La jeune Islandaise avait les yeux rivés sur le sol. Pour la dernière fois, elle regardait cette terre volcanique, poussiéreuse, craquelée. Tous ses souvenirs resteraient pourtant gravés dans sa mémoire. Tandis que le vent balayait le parc, dans cet air irrespirable, elle ramena quelques mèches rouges de ses cheveux sur son front. Puis elle jeta son mégot de cigarette par terre, et l'écrasa d'un coup de pied.
-Je vais partir en voyage, marmonna-t-elle. Ca risque d'être plutôt long.
-Comment ça ?!
Ses amis, assis sur le banc à côté d'elle, la dévisagèrent.
-Je vous en ai déjà parlé, enfin ! s'énerva la jeune femme.
-Stella, tu peux pas nous faire ça…
-Si, je peux. De toute façon, c'est pas moi qui ai décidé.
La meilleure amie de la jeune femme avait les larmes aux yeux. Stella la regarda, impassible.
-Tu reviendras quand ?
-J'en sais strictement rien. Ca ne dépend pas vraiment de moi.
Chris, le petit ami de Stella, la prit dans ses bras et la serra contre lui. Un silence s'installa, seulement perturbé par les rafales de vent.
-Et merde, murmura finalement Chris. Tu vas me manquer.
Elle ne répondit pas, serrant sa veste contre elle. Stella ne portait qu'un t-shirt à fines bretelles en dessous, et grelottait de froid.
Puis tout le monde replongea dans le silence. Ils n'avaient rien à se dire. Seules leurs pensées leur suffisaient. Finalement, lorsque le soleil se coucha, Stella se dégagea brusquement des bras de Chris et se leva.
-Bon, je dois y aller.
Elle les étreignit un par un, sans s'attarder. Cela ne servait à rien de faire durer les adieux.
Puis elle quitta le parc, ses cheveux rouges flottant derrière elle, dans la lumière orangée du soleil couchant.
-Stella, dépêche-toi, lança Mrs Nestary quand sa fille fut de retour. Tu sais que nous n'avons pas beaucoup de temps. Tu as fait tes bagages ?
La jeune femme acquiesça. A présent, elle se regardait une dernière fois dans le miroir de sa grande chambre. Ses longs cheveux légèrement ondulés, d'un rouge étonnant. Personne ne la croyait quand elle disait que c'était sa couleur naturelle. Et pourtant, c'était vrai. Depuis toute petite, elle avait toujours eu ces cheveux à la couleur sanglante mais si belle. Puis ses yeux violets, légèrement bridés, stupéfiants eux aussi. Et une peau de porcelaine. Non, elle n'était pas spécialement belle, mais étrange, impérieuse, et son visage laissait une empreinte indélébile dans la mémoire de quiconque croisait son regard.
Elle attacha ses cheveux en un chignon brouillon, laissant dépasser quelques mèches sanglantes. Puis elle se hâta de rejoindre ses parents dans le vaste hall d'entrée.
Ils s'enfoncèrent dans la nuit, sans bruit, leurs valises à la main. Le chauffeur de la voiture les attendait déjà. Stella s'engouffra sur la banquette arrière, attrapa une couverture dans son sac, et s'emmitoufla dedans.
-La route va être longue, lui dit sa mère. Repose-toi bien.
Pendant longtemps, Stella ne put s'endormir. Elle observait par la fenêtre le ciel rempli d'étoiles scintillantes, sans trouver le sommeil, ses pensées se bousculant dans sa tête. Sa main était crispée sur le paquet de cigarettes au fond de son sac : le cadeau d'adieu, ironique, que lui avait fait sa meilleure amie. Elle se promit de ne jamais utiliser ces cigarettes. Si elle voulait fumer, elle s'achèterait un autre paquet.
Stella ramena ses couvertures contre son visage et, pour la première fois depuis le départ, deux grosses larmes s'échappèrent de ses prunelles violettes. Elle les chassa d'un revers de main. Finalement, la jeune femme tomba dans les bras de Morphée.
Lorsqu'ils arrivèrent, la jeune femme fut brusquement réveillée par la lumière du soleil qui filtrait à travers la fenêtre. Elle se frotta fortement les yeux, éblouie et exaspérée.
-Stella chérie, viens donc porter ta valise vers la maison !
Sa mère se pencha vers elle.
-Ouais, ouais, j'arrive !
La jeune femme se leva péniblement, les membres engourdis. Tandis qu'elle ramassait sa valise, elle fit face à une coquette villa anglaise. Il pleuvait, mais le temps était ensoleillé.
-Alors, elle te plaît, notre nouvelle maison ?
Mrs Nestary regarda sa fille en souriant. Son père, un homme sévère, n'avait pas dit un mot.
-Pas mal, lâcha Stella sans conviction.
Elle marcha vers le premier étage, où elle trouva une chambre spacieuse décorée avec goût, un grand lit à baldaquin au centre. Puis elle défit ses affaires et ses parents l'appelèrent.
-On voudrait te parler… La rentrée à Poudlard est dans deux jours, et…
-Si ça concerne cette école de magie de merde, c'est hors de question que je vous écoute ! trancha Stella.
-Ne parle pas comme ça. Chérie, tu sais très bien qu'on a pas le choix… Nous devons t'envoyer là-bas… Tu y seras très bien…
-Non ! coupa leur fille. Je n'y serais jamais bien, vous m'entendez ?! Jamais !!
Elle poussa une exclamation de colère, et claqua la porte de sa nouvelle chambre. Elle entra dans sa salle de bain, se fit couler un bain moussant et plongea dans l'eau chaude. La jeune femme ne pouvait plus tenir tête à ses parents indéfiniment…
Deux jours plus tard, Stella Nestary était dans la gare de King's Cross, son chariot à la main, attendant de passer sur la voie 9 ¾. Malgré elle, sa nouvelle vie commençait…
