chaude que mon trou paumé. Même si ça ferait plaisir à pas mal de monde, je ne me baladerais pas à poil. Evidemment, je prends une dizaine de ceintures pour étrangler mes chers cousins.
Next : de quoi me distraire. Hmmmm… allez, je vais emporter quelques pavés de science-fiction. Je doute qu'on me laissera les lire tranquillement là-bas… et puis des cds. My chemical romance, Queen, Placebo, Killerpilze, Rammstein, un ou deux cds de musique celtique… pour me détendre. J'hésite : est-ce que je prends Tokio Hotel ou pas ? Si mes cousins voient que je l'ai, ils se foutront bien de ma gueule. Rien à faire, bien enfoui sous les piles de sous-vêtements, ils ne le trouveront pas. Mon ordi portable et quelques dvds pour ma survie. Et puis mes affaires de cours. Il faut que je bosse pendant les vacances, si je ne veux pas avoir 6 de moyenne à la fin du trimestre.

Mmmm…j'ai tout.

Je m'apprête à descendre mon énorme valise dans l'entrée quand je me rends compte que j'oublie un minuscule détail : ma guitare !! Hors de question que je ne la prenne pas ! Je ne survivrais pas deux semaines sans ! D'accord, je l'ai acheté dans une brocante, les cordes sont en permanence mal accordées, et mon médiator est fait maison. Mais j'y tiens quand même. C'est dessus que j'ai joué mes premiers accords. C'est sentimental quoi… Bien sûr, mon rêve serait d'avoir une Gibson Curton, le must du must. Mais avec ma moyenne pitoyable et mon « attitude désinvolte » (comme dirait mon père), je peux m'asseoir dessus. Je galère tous les mois pour avoir de l'argent de poche…

Elle est là, sur mon bureau, rangée dans son étui miteux, avec à côté une liste aussi longue qu'un ticket de caisse de chez Cora.

Oh mein Gott.

J'avais aussi oublié la liste de demandes d'autographes.