Salut à toutes ! J'inaugure enfin ce nouveau thème « Criminels vs Justiciers », on va commencer par une histoire qui se passe en 1880, les prochaines seront plus modernes.

Je dois vous avouer que je connais mal cette époque et ce monde, mes connaissances sur le Far Ouest me viennent des séries « Docteur Quinn » et « Deadwood ».

Ça se passe à Port Angeles car Forks n'existe que depuis 1945.

Pour ménager mon ordinateur, j'ai du couper cette histoire en quatre parties -)


Comme Calamity Jane

Rated : T – tous humains

PDV : Bella

Couple : Edward et Bella

1880 – Port Angeles

Première partie

Mon père se met à crier, l'instant d'après ses yeux roulent dans ses orbites, il s'écroule à terre, sa veste déjà inondée de sang. Je tombe à genoux à côté de lui, prends en sanglotant sa tête dans mes mains.

« Ne meurs pas, père, je t'en supplie ! »

« Ma fille… venge-moi… »

Je me réveille en sursaut comme chaque nuit depuis un mois. Ma main essuie la sueur sur mon front, nous sommes pourtant en février, il fait très froid.

Mon père, Charles Swan, shérif de Port Angeles a été lâchement pris pour cible un mois plus tôt dans le saloon du nord de la ville. Il a miraculeusement survécu mais n'a jamais recouvré ses forces. Depuis une dizaine de jours, le « médecin » me harcèle pour que mon père reste chez nous. J'ai beau lui dire que je ne peux pas lâcher mon poste intérim de shérif, il ne veut plus s'encombrer d'un malade. Je le paye pourtant bien.

Tous ne peuvent pas comprendre, et tous n'acceptent pas non plus. Depuis un mois, notre paisible ville a cruellement besoin d'un nouveau shérif, à croire que les vauriens n'ont attendu que cette occasion pour passer à l'acte. Si j'ai pu dans les premiers jours endosser le costume trop grand et surtout pas du tout séant pour une demoiselle, je ne peux plus remplacer mon père.

Je suis blasée par toutes ces querelles de commerçants, d'agriculteurs, d'éleveurs, lasse de séparer les ivrognes dans la rue qui veulent se départager dans un duel à l'arme à feu. La ville ne compte que sept cent trente quatre habitants pourtant elle me paraît désormais plus dangereuse que Phoenix où j'ai grandi jusqu'à mes cinq ans ou encore San Francisco où j'ai souvent séjourné.

Nous sommes arrivés Port Angeles onze ans plus tôt d'ailleurs parce que mon père voulait m'épargner la vue de pauvres hommes, aveuglés par la ruée vers l'or d'abord, les poches vides et noyés dans l'alcool ensuite. En vérité, c'est un homme qui étouffe en pleine ville, il n'en saisit pas les codes, sur ce point je le comprends. Je ne l'ai su qu'une fois adulte, il a risqué très souvent sa vie à Phoenix et moi-même ait failli être tuée par des bandits que mon père avaient arrêtés, qui s'étaient enfuis et qui avaient voulu se venger.

Je trouve cette bourgade ridicule, les gens les plus riches, ceux qui ont toujours du pain frais sur leur table et de la viande au moins le dimanche, se croient aussi raffinés que les bourgeois de la grande ville. Ils organisent un bal pour chaque occasion, et les femmes alors rivalisent pour savoir qui a pu s'offrir la plus belle robe. Je n'ai qu'une consolation, mon père pense comme moi et envisageait d'acheter une parcelle de terre à vingt kilomètres de la ville.

Ma profession fait jaser, à mes dix-huit ans, je suis devenue chasseuse de primes. Je rêve de parcourir le pays d'est en ouest pour servir la justice. Mon père m'a tout appris, si j'avais été un garçon, il m'aurait formée au métier de shérif, évidemment. Et quand je lui ai annoncé, adolescente, mon souhait de devenir chasseuse de primes, il a d'abord refusé. Nous nous sommes tellement fâchés qu'il a failli me marier de force à Mike Newton. J'ai gagné cette bataille, je ne lui en ai pas voulu, il s'inquiète toujours de ce que je vais devenir quand il sera mort. Cette la tentative d'assassinat aura prouver que je peux affirmer que je m'en sors très bien seule.

Ma mère est un fantôme pour mon père et moi, nous avons dit à tout le monde ici qu'elle était morte lors de notre voyage vers Port Angeles. Je pense qu'elle est toujours vivante, à Phoenix, au bras d'un autre homme. Ma mère est une égoïste, mon père ne l'a pourtant jamais blâmée devant moi, je la déteste de l'avoir rendu malheureux.

En tant que fille du shérif, et du meilleur shérif je précise, j'ai très tôt été confrontée aux malheurs qui se déroulent derrière les portes des maisons. Je ne compte plus le nombre de femmes battues que mon père a recueillies, aidées, sauvées. J'ai grandi en tant que fille unique mais la maison était rarement vide. J'ai croisé la route de Martha Jane Canary, dite Calamity Jane notamment, et celle de dizaines d'étrangers dans le besoin, eux tous m'ont donné la volonté de changer le monde.

Souvent moquée, critiquée, déconsidérée par le bon peuple de Port Angeles, j'ai aussi des alliés. Sans mes amis, je serais déjà repartie en mission au lieu de veiller mon père dont l'état stationnaire ne m'apporte aucun réconfort. J'ai besoin d'action, j'étouffe à Port Angeles.

Mais ce matin, enfin, le nouveau shérif et sa famille vont arriver, je n'aurais plus besoin de rester ici. Les autorités ont eu du mal à trouver un volontaire pour ce poste dans un coin aussi rigoureux du continent. Il y a une semaine, enfin on m'a annoncé l'arrivée du nouveau shérif : Edward Cullen.

Il arrive dans une diligence en début d'après-midi, le retard n'a étonné personne. Le maire, M. Newton, en personne est venu l'accueillir. Il m'a fait jurer d'être présentable à cette occasion puisque je vais devoir lui faire visiter les lieux. J'ai revêtu à contre-coeur une de mes deux seules robes, la bleue, celle que je porte les dimanches quand je suis obligée d'assister à l'office religieux du révérend Webber.

C'est la surprise générale quand Edward Cullen apparaît. Je n'ai eu aucune autre précision sur lui, si ce n'est que sa famille s'installerait avec lui à Port Angeles. Il est seul et jeune, trop jeune pour être shérif. Ça explique pourquoi il a été accepté à ce poste, tous les autres ont refusé, un débutant a voulu tenter sa chance et l'a obtenue. C'est bien ma veine.

Je suis présentée sommairement, Edward Cullen ne semble pas réceptifs aux courbettes du maire et des « notables » de la ville. Il monte rapidement sur le cheval de mon père, dont il hérite du fait de sa prise de fonction. Il devrait aussi posséder le petit logement que j'occupe au-dessus du bureau et des deux cellules, mais mon père n'est pas mort. De plus, la famille Cullen va faire construire une maison, le terrain a déjà été acheté.

Edward ne m'a pas encore parlé, hormis son bonjour général à sa descente de la diligence, je n'ai pas entendu sa voix. Il me suit au petit galop à travers les rues de la ville, ça nous prend presqu'une heure car beaucoup insistent pour se présenter à lui. Ils ne récoltent qu'un hochement de la tête, après tout il sait que tous connaissent son nom.

Arrivés enfin au bureau, je le sens plus à l'aise. Je ricane pour la vingtième fois au moins, il n'a pas du tout l'étoffe d'un shérif. Il vient de la ville, Chicago, il ne connaît rien de l'Ouest sauvage. Je lui donne deux semaines avant qu'il ne rende son badge, cette perspective m'amuse et me contrarie à la fois. J'ai beau ne pas adoré cette ville, je ne peux pas la quitter sans savoir que quelqu'un est en charge de sa protection.

« Où se trouve votre père ? » me demande-t-il soudain.

« Chez le médecin… enfin chez le barbier. »

Ici, nos médecins sont avant tout barbiers, mais dans la grande ville, il en est autrement.

« Mon père est médecin, il arrive dans un mois tout au plus. Je lui parlerai de votre père, si vous le souhaitez. »

« Ça s'rait bien. »

Je me méfie de lui, je me méfie des gens de la ville, et de ceux de la campagne d'ailleurs, en fait je me méfie de tout le monde. Pourtant il m'inspire confiance, je ne me l'explique pas.

Edward Cullen est bien plus grand que je ne l'ai cru au premier abord, alors qu'il lit quelques documents indispensables, je peux admirer sa carrure et les traits ciselés de son visage. Ses yeux sont d'un vert ensoleillé, celui des feuilles sous un ciel d'été, je suis fascinée malgré moi.

« Il n'y a pas d'hôtel, le maire a proposé de vous loger. »

« Ah… »

« Il y a un problème ? »

« J'ignorais que le logement ne serait pas disponible. » me dit-il doucement.

Veut-il me mettre dehors ? J'aimerais bien voir ça, tiens !

« Ça me semble très pratique de vivre au-dessus du bureau, c'est tout. » ajoute-t-il quand il me voit croiser les bras farouchement sur ma poitrine.

« Vous avez assuré la relève, Miss Swan ? » m'interroge-t-il quelques minutes plus tard.

Il tient dans ses mains les enregistrements du mois passé, j'ai signé toutes les mises en accusation et tous les rapports. C'est sûr qu'en me voyant, attifée comme une petite chienne de salon, il ne peut pas y croire.

« Oui, je suis chasseuse de primes. » j'annonce, anticipant déjà une remarque misogyne.

« Impressionnant. » dit-il seulement.

« Combien de temps il va vous falloir pour être opérationnel ? »

Il est décontenancé par le ton sec de ma demande, je m'en veux un peu. Bon sang, j'ai du mal à agir rationnellement en sa présence.

« Je dois partir à la recherche du criminel qui a blessé mon père. » j'explique.

« Je croyais le coupable en prison. »

Mes poings se serrent, Jacob a pourtant été innocenté mais parce qu'il est indien, rien n'y fait, les gens ne veulent pas accepter qu'il n'a pas tiré sur mon père. J'ai caché à tous d'ailleurs que j'ai une piste fiable, il ne me reste plus qu'à me mettre en route.

« Vous avez été mal informé, je réplique il court toujours. »

« Oh… Dites, si vous partez, je pourrais m'installer ici, non ? »

Je ne l'ai pas envisagé puisqu'il était censé venir avec sa famille, le logement n'a qu'une chambre, la mienne, mon père dormait dans la salle/cuisine.

« C'est d'accord, mais quand serez-vous prêts ? » je le défie.

« Vous pourrez partir dans deux jours, Miss Swan. »

Il n'y a que lui qui m'appelle comme ça, pour tous, je suis Bella. J'ai été la pauvre Bella quand adolescente, je n'avais pas les moyens d'avoir une robe pour chaque jour de la semaine, parce que je n'étais jamais invitée à danser au bal, ou encore parce que j'étais « obligée » de traiter avec les Indiens, en suivant mon père. Depuis que je suis chasseuse de primes, je suis le gars du shérif.

Habillée en homme, je cache souvent que je suis une femme lors de mes missions. Une silhouette fine et les criminels se croient sortis d'affaire. Ils sont alors moins prudents et j'en tire toujours avantage. Je sais tirer bien mieux que la plupart des hommes de l'ouest, je cours vite, je peux survivre seule des semaines entières, je n'ai pas peur.

Le lendemain matin, j'attends Cullen de pied ferme, il va devoir me prouver qu'il est capable d'être un bon shérif. Il tique en me voyant assise au bureau, le registre des décès en main.

« Bonjour. » je lui lance sans relever le nez.

J'entends clairement sa surprise, il inspire rapidement et me dévisage. Aujourd'hui, j'ai rangé ma robe bleue et j'ai mis mon pantalon de cuir, une chemise de lin par dessus mon corset.

« Miss Swan. » me répond finalement Cullen.

« Il y a eu un décès cette nuit, en route. »

Il me regarde étrangement quand j'enfile ma veste épaisse, mon chapeau, et que je noue ma ceinture avec mon arme autour de la taille. Il me suit à pied jusqu'à la quatrième rue, où résidait M. Banner. Sa veuve est venue me voir la veille alors que j'étais déjà couchée pour m'annoncer le décès de son mari. Je sais que M. Banner était malade, habituellement le shérif n'a pas besoin de s'attarder sur un tel événement. Je me demande ce que va faire Cullen. A-t-il seulement déjà été shérif ? Ou même adjoint ?

On a besoin de s'assurer que le défunt n'a pas contracté une maladie, Port Angeles a connu plusieurs pandémies ces dernières décennies. Cullen se débrouille bien, il présente ses condoléances, discute avec le « médecin », M. Stanley, signe l'autorisation d'enterrement.

Je sens son regard régulièrement sur moi, il hésite à parler quand je lève la tête vers lui. Dérouté ou curieux, je ne le sais pas, mais Cullen n'est en tout cas pas stupide. Il prend chaque détail en considération, veut ainsi apprendre parfaitement la dynamique de cette bourgade insignifiante.

Dans l'après-midi, je croise mon amie, Rosalie Hale. Quand il me voit m'arrêter devant le saloon, Cullen se tend. Rosalie est une prostituée pour une semaine encore, elle recouvre sa liberté car elle aussi a été blessée le soir où on a tiré sur mon père. Or son « contrat » ne peut être briser que si James Hunter a failli à sa mission de la protéger, ou en versant une fortune en dédommagement. Hélas elle a un délai d'un mois au moins avant de partir.

Rosalie salue poliment le nouveau shérif, elle enchaîne bien vite en me racontant à demi-mots la pression que lui mettent les propriétaires du saloon. J'entraîne Edward dans l'établissement, lui laisse quelques instants pour étudier l'endroit. James Hunter émerge d'une chambre peu après que sa femme, Victoria, ait été le prévenir.

« Shérif Cullen ! Enchanté de faire votre connaissance. Je vois que vous apprenez avec le gars Swan. » se moque-t-il.

« Miss Swan se charge en effet de me présenter à tous. » répond fermement Edward en serrant la main tendue de James.

« Que puis-je faire pour vous ? »

« Je sais que ça doit être fait la semaine prochaine mais le shérif va procéder maintenant à la vérification des comptes et aux interrogatoires. » j'annonce, un grand sourire sur les lèvres.

Mon père a mis en place ce système quand James a voulu ouvrir son établissement, six ans plus tôt. Le maire, c'était déjà M. Newton, a été juste heureux de vendre à un prix d'or la bâtisse. Chaque mois, le shérif épluche les comptes du saloon, mon père a découvert plusieurs fois que James arnaquait ses fournisseurs et ses clients. Il interroge aussi les prostituées même si les pauvres ne rapportent pas les abus de peur des représailles. Si ça n'avait tenu qu'à lui, mon père aurait interdit la prostitution, il n'a pas pu pour le coup enfreindre la loi.

James qui râle, nous montons tous à l'étage et le nouveau shérif rougit jusqu'aux oreilles en entendant les gémissements en provenance des trois chambres du premier étage. Il me jette un regard inquiet, si il savait, j'ai vu et entendu bien pire. Nous ressortons du saloon deux heures plus tard. Edward a été très consciencieux, il a prouvé à James qu'il serait aussi incorruptible que mon père.

Rosalie est rabrouée par Victoria quand nous redescendons, cela cesse quand la rouquine nous aperçoit. Laurent, l'esclave affranchi qui est au service des Hunter, sépare deux hommes qui se battent pour une partie de cartes truquée. Je ne vais pas intervenir et je fais signe au shérif de passer également son chemin. Cullen décide tout de même de fouiller tous les clients, aucun n'est armé. Il est interdit de porter une arme en dehors de son domicile, ou lorsqu'on chasse. Le saloon est ainsi fouillé chaque semaine, Edward prend note des habitudes de surveillance de l'établissement.

« Ils vous détestent. » commente-il quand nous repartons du saloon.

« Ce ne sont que les ivrognes notoires. Il y a eu des trop nombreux malencontreux accidents, des blessures la plupart du temps mais deux hommes et une femme ont été tués déjà. Vous devez empêcher que la liste se rallonge. »

« Et cette Rosalie Hale ? »

Je me dis qu'il a bavé devant elle, comme n'importe quel autre homme, après tout, James dit d'elle qu'elle est la putain la plus désirable de tout l'État. Je n'ai jamais été jalouse de Rosalie, c'est mon amie, mais je n'aime pas l'idée qu'Edward ait aussi succombé. Autant tué dans l'œuf ses fantaisies, et ce que je ressens ne signifie rien.

« Elle va se marier dans un mois avec Emmett Mc Carthy, le forgeron. D'ailleurs, je dois lui parler. Vous venez ? »

Emmett est une force de la nature, tout en muscles, grand, un sourire qui cache sa brutalité si on se met en travers de son chemin. Enfant on lui a prédit le destin de l'idiot du village, il est parti faire la guerre et en est revenu transformé. Il a gagné le respect de tous et son métier fait de lui un élément essentiel de la communauté, il n'est pas riche pour autant.

Quand il a rencontré Rosalie Hale, il y a un an à peine, il a voulu la sortir du saloon. James Hunter avait pour lui la loi, les amoureux ont envisagé plusieurs scénarios, ils s'étaient résolus à économiser et à racheter la liberté de Rosalie. Après la tentative d'assassinat de mon père, je n'ai pas écouté mon cœur, seulement mon sens du devoir. J'ai envisagé qu'Emmett ait pu prémédité ce coup pour briser le contrat qui enchaîne encore Rosalie. Il n'y est pour rien pourtant et dans peu de temps, il épousera celle qu'il aime depuis leur première rencontre.

« Shérif Swan. » me salue amicalement Emmett.

« Emmett. Tu vas devoir m'appeler de nouveau Bella, je plaisante tout en pointant Edward qui se tient un mètre derrière moi. Le shérif est arrivé hier. »

Cullen s'avance et tend sa main, Emmett ne prend pas la peine d'essuyer la sienne et serre sans doute un peu fort celle du shérif.

« Je voulais te dire que Victoria s'en est encore pris à ta fiancée cet après-midi. »

« Tiens ! s'exclame presque joyeusement Emmett, ce qui me fait peur. Puisqu'il y a un nouveau shérif, je vais peut-être pouvoir enfin marchander ! Quel est ton prix pour que je puisse dégommer les Hunter sans être pendu ? »

Cullen secoue la tête, Emmett hausse les épaules. Moi non plus je n'ai pas pu lui permettre ça, même si j'en ai terriblement envie.

« Je passerai chaque jour au saloon pour m'assurer que votre fiancée va bien. » lui promet Edward.

Il est presque l'heure du dîner lorsque nous regagnons le bureau, je meurs de faim, je salue Cullen et monte à l'étage. Je ne m'attends pas à ce qu'il me suive.

« Les Newtons ont sûrement déjà dîné. » prétend-il.

Je lui désigne la chaise face à moi, trop fatiguée pour protester et pour me souvenir de mes bonnes manières.

« Vous allez partir longtemps ? » me questionne-t-il après avoir écouté sans broncher ma courte prière avant de manger.

« J'en sais rien. »

« Une semaine, tout au plus. » présume-t-il.

« Je vais tâcher d'être là à temps pour le mariage de mes amis. »

Edward ne parvient pas à cacher sa surprise, il me sous-estime depuis notre rencontre, pour sa défense, il ne me connaît pas encore. Non pas que je veuille qu'il me connaisse.

« Demain matin nous irons à la Push, je vous attends à six heures. » je lui lance en débarrassant la table.

Il comprend qu'il est temps pour lui de rentrer chez le maire, il me remercie pour le repas, m'assure qu'il sera à l'heure, me souhaite une bonne nuit mais il hésite avant de quitter la pièce.

« Vous êtes en sécurité, ici, toute seule ? »

Je prends sur moi pour ne pas être vexée.

« Vous savez ce que font les chasseurs de primes ? »

« Oui. » répond-il rapidement, peu à peu la réponse à sa première question obtient une réponse et Edward me sourit pour s'excuser.

« Bonne nuit, Miss Swan. »

_oOo_

La Push est situé sur la côte, avant d'entrer dans la réserve indienne, j'en apprends les limites à Edward.

« On a commencé à faire du commerce en 1857, je le renseigne. Les Quileute ont signé un traité de paix et ils n'aiment pas qu'on pénètre dans leurs terres. Mon père et moi avons une autorisation permanente et en tant que nouveau shérif, vous vous devez de l'avoir également. »

« Il y a réellement besoin de venir ici souvent ? » s'inquiète Cullen.

Je parie qu'il n'a vu d'indiens que dans des spectacles.

« Ils sont très civilisés, je précise. La nouvelle génération parle notre langue, et porte des prénoms chrétiens. »

« Je comprends. Comment dois-je faire ? Je leur serre la main ou… »

« Imitez-moi. »

Il fait ainsi, nous rencontrons Billy Black, le chef, de son vrai nom Tonnerre d'été. Je fais un geste d'hommage au chef, Edward fait de même et Billy éclate de rire puis me tape sur l'épaule. À la réserve comme en ville, je suis considérée comme un garçon. Une femme n'entre jamais dans le tipi du chef, j'ai gagné cet honneur au fil des années et des services rendus. Les Quileute ont maintenant des petites maisons, les tipis sont toujours utilisés pour des occasions spéciales.

Edward, comprenant la plaisanterie, ne se vexe pas. Comme moi, il s'assoit par terre et ôte son chapeau. Billy parle mal l'anglais mais sait se faire comprendre. Après avoir exposé quelques légendes à Edward, il fait appeler Jacob. Pour le troc avec les « colons », il a désigné son unique fils.

Jacob n'a qu'un an de moins que moi, il subit davantage de pression pour se marier, d'autant que Billy a de plus en plus de mal à marcher. Le futur chef a demandé ma main il y a trois ans, c'était embarrassant, je ne lui en veux pas mais j'étais drôlement soulagé quand son père s'est opposé à l'affaire. Mon père aurait aussi refusé, simplement parce qu'il ne voulait pas que je devienne une vraie sauvageonne.

J'adore venir à La Push, la plupart du temps personne ne me repère. La nature déchaînée de la côte me fascine, elle me fait oublier ce ciel perpétuellement gris et les journées pluvieuses. Je la préfère à la compagnie des gens, elle est vraie et entière, sans pitié certes mais capable de merveilles.

Edward me paraît charmé par l'endroit, par précaution, je le mets tout de même en garde.

« Les courants sont forts été comme hiver, il y a des cas de noyades chaque année hélas. Nous déconseillons aux gens de s'approcher également, les indiens chassent chaque jour, même si ils sont essentiellement pêcheurs. »

« C'est entendu. J'ai une question. »

« Je m'attendais à plus. » je remarque, sarcastique.

« Euh… »

« Il ne se passe pas grand chose dans le cas, je me sens obligée de dire pour le rassurer. Vous allez vous y faire. »

« Merci. »

Sur le chemin du retour vers Port Angeles, Edward me questionne longuement sur les habitudes des Quileute et leurs interactions avec les habitants des environs. La journée se traîne ensuite, Edward insiste pour parcourir la ville avec moi. J'apprends que sa famille arrivera dans moins d'un mois, il devra superviser la construction de la maison de ses parents.

Sa jeune sœur, Alice, arrivera également et il se lamente à l'avance de sa réaction. Il me dit sans gêne que sa famille a beaucoup d'argent et que sa petite sœur enrage de s'exiler dans une ville sans même un couturier reconnu.

« Elle ne trouvera jamais un parti acceptable ici. » je me permets.

« Nous verrons bien, mes parents ne sont pas snobs. Ils lui permettront de se marier par amour et l'aideront financièrement si besoin. »

Je hausse les épaules, toutes ces problématiques ne sont pas à l'ordre du jour pour moi. Aucun homme de Forks ne me plaît, et si avant de devenir chasseuse de primes j'ai été courtisée quelques temps, je ne me suis jamais imaginée mariée. C'est hélas le vœu le plus cher de mon père, il dit souvent qu'il pourra mourir en paix seulement quand il verra ses petits-enfants se marier eux-même.

Le soir venu, je vais dire au revoir à mon père qui peine à ouvrir les yeux. Ensuite je galope jusqu'à la maison d'Angela et de son mari Ben qui vivent en bordure de la ville, et enfin à Rosalie et Emmett. Je leur demande de garder un œil sur mon père, Emmett promet aussi de surveiller le nouveau shérif.

Edward me souhaite un bon voyage dans le bureau, je ne le reverrai pas avant mon départ le lendemain matin aux aurores. Je me maudis, seule dans mon lit, parce que je ne peux pas dormir. Ce qui était si facile avant est presque devenu une corvée. Dès que je ferme les yeux, j'imagine Edward Cullen, son regard vert, son sourire timide, ses lèvres sur les miennes, ses mains sur mes hanches. Ça n'est que passager, rien qu'une conséquence d'un événement inattendu. Une fois que je serai seule et loin de lui, je l'oublierai rapidement.

FIN DE LA PREMIÈRE PARTIE