Bonjour/soir !
Je me décide à débuter une ptite fic (3 chapitres je pense) en cette toute fin 2015 ! D'autant plus que c'est l'anniversaire de la reine du HPDM j'ai nommé la souuublimeuuh ma chériiiie Artoung :D !
Donc ceci est un hpdm (mais ne vous y trompez pas ! je resterais fidèle au rwhp jusqu'à mon dernier souffle è_é). J'ai remarqué que ma toung aimait les Draco manipulateur et sombre et les Harry torturé. Donc voici pleins de manipulation, de sombre et de torture pour ton anniversaire ma toung !
Bon y'aura pitêtre un peu d'amour vers la fin mais je suis pas encore totalement décidée:p
Bref, j'espère que cela vous plaira (surtout au bébé chat de toung) et je vous souhaite une excellente année 2016 pleins de roux, d'amour, de yeux verts et de santé !
Note 1 : Tout appartient à JKR o/
Note 2 : Désolée d'avance si le début de cette histoire vous choque un peu mais c'est assez sombre on va dire (la faute à toung) (et à Fanny aussi).
Ceci se passe trois ans après la guerre de Poudlard. J'ai juste changé un tout petit minuscule détail par rapport à l'histoire originale : Fred n'est pas mort (\o/) c'est Ginny qui meurt à sa place, tuée par Lucius Malfoy (*\o/*).
Personne n'aurait pu reconnaître le célèbre Sauveur du Monde Sorcier alors qu'il titubait prudemment dans l'allée des embrumes. Il avait des vêtements moldus sombres et trop grands et une capuche qui dissimulait ces boucles brunes et une bonne moitié de visage.
Et même si d'aventure quelqu'un aurait eu un doute sur son identité, il aurait vite changé d'avis car Harry Potter n'était sûrement pas le genre de personne à venir en pleine nuit dans une rue comme celle-ci.
Harry Potter était un homme bien. Il menait une vie déjà bien remplie par son travail d'auror et toutes les œuvres de charité auxquelles il participait.
De plus, l'année dernière il avait ouvert avec son ami Hermione Granger la Fondation Remus Lupin, un orphelinat qui recueillait les trop nombreux enfants sorciers abandonnés par leur famille après une morsure de loup-garou. La bâtisse accueillait déjà 12 enfants venant du pays entier et faisait encore les gros titres des journaux qui ne tarissaient pas d'éloges sur la gentillesse et la bonté d'âme de L'Élu.
Il ne se passait pas un jour sans qu'on ne voit son visage dans un journal. Il était adoré, épié, analysé à chacune de ses sorties.
Quarante deux livres racontaient déjà son histoire de tous les points de vue possibles et avec plus ou moins de vérités.
Alors même si quelques fois il arrivait un peu trop alcoolisé à une réception du ministère, qu'il était incapable de se réveiller le matin pour aller au travail ou que ces cernes se creusaient et sa silhouette s'affinait de mois en mois, personne ne lui en tenait rigueur.
Harry Potter était l'Élu, le Héros de tous. Il était le Bien en personne donc il ne pouvait absolument pas être cet homme ivre qui se tenait aux murs de l'allée crasseuse pour avancer.
L'ancien gryffondor chantonnait doucement une vieille chanson moldu alors qu'il essayait de trouver la sortie de la rue pour rejoindre de Chemin de Traverse puis le Londres moldu. Il n'était pas en état de transplaner.
En fait il n'était pas en état de quoique ce soit. Il sortait juste de chez Théodore Nott, un ancien serpentard qui n'avait pas été heureux de le revoir il y'a quelques mois juste après une perquisition à son domicile. En tant qu'auror, Harry savait parfaitement que le brun mielleux à l'air calculateur était devenu dès la fin de la guerre l'un des revendeurs de drogues sorcières les plus importants de la capitale.
Et Celui-qui-a-vaincu était revenu, sans sa cape d'auror, lui proposer un marché. Il se chargeait de le couvrir en échange d'un accès illimité à son stock.
Des preuves du dossier contre Nott avaient mystérieusement disparues. On n'avait jamais su qui était derrière cela.
Le dealeur était méfiant à présent. Et rusé. Les chances de réunir un nouveau dossier solide étaient beaucoup trop minces.
Il était devenu intouchable.
Et Harry était devenu un client particulier.
Quelques fois l'ancien gryffondor imaginait la tête que ferait son chef ou même son coéquipier et ami de toujours Ron Weasley s'ils apprenaient l'existence de ce pacte secret.
Il avait la sensation depuis plusieurs mois que deux personnalités se partageaient son corps. Il y avait le Harry gentil qui prenait soin de ses amis et qui amenait son filleul à la fête foraine. Ce Harry qui prenait son travail à cœur et trouvait quand même du temps pour venir jouer avec les enfants de sa fondation.
Puis il y avait cet autre qui apparaissait par moment. Cet autre qui hurlait de douleur après quelque chose de perdu mais sans savoir exactement ce que c'était. Ce Harry là se battait tous les jours contre les souvenirs et les regrets. Des fois, de plus en plus souvent, il abandonnait sous le poids de la culpabilité et du chagrin et lui susurrait de mettre un terme à cette comédie. Que c'était trop dur. Que ça n'allait jamais s'arranger. Il vivrait pour toujours avec ces images dans la tête et ce vide dans son âme.
Cet Harry l'entraînait vers des routes sombres et dangereuse. Il lui avait servi son premier verre de Whisky le soir de l'anniversaire de la mort de Sirius il y a deux ans.
Il lui avait fait prendre sa première potion illégale le jour où il avait vu Mrs Weasley éclater en sanglots en trouvant une photo de Ginny en guise de marque-page dans un livre de Gilderoy Lockart.
C'est cet Harry qui l'obligea à regarder de l'autre côté de la ruelle quand deux femmes peu vêtues passèrent rapidement, entraînant dans leur sillage des effluves de parfums capiteux et d'alcool bon marché.
Il les suivit, avide. Il savait à quel point c'était bon de s'oublier dans un corps de femme chaud et docile le temps de quelques heures. Et leurs corps devenaient très dociles et très chauds au fur et à mesure que les gallions apparaissaient dans leurs mains.
Il aimait toutes les formes d'oublis qu'il pouvait trouver.
Le dégoût de lui même et la honte étaient un faible prix à payer contre ce miracle éphémère.
Elles le remarquèrent et ralentirent pour lui laisser le temps de les rattraper. Les clients étaient peu nombreux cette nuit.
Mais il ne les atteint jamais. Il venait de croiser le regard d'une autre personne dans une impasse perpendiculaire.
C'était un cul de sac, étroit, sale et désert à l'exception d'un homme. Petit, jeune, blond et des yeux bleus cernés de maquillage. Sa robe de sorcier largement ouverte sur son torse nu ne cachait rien de sa peau pâle et striée de poussières.
Il avait lui aussi suivit avec intérêt le passage des deux jeunes prostitués avant de repérer Harry. Il y avait quelque chose de trouble dans son regard. Quelque chose de chaud et de brisé.
Il recula lentement dans l'impasse étroite sans quitter le brun du regard et disparut dans l'ombre.
C'était une invitation.
Harry oublia les deux femmes qui partaient déjà en maudissant les clients indécis.
Il s'avança dans l'allée à son tour. Des frissons de peur et d'excitation piquaient chaque centimètre carré de son corps.
Au fond de lui, quelque chose hurlait de partir loin d'ici. Mais son autre fit taire ce hurlement.
Il était tellement défoncé de toute façon, il ne se souvenait presque pas de la suite. C'était sa première fois avec un autre homme.
L'autre lui avait taillé une pipe formidable avant de lui demander une avance et de se protéger. Puis Harry l'avait baisé à même le sol sale et glacé. Brutalement, mécaniquement. Il n'avais pas crié ni lâché le moindre mot, se contentant de subir sans sourciller les assauts d'un énième client un peu trop violent. Il avait pris, un peu étonné mais toujours sans rien dire, la bourse pleine que Harry lui avait tendu en se rhabillant.
Du sang maculait ses cuisses.
Puis Harry était parti presque en courant la conscience même pas soulagée de lui avoir donné au moins dix fois plus d'argent que ce qu'il lui avait demandé.
Cette nuit il avait conscience d'être arrivé au bout de quelque chose. Il marchait vite dans les rues moldues londoniennes.
Il ne se reconnaissait plus. Le Harry sombre et cassé devenait de plus en plus important et maintenant le brun avait la sensation que c'était lui qui le contrôlait définitivement.
Il arrivait à vivre avec cela quand c'était à lui-même qu'il faisait du mal. Mais là il venait de faire mal à quelqu'un qui n'avait rien à voir. Un gars paumé et désespéré. Il lui avait fait mal en échange d'argent. Harry se voyait en train de devenir une ordure.
Et c'était quelque chose qu'il ne supportait plus.
Draco Malfoy s'extirpa brutalement du sommeil. Comme si une main malveillante avait cruellement tiré la chaude couverture qui l'abritait depuis à peine deux heures.
Il passa sa main sur son visage fatigué et moite de sueur. A l'intérieur de sa poitrine nue et humide, il pouvait sentir son cœur battre frénétiquement, encore aux prises avec le cauchemars qui le tourmentait depuis des mois.
Non. Pas un cauchemars, se corrigea-t-il, un souvenir.
Derrière ses paupières closes, le visage émacié et livide de terreur de son père flotta un moment. Il retint un juron et tâtonna vers sa table de nuit où une bouteille de whisky pur-feu à moitié vide l'attendait patiemment, presque tendrement. Comme une mère affectueuse qui le prendrait dans ses bras pour soulager sa peine.
C'était une nuit particulièrement claire.
L'éclat de la lune qui transperçait la vitre impeccable de sa chambre fit jouer des ombres sur les volutes du liquide ambré. Il fit tourner la bouteille dans sa main, admirant le jeu du liquide qui tournoyait, l'appelait.
Je te ferais tout oublier Draco...
Mais le blond n'avait pas besoin du discours séducteur pour savoir que l'alcool l'abrutirait suffisamment pour lui éviter de penser à son passé.
Il avait déjà beaucoup pratiqué cette amnésie artificielle.
La tristesse qui comprimait son sternum ne fit pas long feu. Dès la deuxième gorgée il sentit la brûlure de la rage incendier son ventre alors même que le liquide incandescent embrasait sa gorge.
Potter.
Il n'avait que ce mot à la bouche, que ce nom dans la tête.
Ce salop, bâtard, cette immondice !
Tout était de sa faute.
Il voulut se rendormir, la bouteille posée sur l'oreiller voisin, comme une maîtresse repue après une bonne baise. Il fallait qu'il dorme. Sa dette de sommeil était déjà immense et demain une longue journée l'attendait, il s'employait depuis longtemps à remettre les comptes des différentes entreprises de sa famille à flots. Amadouer les bonnes personnes, effrayer les autres et s'assurer d'avoir toujours deux coups d'avance. Juste comme son père le lui avait appris.
Le plafond de son immense chambre était baigné des rayons lunaires, ses yeux s'égarèrent sur la blancheur parfaite. Il se força à fermer les paupières, essayant de maîtriser la rage qui lui tordait les tripes.
Sa main trouva la surface lisse et glacée de la bouteille qu'il caressa distraitement.
Il sut qu'il ne parviendrait pas à trouver le sommeil.
Comme pour confirmer ses pensées, un petit pop retentit dans la chambre sur sa gauche et il croisa les yeux globuleux d'un elfe de maison qui se hâta de les baisser avec un grognement plaintif.
-Poppy est désolé Maître,... mais un intrus est entré dans le manoir, Maître... Les alarmes se sont déclenchées. Poppy, doit prévenir les aurors ?
Draco eut un sourire cruel.
Les aurors ?
Ces sales connards seraient capables de l'embarquer lui et de féliciter le cambrioleur ou tueur qui venait de violer sa propriété.
Il attrapa sa baguette et se redressa complètement.
-Est-il seul ?
L'elfe hocha frénétiquement sa tête ronde.
-Où se trouve-t-il ?
-En bas Maître... Dans le grand hall, Maître.
Draco lui ordonna de partir d'un mouvement de la tête et il sortit le plus silencieusement possible de sa chambre.
Il se félicita de ne pas avoir trop bu ce soir-là et d'avoir les idées claires. Il n'avait jamais tué mais il avait vu tant de meurtres durant l'installation forcée des mangemorts et de Voldemort chez lui qu'il savait exactement comment faire.
Faire disparaître un cadavre s'ajoutait aussi à la longue liste des choses que son père lui avait apprises. Entre des enseignements sur l'économie sorcière et les bonnes manières à avoir en présence d'une personne avec beaucoup d'influence.
Il emprunta un passage secret du couloir qui lui permit d'atterrir directement dans le salon principal attenant le grand hall de son manoir.
Un intrus chez lui ne pouvait avoir qu'une signification. Il ne pensait pas à un cambrioleur à vrai dire.
Sa famille avait été plus qu'impliquée avec Voldemort durant la guerre et, même si son père était mort d'un baiser du détraqueur et sa mère suicidée peu après, nombreux étaient les sorciers qui voulaient le voir emprunter la même voie.
C'était la première fois qu'une infraction de la sorte arrivait depuis la fin de la guerre, il y a presque trois ans, mais le blond allait faire en sorte que ce soit la dernière.
La rage faisait trembler sa main qui tenait la baguette.
La porte du grand salon était encore entrouverte. C'était ici qu'il / avant d'aller dormir et il n'avait heureusement pas pensé à fermer la porte. Il glissa un coup d'œil entre les pans de bois, à moitié masqué par leur épaisseur.
Le grand hall était plongé dans l'obscurité mais Draco pu distinguer grâce aux larges fenêtres qui parsemaient le mur opposé une mince silhouette à quelques mètres devant lui.
La silhouette n'était pas très grande.
Ce devait être un adolescent. Il était de dos mais la largeur relative de ses épaules contredisait l'hypothèse d'une femme. Ses cheveux étaient cachés par la capuche d'un sweat sombre.
Des vêtements moldus.
Il n'arrivait pas à voir si l'autre avait une baguette aussi. Il avançait, inconscient du regard attentif du propriétaire des lieux, vers l'escalier qui menait à l'étage. A la chambre de Draco.
L'ancien serpentard aurait pu le tuer ainsi. Proprement, sournoisement, d'un sort entre les deux omoplates.
Mais il savait qu'il n'en aurait pas été apaisé.
La rage qui le dévorait de l'intérieur exigeait un exutoire.
Il fallait qu'il se méfie néanmoins. Aussi vulnérable que paraissait l'intrus devant lui, il avait réussi à passer tous les sorts de sécurité posés sur son manoir et, à priori, tout seul.
Il devait être puissant. Ou connaître le manoir. Les deux hypothèses étaient inquiétantes.
Il se força à respirer calmement, écouta quelques secondes les battements effrénés de son propre cœur et poussa d'un coup sec les portes entrouvertes tout en lançant un sort de désarmement.
L'étranger avait de toute évidence une baguette puisque celle-ci atterrit directement dans la main de Draco qui conserva sa propre baguette pointée sur lui.
Il retint un sourire victorieux. Son sort avait été net, contrôlé au millimètre près. Mais ce n'était pas de lui de prendre tant de risques. Finalement, il était peut-être plus imbibé d'alcool qu'il ne le pensait.
Sa voix fut néanmoins ferme et glacial quand il s'adressa à l'ombre anonyme qui venait de se tourner vers lui, le visage toujours plongé dans les ténèbres de sa capuche et du couloir.
-A qui ai-je l'honneur ?
Il s'attendait aux pleurs de rage d'un orphelin qui l'accusait lui et sa famille d'avoir pris ses parents ou aux hurlements d'un malade qui le traiterait de mangemort et lui conseillerait de pourrir en enfer rejoindre sa chère famille.
Mais l'inconnu fit simplement un pas vers la torche la plus proche sur sa droite et retira sa capuche.
Et le souffle de Draco se bloqua dans sa poitrine quand il reconnut les mèches sombres et les lunettes rondes.
Le nom qu'il avait tant de fois prononcé en rêve, franchit ses lèvres, s'enroula autour de sa langue comme une gorgée d'un excellent vin. Le blond savoura ce nom, le fit durer. Étirant les syllabe de sa voix traînante et enrouée par l'alcool et les cigarettes.
-Potter...
Un sort vert crépita au bout de sa baguette, parant le hall d'une lueur irréelle. Cependant, les iris tout aussi verts de l'intrus en face de lui n'exprimaient pas une once d'inquiétude. Les yeux étaient étrangement brillants et fixes comme ceux d'un fou ou d'un enfant fiévreux.
Potter avait les yeux cerclés de mauves et le visage émacié. La lueur verdâtre dans le hall donnait à son visage un teint livide et maladif.
La tête de Draco était emplie d'un bourdonnement insupportable, rythmé par les battements rapides de ses pulsations cardiaques. Il évalua rapidement ses chances de tuer l'ancien gryffondor, là, maintenant et de réussir à s'en tirer. Elles lui parurent beaucoup trop minces.
-Bonsoir Malefoy...
La voix du brun était étrangement sourde, comme s'il retenait à grand peine un sanglot. Elle déclencha chez l'ancien mangemort un brusque frisson de haine et d'excitation qui partit de sa nuque dénudée pour venir rejoindre l'extrémité de sa colonne vertébrale masquée par son pantalon de pyjama.
Il n'avait pas entendu cette voix depuis très longtemps.
Une éternité.
Il se surprit presque en pensant qu'elle lui avait en quelque sorte manqué. Comme une horrible chanson démodée qu'on surprend sur une radio et qui nous ramène des décennies plus tôt. La voix de Potter était sa rengaine ringarde et horripilante.
Le frisson sinua vicieusement le long de ses nerfs périphériques et atteignit sa main toujours crispée sur sa baguette. Elle trembla un peu, mais pas assez pour dévier de sa cible : la poitrine de l'ennemi.
Potter paru enfin se rendre compte du sort de Mort qui étincelait dangereusement au bout de la baguette pointée sur lui. Il n'eut aucun geste de recul, aucun sursaut d'angoisse.
-Tu vas me tuer ? Demanda-t-il finalement. Et le blond crut percevoir un soupir d'attente à la fin de la phrase. Comme une demande silencieuse.
Son instinct de conservation et la folie de sa haine menait une lutte à mort dans l'esprit embrumé d'alcool de Draco. Et le brun semblait avoir conscience de cela et attendait patiemment de savoir qui remporterait le combat.
-Qui sait que tu es là ? Interrogea finalement le blond avec un calme glacial qu'il était loin de ressentir.
-Personne.
L'instinct de prudence de Draco finit par gagner. L'occasion était trop belle pour être vraie : Potter était chez lui, désarmé, vulnérable, attendant sagement d'être abattu comme du gibier et sans personne à l'extérieur pour savoir qu'il se trouvait chez l'homme qui avait toutes les raisons de le voir mort.
Chaque fibres de son corps lui criaient que tout ceci était un piège. Il baissa sagement sa baguette et désigna le salon derrière lui d'un mouvement brusque de la tête.
-Entre.
La présence de son ennemi juré chez lui amenait beaucoup de questions. Il se demanda d'ailleurs si l'intrus était réellement Potter. Néanmoins, quelque chose au fond de lui l'avait reconnu et il était absolument certain c'était bien Harry Potter. Même avec du polynectar personne n'était capable de mimer aussi parfaitement l'ancien gryffondor. C'était sa démarche, sa façon de se tenir, sa façon de respirer et de prononcer son prénom. Même l'éclat dans ses yeux alors qu'ils s'affrontaient du regard. Il y avait cette lueur qu'il ne réservait qu'à lui. De la haine à l'état brut.
Son père disait souvent qu'il fallait bien connaître ses ennemis et Draco estima qu'il devait être fier de lui car il connaissait Potter par cœur. Encore mieux que n'importe lequel de ses amis, encore mieux que lui même.
Le brun baissa la tête et pénétra lentement dans la pièce, rompant leur contact visuel alors qu'il passait à côté de lui.
Draco expira doucement quand l'homme fut dans le salon, inconscient d'avoir retenu sa respiration quand il l'avait vu approcher, en quête d'un geste brusque signifiant qu'il voulait reprendre sa baguette.
Il appela son elfe de maison et lui ordonna de faire le tour du Manoir et de ses environs en vue d'un autre intrus.
Puis il entra à son tour dans le salon et en verrouilla les lourdes portes de bois précieux.
D'un coup de baguette il alluma un feu dans la cheminée, éclairant ainsi la pièce d'une chaude lumière singulièrement opposée quant à l'ambiance avec son nouvel invité.
Potter se tenait bien droit, à quelques mètres devant lui, les mains dans les poches de son sweat trop grand comme s'il n'avait pas été en danger de mort il y'a quelques secondes et comme si ce n'était pas encore actuellement le cas.
Ses yeux suivaient le ballet dansant des flammes dans l'âtre.
Draco le contourna soigneusement sans le lâcher du regard. Leurs deux baguettes avaient beau être dans la poche de son pantalon, il se méfiait toujours.
Soit prudent, le prévient une voix dans sa tête qui avait les inflexions implacables de celle de son père.
Il attrapa une bouteille de vin français sur le bar dans un coin de la pièce et s'installa sur un des fauteuils en cuir sombre en face de la cheminée. En face de son ennemi mortel.
Ce n'était pas une bonne idée de boire encore maintenant mais il ne savait pas si il était vraiment capable de tuer l'ancien gryffondor si la situation l'exigeait. Il ne l'avait jamais fait après tout. L'alcool pourrait l'aider à trouver le courage nécessaire.
-Je t'en prie Potter, conte-moi la délicieuse histoire qui t'a amené jusque chez moi en pleine nuit.
Les longues gorgées d'alcool lui parurent à peine tièdes comparées à la haine qui incendiait ses entrailles.
Le brun s'installa dans le fauteuil en face de lui. Ses gestes étaient lents, il paraissait être dans un état second, comme ralenti.
Draco plissa les yeux, quelque chose clochait.
-Cela faisait longtemps. Combien de temps depuis notre dernière rencontre tu t'en souviens ?
-Deux ans... murmura Potter avec la même intonation atone.
-Deux ans, trois mois et quatorze jours, corrigea le blond en reprenant une plus longue gorgée d'alcool. Quand tu as témoigné au procès de mon père pour t'assurer qu'il serait condamné au baiser du détraqueur.
Il avait réussi à ne pas faire trembler sa voix à la fin de sa phrase mais il n'avait pu empêcher sa main de venir serrer convulsivement la baguette contre son flanc à l'affût du moindre geste ou mot qui lui donnerait une raison de l'utiliser.
Potter blêmit comme s'il venait de le frapper. Ses yeux se détournement vivement vers les flammes alors qu'il retenait à grand peine un gémissement étouffé. Il avait l'air aux bords des larmes.
Durant la bataille de Poudlard, des dizaines de témoins avaient vu Lucius Malefoy drapé dans sa cape de mangemort.
Et cinq d'entre eux l'avaient vu tuer froidement Ginny Weasley alors que sa mère la protégeait à grand peine d'une Bellatrix Lestrange enragée.
Les avocats que Lucius avait engagé pour son procès étaient doués, ils connaissaient exactement les ficelles et comment les actionner pour gagner. D'autant plus que trois de ces témoins étaient des membres de la famille de la victime ce qui avait peu de poids quand on connaissait la haine ancestrale que se vouaient les Weasley et les Malefoy. Le quatrième témoin n'était autre que Draco qui avait assuré que c'était Bellatrix qui avait lancé le sortilège de mort avant de succomber à son tour d'un sortilège de la mère folle de chagrin.
Le procès commençait assez bien contre toutes attentes. Lucius espérait une peine mineure à Azkaban pour avoir aidé financièrement le Mage Noir. Et il commençait déjà à attendrir le Magenmagot en racontant comme le Lord avait menacé sa famille en échange de son soutien quand le cinquième témoin avait fait son apparition.
Et le témoignage de Harry Potter avait sonné comme une sentence. C'était Lucius qui avait abattu froidement l'adolescente. C'était aussi lui qui avait tué des d'aurors durant la nuit, caché derrière son masque. C'était un assassin et il méritait le baiser du détraqueur.
Les délibérations n'avait duré que quelques dizaines de secondes.
Ils avaient tous appuyé la décision de l'Élu. Le Grand Sauveur.
Lucius Malfoy était mort dans l'heure. Blême, effrayé et rempli de haine.
Et Draco s'était juré de se venger.
Sa mère s'était suicidée peu de temps après, ne supportant ni les insultes des gens sur son passage, ni le silence du manoir seulement rompu par les éclats de rage de son fils qui ne se calmait qu'après l'avoir laissée exploser sur quelques meubles ou elfes de maison.
Et voilà que Potter se servait lui-même sur un plateau d'argent, perdu, fragile, la tristesse suintant par chaque pore de sa peau.
Quelque chose lui échappait.
-Pourquoi es-tu là, Potter ?
Le sorcier brun soupira. Il frotta son visage de ses mains tremblantes et retira ses lunettes qu'il posa sur la table basse entre eux. Se rendant encore plus vulnérable.
-J'ai bu. Expliqua-t-il finalement.
Draco reprit une gorgée de vin, un sourire cruel aux lèvres.
-Moi aussi, mais je ne suis toujours pas entré chez toi par effraction pour l'instant.
-J'ai aussi pris des trucs,...des potions... Les bleues qu'on vend dans l'Allée des Embrumes.
Donc Potter était saoul et défoncé aux drogues.
Draco sortit tout doucement sa baguette de sa poche quand dans un coin du salon, Poppy venait de réapparaître pour lui signifier d'un signe de tête qu'il n'y avait pas d'autre intrus autour du manoir.
L'elfe disparut presque aussitôt quand il vit le regard sauvage de son maître. Il savait que ce n'était pas bon signe.
-J'ai couché avec un gars il y a vingt minutes... il se prostituait...je l'ai baisé dans une ruelle, je ne sais même pas comment il s'appelle.
L'étonnement réussit à stopper le mouvement de la main de l'ancien mangemort qui tenait à présent la baguette. Il croisa le regard trop vert et brillant de Potter.
Il lui donnait l'impression d'être écorché vif. Comme si une plaie invisible mais sanguinolente mutilait son corps. Il avait l'air de lutter pour parler.
-Ça fait des mois que j'essaye, des mois que je fais toutes ces choses sales et... et je... je n'arrive toujours pas à me pardonner. Je n'arrive plus à dormir, manger ou même me lever de mon lit parfois.
Il avait la voix pleine de pleurs contenus.
-Je sais que c'est ma faute. Ginny. Remus. Sirius. C'est à cause de moi si ils sont morts.
Draco faillit rajouter son père à la liste tremblante du brun mais il garda prudemment le silence. Attendant de savoir quel rôle il avait à jouer là dedans.
-Elle était amoureuse de moi. C'est à cause de moi qu'elle s'est retrouvée dans cette bataille, elle voulait me protéger. Ils disent que ce n'est pas de ma faute. Ils essayent de me sauver. Mais je sais... et ils savent...
L'ancien serpentard n'eut pas besoin de demander pour savoir que Potter parlait de la famille Weasley. Il plissa les yeux, analysant calmement le discours vacillant et déchirant de l'homme qui avait gâché sa vie.
La culpabilité.
C'était donc ça.
Potter le Saint était torturé depuis le début par la culpabilité.
C'est vrai que l'ancien serpentard avait souvent joué avec cette faiblesse durant leurs années à Poudlard.
Et maintenant, ne trouvant pas de moyen pour atténuer le tourment des cadavres qu'il traînait derrière lui, le brun s'était lancé dans une course à l'auto-destruction qui devait lui paraître trop lente.
-Tu es trop lâche ou tu n'as pas envie de faire du mal à la famille de miséreux donc tu ne veux pas te suicider. Lâcha-t-il abruptement.
Potter paru se recroqueviller sur lui-même.
-Molly ne le supporterait pas. Je ne peux pas lui faire ça.
Draco se cala un peu plus confortablement dans son fauteuil. Il repoussa le souvenir de sa mère livide, allongée sur le sol avec une mare de sang se formant autour de son poignet mutilé et appela un paquet de cigarettes d'un mouvement négligent de la main. Puis il rangea à nouveau sa baguette dans sa poche alors qu'il allumait le tube de papier coincé entre ses lèvres.
-Tu voudrais que je fasse le sale boulot à ta place. Termina-t-il en expirant une longue bouffée évanescente.
-Tu es le seul que je connaisse qui...
Il ne termina pas sa phrase la laissant en suspens entre eux comme les volutes qui émanaient de la cigarette de Draco.
-Détrompes toi, Potter. Je connais des gens qui adoreraient avoir le privilège d'ôter ta misérable vie. Mentit-il effrontément en reprenant une longue gorgée d'alcool pour accompagner la brûlure du tabac.
Le regard du brun vacilla un moment. Il était tellement pâle que l'ancien mangemort crût qu'il allait disparaître d'un moment à l'autre. Comme une vision de son esprit troublé et fou. Il allait se réveiller dans son lit, la main toujours serrée sur sa bouteille.
Mais Potter planta ses yeux verts comme un poison dans les siens et ils étaient bien réels.
-Tu vas le faire ? Demanda-t-il dans un murmure. Je savais que toi tu le ferais. Je veux que ce soit toi qui le fasse...
-Est-ce que le plaisir de te voir mort, mérite que je passe le reste de ma vie à fuir et que j'abandonne tout ce que ma famille a bâti ?
Draco eut un rire qui n'avait rien de joyeux. Il soutint le regard du brun et mit toute sa haine et son dégoût dans sa prochaine phrase.
-Non Potter. Ton abominable personne ne mérite pas que je subisse cela.
Il se leva brusquement, déclenchant un sursaut chez son hôte peu désiré. Il savait que ce qu'il venait de dire était aussi douloureux pour le brun qu'un sort mortel. Il le rabaissait, le faisant se sentir encore plus misérable et ignoble qu'il ne le pensait déjà. Et un jour, quand la culpabilité deviendrait trop forte et insupportable, il s'ouvrirait les veines ou se pendrait à une poutre de sa maison.
Draco espérait juste que ce soit long et atroce et que les mots qu'il avait prononcé seraient ceux que Potter entendrait résonner à ces oreilles quand il en finirait.
Il suffisait juste de choisir les bons.
Et il était assez doué pour ça.
-Dégage de chez moi maintenant. Je garde ta baguette. Elle m'appartient après tout.
Potter n'eut aucun mouvement pour se lever.
-Tu me dégoûte. Continua le blond tandis que des étincelles d'excitation commençait à naître dans le creux de ses reins.
Cette brûlure là était encore meilleure que la rage. Blesser Potter était meilleur que le plus luxueux des vins ou la plus grisante des potions stupéfiantes.
Son sexe commençait même à durcir ce qui ne lui était pas arrivé depuis des semaines. Il se força à se calmer et tira une longue bouffée de fumée grise sur sa cigarette mourante.
-Agit comme un homme et mets un terme à l'abjection que tu es devenu.
Sa voix était un murmure. L'intonation était devenue séductrice.
-Finis-en ce soir. Épargnes toi des années de douleur et toute la peine que tu infligera à tes amis en leur montrant à quel point tu es tombé bas. A quel point tu es pathétique.
Potter ne bougeait toujours pas, les yeux résolument fixés sur la table basse. Ses mains posées sur ses genoux tremblaient.
Draco fit quelques pas et écrasa le mégot rougeoyant dans un cendrier en ivoire précieux sur la table basse. Il était tout proche du brun. Tellement proche qu'il pouvait sentir les effluves qui émanaient de son corps raidi de souffrance : c'était un mélange de whisky, de tabac froid et quelque chose d'épicé. L'odeur piquante des drogues mélangées à celle plus entêtante de la sueur après le sexe.
Draco sentit son estomac se retourner de dégoût.
Il franchit les quelques dizaines de centimètres qui le séparaient de la silhouette dans le fauteuil. Puis posa ses mains sur les épaules du brun, ignorant le sursaut de haine que cette promiscuité générait contre sa moelle épinière.
Potter le regarda alors avec cette même expression troublée, les pupilles dilatées, le regard fou et brillant. Un moment son regard parut dériver vers son torse nu, mais c'était si fugace que Draco crût l'avoir imaginé.
Si sa silhouette et son visage émacié le faisait paraître plus jeune, il suffisait de plonger dans les verts méandres tortueux pour se rendre compte que Harry Potter était en fait beaucoup plus âgé. Il semblait avoir vécu cent années toutes aussi malheureuses et solitaires les unes que les autres.
-Ton père méritait de mourir. Chuchota-il cruellement tandis qu'une once de vie alluma vaguement le visage aux traits tirés.
Ses lèvres étaient roses et fines. Une ombre de barbe obscurcissait sa mâchoire franche et bien dessinée.
Les mains de Draco se serrèrent malgré lui sur les épaules qu'elles tenaient. Il savait pertinemment que Potter le provoquait exprès, mais la rage qu'il nourrissait depuis des années semblait vouloir se jeter dans le piège grossier qu'on lui tendait.
Il serrait si facile de déplacer ses mains. Les faire glisser le long des clavicules qu'il apercevait à travers le col du sweat informe, doucement, presque sensuellement.
Une caresse d'amant.
Puis ses mains s'enrouleraient autour du cou fragile et il regarderait le vert des yeux se faner peu à peu au fur et à mesure qu'il extirperait la vie hors du corps de Potter.
Draco eut un sourire qui n'atteint jamais ses yeux.
-Je sais ce que tu cherches à faire. Et je ne le ferais pas.
Les yeux de Potter l'affrontaient toujours. Le blond entendait sa respiration calme et régulière. Le sursaut de vie qui naissait dans les prunelles vertes lui donna alors une certitude : oui, c'est lui qui allait tuer Harry Potter.
Il ne laisserait ce plaisir à personne !
La descente aux enfers du brun était à lui. Il serait son guide macabre, l'ombre de mort qui lui chuchoterait tendrement à l'oreille le chemin à prendre.
Mais il le fera sans se salir les mains. A sa façon. Insidieusement, sournoisement. Et personne ne soupçonnera qu'il était derrière tout ça quand on trouvera le cadavre suicidé du Héros du Monde Sorcier.
Cette fois-ci sa raison et sa folie de vengeance battaient à l'unisson dans le bourdonnement que formaient ses pensées. Elles approuvaient sa décision, l'appuyaient, lui susurraient toutes les étapes du plan qu'il allait devoir suivre à la lettre pour arriver à ses fins.
-Je ne te donnerais pas ce que tu veux Potter. Je n'ai jamais fais ce que tu voulais et je ne vais pas commencer maintenant. Mais je vais te donner autre chose...
Draco lâcha avec soulagement les épaules du corps tant honni et il s'assit à même le sol devant le fauteuil du brun. Il aurait dû se sentir en position de faiblesse, torse nu, en simple pantalon de pyjama assis aux pieds de son ennemi comme un chien obéissant mais la vérité était que c'est lui qui dominait la situation. La baguette de Potter était dans la poche arrière de son pantalon et l'ancien gryffondor était suspendu à ses lèvres, avide de ces mots et de cette solution qu'il lui faisait miroiter comme un miracle.
C'était Potter le chien obéissant.
L'héritier Malefoy savoura ce moment de puissance, prit le temps de saisir une nouvelle cigarette sur la table derrière lui et de l'allumer avec nonchalance.
-Tu as l'air épuisé. Annonça-t-il tranquillement, négligemment. J'ai peut-être quelque chose qui pourrait t'aider à dormir un peu.
Une grimace qui semblait vouloir imiter un sourire ironique déforma les lèvres du brun pendant un moment. Il ne lâchait pas les prunelles grises du regard.
-Dormir ? Si seulement... Il passa une main dans ses cheveux déjà bien ébouriffés. Les potions de sommeil sans rêve ne marchent plus sur moi depuis longtemps déjà. L'alcool, le sexe et la drogue non plus comme tu peux le constater.
-Ce n'est pas une potion de sommeil sans rêve que je te propose. Répondit simplement Draco, s'amusant de la lueur d'intérêt qui venait d'éclairer le visage du brun. Attends moi ici.
Il tendit sa cigarette à moitié fumée à son ennemi comme s'il s'agissait d'un de ses domestiques et déploya sa longue silhouette alors qu'il se levait lentement. Il avait la démarche précautionneuse d'un homme ivre qui faisait son possible pour paraître sobre mais Potter le regardait comme s'il était un quelconque Dieu en train de lui accorder son vœu le plus cher.
L'ancien serpentard aima ce regard et la sensation de puissance qu'il engendrait. Il déverrouilla les portes du salon mais ne les referma pas derrière lui. L'ancien gryffondor allait rester, il en était sûr. Il allait l'attendre docilement.
Soumis, fasciné et désespéré.
Ce qu'il comptait donner au brun était illégal et dangereux. Juste avant la mort de sa mère, Draco s'était essayé à quelques activités susceptibles de l'aider à vaincre sa haine des gens en général et Potter en particulier.
Il avait donc pendant quelques semaines pratiqué l'art des potions avec un certains succès. Son parrain avait d'ailleurs décelé bien avant Poudlard des dons certains pour les potions qu'il lui conseillait constamment de cultiver.
Mais Draco était nonchalant, inconstant. Il n'avait jamais réussi à se concentrer entièrement sur une seule chose et il ne s'essayait aux mélanges magiques que lors de grandes périodes d'ennuis et jamais plus de quelques semaines.
Pourtant, l'insomnie et la souffrance aidant il avait réussi à créer une potion à ce moment là (une mixture faites à base de poisons, de drogues et de sang d'hippogriffe) qui lui garantissait un sommeil réparateur et dénué de cauchemars.
Il en prenait lui-même parfois quand ses nuits devenaient atroces mais jamais trop fréquemment car au fur et à mesure du temps les réveils devenaient de plus en plus brutaux quand la vague de souvenirs sanglants lui revenait en pleine face.
Après un détour dans son laboratoire de potions et un moment dans le couloir pour mettre en ordre ses pensées et rejouer calmement le plan qu'il avait prévu cette nuit pour Potter il entra à nouveau dans le salon et se dirigea vers le fauteuil de son invité. Le brun n'avait pas bougé d'un centimètre et la cigarette de Draco se consumait lentement entre ses doigts.
Il la récupéra, tira une longue bouffée, sachant le regard vert et quémandeur fixé sur lui. Puis il lui tendit un petit flacon, pas plus grand qu'un verre à liqueur et rempli d'un liquide au rouge si profond qu'il en paraissait noir.
Potter le prit sans poser de question et Draco retourna s'installer sur le fauteuil en face de lui.
-Bois. Ordonna-t-il.
Un muscle sur la mâchoire du brun se contracta devant le ton autoritaire. Ce fut assez rapide, comme un réflexe qu'on a du mal à réprimer. Le blond se fit la réflexion que le Potter adolescent, frondeur et fier n'avait pas totalement disparu et le voir obéir en devint d'autant plus jouissif.
Cela aurait pu être un poison.
Il y 'en avait dedans d'ailleurs.
Une dose infime certes mais rien qu'en voyant la couleur sombre de la potion n'importe quel sorcier sain d'esprit aurait refusé d'y goûter. Potter pensait d'ailleurs peut-être que ça en était. Pourtant, il déboucha le petit flacon, planta à nouveau ses iris verts comme un mauvais alcool dans ceux de Draco et vida le récipient d'un trait.
Il y avait une lueur de défi dans ses yeux, comme s'ils avaient quinze ans et qu'ils se trouvaient sur un terrain de quidditch.
L'ancien mangemort l'observa attentivement. Ni l'un ni l'autre n'avait envie de rompre le silence qui venait de s'installer. Il n'y avait rien à dire de toute façon. Soit l'impression de Potter était bonne et il venait d'avaler un poison mortel et probablement très douloureux, soit il s'agissait vraiment de la potion miracle dont le blond lui avait parlé. Dans ce dernier cas, le fait qu'il l'ait réellement aidé était presque aussi effrayant que l'hypothèse du poison de l'avis de l'ancien gryffondor.
Les yeux du Sauveur papillonnèrent imperceptiblement au bout de quelques minutes. Il sentit ses muscles se détendre d'un seul coup comme si on avait relâché un ressort tendu à l'extrême puis il tomba dans un sommeil profond sans même s'en apercevoir.
L'ancien serpentard ne retint plus son soupir en entendant la respiration régulière et profonde qui s'élevait de la silhouette endormie dans le fauteuil.
Et bien, Potter n'avait pas menti en se disant habitué aux drogues et potions ! Malgré sa faible corpulence, il avait résisté aux effets du philtre pendant un temps incroyablement long. Lui-même mettait deux fois moins de temps pour y succomber alors qu'il y était accoutumé.
Il chassa cette pensées de son esprit et la jalousie qu'elle y faisait naître pour se concentrer sur le plus important.
Draco n'était pas impulsif, il n'aimait pas prendre des décisions rapides et se fier à son impression du moment. Cela faisait d'ailleurs de lui un piètre combattant sur le terrain de bataille une fois sorti du contexte habituel.
En revanche il se savait particulièrement doué et inventif quand il s'agissait d'analyser à tête reposée les méandres d'une situation inextricable pour le commun des mortels.
Il était capable d'élaborer des stratégies habiles et sournoises comme personne. Mais pour cela il avait toujours besoin d'un peu de temps.
Et c'est ce qu'il venait de s'offrir en donnant la potion à Potter. Un temps précieux.
Les premières lueurs de l'aube coloraient les murs immaculés d'une teinte grisâtre quand il fut totalement satisfait de sa ruse à venir. C'était tout simple.
Potter était dans une période de vulnérabilité inouïe. Il avait le devoir de l'utiliser à son avantage. La vengeance n'était pas sa seule motivation fort heureusement sinon le cadavre du brun aurait déjà gît à ses pieds et entraîné avec lui une condamnation à mort pour le dernier des Malfoy.
Draco se sentait investi d'une mission plus importante qui le faisait tenir jour après jour et qui l'empêchait de s'autodétruire totalement -contrairement à la loque brune dans son fauteuil- à coup d'alcool et de drogues dures.
Draco avait le devoir de restaurer l'Empire Malfoy. Il devait à son père et à toute sa lignée de conserver ses biens, accroître son pouvoir et laver son nom du déshonneur.
Le blond aimait le pouvoir, c'était inextricable à son être. Cet amour coulait dans ses veines autant que la magie elle même.
Cet amour avait causé la mort de son père qui pensait redevenir le bras noir du Lord Noir en tuant la fille de membres de l'Ordre du Phénix.
Alors l'ancien mangemort prenait en compte les erreurs passées. Il ne laisserait pas cet amour
le perdre.
Il aurait le contrôle.
Personne n'aurait pu reconnaître le célèbre Sauveur du Monde Sorcier alors qu'il titubait prudemment dans l'allée des embrumes. Il avait des vêtements moldus sombres et trop grands et une capuche qui dissimulait ces boucles brunes et une bonne moitié de visage.
Et même si d'aventure quelqu'un aurait eu un doute sur son identité, il aurait vite changé d'avis car Harry Potter n'était sûrement pas le genre de personne à venir en pleine nuit dans une rue comme celle-ci.
Harry Potter était un homme bien. Il menait une vie déjà bien remplie par son travail d'auror et toutes les œuvres de charité auxquelles il participait.
De plus, l'année dernière il avait ouvert avec son ami Hermione Granger la Fondation Remus Lupin, un orphelinat qui recueillait les trop nombreux enfants sorciers abandonnés par leur famille après une morsure de loup-garou. La bâtisse accueillait déjà 12 enfants venant du pays entier et faisait encore les gros titres des journaux qui ne tarissaient pas d'éloges sur la gentillesse et la bonté d'âme de L'Élu.
Il ne se passait pas un jour sans qu'on ne voit son visage dans un journal. Il était adoré, épié, analysé à chacune de ses sorties.
Quarante deux livres racontaient déjà son histoire de tous les points de vue possibles et avec plus ou moins de vérités.
Alors même si quelques fois il arrivait un peu trop alcoolisé à une réception du ministère, qu'il était incapable de se réveiller le matin pour aller au travail ou que ces cernes se creusaient et sa silhouette s'affinait de mois en mois, personne ne lui en tenait rigueur.
Harry Potter était l'Élu, le Héros de tous. Il était le Bien en personne donc il ne pouvait absolument pas être cet homme ivre qui se tenait aux murs de l'allée crasseuse pour avancer.
L'ancien gryffondor chantonnait doucement une vieille chanson moldu alors qu'il essayait de trouver la sortie de la rue pour rejoindre de Chemin de Traverse puis le Londres moldu. Il n'était pas en état de transplaner.
En fait il n'était pas en état de quoique ce soit. Il sortait juste de chez Théodore Nott, un ancien serpentard qui n'avait pas été heureux de le revoir il y'a quelques mois juste après une perquisition à son domicile. En tant qu'auror, Harry savait parfaitement que le brun mielleux à l'air calculateur était devenu dès la fin de la guerre l'un des revendeurs de drogues sorcières les plus importants de la capitale.
Juste après la perquisition, Celui-qui-a-vaincu était revenu, sans sa cape d'auror, lui proposer un marché. Il se chargeait de le couvrir en échange d'un accès illimité à son stock.
Des preuves du dossier contre Nott avaient mystérieusement disparues. On n'avait jamais su qui était derrière cela.
Le malfrat était méfiant à présent. Et rusé. Les chances de réunir un nouveau dossier solide étaient beaucoup trop minces.
Il était devenu intouchable.
Et Harry était devenu un client particulier.
Quelques fois l'ancien gryffondor imaginait la tête que ferait son chef ou même son coéquipier et ami de toujours Ron Weasley s'ils apprenaient l'existence de ce pacte secret.
Il avait la sensation depuis plusieurs mois que deux personnalités se partageaient son corps. Il y avait le Harry gentil qui prenait soin de ses amis et qui amenait son filleul à la fête foraine. Ce Harry qui prenait son travail à cœur et trouvait quand même du temps pour venir jouer avec les enfants de sa fondation.
Puis il y avait cet autre qui apparaissait par moment. Cet autre qui hurlait de douleur après quelque
chose de perdu mais sans savoir exactement ce que c'était. Ce Harry là se battait tous les jours contre les souvenirs et les regrets. Des fois, de plus en plus souvent, il abandonnait sous le poids de la culpabilité et du chagrin et lui susurrait de mettre un terme à cette comédie. Que c'était trop dur. Que ça n'allait jamais s'arranger. Il vivrait pour toujours avec ces images dans la tête et ce vide dans son âme.
Cet Harry l'entraînait vers des routes sombres et dangereuse. Il lui avait servi son premier verre de Whisky le soir de l'anniversaire de la mort de Sirius il y a un ans.
Il lui avait fait prendre sa première potion illégale le jour où il avait vu Mrs Weasley éclater en sanglots en trouvant une photo de Ginny en guise de marque-page dans un livre de Gilderoy Lockart.
C'est cet Harry qui l'obligea à regarder de l'autre côté de la ruelle quand deux femmes peu vêtues passèrent rapidement, entraînant dans leur sillage des effluves de parfums capiteux et d'alcool bon marché.
Il les suivit, avide. Il savait à quel point c'était bon de s'oublier dans un corps de femme chaud et docile le temps de quelques heures. Et leurs corps devenaient très dociles et très chauds au fur et à mesure que les gallions apparaissaient dans leurs mains.
Il aimait toutes les formes d'oublis qu'il pouvait trouver.
Le dégoût de lui même et la honte étaient un faible prix à payer contre ce miracle éphémère.
Elles le remarquèrent et ralentirent pour lui laisser le temps de les rattraper. Les clients étaient peu nombreux cette nuit.
Mais il ne les atteint jamais. Il venait de croiser le regard d'une autre personne dans une impasse perpendiculaire.
C'était un cul de sac, étroit, sale et désert à l'exception d'un homme. Petit, jeune, des mèches colorées en blond et des yeux bleus cerclés de maquillage tapageur. Sa robe de sorcier largement ouverte sur son torse nu ne cachait rien de sa peau pâle et striée de poussières.
Il avait lui aussi suivit avec intérêt le passage des deux jeunes prostitués avant de repérer Harry. Il y avait quelque chose de trouble dans son regard. Quelque chose de chaud et de brisé.
Il recula lentement dans l'impasse étroite sans quitter le brun du regard et disparut dans l'ombre.
C'était une invitation.
Harry oublia les deux femmes qui partaient déjà en maudissant les clients indécis.
Il s'avança dans l'allée à son tour. Des frissons de peur et d'excitation piquaient chaque centimètre carré de son corps. Un de ces collègues auraient pu passer par là. Ils faisaient souvent des rondes dans la nuit de ce côté. C'était totalement fou et irresponsable.
Au fond de lui, quelque chose hurlait de partir loin d'ici. Mais son autre fit taire ce hurlement.
Il était tellement défoncé de toute façon, il ne se souvenait presque pas de la suite. C'était sa première fois avec un autre homme.
L'autre lui avait taillé une pipe formidable avant de lui demander une avance et de se protéger. Puis Harry l'avait baisé à même le sol sale et glacé. Brutalement, mécaniquement. Il n'avais pas crié ni lâché le moindre mot, se contentant de subir sans sourciller les assauts d'un énième client un peu trop violent. Il avait pris, un peu étonné mais toujours sans rien dire, la bourse pleine que Harry lui avait tendu en se rhabillant.
Il lui avait dit de revenir quand il voulait avec un sourire un peu bizarre. Un sourire sans joie.
Puis Harry était parti presque en courant la conscience même pas soulagée de lui avoir donné au moins dix fois plus d'argent que ce qu'il lui avait demandé.
Cette nuit il avait conscience d'être arrivé au bout de quelque chose. Il marchait vite dans les rues moldues londoniennes.
Il ne se reconnaissait plus. Le Harry sombre et cassé devenait de plus en plus important et maintenant le brun avait la sensation que c'était cet autre qui le contrôlait définitivement.
Il arrivait à vivre avec cela quand c'était à lui-même qu'il faisait du mal. Mais là il venait de faire mal à quelqu'un qui n'avait rien à voir. Un gars paumé et désespéré. Il lui avait fait mal en échange d'argent. Harry se voyait en train de devenir une ordure.
Et c'était quelque chose qu'il ne supportait plus.
Draco Malfoy s'extirpa brutalement du sommeil. Comme si une main malveillante avait cruellement tiré la chaude couverture qui l'abritait depuis à peine deux heures.
Il passa sa main sur son visage fatigué et moite de sueur. A l'intérieur de sa poitrine nue et humide, il pouvait sentir son cœur battre frénétiquement, encore aux prises avec le cauchemars qui le tourmentait depuis des mois.
Non. Pas un cauchemars, se corrigea-t-il, un souvenir.
Derrière ses paupières closes, le visage émacié et livide de terreur de son père flotta un moment. Il retint un juron et tâtonna vers sa table de nuit où une bouteille de whisky pur-feu à moitié vide l'attendait patiemment, presque tendrement. Comme une mère affectueuse qui le prendrait dans ses bras pour soulager sa peine.
C'était une nuit particulièrement claire.
L'éclat de la lune qui transperçait la vitre impeccable de sa chambre fit jouer des ombres sur les volutes du liquide ambré. Il fit tourner la bouteille dans sa main, admirant le jeu du liquide qui tournoyait, l'appelait.
Je te ferais tout oublier Draco...
Mais le blond n'avait pas besoin du discours séducteur pour savoir que l'alcool l'abrutirait suffisamment pour lui éviter de penser à son passé.
Il avait déjà beaucoup pratiqué cette amnésie artificielle.
La tristesse qui comprimait son sternum ne fit pas long feu. Dès la deuxième gorgée il sentit la brûlure de la rage incendier son ventre alors même que le liquide incandescent embrasait sa gorge.
Potter.
Il n'avait que ce mot à la bouche, que ce nom dans la tête.
Ce salop, bâtard, cette immondice !
Tout était de sa faute.
Il voulut se rendormir, la bouteille posée sur l'oreiller voisin, comme une maîtresse repue après une bonne baise. Il fallait qu'il dorme. Sa dette de sommeil était déjà immense et demain une longue journée l'attendait, il s'employait depuis longtemps à remettre les comptes des différentes entreprises de sa famille à flots. Amadouer les bonnes personnes, effrayer les autres et s'assurer d'avoir toujours deux coups d'avance. Juste comme son père le lui avait appris.
Le plafond de son immense chambre était baigné des rayons lunaires, ses yeux s'égarèrent sur la blancheur parfaite. Il se força à fermer les paupières, essayant de maîtriser la rage qui lui tordait les tripes.
Sa main trouva la surface lisse et glacée de la bouteille qu'il caressa distraitement.
Il sut qu'il ne parviendrait pas à trouver le sommeil.
Comme pour confirmer ses pensées, un petit pop retentit dans la chambre sur sa gauche et il croisa les yeux globuleux d'un elfe de maison qui se hâta de les baisser avec un grognement plaintif.
-Poppy est désolé Maître,... mais un intrus est entré dans le manoir, Maître... Les alarmes se sont déclenchées. Poppy, doit prévenir les aurors ?
Draco eut un sourire cruel.
Les aurors ?
Ces sales connards seraient capables de l'embarquer lui et de féliciter le cambrioleur ou tueur qui venait de violer sa propriété.
Il attrapa sa baguette et se redressa complètement.
-Est-il seul ?
L'elfe hocha frénétiquement sa tête ronde.
-Où se trouve-t-il ?
-En bas Maître... Dans le grand hall, Maître.
Draco lui ordonna de partir d'un mouvement de la tête et il sortit le plus silencieusement possible de sa chambre.
Il se félicita de ne pas avoir trop bu ce soir-là et d'avoir les idées claires. Il n'avait jamais tué mais il avait vu tant de meurtres durant l'installation forcée des mangemorts et de Voldemort chez lui qu'il savait exactement comment faire.
Faire disparaître un cadavre s'ajoutait aussi à la longue liste des choses que son père lui avait apprises. Entre des enseignements sur l'économie sorcière et les bonnes manières à avoir en présence d'une personne avec beaucoup d'influence.
Il emprunta un passage secret du couloir qui lui permit d'atterrir directement dans le salon principal attenant le grand hall de son manoir.
Un intrus chez lui ne pouvait avoir qu'une signification. Il ne pensait pas à un cambrioleur à vrai dire.
Sa famille avait été plus qu'impliquée avec Voldemort durant la guerre et, même si son père était mort d'un baiser du détraqueur et sa mère suicidée peu après, nombreux étaient les sorciers qui voulaient le voir emprunter la même voie.
C'était la première fois qu'une infraction de la sorte arrivait depuis la fin de la guerre, il y a presque trois ans, mais le blond allait faire en sorte que ce soit la dernière.
La rage faisait trembler sa main qui tenait la baguette.
La porte du grand salon était encore entrouverte. C'était ici qu'il avait passé en revue la comptabilité de sa nouvelle société de balais magiques avant d'aller dormir et il n'avait heureusement pas pensé à fermer la porte. Il glissa un coup d'œil entre les pans de bois, à moitié masqué par leur épaisseur.
Le grand hall était plongé dans l'obscurité mais Draco pu distinguer grâce aux larges fenêtres qui parsemaient le mur opposé une mince silhouette à quelques mètres devant lui.
La silhouette n'était pas très grande.
Ce devait être un adolescent. Il était de dos mais la largeur relative de ses épaules contredisait l'hypothèse d'une femme. Ses cheveux étaient cachés par la capuche d'un sweat sombre.
Des vêtements moldus.
Il n'arrivait pas à voir si l'autre avait une baguette aussi. Il avançait, inconscient du regard attentif du propriétaire des lieux, vers l'escalier qui menait à l'étage. A la chambre de Draco.
L'ancien serpentard aurait pu le tuer ainsi. Proprement, sournoisement, d'un sort entre les deux omoplates.
Mais il savait qu'il n'en aurait pas été apaisé.
La rage qui le dévorait de l'intérieur exigeait un exutoire.
Il fallait qu'il se méfie néanmoins. Aussi vulnérable que paraissait l'intrus devant lui, il avait réussi à passer tous les sorts de sécurité posés sur son manoir et, à priori, tout seul.
Il devait être puissant. Ou connaître le manoir. Les deux hypothèses étaient inquiétantes.
Il se força à respirer calmement, écouta quelques secondes les battements effrénés de son propre cœur et poussa d'un coup sec les portes entrouvertes tout en lançant un sort de désarmement.
L'étranger avait de toute évidence une baguette puisque celle-ci atterrit directement dans la main de Draco qui conserva sa propre baguette pointée sur lui.
Il retint un sourire victorieux. Son sort avait été net, contrôlé au millimètre près. Mais ce n'était pas de lui de prendre tant de risques. Finalement, il était peut-être plus imbibé d'alcool qu'il ne le pensait.
Sa voix fut néanmoins ferme et glacial quand il s'adressa à l'ombre anonyme qui venait de se tourner vers lui, le visage toujours plongé dans les ténèbres de sa capuche et du couloir.
-A qui ai-je l'honneur ?
Il s'attendait aux pleurs de rage d'un orphelin qui l'accusait lui et sa famille d'avoir pris ses parents ou aux hurlements d'un malade qui le traiterait de mangemort et lui conseillerait de pourrir en enfer rejoindre sa chère famille.
Mais l'inconnu fit simplement un pas vers la torche la plus proche sur sa droite et retira sa capuche.
Et le souffle de Draco se bloqua dans sa poitrine quand il reconnut les mèches sombres et les lunettes rondes.
Le nom qu'il avait tant de fois prononcé en rêve, franchit ses lèvres, s'enroula autour de sa langue comme une gorgée d'un excellent vin. Le blond savoura ce nom, le fit durer. Étirant les syllabes de sa voix traînante et enrouée par l'alcool et les cigarettes.
-Potter...
Un sort vert crépita au bout de sa baguette, parant le hall d'une lueur irréelle. Cependant, les iris tout aussi verts de l'intrus en face de lui n'exprimaient pas une once d'inquiétude. Les yeux étaient étrangement brillants et fixes comme ceux d'un fou ou d'un enfant fiévreux.
Potter avait les yeux cerclés de mauves et le visage émacié. La lueur verdâtre dans le hall donnait à son visage un teint livide et maladif.
La tête de Draco était emplie d'un bourdonnement insupportable, rythmé par les battements rapides de ses pulsations cardiaques. Il évalua rapidement ses chances de tuer l'ancien gryffondor, là, maintenant et de réussir à s'en tirer. Elles lui parurent beaucoup trop minces.
-Bonsoir Malefoy...
La voix du brun était étrangement sourde, comme s'il retenait à grand peine un sanglot. Elle déclencha chez l'ancien mangemort un brusque frisson de haine et d'excitation qui partit de sa nuque dénudée pour venir rejoindre l'extrémité de sa colonne vertébrale masquée par son pantalon de pyjama.
Il n'avait pas entendu cette voix depuis très longtemps.
Une éternité.
Il se surprit presque en pensant qu'elle lui avait en quelque sorte manqué. Comme une horrible chanson démodée qu'on surprend sur une radio et qui nous ramène des décennies plus tôt. La voix de Potter était sa rengaine ringarde et horripilante.
Le frisson sinua vicieusement le long de ses nerfs périphériques et atteignit sa main toujours crispée sur sa baguette. Elle trembla un peu, mais pas assez pour dévier de sa cible : la poitrine de l'ennemi.
Potter paru enfin se rendre compte du sort de Mort qui étincelait dangereusement au bout de la baguette pointée sur lui. Il n'eut aucun geste de recul, aucun sursaut d'angoisse.
-Tu vas me tuer ? Demanda-t-il finalement. Et le blond crut percevoir un soupir d'attente à la fin de la phrase. Comme une demande silencieuse.
Son instinct de conservation et la folie de sa haine menait une lutte à mort dans l'esprit embrumé d'alcool de Draco. Et le brun semblait avoir conscience de cela et attendait patiemment de savoir qui remporterait le combat.
-Qui sait que tu es là ? Interrogea finalement le blond avec un calme glacial qu'il était loin de ressentir.
-Personne.
L'instinct de prudence de Draco finit par gagner. L'occasion était trop belle pour être vraie : Potter était chez lui, désarmé, vulnérable, attendant sagement d'être abattu comme du gibier et sans personne à l'extérieur pour savoir qu'il se trouvait chez l'homme qui avait toutes les raisons de le voir mort.
Chaque fibres de son corps lui criaient que tout ceci était un piège. Il baissa sagement sa baguette et désigna le salon derrière lui d'un mouvement brusque de la tête.
-Entre.
La présence de son ennemi juré chez lui amenait beaucoup de questions. Il se demanda d'ailleurs si l'intrus était réellement Potter. Néanmoins, quelque chose au fond de lui l'avait reconnu et il était absolument certain c'était bien Harry Potter. Même avec du polynectar personne n'était capable de mimer aussi parfaitement l'ancien gryffondor. C'était sa démarche, sa façon de se tenir, sa façon de respirer et de prononcer son prénom. Même l'éclat dans ses yeux alors qu'ils s'affrontaient du regard. Il y avait cette lueur qu'il ne réservait qu'à lui. De la haine à l'état brut.
Son père disait souvent qu'il fallait bien connaître ses ennemis et Draco estima qu'il devait être fier de lui car il connaissait Potter par cœur. Encore mieux que n'importe lequel de ses amis, encore mieux que lui même.
Le brun baissa la tête et pénétra lentement dans la pièce, rompant leur contact visuel alors qu'il passait à côté de lui.
Draco expira doucement quand l'homme fut dans le salon, inconscient d'avoir retenu sa respiration quand il l'avait vu approcher, en quête d'un geste brusque signifiant qu'il voulait reprendre sa baguette.
Il appela son elfe de maison et lui ordonna de faire le tour du Manoir et de ses environs en vue d'un autre intrus.
Puis il entra à son tour dans le salon et en verrouilla les lourdes portes de bois précieux.
D'un coup de baguette il alluma un feu dans la cheminée, éclairant ainsi la pièce d'une chaude lumière singulièrement opposée quant à l'ambiance avec son nouvel invité.
Potter se tenait bien droit, à quelques mètres devant lui, les mains dans les poches de son sweat trop grand comme s'il n'avait pas été en danger de mort il y'a quelques secondes et comme si ce n'était pas encore actuellement le cas.
Ses yeux suivaient le ballet dansant des flammes dans l'âtre.
Draco le contourna soigneusement sans le lâcher du regard. Leurs deux baguettes avaient beau être dans la poche de son pantalon, il se méfiait toujours.
Soit prudent, le prévient une voix dans sa tête qui avait les inflexions implacables de celle de son père.
Il attrapa une bouteille de vin français sur le bar dans un coin de la pièce et s'installa sur un des fauteuils en cuir sombre en face de la cheminée. En face de son ennemi mortel.
Ce n'était pas une bonne idée de boire encore maintenant mais il ne savait pas si il était vraiment capable de tuer l'ancien gryffondor si la situation l'exigeait. Il ne l'avait jamais fait après tout. L'alcool pourrait l'aider à trouver le courage nécessaire.
-Je t'en prie Potter, conte-moi la délicieuse histoire qui t'a amené jusque chez moi en pleine nuit.
Les longues gorgées d'alcool lui parurent à peine tièdes comparées à la haine qui incendiait ses entrailles.
Le brun s'installa dans le fauteuil en face de lui. Ses gestes étaient lents, il paraissait être dans un état second, comme ralenti.
Draco plissa les yeux, quelque chose clochait.
-Cela faisait longtemps. Combien de temps depuis notre dernière rencontre tu t'en souviens ?
-Deux ans... murmura Potter avec la même intonation atone.
-Deux ans, trois mois et quatorze jours, corrigea le blond en reprenant une plus longue gorgée d'alcool. Quand tu as témoigné au procès de mon père pour t'assurer qu'il serait condamné au baiser du détraqueur.
Il avait réussi à ne pas faire trembler sa voix à la fin de sa phrase mais il n'avait pu empêcher sa main de venir serrer convulsivement la baguette contre son flanc à l'affût du moindre geste ou mot qui lui donnerait une raison de l'utiliser.
Potter blêmit comme s'il venait de le frapper. Ses yeux se détournement vivement vers les flammes alors qu'il retenait à grand peine un gémissement étouffé. Il avait l'air aux bords des larmes.
Durant la bataille de Poudlard, des dizaines de témoins avaient vu Lucius Malefoy drapé dans sa cape de mangemort.
Et cinq d'entre eux l'avaient vu tuer froidement Ginny Weasley alors que sa mère la protégeait à grand peine d'une Bellatrix Lestrange enragée.
Les avocats que Lucius avait engagé pour son procès étaient doués, ils connaissaient exactement les ficelles et comment les actionner pour gagner. D'autant plus que trois de ces témoins étaient des membres de la famille de la victime ce qui avait peu de poids quand on connaissait la haine ancestrale que se vouaient les Weasley et les Malefoy. Le quatrième témoin n'était autre que Draco qui avait assuré que c'était Bellatrix qui avait lancé le sortilège de mort avant de succomber à son tour d'un sortilège de la mère folle de chagrin.
Le procès commençait assez bien contre toutes attentes. Lucius espérait une peine mineure à Azkaban pour avoir aidé financièrement le Mage Noir. Et il commençait déjà à attendrir le Magenmagot en racontant comme le Lord avait menacé sa famille en échange de son soutien quand le cinquième témoin avait fait son apparition.
Et le témoignage de Harry Potter avait sonné comme une sentence. C'était Lucius qui avait abattu froidement l'adolescente. C'était aussi lui qui avait tué des d'aurors durant la nuit, caché derrière son masque. C'était un assassin et il méritait le baiser du détraqueur.
Les délibérations n'avait duré que quelques dizaines de secondes.
Ils avaient tous appuyé la décision de l'Élu. Le Grand Sauveur.
Lucius Malfoy était mort dans l'heure. Blême, effrayé et rempli de haine.
Et Draco s'était juré de se venger.
Sa mère s'était suicidée peu de temps après, ne supportant ni les insultes des gens sur son passage, ni le silence du manoir seulement rompu par les éclats de rage de son fils qui ne se calmait qu'après l'avoir laissée exploser sur quelques meubles ou elfes de maison.
Et voilà que Potter se servait lui-même sur un plateau d'argent, perdu, fragile, la tristesse suintant par chaque pore de sa peau.
Quelque chose lui échappait.
-Pourquoi es-tu là, Potter ?
Le sorcier brun soupira. Il frotta son visage de ses mains tremblantes et retira ses lunettes qu'il posa sur la table basse entre eux. Se rendant encore plus vulnérable.
-J'ai bu. Expliqua-t-il finalement.
Draco reprit une gorgée de vin, un sourire cruel aux lèvres.
-Moi aussi, mais je ne suis toujours pas entré chez toi par effraction pour l'instant.
-J'ai aussi pris des trucs,...des potions... Les bleues qu'on vend dans l'Allée des Embrumes.
Donc Potter était saoul et défoncé aux drogues.
Draco sortit tout doucement sa baguette de sa poche quand dans un coin du salon, Poppy venait de réapparaître pour lui signifier d'un signe de tête qu'il n'y avait pas d'autre intrus autour du manoir.
L'elfe disparut presque aussitôt quand il vit le regard sauvage de son maître. Il savait que ce n'était pas bon signe.
-J'ai couché avec un gars cette nuit... il se prostituait...je l'ai baisé dans une ruelle, je ne sais même pas comment il s'appelle.
L'étonnement réussit à stopper le mouvement de la main de l'ancien mangemort qui tenait à présent la baguette. Il croisa le regard trop vert et brillant de Potter.
Il lui donnait l'impression d'être écorché vif. Comme si une plaie invisible mais sanguinolente mutilait son corps. Il avait l'air de lutter pour parler.
-Ça fait des mois que j'essaye, des mois que je fais toutes ces choses sales et... et je... je n'arrive toujours pas à me pardonner. Je n'arrive plus à dormir, manger ou même me lever de mon lit parfois.
Il avait la voix pleine de pleurs contenus.
-Je sais que c'est ma faute. Ginny. Remus. Sirius. C'est à cause de moi si ils sont morts.
Draco faillit rajouter son père à la liste tremblante du brun mais il garda prudemment le silence. Attendant de savoir quel rôle il avait à jouer là dedans.
-Elle était amoureuse de moi. C'est à cause de moi qu'elle s'est retrouvée dans cette bataille, elle voulait me protéger. Ils disent que ce n'est pas de ma faute. Ils essayent de me sauver. Mais je sais... et ils savent...
L'ancien serpentard n'eut pas besoin de demander pour savoir que Potter parlait de la famille Weasley. Il plissa les yeux, analysant calmement le discours vacillant et déchirant de l'homme qui avait gâché sa vie.
La culpabilité.
C'était donc ça.
Potter le Saint était torturé depuis le début par la culpabilité.
C'est vrai que l'ancien serpentard avait souvent joué avec cette faiblesse durant leurs années à Poudlard.
Et maintenant, ne trouvant pas de moyen pour atténuer le tourment des cadavres qu'il traînait derrière lui, le brun s'était lancé dans une course à l'auto-destruction qui devait lui paraître trop lente.
-Tu es trop lâche ou tu n'as pas envie de faire du mal à la famille de miséreux donc tu ne veux pas te suicider. Lâcha-t-il abruptement.
Potter paru se recroqueviller sur lui-même.
-Molly ne le supporterait pas. Je ne peux pas lui faire ça.
Draco se cala un peu plus confortablement dans son fauteuil. Il repoussa le souvenir de sa mère livide, allongée sur le sol avec une mare de sang se formant autour de son poignet mutilé et appela un paquet de cigarettes d'un mouvement négligent de la main. Puis il rangea à nouveau sa baguette dans sa poche alors qu'il allumait le tube de papier coincé entre ses lèvres.
-Tu voudrais que je fasse le sale boulot à ta place. Termina-t-il en expirant une longue bouffée évanescente.
-Tu es le seul que je connaisse qui...
Il ne termina pas sa phrase la laissant en suspens entre eux comme les volutes qui émanaient de la cigarette de Draco.
-Détrompes toi, Potter. Je connais des gens qui adoreraient avoir le privilège d'ôter ta misérable vie. Mentit-il effrontément en reprenant une longue gorgée d'alcool pour accompagner la brûlure du tabac.
Le regard du brun vacilla un moment. Il était tellement pâle que l'ancien mangemort crût qu'il allait disparaître d'un moment à l'autre. Comme une vision de son esprit troublé et fou. Il allait se réveiller dans son lit, la main toujours serrée sur sa bouteille.
Mais Potter planta ses yeux verts comme un poison dans les siens et ils étaient bien réels.
-Tu vas le faire ? Demanda-t-il dans un murmure. Je savais que toi tu le ferais. Je veux que ce soit toi qui le fasse...
-Est-ce que le plaisir de te voir mort, mérite que je passe le reste de ma vie à fuir et que j'abandonne tout ce que ma famille a bâti ?
Draco eut un rire qui n'avait rien de joyeux. Il soutint le regard du brun et mit toute sa haine et son dégoût dans sa prochaine phrase.
-Non Potter. Ton abominable personne ne mérite pas que je subisse cela.
Il se leva brusquement, déclenchant un sursaut chez son hôte peu désiré. Il savait que ce qu'il venait de dire était aussi douloureux pour le brun qu'un sort mortel. Il le rabaissait, le faisant se sentir encore plus misérable et ignoble qu'il ne le pensait déjà. Et un jour, quand la culpabilité deviendrait trop forte et insupportable, il s'ouvrirait les veines ou se pendrait à une poutre de sa maison.
Draco espérait juste que ce soit long et atroce et que les mots qu'il avait prononcé seraient ceux que Potter entendrait résonner à ces oreilles quand il en finirait.
Il suffisait juste de choisir les bons.
Et il était assez doué pour ça.
-Dégage de chez moi maintenant. Je garde ta baguette. Elle m'appartient après tout.
Potter n'eut aucun mouvement pour se lever.
-Tu me dégoûte. Continua le blond tandis que des étincelles d'excitation commençait à naître dans le creux de ses reins.
Cette brûlure là était encore meilleure que la rage. Blesser Potter était meilleur que le plus luxueux des vins.
Son sexe commençait même à durcir ce qui ne lui était pas arrivé depuis des semaines. Il se força à se calmer et tira une longue bouffée de fumée grise sur sa cigarette mourante.
-Agit comme un homme et mets un terme à l'abjection que tu es devenu.
Sa voix était un murmure. L'intonation était devenue séductrice.
-Finis-en ce soir. Épargnes toi des années de douleur et toute la peine que tu infligera à tes amis en leur montrant à quel point tu es tombé bas. A quel point tu es pathétique.
Potter ne bougeait toujours pas, les yeux résolument fixés sur la table basse. Ses mains posées sur ses genoux tremblaient.
Draco fit quelques pas et écrasa le mégot rougeoyant dans un cendrier en ivoire précieux sur la table basse. Il était tout proche du brun. Tellement proche qu'il pouvait sentir les effluves qui émanaient de son corps raidi de souffrance : c'était un mélange de whisky, de tabac froid et quelque chose d'épicé. L'odeur piquante des drogues mélangées à celle plus entêtante de la sueur après le sexe.
Draco sentit son estomac se retourner de dégoût.
Il franchit les quelques dizaines de centimètres qui le séparaient de la silhouette dans le fauteuil. Puis posa ses mains sur les épaules du brun, ignorant le sursaut de haine que cette promiscuité générait contre sa moelle épinière.
Potter le regarda alors avec cette même expression troublée, les pupilles dilatées, le regard fou et brillant. Un moment son regard parut dériver vers son torse nu, mais c'était si fugace que Draco crût l'avoir imaginé.
Si sa silhouette et son visage émacié le faisait paraître plus jeune, il suffisait de plonger dans les verts méandres tortueux pour se rendre compte que Harry Potter était en fait beaucoup plus âgé. Il semblait avoir vécu cent années toutes aussi malheureuses et solitaires les unes que les autres.
-Ton père méritait de mourir. Chuchota-il cruellement tandis qu'une once de vie alluma vaguement le visage aux traits tirés.
Ses lèvres étaient roses et fines. Une ombre de barbe obscurcissait sa mâchoire franche et bien dessinée.
Les mains de Draco se serrèrent malgré lui sur les épaules qu'elles tenaient. Il savait pertinemment que Potter le provoquait exprès, mais la rage qu'il nourrissait depuis des années semblait vouloir se jeter dans le piège grossier qu'on lui tendait.
Il serrait si facile de déplacer ses mains. Les faire glisser le long des clavicules qu'il apercevait à travers le col du sweat informe, doucement, presque sensuellement.
Une caresse d'amant.
Puis ses mains s'enrouleraient autour du cou fragile et il regarderait le vert des yeux se faner peu à peu au fur et à mesure qu'il extirperait la vie hors du corps de Potter.
Draco eut un sourire qui n'atteint jamais ses yeux.
-Je sais ce que tu cherches à faire. Et je ne le ferais pas.
Les yeux de Potter l'affrontaient toujours. Le blond entendait sa respiration calme et régulière. Le sursaut de vie qui naissait dans les prunelles vertes lui donna alors une certitude : oui, c'est lui qui allait tuer Harry Potter.
Il ne laisserait ce plaisir à personne !
La descente aux enfers du brun était à lui. Il serait son guide macabre, l'ombre de mort qui lui chuchoterait tendrement à l'oreille le chemin à prendre.
Mais il le fera sans se salir les mains. A sa façon. Insidieusement, sournoisement. Et personne ne soupçonnera qu'il était derrière tout ça quand on trouvera le cadavre suicidé du Héros du Monde Sorcier.
Cette fois-ci sa raison et sa folie de vengeance battaient à l'unisson dans le bourdonnement que formaient ses pensées. Elles approuvaient sa décision, l'appuyaient, lui susurraient toutes les étapes du plan qu'il allait devoir suivre à la lettre pour arriver à ses fins.
-Je ne te donnerais pas ce que tu veux Potter. Je n'ai jamais fais ce que tu voulais et je ne vais pas commencer maintenant. Mais je vais te donner autre chose...
Draco lâcha avec soulagement les épaules du corps tant honni et il s'assit à même le sol devant le fauteuil du brun. Il aurait dû se sentir en position de faiblesse, torse nu, en simple pantalon de pyjama assis aux pieds de son ennemi comme un chien obéissant mais la vérité était que c'est lui qui dominait la situation. La baguette de Potter était dans la poche arrière de son pantalon et l'ancien gryffondor était suspendu à ses lèvres, avide de ces mots et de cette solution qu'il lui faisait miroiter comme un miracle.
C'était Potter le chien obéissant.
L'héritier Malefoy savoura ce moment de puissance, prit le temps de saisir une nouvelle cigarette sur la table derrière lui et de l'allumer avec nonchalance.
-Tu as l'air épuisé. Annonça-t-il tranquillement, négligemment. J'ai peut-être quelque chose qui pourrait t'aider à dormir un peu.
Une grimace qui semblait vouloir imiter un sourire ironique déforma les lèvres du brun pendant un moment. Il ne lâchait pas les prunelles grises du regard.
-Dormir ? Si seulement... Il passa une main dans ses cheveux déjà bien ébouriffés. Les potions de sommeil sans rêve ne marchent plus sur moi depuis longtemps déjà. L'alcool, le sexe et la drogue non plus comme tu peux le constater.
-Ce n'est pas une potion de sommeil sans rêve que je te propose. Répondit simplement Draco, s'amusant de la lueur d'intérêt qui venait d'éclairer le visage du brun. Attends moi ici.
Il tendit sa cigarette à moitié fumée à son ennemi comme s'il s'agissait d'un de ses domestiques et déploya sa longue silhouette alors qu'il se levait lentement. Il avait la démarche précautionneuse d'un homme ivre qui faisait son possible pour paraître sobre mais Potter le regardait comme s'il était un quelconque Dieu en train de lui accorder son vœu le plus cher.
L'ancien serpentard aima ce regard et la sensation de puissance qu'il engendrait. Il déverrouilla les portes du salon mais ne les referma pas derrière lui. L'ancien gryffondor allait rester, il en était sûr. Il allait l'attendre docilement.
Soumis, fasciné et désespéré.
Ce qu'il comptait donner au brun était illégal et dangereux. Juste avant la mort de sa mère, Draco s'était essayé à quelques activités susceptibles de l'aider à oublier sa haine des gens en général et Potter en particulier.
Il avait donc pendant quelques semaines pratiqué l'art des potions avec un certains succès. Son parrain avait d'ailleurs décelé bien avant Poudlard des dons certains pour les potions qu'il lui conseillait constamment de cultiver.
Mais Draco était nonchalant, inconstant. Il n'avait jamais réussi à se concentrer entièrement sur une seule chose et il ne s'essayait aux mélanges magiques que lors de grandes périodes d'ennuis et jamais plus de quelques semaines.
Pourtant, l'insomnie et la souffrance aidant il avait réussi à créer une potion à ce moment là (une mixture faites à base de poisons, de drogues et de sang d'hippogriffe) qui lui garantissait un sommeil réparateur et dénué de cauchemars.
Il en prenait lui-même parfois quand ses nuits devenaient atroces mais jamais trop fréquemment car au fur et à mesure du temps les réveils devenaient de plus en plus brutaux quand la vague de souvenirs sanglants lui revenait en pleine face.
Après un détour dans son laboratoire de potions et un moment dans le couloir pour mettre en ordre ses pensées et rejouer calmement le plan qu'il avait prévu cette nuit pour Potter il entra à nouveau dans le salon et se dirigea vers le fauteuil de son invité. Le brun n'avait pas bougé d'un centimètre et la cigarette de Draco se consumait lentement entre ses doigts.
Il la récupéra, tira une longue bouffée, sachant le regard vert et quémandeur fixé sur lui. Puis il lui tendit un petit flacon, pas plus grand qu'un verre à liqueur et rempli d'un liquide au rouge si profond qu'il en paraissait noir.
Potter le prit sans poser de question et Draco retourna s'installer sur le fauteuil en face de lui.
-Bois. Ordonna-t-il.
Un muscle sur la mâchoire du brun se contracta devant le ton autoritaire. Ce fut assez rapide, comme un réflexe qu'on a du mal à réprimer. Le blond se fit la réflexion que le Potter adolescent, frondeur et fier, n'avait pas totalement disparu et le voir obéir en devint d'autant plus jouissif.
Cela aurait pu être un poison.
Il y 'en avait dedans d'ailleurs.
Une dose infime certes mais rien qu'en voyant la couleur sombre de la potion n'importe quel sorcier sain d'esprit aurait refusé d'y goûter. Potter pensait d'ailleurs peut-être que ça en était. Pourtant, il déboucha le petit flacon, planta à nouveau ses iris verts comme un mauvais alcool dans ceux de Draco et vida le récipient d'un trait.
Il y avait une lueur de défi dans ses yeux, comme s'ils avaient quinze ans et qu'ils se trouvaient sur un terrain de quidditch.
L'ancien mangemort l'observa attentivement. Ni l'un ni l'autre n'avait envie de rompre le silence qui venait de s'installer. Il n'y avait rien à dire de toute façon. Soit l'impression de Potter était bonne et il venait d'avaler un poison mortel et probablement très douloureux, soit il s'agissait vraiment de la potion miracle dont le blond lui avait parlé. Dans ce dernier cas, le fait qu'il l'ait réellement aidé était presque aussi effrayant que l'hypothèse du poison de l'avis de l'ancien gryffondor.
Les yeux du Sauveur papillonnèrent imperceptiblement au bout de quelques minutes. Il sentit ses muscles se détendre d'un seul coup comme si on avait relâché un ressort tendu à l'extrême puis il tomba dans un sommeil profond sans même s'en apercevoir.
L'ancien serpentard ne retint plus son soupir en entendant la respiration régulière et profonde qui s'élevait de la silhouette endormie dans le fauteuil.
Et bien, Potter n'avait pas menti en se disant habitué aux drogues et potions ! Malgré sa faible corpulence, il avait résisté aux effets du philtre pendant un temps incroyablement long. Lui-même mettait deux fois moins de temps pour y succomber alors qu'il y était accoutumé.
Il chassa cette pensées de son esprit et la jalousie qu'elle y faisait naître pour se concentrer sur le plus important.
Draco n'était pas impulsif, il n'aimait pas prendre des décisions rapides et se fier à son impression du moment. Cela faisait d'ailleurs de lui un piètre combattant sur le terrain de bataille une fois sorti du contexte habituel.
En revanche il se savait particulièrement doué et inventif quand il s'agissait d'analyser à tête reposée les méandres d'une situation inextricable pour le commun des mortels.
Il était capable d'élaborer des stratégies habiles et sournoises comme personne. Mais pour cela il avait toujours besoin d'un peu de temps.
Et c'est ce qu'il venait de s'offrir en donnant la potion à Potter. Un temps précieux.
Les premières lueurs de l'aube coloraient les murs immaculés d'une teinte grisâtre quand il fut totalement satisfait de sa ruse à venir. C'était tout simple.
Potter était dans une période de vulnérabilité inouïe. Il avait le devoir de l'utiliser à son avantage. La vengeance n'était pas sa seule motivation fort heureusement sinon le cadavre du brun aurait déjà gît à ses pieds et entraîné avec lui une condamnation à mort pour le dernier des Malfoy.
Draco se sentait investi d'une mission plus importante qui le faisait tenir jour après jour et qui l'empêchait de s'autodétruire totalement -contrairement à la loque brune dans son fauteuil- à coup d'alcool et de drogues dures.
Draco avait le devoir de restaurer l'Empire Malfoy. Il devait à son père et à toute sa lignée de conserver ses biens, accroître son pouvoir et laver son nom du déshonneur.
Le blond aimait le pouvoir, c'était inextricable à son être. Cet amour coulait dans ses veines autant que la magie elle même.
Cet amour avait causé la mort de son père qui pensait redevenir le bras noir du Lord Noir en tuant la fille de membres de l'Ordre du Phénix.
Alors l'ancien mangemort prenait en compte les erreurs passées. Il ne laisserait pas cet amour
le perdre.
Il aurait le contrôle.
A dans quelques jours pour la suite !
