Coucou,
J'ai eu l'idée de cette fiction après avoir écouté "Young and beautiful" de Lana Del Rey.
Bonne lecture !
Volterra, 1er juillet 2015
L'été était arrivé avec son flot de touristes. Assis confortablement à son bureau dans son fauteuil Voltaire, Aro Volturi s'efforçait de ne pas faire attention à toute cette masse bruyante. Malheureusement pour lui, son ouïe surdéveloppée ne l'aidait pas dans cette tâche. En trois mille années d'existence, il avait réussi à trouver une technique pour ignorer les bruits de son entourage comme par exemple les soupirs de Marcus ou les grincements de dents de Caius. Cependant, cette technique était inefficace en été. Les humains étaient décidément un peuple beaucoup trop bruyant. L'un criait pour qu'on lui achète ses melons, un autre pour qu'on lui achète des chapeaux, un autre pour proposer des portraits... Mais les touristes étaient pires ! Ils ne cessaient de hurler pour un oui ou pour un non. "Oh, regarde ! Oh, c'est magnifique ! Kyahhhh ! Maman ! Papa ! J'ai faim ! Pipi !"... Toute la journée !
Aro, d'un naturel patient, dû se rappeler que cela ne durerait que deux petits mois et que cette période n'était rien lorsqu'on pouvait, comme lui, vivre éternellement. Il se rappela également que dans quelques heures, il pourrait se nourrir et cela le fit sourire. Ventre affamé n'a point d'oreilles, disait-on. Selon lui, c'était plutôt "Ventre rassasié n'a point d'oreilles". Son humeur, tout comme celle de la totalité des vampires habitant le château de Volterra, s'améliorait considérablement après s'être abreuvé de sang humain. Si seulement il n'avait pas interdit la chasse à Volterra, alors, il aurait pu sortir et permettre à son clan de se nourrir de tous ces humains bruyants. Il aurait ainsi eu la paix et aurait pu se concentrer sur ces comptes.
Mais, pour cacher sa nature vampirique, il avait dû instaurer cette loi. De cette manière, le nombre d'habitants à Volterra ne diminuait pas et personne ne se doutait qu'au sein du château vivait la famille royale des vampires. Aro retira sa veste et desserra sa cravate. Bien qu'il ne ressente pas la chaleur, il se sentait oppressé par tout ce bruit. Il se leva, attrapa ses longs cheveux qui lui allaient jusqu'aux épaules et les attacha en une queue de cheval. Il se regarda dans le miroir et sourit à nouveau. Il était vraiment bel homme et il en était très fier. Il alla près de la fenêtre et s'assis d'une fesse sur le rebord de la fenêtre. Il appuya son dos contre le mur et se laissa aller à regarder dehors, une jambe dans le vide qu'il laissa se balancer doucement tandis qu'il tenait son autre jambe de ses deux bras. La tête appuyée contre le rebord de la fenêtre, il se demandait pourquoi les humains avaient besoin d'être aussi bruyants. Lui-même aimait s'exclamer pour montrer sa joie et sa surprise mais les sons qui sortaient de sa bouche étaient toujours mélodieux, contrairement aux humains. Oui, si les humains et Aro étaient de la musique, Aro serait une mélodie tandis que les humains seraient des fausses notes.
En entendant le rire particulièrement disgracieux d'une anglaise, Aro ne put s'empêcher de frissonner et de grimacer. Si cette femme se retrouvait un jour dans les filets d'Heidi, il se vengerait de la torture qu'elle venait de lui imposer en la confiant à Jane, grande spécialiste de traitements particulièrement douloureux. C'est alors que la foule se calma et se rapprocha du château. Aro s'inquiéta : l'avait-on repéré ? Normalement, cela était impossible. La tour faisait de l'ombre à son bureau, ce qui l'empêchait de briller aux rayons du soleil et il se trouvait suffisamment en hauteur pour que les humains ne le voient pas. Il observa la scène plus attentivement et se rendit compte que les humains ne levaient pas la tête mais semblaient plutôt concentrés par quelque chose qui se trouvait en bas. Intrigué, Aro ouvrit la fenêtre pour pouvoir se pencher et découvrir ce qui venait de le sauver de tout ce bruit.
Ecoeuré, il vit une mendiante, si sale que son horrible odeur lui monta au nez, s'asseoir sur les bords de son château. Elle avait de longs cheveux bruns, si longs qu'ils descendaient en-dessous de ses fesses. Aro, grâce à sa vue vampirique, se rendit compte que ses cheveux étaient très gras et très fourchus. A son avis, il fallait tout couper et surtout, tout laver ! Pour les vêtements, elle portait un T-shirt qui avait dû être un blanc à une époque mais qui aujourd'hui, tirait plus sur le jaune, en particulier au niveau des auréoles. Son jean était extrêmement usé et troué par endroits, laissant apercevoir des jambes qui, tout comme le T-shirt, avaient dû être blanches autrefois et qui étaient aujourd'hui noircies par la saleté. Des baskets décollées venaient complètement ce tableau qui donnait des hauts-le-coeur à Aro. Il ne pouvait rien dire sur son visage puisqu'elle avait en permanence la tête vers le bas, comme tous les perdants.
Après s'être assise par terre, elle chanta d'une voix sombre, lancinante et sublime :
"I've seen the world
Done it all
Had my cake now
Diamonds, brilliant
And Bel Air now
Hot summer nights, mid July
When you and I were forever wild
The crazy days, city lights
The way you'd play with me like a child"
Le temps sembla se figer. Aro était surpris : comment une personne aussi repoussante pouvait avoir une voix aussi ensorcelante ? La foule s'était arrêtée de respirer et ne vivait plus qu'à travers ses paroles. La mendiante entama alors le refrain :
"Will you still love me
When I'm no longer young and beautiful?
Will you still love me
When I got nothing but my aching soul?"
Aro secoua la tête. Qu'est-ce que c'était que cette question stupide ? Elle pensait sincèrement qu'un homme continuerait de l'aimer si elle n'était plus ni belle ni jeune ? Il était évident que non. C'était d'ailleurs pour cette raison que les humains étaient tant fascinés par les vampires, eux qui possédaient la jeunesse et la beauté éternelle. Mais la mendiante répondit en chantant :
"I know you will, I know you will
I know that you will
Will you still love me when I'm no longer beautiful?"
Aro se désintéressa de cette scène et ferma la fenêtre. Il décida de retourner à ses comptes et oublia cette mendiante.
Ceci n'est que le prologue. Je m'excuse d'avance pour le comportement d'Aro. Il fera des progrès, promis, mais pour l'instant, il est un Roi insensible et narcissique.
