Jingle : Cet os est écrit pour un jeu du FoF, il fallait le rédiger sur le thème "demain" en une heure. Pour plus de précisions vous pouvez m'envoyer un mp.
Disclaimer : Jonathan Stroud est l'auteur de ce fabuleux livre que j'ai découvert récemment, Lockwood et Co (T.1). Je lui emprunte ses personnages pour un temps.
Le Spectre du Manoir Arlett
Chapitre 1 : Si Demain arrive
Le manoir des Arlett était magnifique. Lucy ne s'y était pas attendu. La dernière demeure du genre qu'elle avait vu était située à Combe Carey, un endroit donnant l'impression d'avoir été laissé à l'abandon, ce qui était compréhensible du fait de la forte concentration de Visiteurs qui s'y baladaient. Le manoir des Arlett, lui, semblait tellement plus « vivant ».
La pelouse du parc était bien taillée, ainsi que tous les buissons. Les branches mortes qui n'avaient pas dû manquer de tomber lors de la tempête de la nuit précédente avaient été ramassées. Les allées en graviers blancs étaient bien délimitées, des parterres de fleurs multicolores les escortant. La maison en elle-même avait cet aspect d'ancien rénové au goût du jour. La façade avait été refaite, donnant à l'ensemble des airs agréables de villa de campagne.
L'endroit respirait l'aisance, à se demander pourquoi les propriétaires n'avaient pas fait appel à une agence psychique réputée comme Fittes ou Rotwell plutôt qu'à leur petite entreprise indépendante. Cela laissait un sentiment assez mitigé à l'adolescente déjà préoccupée.
« Mrs Arlett, pouvez-vous nous parler du Visiteur ? »
La maîtresse des lieux s'interrompit au milieu de son discours sur le concours de fleurs du village que son jardinier avait remporté le mois dernier et son air s'assombrit. Mais Lucy approuvait tout à fait l'initiative de Lockwood. La nuit allait tomber dans une heure, il n'y avait pas de temps à perdre. Et puis Lucy avait une autre raison de vouloir expédier rapidement la mission. Avant de partir, son principal associé lui avait confié vouloir lui montrer quelque chose d'important, quelque chose qui attendrait visiblement le lendemain et leur retour à Portland Row.
« Oui, bien sûr, répondit nerveusement Mrs Arlett. Comme vous l'a dit mon mari au téléphone hier, notre concierge a été touché par un visiteur il y a deux jours. C'était dans son sommeil, mais on l'a retrouvé gonflé et bleu, aucun doute n'est permis sur la présence d'un Visiteur. »
Un silence passa.
« Et c'est tout ?, s'enquit George.
- Que voulez-vous de plus ? Vous vous attendiez à un autre manoir hanté ? Désolée de ne pas vous fournir une autre occasion de vous illustrer.
- Vous avez peut-être quelques détails ?, l'encouragea diplomatiquement Lockwood, coupant dans son élan George qui allait répliquer. Mr Morgan est mort à l'intérieur du manoir, c'est cela ? Pourquoi ne dormait-il pas dans la maison du gardien ?
- C'est vrai, renchérit Lucy. Nous sommes passé devant la maison en arrivant.
- Effectivement, vos renseignements sont justes. Benjamin vit habituellement à l'écart du manoir. Mais cela faisait deux semaines que nous lui avions laissé occuper la chambre du rez-de-chaussée. Il prenait de l'âge, c'était moins pénible pour lui de vivre sur place et plus pratique pour nous qui n'avions plus à traverser le parc pour lui donner des directives. La maison du gardien n'a pas le téléphone, voyez-vous.
- Il n'avait rien remarqué d'inhabituel dont il aurait pu vous faire part ?, interrogea George.
- Pas à ma connaissance.
- Et il n'y a jamais eu d'antécédent à la venue de ce Visiteur ?
- Ce manoir appartient à ma famille depuis longtemps. J'y ai grandi. Je croyais entendre des pleurs près de la chambre quand j'étais enfant, mais je les avais toujours attribué à ma jeune sœur qui aimait beaucoup s'y cacher. Maintenant, je commence à douter de leur origine. »
Lucy acquiesça. Les enfants qui ne possédait pas de véritable don de perception mais parvenaient à entrevoir certains phénomènes leur trouvaient souvent des explications rationnelles. Ce qui en revanche sonnait bizarre dans cette histoire était le fait que la sœur de Mrs Arlett ait trouvé un refuge dans une pièce où se cachait un Visiteur et s'en soit sortie indemne.
« Vous avez d'autres questions ?
- Juste une, pourquoi nous avoir choisi nous ?, se décida enfin de demander Lucy.
- Parce que vous n'êtes pas cher et que vous avez tout de même de bons résultats, depuis peu. Bonne nuit et à demain matin. Je m'attends à retrouver mon manoir en bon état. »
Une fois Mrs Arlett partie rejoindre le chauffeur qui l'emmenait rejoindre son mari en ville pour la nuit, George fit la grimace.
« A quel point as-tu bradé notre venue cette fois, Lockwood ?
- Tu ne te concentres pas sur l'essentiel, George. On fait rentrer de l'argent, c'est tout ce qui compte.
- On peut tout de même se permettre de travailler à juste prix, notre dette a déjà été épongée, lui rappela Lucy qui n'acceptait pas non plus l'argument.
- Je trouvais le cas intéressant ? »
George haussa un sourcil, ce qui lui donna un air très spirituel qui dénotait fortement avec le reste de sa personne.
« A part lire l'article paru dans le journal relatant la mort de Benjamin Morgan, je n'ai vu effectuer aucune recherche sur le lieu.
- Lockwood, le prévint Lucy, tu nous caches quelque chose et tu sais très bien qu'on a horreur de ça. Quand ça concerne le travail, ça nous concerne aussi. Je pensais avoir été claire après Combe Carey, plus de secret qui puisse nous mettre en danger pendant une mission. »
Sous les regards inflexibles de ses deux collègues, Lockwood ne put que rendre les armes. Il soupira avant d'avouer pourquoi il avait accepté de baisser les tarifs de l'agence pour ce cas.
« Mes parents sont venus ici. »
Cela scotcha ses interlocuteurs. Si Lucy avait compris une chose à Portland Row, c'était que Lockwood ne parlait jamais de ses parents, même si la maison qui leur servait de QG leur avait appartenu. George lui avait dit qu'ils étaient chercheur en parapsychique, ou quelque chose approchant. Il leur était arrivé quelque chose, dans tous les cas. Lucy supposa qu'ils n'avaient pas fini leur aventure ici, les propriétaires n'auraient pas été si surpris de découvrir le Visiteur.
« Au moins, ils ne nous ont pas interdit d'emporter du feu grégeois à l'intérieur. »
Lockwood se remit à sourire, ce que Lucy préférait nettement. Elle ne supportait pas de voir cet air sombre sur son visage. D'autant plus qu'il lui avait aussi jeté un regard un peu bizarre. Il fallait dire que c'est temps-ci l'adolescent ne semblait plus exactement le même, comme s'il était préoccupé. Il avait semblé tendu depuis le moment où il lui avait promis de lui montrer quelque chose le lendemain. Lucy espérait vraiment que cela n'avait rien à voir avec la mission actuelle.
« On va quand même éviter de l'utiliser, si on peut, on a eu assez d'une maison détruite pour le moment, rappela George. Bon, je vous fais le topo sur ce que j'ai trouvé sur le manoir, c'est-à-dire pas grand-chose. Le manoir a souvent changé de propriétaires. Apparemment, c'est une tradition de l'offrir à la fille aînée de la famille au moment de son mariage. Il n'a été mis en vente qu'une seule fois, lorsqu'il a été acheté par la famille de Mrs Arlett qui a décidé de poursuivre la tradition, certainement pour se donner un bon genre.
- Il n'y avait plus de descendants à la famille précédente ?, demanda Lockwood.
- C'est exact. La propriétaire, Lauren Gilligan, est morte en couche avec son bébé et le mari a donc préféré vendre la maison et passer à autre chose.
- Où ont-ils été enterrés ?
- Au cimetière du village voisin. J'ai vérifié, la tombe est indiquée sur le plan que j'en ai trouvé.
- La tombe a été protégée ?, s'enquit Lucy.
- Je n'ai pas trouvé l'information. Le problème était apparu depuis quelques années déjà à l'époque, alors je suppose que oui. Mais si c'est Lauren Gilligan qui nous occupe, alors la source va être plus complexe que de simples ossements. Tu as une idée sur la situation Lockwood ?
- Non, ma mère n'a pas laissé beaucoup de notes sur le sujet. »
La conversation s'interrompit sur ce dernier point. Les trois agents avaient discuté sur le chemin les ramenant au manoir et en s'installant dans le salon. Lockwood avait allumé des lampes à huile et avait disposé sur l'étagère une unique lampe-tempête électrique pour le moment éteinte, au cas où. Lucy avait commencé à sortir le matériel des sacs et à le répartir entre eux et avait également disposé de la limaille de fer en cercle autour d'une table basse et de trois fauteuils confortables. George, quant à lui, avait sorti les thermos de thé et préparé leur collation d'avant-mission. Leur solution de fuite était au point et ils avaient de quoi se détendre un peu avant le gros du travail.
Ils s'équipèrent, burent leur tasse de thé puis prirent immédiatement la direction de la chambre du défunt Mr Morgan. Ils restèrent silencieux, laissant leurs sens les diriger dans le noir. Seul George intervenait parfois pour leur donner une indication de la température qu'il relevait. Cette dernière se rafraîchissait, signe indéniable qu'ils se rapprochaient d'une source. Lucy laissait sa main parcourir le mur du couloir, faisant appel à son Toucher, tout en se concentrant sur son Ouïe, qui était son talent le plus développé. Très vite, elle se mit à entendre les pleurs dont leur avait parlé Mrs Arlett. Il ne faisait aucun doute à présent qu'ils n'étaient pas ceux de sa sœur. Lucy frissonna. Ces pleurs lui rappelaient désagréablement ceux du fantôme du moulin de Wythburn et elle gardait un terrible souvenir des évènements qui avait suivi, dont elle avait été la seule rescapée.
« Ca va Lucy ?, lui demanda Lockwood qui avait remarqué son changement de comportement.
- Oui, merci. J'entends des pleurs, ils viennent de la chambre.
- Et tu as senti quelque chose ?
- Pas encore, si ce n'est que l'endroit me semble presque chaleureux.
- Et nous avons pourtant perdu encore un degré. Nous sommes à 10 degré Celsius maintenant, les informa George.
- C'est une chaleur, comme une brûlure ?, essaya de deviner Lockwood.
- Non, c'est à la fois agréable et…
- Lucy ! »
Lockwood se précipita vers Lucy et l'attrapa par les épaules. Elle avait légèrement vacillé après s'être tue brusquement, mais pas assez pour inquiéter son associé en temps normal. Pourquoi se montrait-il si prévenant tout à coup ? Demain, se répéta-t-elle dans la tête, j'aurai le fin mot de l'histoire demain.
« C'est… c'est le moulin…, chuchota-t-elle assez bas pour que seulement Lockwood l'entende avant de reprendre plus fort pour donner le change à George. Non, c'est juste, un regret et une tristesse profonde dans ces murs.
- Tu devrais peut-être rester ici en soutien si on a besoin de se replier, proposa le garçon.
- Hors de question !, s'emporta Lucy qui commençait à en avoir assez de ce manège. Je n'ai pas besoin d'être ménagée sur un travail au rabais. »
Lucy tira sa rapière de son fourreau, prête à poursuivre la route. La garde de la lame la rasséréna un peu.
« Alors entrons. »
Lockwood ouvrit la porte et s'immobilisa, tendant juste le bras pour empêcher Lucy et George d'entrer. Lucy parvint à regarder par-dessus son épaule. Elle distingua la forme assez nette d'une jeune femme à genou près du lit. Elle avait les cheveux longs lâchés et en bataille et semblait vêtue d'une chemise de nuit couverte de tâches, du sang certainement.
« A quoi ressemblait Lauren ?, » glissa Lucy à George.
Mais avant que le garçon n'ait pu lui répondre, l'apparition leva les yeux vers eux à l'entente du nom et Lockwood eut un mouvement de recul qui les repoussa tous en arrière. Lucy avait à peine eut le temps d'apercevoir le visage lacéré et pratiquement sans peau de la femme.
« C'est une écorchée ?, s'enquit Lucy auprès de son principal associé qui avait un don rare pour la Vue.
- Pas exactement. Seul son visage est atteint, ce qui est inhabituel pour un écorché. Elle a dû se faire ces blessures avant de mourir. C'est un Spectre.
- Pas vraiment le signe d'une mort en couche, non ?
- Effectivement George. Soit nous ne connaissons pas toute l'histoire, soit cette apparition n'est pas Lauren Gilligan. »
Le regard de Lockwood glissa vers Lucy. Il semblait réellement inquiet, alors qu'il n'y avait pas de raison, au point qu'il préférait perdre de vue le Spectre.
« Concentres-toi Anthony, lui souffla-t-elle en utilisant volontairement son prénom pour le secouer un peu. Si tu voulais me dire quelque chose, il fallait le faire plus tôt. Maintenant, ça attendra demain. »
Si demain arrive, se précisa-t-elle mentalement.
Si toi aussi tu as survécu à ta dernière nuit, laisse une review :)
