Chapitre 1 - Welsh save the Queen
Après la discussion qu'il venait d'avoir avec Jack, Ianto se sentait nauséeux. Il s'était retiré du coté est de l'immeuble et tentait de retrouver son calme en s'efforçant de respirer lentement. Mais il dut rapidement se pencher par-dessus les rambardes pour expulser le liquide acide qui lui brûlait les entrailles. Acide, sa bile l'était assurément, aussi acide que les mots qu'il avait lâchés au visage de son époux, aussi acide que sa trahison. Malgré le fait qu'il se soit débarrassé de l'ensemble du peu d'aliments qu'il avait dans l'estomac, ses hauts le cœur ne le quittaient pas et lui infligeaient des douleurs aiguës dans sa gorge et son œsophage.
Il lui fallut dix bonnes minutes pour retrouver le contrôle de lui-même. Il s'essuya la bouche d'un revers de manche et sécha ses larmes de douleur puis fixa l'horizon. Il se détestait pour ce qu'il venait de faire mais il n'avait pas eu le choix lorsque le moment propice s'était imposé. Il décrocha son téléphone et composa un numéro. Au bout de la troisième sonnerie, une voix s'éleva dans l'écouteur.
Voix : Mr Jones. Nous attendions de vos nouvelles. Quelle est votre réponse ?
Ianto : J'accepte.
Voix : Nous vous contacterons pour vous donner le point de rendez-vous Mr Jones. Il va sans dire que la discrétion est de rigueur. Avez-vous fait ce que vous deviez faire ?
Ianto : Oui…
Voix : Bien, très bien Mr Jones.
Une semaine plus tôt.
Voix : Mr Jones ? Ianto Jones ?
Ianto se retourna. Il sortait juste du Starbuck Coffe, les bras chargés de muffins pour l'équipe. Devant lui, deux hommes vêtus de costumes noirs lui barraient le chemin.
Ianto : Que voulez-vous ?
Homme 1 : Quelqu'un voudrait vous parler.
Ianto : Qui ?
Homme 2 : Nous ne pouvons pas vous le dire.
Ianto : Et vous comptez que je vous suive, comme ça ? Sans explications ? Vous rêvez messieurs !
Homme 2 : Ceci est la façon civilisée qui nous a été conseillée, mais on peut s'y prendre autrement.
Le premier homme fit signe à une limousine noire de s'avancer à leur hauteur. Lorsqu'elle s'arrêta, il ouvrit la portière et dégaina son arme.
Homme 1 : Votre puce ?
Ianto : Ma Puce ?
Homme 1 : Nous savons que vous avez une puce implantée. Où est-elle ?
Ianto sentit le canon d'une seconde arme contre son dos. A deux contre un, il avait une chance, infime soit-elle. Il esquissa un mouvement mais se retrouva plaqué au sol, l'arme devant le visage.
Homme 1 : Où est-elle !
Ianto : Epaule droite.
Homme 2 : Vous voyez, ce n'était pas si difficile. Relevez vous !
Il se releva, épousseta son costume et fusilla du regard le gorille devant lui. Le second plaça sur son épaule un appareil et envoya une décharge qui désactiva la puce de localisation.
Homme 1 : Montez !
Ianto s'exécuta à contrecœur. Il s'assit à l'arrière de la limousine, un des deux hommes prit place près de lui, le second à coté du chauffeur. Il posa le regard sur la troisième personne assise en face, dans la pénombre. Il n'arrivait pas à distinguer qui elle pouvait être. La voiture démarra et une voix de femme, jeune, familière, sans pour autant qu'il puisse mettre un nom dessus, arriva aux oreilles de Ianto.
Voix : Monsieur Jones, j'ai… Non, pardon, le pays a besoin de vous.
Ianto : Le Pays ?
Voix : Vous êtes le seul à pouvoir nous aider.
Ianto : Nous ?
Voix : Le peuple britannique Monsieur Jones.
Ianto : Mais pourquoi moi ?
Voix : Parce que la seule autre personne qui pourrait nous aider est également le premier suspect et je ne peux rien faire pour le protéger. Dans une semaine, il sera arrêté.
Ianto : Et qui est-ce ?
Voix : Jack Harkness.
Ianto : Jack ? Mais c'est impossible ! De quoi l'accuse t-on ?
Homme : De régicide.
Ianto : QUOI ?
Voix : Je sais parfaitement qu'il n'est pas derrière ces menaces. Je lui ai donné ma confiance et il n'a jamais failli, bien que ses manières ne soient pas toujours conventionnelles, vous ne me contredirez pas là-dessus Mr Jones. Je ne suis pas comme mes prédécesseurs, je sais que le travail de Torchwood est des plus importants, non pas pour traquer le Docteur, mais pour protéger l'humanité. J'aimerais que les autres branches de Torchwood soient comme la vôtre … malheureusement mon Etat-Major n'a pas accepté que je prenne cette décision. Les vieilles peurs et habitudes ont la peau dure.
Ianto : Excusez-moi .. Je suis perdu … QUI êtes-vous !
Son interlocutrice se pencha en avant vers la lumière. Elle avait la trentaine, portait des vêtements ne correspondant pas à son âge ainsi qu'un simple diadème dans ses cheveux blonds.
Voix : Quand je pense que vous avez le triple, voir quadruple de mon âge et pourtant vous paraissez plus jeune que moi. Me direz-vous votre secret ?
Ianto : … Ma ... Ma…
Ianto avala sa salive, respira profondément et inclina respectueusement la tête.
Ianto : Majesté !
Voix : Appelez-moi Victoria ou même mieux, Vicky. Je ne me suis pas encore fait à ce cérémonial pompeux qui entoure ma fonction.
Homme 1 : Madame !
Victoria : Alfred, laissez, je ne suis pas mon frère et je ne le serai jamais ! Je n'étais pas faite pour gouverner ce pays… Pourtant j'y suis obligée. Alors laissez-moi faire comme je l'entends. Vous n'étiez pas aussi protecteur à Torchwood Londres !
Alfred : Pardonnez- moi, Majesté. Nous sommes arrivés.
L'homme sortit du véhicule et s'assura que les alentours étaient sûrs. Le second homme le rejoignit et il se pencha vers les deux derniers occupants.
Homme 2 : Vous pouvez sortir Majesté, Mr Jones.
Comme le voulait le cérémonial, Ianto sortit le premier, suivit par la jeune femme. Ils étaient dans un parking et se dirigèrent vers les ascenseurs. Un bip résonna lorsqu'ils arrivèrent à l'étage souhaité.
Victoria : Laissez-nous seuls !
Alfred : Madame, c'est …
Victoria : Seuls j'ai dit !
Les deux gardes du corps restèrent à l'intérieur tandis que Ianto suivait la Reine Victoria III dans de somptueux appartements, sûrement une suite royale…
Ianto : Où sommes nous ?
Victoria : Au Mercury. Dernier étage. Veuillez m'attendre un moment.
Ianto s'assit sur un des fauteuils, mal à l'aise de se retrouver seul à seul avec le monarque britannique, bafouant ainsi le protocole millénaire. Bien que Gallois et ouvertement anti-anglais, il n'en était pas moins un sujet de sa majesté et respectueux des traditions…
La porte par laquelle Victoria s'était évaporée s'ouvrit et elle réapparut vêtue d'un jean et d'un pull, les cheveux libérés du diadème retombant sur ses épaules. Il esquissa un geste pour se lever mais elle lui fit comprendre qu'il n'avait pas à le faire.
Victoria : Alors Ianto, je peux vous appelez Ianto, ou avez-vous gardé le prénom de Will ?
Ianto : … Heu non, Ianto c'est bon… mais …
Victoria : Oui, je sais beaucoup de choses Ianto, sur vous, sur le Capitaine Harkness, sur votre équipe… Et cela grâce à vous.
Ianto : à Moi ?
Victoria : Je n'ai jamais lu de rapports aussi détaillés et complets que les vôtres. Un vrai plaisir.
Ianto : Mes rapports ?
Victoria ; Evidement. Je les lis tous, les vôtres entièrement, les autres, on m'en fait un résumé. Enfin, on m'en faisait …
Ianto : Faisait ?
Victoria : Avant la mort d'Edouard, j'étais la responsable de Torchwood. C'est à moi que le Capitaine Harkness envoyait ses rapports hebdomadaires, enfin je devrais dire VOS rapports.
Ianto : Vous…
Victoria : Oui, c'est la tâche assignée au second dans l'ordre de succession au trône depuis 3 générations. Aujourd'hui, c'est mon jeune frère qui est à la tête de l'organisation et il est … comment dire … borné et influencé par de mauvaises personnes. C'est lui qui a donné l'ordre d'emprisonner votre supérieur. La seule solution que j'ai trouvée c'est de venir moi-même et de vous rencontrer.
Ianto : Qu'attendez-vous de moi au juste, Majesté ?
Victoria : Victoria !
Ianto : Victoria…
Victoria : J'ai un plan, mais je pense que vous ne l'aimerez pas !
Ianto : Dites toujours !
Victoria : Venez travailler à Torchwood Londres ! Coupez les liens qui vous unissent à la branche de Cardiff, à cette équipe et aidez-moi à trouver le traître qui veut ma mort.
Ianto : …
Victoria : Qu'en dites vous ?
Ianto : Maj … Victoria … Si vous avez lu mes rapports vous savez quels liens j'ai avec Jack Harkness. Le quitter ne sera pas chose facile et de vous à moi, je ne m'en sens ni le courage ni la force et surtout pas l'envie, même si c'est pour donner le change. Par contre si nous le mettons au courant …
Victoria : Impossible. Il est impliqué dans l'affaire ! Et de plus, il faut que votre « rupture » ait l'air authentique. Vous êtes surveillés 24h/24. S'ils n'assistent pas à une « vraie » réaction de la part de Jack Harkness, ils auront des soupçons et vous ne serez pas libre de vos mouvements à Londres. Il est important que personne d'autre que vous ne soyez au courant Ianto. Vous me comprenez ?
Ianto : Oui…
Victoria : Je sais que je vous demande un gros sacrifice.
Ianto : Vous ne savez pas à quel point…
Victoria : Allez-vous m'aider ?
Ianto : Ais-je vraiment le choix ?
Victoria : Ianto …
Elle posa sa main sur son avant-bras. Il releva ses yeux humides vers ceux de sa Reine.
Victoria : Arrivera un moment où vous pourrez tout lui dire. Je vous le promets. Mais seulement lorsqu'il aura été mis hors de cause… Vous l'aimez tellement, cet homme ça se voit dans vos yeux.
Ianto : Il est tout ce qui me reste de mon ancienne vie, il est tout pour moi… c'est lui et juste lui. J'espère simplement que quand il saura, ce ne sera pas trop tard pour nous.
Victoria : Je vous envie Ianto … Et c'est la mort dans l'âme que je vous le demande … Rompez avec lui, avant la fin de la semaine.
Demain soir. Dans environ 24 heures, les troupes de Torchwood Londres investiront le Hub et captureront Jack. Ianto savait qu'il ne se laisserait pas faire et qu'encore une fois il mourrait. Mais cette fois ci, lui ne serait pas là pour l'accompagner à son réveil.
Ianto quitta son poste d'observation et retourna vers le parking, une boule dans le ventre, à la rencontre de celui qui n'était plus maintenant que son supérieur. Il espérait sincèrement que cette mission se terminerait rapidement, il ne voulait pas manquer à sa parole et surtout abandonner Simon.
Lorsqu'il s'approcha de la Porsche, il vit Jack posé contre une des ailes, les bras croisés, le regard noir. Il avait repris une contenance, celle du boss de l'équipe, inflexible, imperturbable.
Ianto : Des nouvelles ?
Jack : Eiry est tirée d'affaire !
Ianto : Bien.
Jack : David est resté avec elle.
Ianto : Bien.
Jack : Et Simon …
Ianto : Quoi Simon ?
Jack : Simon est un peu coincé pour l'instant. On l'a assigné à la vérification du programme et il est sous surveillance… Il ne peut avoir accès au réseau pour le moment.
Ianto : Merde… Il va pouvoir le faire ?
Jack : Comment veux-tu que je le sache ?
Ianto ne répondit rien et s'adossa aussi à la portière de la voiture. Son épaule frôla celle de Jack qui, comme électrisé par ce contact, s'éloigna de quelques centimètres.
Dans leurs oreillettes seul le bruit de pages qu'on tournait se faisait entendre depuis plus de 15 minutes.
Simon : Vous savez, si j'avais accès au réseau, cela irait beaucoup plus vite. Je créerais un programme qui serait capable de trouver l'erreur en quelques minutes.
Keenan : Je n'ai pas l'autorisation de vous laisser entrer dans le réseau.
Simon : ça va me prendre des jours !
Keenan : Vous n'avez que 24 heures Mr Dupuis.
Simon : C'est IMPOSSIBLE !
Il referma bruyamment le classeur et le posa sur la table faisant de ce fait revenir Vance.
Vance : Mr Dupuis, que se passe t-il ?
Simon : Ce que vous me demandez est impossible ! Même le plus talentueux informaticien n'y arriverait pas sans se servir d'algorithmes particuliers. Et pour ça je dois avoir accès au réseau sur lequel est implanté le programme.
Vance : Impossible… Ce réseau est totalement sécurisé. Seules deux personnes y ont accès.
Simon : Alors votre technologie tombe à l'eau et vous pouvez vous débarrasser de moi tout de suite car je n'y arriverai pas en 24 heures.
Jack : Mais qu'est-ce qu'il fait !
Il allait s'élancer tête baissée vers le bâtiment afin de faire sortir son employé manu militari, mais Ianto le retint par le bras.
Ianto : Jack attend !
Il se dégagea comme si cette main qui le tenait le dégoûtait et le fixa.
Ianto : Ils ont besoin de lui, ils ne vont pas le tuer ! Simon sait ce qu'il fait ! Ils vont lui donner l'accès !
Jack : J'espère que tu as raison ! Car si Simon meurt, tu le suis illico presto, quel que soit le nombre de fois auquel je devrai m'y reprendre !
Il se retourna vers l'immeuble et tous deux levèrent les yeux vers les baies vitrées du 7e étage.
Vance était furieux. Il faisait les cent pas dans le peu de place qu'il avait. Il sortit son téléphone.
Vance : Monsieur le Directeur ? … Oui, nous avons un soucis… Oui pour le délai… Il dit avoir besoin d'un accès au réseau pour accélérer la vérification… Non, impossible en 24 heures…. Oui… Très bien … D'accord …
Il raccrocha, s'avança vers un des écrans et l'alluma. Il entra son mot de passe et se recula.
Vance : Voici Mr Dupuis. Vous avez accès au programme et seulement au programme. Suis-je bien clair ?
Simon : Tout à fait !
Vance : J'espère pour vous que vous dites vrai et que vous savez ce que vous faîtes.
Sur ce, il quitta une nouvelle fois la pièce laissant de nouveau Simon seul avec Keenan.
Ianto : Je te l'avais dit !
Il regretta aussitôt sa phrase. Jack le toisa du regard, d'un regard assassin. Il venait de « perdre » son amant et avait failli perdre un de ses employés. Il n'était pas en état de prendre des paris insensés aujourd'hui.
