Prologue.

Un vent glacial souffle sur la ville de Magnolia, déserte en ce jour de froid et de tempête. Seules quelques personnes osent affronter ce blizzard, marchant à vive allure dans les rues pour rejoindre au plus vite leur destination. J'en fais partie. Je viens de finir de préparer mes affaires pour la mission que je dois exécuter, rangées dans une petite valise. Je me hâte de rejoindre la gare, courbant la tête sous la puissance des rafales glacées. Le train est déjà arrêté sur le quai. Mon regard se pose rapidement sur la grande horloge qui orne le mur de la gare. Seulement quelques minutes avant qu'il ne parte. J'achète rapidement mon billet, puis monte à bord du véhicule. Je pénètre dans un des compartiments. Une douce chaleur m'enveloppe, puis la porte se referme derrière moi, coupant le vent froid qui tente d'entrer. Je soupire.

J'ai déjà pris quelques jours de retard sur la mission que je dois effectuer, ce n'est pas la météo qui va m'en empêcher. Je pose ma valise à côté de moi, puis l'ouvre. L'annonce de la mission est posée sur la pile de vêtements, je m'en saisis. Cinq cent mille Jewels. Ce n'est pas tant que ça, au final. Ce qui m'a attiré le plus, c'est la description de cette mission « Maintenant, ils sont tous endormis. » Cette phrase m'a fait froncer les sourcils. Oui, elle est très énigmatique, et c'est justement ce qui me plais le plus. En même temps, lorsque j'ai consulté le tableau des missions pour en trouver une, j'ai été comme... aimantée par cette annonce, comme si elle m'est destinée. Peut-être que tout ceci n'est qu'une farce où même un piège, mais cela m'intrigue tout de même.

Des dates de rendez-vous sont marquées en bas à droite. La première correspond au soir de Noël, la date que j'ai ratée. Parce qu'un Noël à Fairy Tail, cela ne se loupe pas. Comme chaque année, cette fête était grandiose, en oubliant les quelques bagarres qui survinrent. La seconde date est celle d'aujourd'hui. La troisième, dans dix jours. En dessous est noté « Train de 11 h 21 en direction de Clever Town. Terminus. » Cela peut être un piège. Mais c'est justement cela qui m'excite le plus, de ne pas savoir ce qu'il m'attend là-bas.

Il faut dire que j'aime beaucoup le mystère, le suspens. Lorsque je consulte le tableau des missions, je prends toujours celle qui m'attire le plus, qui est la plus énigmatique. On peut décrire cette « obsession » par un « reflexe », je dirais. Comme lorsque je fais les magasins, et que mon regard se porte automatiquement sur les vêtements dans les tons bleus. Ou encore quand je cherche un meuble pour mon appartement, et que je regarde tout de suite les plus vieux. Une sorte d'automatisme. Pourtant, à cause de cette curiosité, je me suis souvent retrouvée dans des situations plus qu'impossibles. Entourée d'une centaine d'ennemis au fin fond d'une forêt, par exemple. Mais je m'en sors au final toujours bien, plus ou moins. Je ne suis pas mage S pour rien, non plus. Mais je ne me sers pas vraiment de ce titre. Je n'ai pas tellement fait de S-quest, au final. Pas assez énigmatiques à mon goût. Je ne fais une mission que lorsqu'elle me plais, m'intrigue. Ce qui explique le pourquoi du comment je suis bien trop souvent fauchée. Je peux rester des semaines et des semaines à la guide avant de trouver une mission. Mais celle que je dois effectuer, elle m'a bien plus attirée que toutes les autres que j'ai effectuées auparavant. J'ai vraiment été absorbée, comme si mes yeux ne pouvaient s'en délier. Sortilège, ou réelle curiosité ?

Je repose la feuille dans la valise, puis la referme. Seulement quelques heures de train me séparent de Clever Town. Il ne s'agit pas d'une très grande ville, le seul bâtiment important est le conseil des maîtres de guildes. Je pose ma tête contre la vitre froide regardant le paysage défiler. Le train freine soudainement. Je fronce les sourcils, puis me lève. Un tel blizzard souffle dehors que je ne voie rien à l'extérieur. Il y a peut-être trop de neige sur les rails... Les personnes présentes dans mon compartiment commencent à s'agiter. Quand à moi, je m'enfonce dans le siège en soupirant.

« Le train est actuellement stoppé pour une durée indéterminée à cause du temps. Veuillez ne pas quitter votre compartiment et rester calme. »

Nous en avons certainement encore pour un sacré bout de temps. Génial. La personne ayant écrit la mission va pouvoir m'attendre longtemps.

Je m'ennuie rapidement. Je n'ai même pas pris de livre dans ma valise, du fait que le voyage en train est assez court. Enfin, est censé être court. Et j'aurais mieux fait d'en emmener un. Je me retrouve à devoir écouter les jérémiades de ma voisine, une vieille dame, qui s'est mis en tête de me parler de sa famille. En effet, elle rentre chez elle après avoir fêté Noël en famille. Et elle me décrit maintenant sa belle-fille, après son fils et ses deux filles. Je soupire pour la énième fois, observant le blizzard virevoltant. Je ne me rappelle pas avoir subi un hiver aussi froid depuis quelques années. Mais je n'ai pas été là pendant sept ans, donc je ne peux pas trop m'avancer. Mais la vieille dame à côté me le confirme.

- Je n'ai jamais vu un hiver aussi froid ! J'espère tout de même pouvoir rentrer avant midi.

- Où allez-vous ? Lui demandé-je, décidant de tuer un peu le temps en parlant avec elle.

- À Oshio.

- Où est-ce ?

- Un peu après Clever Town... il serait vraiment temps qu'ils rallongent la ligne de train jusqu'à Oshio, parce que j'ai après bien une demi-heure de calèche, soupire-t-elle.

Elle continue ses jérémiades. Je ressens soudainement une étrange énergie. Je tourne la tête brusquement, me levant. Mais j'ai beau observer toutes les personnes autour de moi, rien. Pourtant, il y a toujours cette puissance autour de moi. Une impression... d'être observée. Je reste en alerte, me rasseyant.

- Tout va bien ? Me demande ma voisine.

J'acquiesce, restant sur mes gardes. Il y a quelque chose d'étrange, autour de moi. Comme si... La magie est brouillée. Tout semble se flouer autour de moi, et cette impression d'être observée passe au dessus de tout, jusqu'à ce que je ne sente rien d'autre... D'un coup, le train s'ébranle et repart lentement, me faisant sortir de ma semi-torpeur. Je cligne des yeux, secouant la tête pour reprendre mes esprits. Le train s'arrête à nouveau. Une nouvelle annonce nous parvient.

« Nous ne pouvons avancer dans ces conditions météorologiques. Le train sera donc immobilisé pendant une durée indéterminée, le temps que le blizzard se calme. Si au bout de quelques heures, nous ne pouvons toujours pas redémarrer, nous vous distribuerons des vivres. Veuillez garder votre calme et éviter de trop circuler entre les compartiments. »

Génial. Je ne peux pas tomber sur un meilleur jour. Je décide de me lever afin de me dégourdir les jambes, et me dirige vers le wagon-bar, qui malheureusement est plein à craquer. J'aurais dû m'en douter. Je soupire, faisant demi-tour pour repartir puis me trouvais nez à nez avec un blond. Je fronce les sourcils, tentant de me souvenir.

- Eh mais je te connais ! S'exclame-t-il. T'es à Fairy Tail, non ?

Je me mords la lèvre, mais son nom ne me revient pas. Où l'ai-je rencontré, déjà ? Certainement aux Grands Jeux Magiques, mais il y avait tellement de monde...

- Oui, c'est exact...

- Je suis Sting Eucliffe ! De...

- Sabertooth, bien sûr, le coupé-je en soupirant. Désolé, j'ai du mal à me souvenir des noms des gens. Je suis Ciela. Faust Ciela.

Il m'adresse un grand sourire.

- Donc toi aussi, tu es coincée dans ce train... Où vas-tu ?

- À Clever Town pour une mission.

- La même !

- N'es-tu pas censé, aux dernières nouvelles, diriger ta guilde ?

Il soupire alors que nous parvenons enfin à sortir du wagon-bar, se calant dans un endroit tranquille.

- Si, mais cela fait des semaines que je n'ai pas fait de missions, alors j'ai craqué et j'en ai pris une...

- Beaucoup de responsabilités ?

- Tu n'imagines même pas, c'est terrible. Maintenant, cela fait quelques temps que j'ai repris la guilde, donc ça va un peu mieux. Puis, comme Rogue m'aide un peu, on arrive à gérer à peu près tout.

Rogue ? Bien sûr, il s'agit de l'autre dragon slayer, celui de l'ombre.

- Que fais-tu comme mission ? Me demande-t-il.

- Au fait, c'est assez ambigu. Je ne connais pas vraiment le but de cette mission, ce que j'aurais à effectuer... Et toi ?

Il hausse les épaules.

- Un truc du genre "Ils sont endormis", je crois... Enfin, je verrais plus précisément ce que le mec me diras là-bas.

Je fronce les sourcils.

- Qu'est ce qu'il y a ?

- J'ai la même mission.

Il fronce les sourcils.

- Quoi ?

- On a la même mission.

- Genre.

Il fouille dans ses poches, en ressortant un papier froissé. L'affiche de la mission, apparemment. Je la regarde par dessus son épaule. Il s'agit bien de la même annonce, sans image.

- J'ai bien la même, confirmé-je.

- C'est impossible !

J'acquiesce, réfléchissant à toute vitesse. Je relève la tête vers Eucliffe.

- Non, ce n'est pas possible. Une mission ne peut pas être dans deux guildes différentes. Elle peut être envoyée à différentes guildes si elle est refusée, mais elle ne peut pas être dans plusieurs guildes.

- Une erreur, peut-être ?

- Possible. Mais cela n'arrive pratiquement jamais, les guildes font en sorte qu'il n'y ait pas de problèmes.

Il réfléchit, soupirant lourdement.

- Je ne sais plus vraiment quand j'ai accepté cette mission... Je me suis peut-être trompé. Enfin, ce n'est pas peut-être, c'est certainement. Désolé. Je te laisse la mission, du coup ?

Je secoue la tête.

- Tant pis, nous nous partagerons la prime. Puis, nous sommes tous deux coincés dans ce train, donc autant faire ensemble la mission.

Un fin sourire éclaire son visage.

- Cool alors ! S'exclame Eucliffe. Enfin, j'espère ne pas avoir fait tout ce chemin pour une fiche blague.

- Moi non plus... Mais je veux savoir ce qu'il se cache derrière cette mission. Puis, je suis fauchée en ce moment, alors...

- La même ! C'est en partie pour ça que j'ai voulu faire une mission, Rogue payait tout pendant que je trimais à faire tous ces fichus papiers...

À nouveau, le train s'ébranle. Je regarde dehors. Le blizzard semble s'être calmé, mais juste un peu. Le train s'immobilise. Les haut-parleurs grésillent.

« Nous ne pouvons toujours pas avancer. Nous allons passer dans les wagons pour distribuer des vivres, veuillez donc... »

Les haut-parleurs grésillent à nouveau. Puis un cri me glace le sang. Suivi d'autres cris.

Silence.

Les personnes autour de nous se mettent à crier, hurlant que c'est la fin. J'empoigne mon sceptre, attaché dans mon dos. Je croise le regard déterminé d'Eucliffe.

- C'est parti ! S'exclame-t-il. Je te parie que c'est une guilde noire.

- Qui cela pourrait être d'autre ? Soupiré-je alors que nous nous frayons un chemin à travers la foule agitée.

Il ne répond rien, continuant à avancer vers l'avant du train, que la foule avait déserté, se réfugiant vers l'arrière. Nous nous retrouvons en quelques minutes devant la porte menant à l'avant.

- Donc on fait quoi ? Me demande Eucliffe. On ouvre la porte et on fonce dans le tas ?

- Tu es bien un dragon slayer, soupiré-je.

- Je prends ça pour un compliment !

Puis il ouvre la porte, se précipitant le poing en avant. J'écarquille les yeux. Il n'y a personne. Enfin, si on ne comptait pas les deux hommes par terre, leur sang se répandant sur le sol. Je prenais rapidement leur pouls.

- Morts.

Je m'en doutais. Je n'arrive pas à savoir s'il y a quelqu'un près de nous. L'air... L'air est comme brouillé autour de moi. Comme tout à l'heure. À nouveau, j'ai l'impression d'être observée. Je tourne la tête, les battements de mon cœur s'accélérant. Je me fige, essayant de détecter une présence en excluant celle d'Eucliffe. Mais mon cerveau semble embrouillé, mes gestes me semblent de plus en plus lents... L'air ne parvient plus jusqu'à mes poumons, mon cerveau...

J'ai un hoquet et respire enfin lorsqu'Eucliffe me secoue.

- Hey, tu vas bien ?

Je serre les dents, les battements de mon cœur pulsant dans ma tête.

- Ne ressens-tu rien ?

Il fronce les sourcils.

- Non, mais je n'arrive pas à bien entendre. J'ai un sifflement dans les oreilles, c'est bizarre. Et il y a une odeur que je n'aime pas du tout, mais je ne parviens pas à mettre le doigt dessus.

Nous n'avons pas la même perception, mais nous sommes d'accord pour dire que tout n'était pas normal.

- Il n'y a personne ici. Il est certainement parti.

- Oui, mais où ? Chuchoté-je inconsciemment.

D'un coup, le blizzard de stoppe dehors. Je me fige, en même temps que Sting.

- C'est normal que la neige s'arrête d'un coup ?

- Non, bien sur que ce n'est pas normal. Quelqu'un nous joue un mauvais tour, et je n'aime pas du tout cela. Il va voir ce que cela fait de se frotter à moi.

- À nous tu veux dire ! Moi non plus, je n'aime vraiment pas les gens qui font les fourbes. Qu'il vienne se battre contre nous, au lieu de se cacher comme un lâche !

Soudainement, je sens clairement une présence derrière moi. Nous nous retournons d'une même personne. Il s'agit d'un homme. Une cape noire le recouvre, cachant son visage. Je vois seulement son sourire. Un rictus moqueur.

Je tends mon sceptre devant moi, érigeant une barrière autour de moi. La magie qui émane de ce type me donnait des frissons. Celui-ci a un sabre en sa possession. Il m'attaque, brisant sans problèmes mes protections. Merde, ce n'est pas un mage de pacotille. Je recule tandis qu'Eucliffe l'attaque violemment, sans parvenir à prendre le dessus. Le mec semble le repousser facilement ! Je fais le vide dans ma tête, me concentrant seulement sur l'air autour de moi. Un vent familier fait voler mes cheveux. C'est parti. J'ouvre les yeux, puis le vent forme un tourbillon autour de moi. On ne provoque pas un mage S sans bien s'en tirer. Je tends les mains devant moi, projetant mon pouvoir vers lui. Eucliffe recule, tandis que le mec se tourne vers moi. Je le vois lever son sabre. Le temps semble se figer. Puis il l'abat.

Une énergie phénoménale traverse l'air, me coupant la respiration. Tout mon tourbillon a disparu, rien qu'avec une seule de ses attaques. Je me remets avec peine en position, me préparant à contrer une nouvelle attaque, serrant les dents. Il est vraiment très fort, plus fort que moi, que nous. Puis, un fin sourire étire son visage. Il prononce alors, un mot, seulement un mot.

« Dormez. »

Ma vue se trouble soudainement et je perds l'équilibre. Alors, je me souviens une nouvelle fois de la description de la mission « Maintenant, ils sont tous endormis. » Puis le noir se fait autour de moi.