LISEZ MA PETITE INTRO D'AUTEUR S'IL VOUS PLAIT.
MERCI.
Titre : Virus 404 (Titre alternatif : La guerre des hippocampes ; "Oups" ; "C'était un accident" ; "Déso pas déso Katsuki" ; "Deku mérite mieux" et bien d'autres)
Rating : M, je détail un peu plus bas pourquoi (et ce n'est pas qu'une histoire de fesses!)
Disclaimer : Rien n'est à moi, si ce n'est l'amour, le clavier et les litres de boissons sucrées consommées durant l'écriture de cette fic.
Bêta-lecture : Moïra-chan (Momo's the best 3 Meilleure autrice du fandom, meilleure bêta-lectrice, déso pas déso)
Trigger Warning / Avertissements (oui, J'OSE) : Notion de meurtre de masse, descriptions de corps même si assez peu explicites, violences physiques graves, meurtres graves, violences sexuelles. Je pense que c'est le principal, mais si ce sont des thèmes avec lesquels vous êtes mal à l'aise, je vous déconseille la lecture de cette fiction. Je peux préciser avant chaque chapitre s'il y a - ou non - un passage difficile à lire, mais je ne vais pas l'indiquer directement DANS le texte. A vos risques et périls, donc.
Bonjour.
Entre vous et moi, je vais être franc ; je traîne dans le monde de la fanfiction depuis environ dix ans, de Skyrock aux forums louches à FFnet que nous connaissons bien, et j'ai vu le principe des omegaverses déclinés à toutes les sauces. Soyons dans l'honnêteté la plus pure : de toute ma vie, je n'en ai apprécié réellement que *deux*, les deux seuls dont les scènes sexuelles n'étaient pas le seul intérêt, mais grâce au scénario tout autour. J'ai voulu rendre honneur à la capacité d'un omegaverse à être plus que des fesses, et j'ai notamment emprunté le chemin de genre dont je n'ai pas l'habitude : pseudo policier, épique, et j'en passe. Mais, SINCEREMENT, si vous lisez un omegaverse pour le cul (et c'est tout à votre honneur, aucun jugement de valeur là-dessus), sincèrement, passez votre chemin. Ce n'est pas ce qui m'intéresse, ce n'est pas ce que j'aime écrire, et ce n'est pas ce que je ferai. Pour tout vous dire, en écrivant, j'ai tout de suite pensé à comment éclipser les scènes de sexe le plus rapidement possible. Le rating M est donc surtout là pour les violences physiques et morales encourues par les personnages. Déso.
Sinon, l'écriture est très bien entamée, le scénario est entièrement rédigé et prêt, ce petit bébé devrait faire entre cinq à dix chapitres (même si je doute aller aussi loin) et j'essayerai de poster une fois par semaine. Est-ce que j'ai encore deux autres fictions à chapitres en cours et un recueil d'OS très louches (mais approuvé par FeDEX) dans mes dossiers, et est-ce que j'ai tout laissé tombé parce que du jour au lendemain j'ai décidé d'écrire ce truc ? Peut-être, mais vous n'avez aucune preuve.
Momo is still the best, et merci à l'amour de ma vie de me hurler dessus à deux heures du matin pour que je cesse de chanter avec passion Les lacs du Connemara pour écrire à la place.
Sur ce, désolé pour cette (très) longue introduction, je ferai plus court la prochaine fois. Bonne lecture! :keur censuré par :
Il sentit une brise se glisser dans son dos, qui lui donna un long frisson tout le long de sa colonne vertébrale. Les policiers étaient tout autour de la scène. C'était lui qui avait entendu les cris et s'était retrouvé le premier dans la ruelle. Un oméga était éventré sur le sol, sa progéniture éparpillée un peu partout en dehors de son ventre ouvert. Son visage était crispé d'horreur. Le légiste était clair : il n'y avait pas eu de coups mortels immédiatement, le jeune homme était mort à cause de l'hémorragie provoquée par la découpe de son abdomen. Un crime particulièrement violent, et Shouta avait un haut-le-cœur à chaque fois que son regard se tournait vers le visage de ce qui n'était ni plus ni moins qu'un enfant. Dix-huit, dix-neuf ans, tout au plus. Il aurait pu être l'un de ses anciens élèves, tout juste diplômé.
A vrai dire, il s'inquiétait de plus en plus pour eux. Ce n'était pas le premier crime du genre perpétré ces derniers temps, et le mode opératoire était toujours le même. Trouver un jeune oméga, de préférence dans l'attente d'un événement plus ou moins heureux, pour les massacrer violemment, lui et le fœtus – qui, parfois, avait dépassé le simple stade d'amas cellulaires, puisqu'il avait déjà croisé des corps d'enfants arrivés à terme, dont la naissance était imminente. Il détourna les yeux, et secoua la tête, pour retirer ces images de son crâne. Pas qu'il fût une âme sensible, mais il avait un instinct paternel excessivement développé, sans doute à cause de sa profession d'enseignant. Il s'éloigna de la ruelle, les bras croisés contre son torse pour se donner un peu de contenance et ne pas cracher ses tripes. Ce serait dérangeant pour l'examen de la scène de crime.
« Est-ce que vous avez encore besoin de moi, commissaire ? »
Ce dernier releva la tête du papier qu'il remplissait, et lui offrit un petit sourire qui se voulait réconfortant – ce n'était pas très efficace, mais Shouta apprécia le geste néanmoins.
« Oui, merci, Eraser... Je pense qu'il faudra lancer une alerte pour les omégas, afin d'éviter de nouveaux meurtres. Je n'apprécie pas cette façon de faire, mais il me semble que c'est la meilleure initiative chose à faire pour le moment. »
Son interlocuteur hocha la tête, et nota dans un angle de son crâne qu'il allait devoir aborder ce sujet avec ses étudiants, afin de les avertir du danger. Évidemment, il s'agissait de jeunes héros en herbe, mais certains appartenaient à cette « caste » - un mot qui n'avait pas grande signification, à vrai dire – et il ne souhaitait pas apprendre d'une quelconque façon que l'un d'eux avait été brutalement assassiné, quand bien même aucun ne correspondait à cent pour cent au profil apparemment recherché par le tueur. Enfin, à sa connaissance, aucun d'eux n'attendait de malheureux événement. Qui à quinze ans voudrait avoir la charge d'un enfant, de toute façon ?! Enfin, peu importe.
Shouta s'éloigna rapidement de la scène de crime, la paume de sa main plaquée sur sa bouche. C'était l'horreur qui lui tordait les boyaux, et l'image du corps figé dans une expression de terreur absolue. Il se dépêcha de regagner son appartement, de s'assurer que la porte était correctement fermée, et de s'écrouler contre le battant en bois.
Du haut de ses trente ans, il avait la chance que sa puberté ait fait de lui un alpha. Bien sûr, il n'accordait pas de réelle importance à cette histoire d'hormones – il n'était pas un animal, après tout – mais il était assez évident que les omégas n'étaient pas les personnes les mieux traitées de la société. Ce n'était plus tant une histoire d'esclavagisme – quoique, cela devait encore un peu exister – mais plutôt de discriminations dans tous les pans de la société. Les refus au logement si seul, les refus de travail à temps plein - « oui, mais vos chaleurs ! », comme si les contraceptifs n'existaient plus – les insultes, les refus de soins. D'ailleurs, même les pilules contraceptives destinées aux jeunes omégas n'étaient clairement pas produites dans l'espoir de leur simplifier la vie. Il n'y avait qu'à observer le nombre ahurissant d'effets secondaires qu'elles pouvaient avoir.
Il frappa très lentement sa tête contre le bois dans son dos, à trois reprises, comme le poing léger d'un invité tardif qui tenait à ce qu'on lui ouvre vite. Une silhouette apparut alors dans le couloir, s'approcha à une vitesse folle, et se jeta presque sur le sol – s'égratignant les genoux au passage – pour le prendre dans ses bras. Shouta se laissa aller dans les bras de son époux avec douceur, et se concentra sur l'odeur de son nouveau shampoing au jasmin pour ne plus songer aux horreurs qu'il avait vues cette nuit. Et les précédentes aussi, d'ailleurs... Quelques mèches blondes furent légèrement rejetées en arrière d'un mouvement souple de la main, et Hizashi déposa ses lèvres chaudes sur le front gelé de son idiot insomniaque préféré.
« Ça va aller, Shouta ?.. C'est encore arrivé, hein ? »
Il hocha lentement son crâne pour toute réponse. Hizashi se cala un peu mieux, de sorte que le brun se retrouva recroquevillé entre ses longues jambes qui l'entouraient, de même que ses bras qui le tenaient fermement contre lui. Il commença à le bercer doucement en chantant à demi-voix quelques paroles en anglais, une berceuse qui, il le savait, calmait rapidement Shouta qui commença à somnoler contre son épaule.
« 'Solé..
-Tu devrais peut-être prendre un congé, pour t'éloigner un peu de cette histoire... C'est la quatrième fois que tu retrouves.. Une victime.. Ce mois-ci. C'est normal que ça te pèse. »
Il ne sut pas vraiment quoi répondre, et se contenta de se détendre encore un peu plus entre les bras d'Hizashi qui ne cessait de faire des mouvements d'avant en arrière dans le but de le calmer. Ce n'était pas facilement perceptible de l'extérieur, mais Shouta ressentait rapidement de l'angoisse. Il ne la laissait pas le submerger, évidemment, mais c'était parfois dur de ne pas lâcher une larme ou de retenir son système digestif de régurgiter la dernière pitance qui lui avait été accordée. Une fois qu'il fut un peu plus calme, Hizashi l'aida à se redresser pour l'accompagner jusqu'à la chambre, le déshabiller à peu près, le border et se caler contre lui dans les couvertures chaudes. La première fois, le blond avait tenté de lui apporter un verre de lait – une composantes essentielles au régime alimentaire de Shouta – mais son mari avait attrapé sa manche.
Dans ce genre de situation, il ne devait surtout pas être seul. Et Hizashi se fit un plaisir de rester avec lui, malgré la boule d'inquiétude qui grossissait de plus en plus dans sa gorge.
Il savait pertinemment d'où venait le malaise palpable du héros, à chaque fois qu'il se retrouvait nez-à-nez avec cette affaire. Déjà, le tueur ne visait que de très jeunes gens, et étant professeur dans un lycée, il était sans cesse inquiet. Mais, pire ; ce n'étaient que des omégas, et bien sûr qu'il était angoissé à l'idée que la prochaine victime soit le blond qui partageait son lit. Improbable, cela dit : des années de pilules contraceptives toutes plus mauvaises les unes que les autres l'avaient rendu cent pour cent stérile, et il n'avait plus eu aucune période de chaleur depuis près de cinq ans. Ce n'était pas lui qui allait attendre un enfant, et il savait se défendre, après tout – ce n'était pas un héro professionnel pour rien.
Mais Shouta était toujours trop anxieux, de toute façon.
Après un dernier baiser posé avec la douceur d'un papillon sur la tempe du brun, Hizashi s'endormit lourdement entre les couvertures, la bouche légèrement entrouverte, permettant à un filet de bave de tacher la taie d'oreiller.
OoO
Une cinquantaine d'années auparavant, un virus particulièrement violent avait ravagé une énorme partie de l'humanité. C'était une maladie fulgurante qui attaquait l'utérus et les ovaires, provoquant un dysfonctionnement violent de l'œstrogène produit par cette partie du corps. Les hormones ne se sécrétaient plus correctement : résultat, surdose, qui provoquait un grossissement violent des ovaires et l'apparition de kystes, majoritairement cancéreux. Sous-dose possible, également, provoquant fatigue extrême, douleurs chroniques, sautes d'humeur, dépression. Toutes sortes de traitements avaient été testés ; des bloqueurs d'oestrogène, des piqûres de testostérone, des patchs et des gels contenant des doses phénoménales d'hormones sexuelles pour « rétablir l'équilibre naturel » du corps.
Un pur échec. Les femmes, principales victimes, s'écroulaient comme des mouches. Le seul moyen de prévenir l'infection était de retirer purement et simplement le système reproductif interne des patientes et d'entreprendre un traitement substitutif, une méthode qui échouait régulièrement, mais moins que toutes les autres tentatives auparavant.
Ce n'était néanmoins pas la meilleure solution, sur le long terme : car le virus s'était répandu sur tout le globe. On comprit, bien plus tard, qu'il s'agissait à l'origine de tests pratiqués en Sibérie pour de nouvelles armes bactériologiques et chimiques. La maladie avait survécu au froid avant de parvenir dans l'Europe entière et une partie de l'Asie. Très vite, elle s'était propagée jusqu'à toucher la quasi-totalité de l'humanité. On aurait pu cruellement penser que l'hystérectomie complète n'était pas nécessaire immédiatement, mais les personnes à peine réglées mouraient deux à trois fois plus vite que leurs aînées. Qu'il était sans doute possible d'avoir un enfant avant d'en arriver là, mais non : les ovaires disproportionnés enflaient tant et tant qu'ils appuyaient sur l'utérus, laissant déjà bien moins de place au fœtus, et celui-ci se trouvait également attaqué par des cellules dégénérées de l'endomètre qui provoquaient des tumeurs violentes sur le corps de la progéniture.
L'Humanité était vouée à disparaître.
Enfin, du moins, jusqu'à ce qu'une étudiante en médecine s'intéresse aux effets du virus sur les hommes, et à vrai dire, toute personne qui produisait naturellement un taux énorme de testostérone. Chiyo Shuzenji en arriva rapidement à la conclusion que la maladie affectait aussi les hommes, bien que ce fût d'une façon complètement différente. En effet, elle remarqua que la peau de l'abdomen était devenue particulièrement élastique chez une partie de la population masculine, et qu'une autre se retrouvaient régulièrement hospitalisée d'urgence à cause d'un gonflement anormal des parties génitales. Après quelques expériences douteuses, la jeune femme conclut que le corps de certains individus mâles se changeait peu à peu pour accueillir potentiellement un embryon, développant une sorte de néo-utérus étrange, aux parois beaucoup trop fines pour supporter un ovule. Peut-être que la nature aurait fini par permettre à l'évolution de suivre son cours, et aux hommes d'avoir des utérus en parfait état de marche après une petite centaine années.
Chiyo n'avait pas cent ans à perdre.
Elle n'était pas fière de ce qu'elle avait fait, à cette période, déjà affaiblie physiquement par l'hystérectomie presque forcée sur sa personne, et particulièrement épuisée psychologiquement parlant de voir toutes ses amies autour d'elle mourir. Sa propre mère. Ses propres sœurs.
Chiyo décida de forcer un peu la nature.
Après des tentatives infructueuses beaucoup trop nombreuses, et les piles de corps qu'elle avait examinés avec patience – plus ou moins légalement, mais les temps n'étaient pas à respecter l'autorité suprême de l'État – elle mit au point un traitement brusque et violent, mais qui porta ses fruits.
Ses recherches durèrent environ cinq ans. Cinq années à voir ses camarades s'effondrer, les unes après les autres. Cinq années de corps sans vie, parfois jusque dans la rue ; c'était devenu habituel, presque, de passer la jambe par-dessus le cadavre d'une femme au visage crispé de douleur. Cinq années durant lesquelles des conjoints éplorés vinrent la supplier de tenter quelque chose, n'importe quoi, pour sauver leur épouse, ou leur enfant, ou les deux. Cinq années durant lesquelles elle vit plus de larmes, de sang et de souffrance qu'un humain peut le supporter.
Mais elle réussit. Elle sauva l'Humanité, pour le meilleur ou pour le pire.
Le procédé était dur à expliquer, mais la jeune femme s'était inspirée de l'attitude de certains animaux, et jouant sur les hormones pour amener deux individus mâles à se reproduire – même pour sauver la race humaine, il y aurait toujours un crétin qui préférerait mourir que d'être gay – afin de maintenir une certaine lignée. Les hormones des mâles pouvant porter un fœtus étaient trafiquées de façon à attirer les mâles capable de les féconder. Quelques cas de grossesses de ce qui est devenu par la suite un « oméga » causée par un homme non-évolué avaient été recensés, mais leur rareté de les rendait pas très attractive sur le long terme du repeuplement humain.
C'était la folie humaine qui avait tenté de les détruire, et c'était l'espoir tout aussi détraqué d'une jeune étudiante qui se refusait à voir autant de personnes mourir autour d'elle, qui avait sauvé les trois milliards d'humains encore vivants à la surface du globe.
Chiyo était âgée de vingt-cinq ans, au début des événements. Trente, à peine, quand le gouvernement japonais avait commencé à monnayer le remède sur lequel elle avait sué sang et eau et qu'elle-même devait délivrer illégalement hors des frontières de son propre pays. Trente-deux, enfin, une fois que presque chaque humain sur Terre eut brusquement évolué – et ce n'était pas uniquement le mode de reproduction qui avait changé. C'était le métabolisme même des patients, jusqu'à ce qu'intervienne l'histoire bien connue d'un enfant brillant dans la maternité, événement marquant : l'apparition des premiers alters.
L'histoire avait été romancée, bien sûr. Chiyo, elle, avait préféré disparaître de la circulation, un maximum. Son nom s'était oublié, et la grande héroïne qui sauva l'humanité devint un homme de génie qui employait un pseudonyme quelconque. Ça lui allait, de toute façon, comme situation. L'oubli.
Allant désormais sur ses quatre-vingts ans – comment était-ce possible de vivre aussi longtemps ? - elle était toujours infirmière dans un lycée pour jeunes héros. Son âge n'avait altéré ses compétences d'aucune façon, et elle-même était désormais pourvue d'un pouvoir efficace en termes de guérison. Un baiser, pour accélérer ce que la nature était capable de faire seule.
Peut-être que le destin avait de l'humour, finalement.
Soudain, la porte de la salle s'ouvrit à grand renfort de cris et de fracas, et la plus si jeune femme tourna les yeux vers un jeune homme aux cheveux en bataille, verts. Izuku Midoriya, habitué à ses soins. Du haut de ses quinze ans, il était né oméga et sans le moindre alter. La question du pouvoir s'était réglée à sa rencontre avec All Might, sinon, il ne serait pas sur le lit maculé de l'infirmerie de Yuei. Elle observa avec soin son corps qu'il malmenait bien trop souvent – elle ne comptait plus les cicatrices hideuses sur ses bras – mais s'étonna de ne pas le voir blessé. A vrai dire, il n'avait pas dit bonjour, ou quoi que ce soit, se contentant de s'asseoir en gigotant les pieds et en jouant avec ses doigts.
Un oméga sans alter, il y a vingt ans de cela, aurait été en danger constant. Aucun moyen efficace de se défendre, des refus aux emplois, une incapacité à l'indépendance aussi bien morale que matérielle, puisque tous les biens des omégas appartenaient à leur Alpha attitré : père, frère, maître. Les femmes, désormais toutes stériles – et si peu nombreuses – étaient des sortes d'objets de luxe. Des collections entières étaient dédiées aux femmes de tout âge, de toute corpulence, de toute origine presque ; leur condition n'avait pas tant changé, si ce n'est qu'elles étaient un peu moins assassinées sans raison tangible – et voler quelques organes internes pour les collectionneurs n'en était définitivement pas une.
Cette situation avait duré longtemps. Pendant longtemps, il avait même existé des fermes pour créer des omégas au plus rapide, afin d'en faire des esclaves. A vrai dire, elles n'avaient pas toutes fermé, malgré les nombreuses interdictions.
Les rapports entre être humains n'avaient pas tant changé, finalement. L'idée était toujours la même : détruire toutes les personnes potentiellement fragiles.
« Uh, désolé de vous déranger de nouveau... lâcha finalement l'adolescent, appuyant ses deux index l'un contre l'autre. J'aurais besoin de vous parler, si ça ne dérange pas.
-Bien sûr que non. Tant que tu reviens pas avec des os éclatés, tout me va. Alors ? »
Midoriya regarda le sol comme si la réponse au sens de la vie s'y trouvait gravée.
« Ne t'en fais pas, tu ne me choqueras pas. »
Il expira un long moment, et une ou deux minutes après, il bredouilla.
« Ahum.. Je... Je voudrais savoir si... Si vous... Sivousavezdespréservatifs ? »
Elle haussa un sourcil, étonnée de la demande, avant d'éclater brutalement de rire. « Bien sûr que j'ai ça. C'était tout ? Rien de grave, donc ? »
Les joues de l'étudiant étaient particulièrement rouges, et l'infirmière – Recovery Girl, ici – lui tendit un certain nombre de protections. Avec ou sans latex, de différentes tailles, et dans le doute, une digue dentaire. Elle avait fait un peu de prévention au début de l'année à cause d'un précédent jeune oméga qui avait subi une grossesse imprévue et non voulue – malheureusement, l'avortement n'était pas illégal, mais trop difficile d'accès. Il avait dû abandonner tous ses rêves pour s'occuper d'un enfant qu'il considérait comme un accident de parcours, une erreur. Un regret.
« Et fais bien attention.. Tu prends la pilule, ou non ? »
Question idiote, c'était obligatoire pour avoir une autorisation de sortie dépassant une heure trente. Prendre un cachet tous les jours pour étudier ailleurs qu'à domicile, pour sortir en soirée, pour une après-midi entre amis, pour un voyage... Et les policiers, profession interdite aux femmes et aux omégas, étaient très regardants sur les contrôles. En effet, les omégas devaient porter au poignet une plaque métallique indiquant leur « condition ». Une histoire de soins, avait dit l'Etat. Pour les parquer, surtout.
Mais, étonnement, Midoriya secoua la tête.
« Non... Ça me rend malade, je supporte pas bien.
-... Comment tu as eu ton autorisation de sortie, au juste ? »
Elle plaça ses bras contre son torse, perplexe.
« Uhhh... J'ai menti et je fais semblant de la prendre ? » lâcha-t-il, en détournant les yeux.
Elle aurait voulu rire, se moquer doucement. Elle le trouvait courageux. Et très idiot. Il vivait dangereusement.
« Que vas-tu faire, si quelqu'un d'autre que moi l'apprend ?
-Je... Je sais pas trop. Mais en voyant la liste des effets secondaires, j'ai préféré arrêter directement. J'ai pas envie de m'empoisonner... »
Elle soupira de nouveau. Elle ne savait pas réellement quoi lui dire. Elle lui tapota doucement le genou en lui demandant d'être au plus prudent. Midoriya hocha la tête énergiquement avant de quitter la salle. Elle craignait le pire...
Et elle savait que c'était de sa faute.
OoO
Shouto était le seul de tous ses adelphes à être un alpha et à posséder deux alters. Cela avait coûté à son père de très nombreuses liaisons, des mariages forcés, pour finalement s'installer avec une femme – c'était un objet rare, et il avait bonne réputation grâce à elle, quand bien même il ne la laissait quitter sa pièce attitrée que pour les grandes occasions. C'était avec elle que Shouto avait grandi, jusqu'à ce que prise d'une crise – il ressemblait tant à l'homme qui la séquestrait – elle ne jette à son visage de l'eau brûlante.
Il en avait toujours la cicatrice, sur une partie de son visage.
Shouto détestait son père.
Savoir qu'il lui ressemblait le rendait fou de rage, tant et si bien qu'en y songeant, il tremblait par moments. Poussé de force à devenir un héros, à devenir le numéro un. À être une version améliorée de son père. Qu'à cela ne tienne ; c'était sans honte qu'il s'était mis à fréquenter un jeune oméga de sa classe, et c'était toujours sans la moindre gêne qu'après quelques touchés hésitants, Shouto avait annoncé à Izuku qu'il souhaitait aller plus loin. Le jeune homme avait paniqué, bien sûr, il n'était pas prêt et à vrai dire mal à l'aise à l'idée d'être « en-dessous » pour un tas de raisons toutes légitimes. Shouto lui avait souri, haussant les épaules.
« Alors ce sera moi. Ne t'en fais pas. »
Ce n'était pas uniquement pour emmerder son géniteur, cela dit – ce n'était qu'un bonus, à vrai dire. Appréciable, bien sûr, mais un bonus. Il se sentait réellement le cœur battant quand Izuku était dans la même pièce que lui, le regardait, lui souriait. Il était heureux de faire cela avec lui, il était heureux d'être avec lui, et pas avec quelqu'un d'autre.
En voyant son... Petit ami – il supposait ? Ils n'avaient encore rien officialisé – revenir de l'infirmerie, les joues rouges, il lui accorda son plus beau sourire – ou tout du moins, il essaya – avant d'attraper sa main pour entremêler ses doigts aux siens.
« Ne t'en fais pas, je suis sûr que tu seras parfait. Je te fais confiance. »
OoO
La nuit était éclairée faiblement par la lumière d'un croissant de lune blafard. Cette nuit, ce n'était pas Shouta qui s'occupait de la patrouille, puisqu'il se reposait dans le grand lit. Hizashi s'était porté volontaire pour prendre en charge les horaires de son mari. Vêtu de son costume, les cheveux coiffés avec soin et deux kilos de gel, il marchait dans les rues que la lune ne parvenait pas à atteindre, et où les lampadaires clignotaient faiblement. C'était couru d'avance, d'y entendre un cri sourd, mais ce qui était plus étonnant, c'était les différents éclats de voix. Le blond courut jusqu'à l'origine des sons pour y trouver trois individus. L'un, oméga qui attendait visiblement un enfant, était allongé au sol, tremblant de peur, mais en vie. Ensuite, il y avait un homme cagoulé qui tenait un couteau taché çà et là de vieux sang noirci, et finalement, un autre individu qui avait autour des yeux un bandeau rouge qui flottait doucement avec la brise légère de la nuit.
Le troisième personnage de cette scène étrange tenait entre ses mains une arme longue, dont la lame avait transpercé le corps de l'homme cagoulé, qui émit encore quelques plaintes avant de se taire. Sans doute définitivement, étant donné l'emplacement du coup. Hizashi ouvrit la bouche dans l'idée de crier, avant de réaliser qu'il risquait de blesser l'oméga enceint au sol. Agacé, il s'approcha – il n'était pas aussi bon que Shouta au corps à corps, mais il se débrouillait pas mal, dans son genre. Il n'eut néanmoins pas le loisir de s'attaquer au meurtrier, car celui-ci fit un immense saut pour partir, dégageant son sabre de l'abdomen du cadavre qui s'effondra au sol.
La scène avait été rapide. Peut-être une minute, à peine, s'était écoulée. Mais Present Mic ne réfléchissait pas à ce genre de détails, et s'approcha de la victime – celle en vie, du moins – qui pleurait à grosses larmes en tenant son ventre très rond. Il se voulut le plus rassurant possible, et maîtrisa un maximum le son de sa voix en contactant la police d'une main – s'il restait appuyé cinq secondes sur un bouton du côté droit de son téléphone, il envoyait un message au poste le plus proche en leur indiquant sa géolocalisation afin qu'ils puissent intervenir au plus tôt. S'il restait appuyé dix secondes, c'était à Shouta qu'arrivait le message.
« Hey, you... Everything's fine now. Je te le promets. Tu peux bouger ? »
La victime tremblait beaucoup, et ne parvint pas à articuler la moindre phrase. Il secoua la tête, finalement, et Hizashi se mordit la lèvre inférieure.
« Je vais appeler une ambulance, O- »
Il fut coupé brutalement par un cri. L'oméga s'était sans doute arraché les cordes vocales, avec celui-là ; ses doigts, couverts de cicatrices çà et là, se posèrent sur le ventre rond, avant qu'il ne lâche un nouveau hurlement de désespoir et de souffrance. Une flaque s'était formée sous son fessier.
Oh merde il était en train d'accoucher. FUCK FUCK FUCK.
Hizashi respira un grand coup. Il n'était pas médecin, mais étant oméga – quand bien même stérile – il connaissait quelques bases en matière de grossesse, puisque, après tout, il aurait pu en vivre une. Il toucha doucement le ventre enflé du jeune homme ; la grossesse était bien avancée, mais pas terminée. Le stress intense de cette confrontation avait dû causer le début du travail. Toujours avec soin, il allongea le jeune homme au sol en déposant sa veste sous sa tête – il y avait plus confortable, bien sûr, mais c'était déjà mieux que rien – avant de téléphoner à une ambulance, leur expliquant calmement la situation.
La suite était un peu floue. Des bruits de sirènes et d'alarmes, des lumières changeantes qui écorchaient sa rétine même si protégée par ses lunettes préférées, des voix de médecins et de policiers qui rentraient dans la ruelle pour y découvrir le corps de l'homme cagoulé. Le jeune oméga fut pris en charge, Hizashi interrogé, avant qu'il ne puisse retourner à sa patrouille qui touchait presque à sa fin.
Depuis l'avènement des héros, la criminalité avait bien sûr énormément diminué – merci, All Might – mais les agressions contre les omégas n'étaient pas tant considérées comme des crimes. Enfin, dans le droit, si ; dans les faits, personne n'y accordait une réelle attention, si ce n'est quelques associations dédiées et des militants infatigables sans qui aucun droit n'aurait été acquis ces dernières décennies. Le reste de la populations les voyait comme des sous-citoyens. Des sous-humains. Des parasites.
Hizashi rentra ensuite chez lui, et une fois les verrous de la porte fermés convenablement – c'était un détail qui angoissait souvent Shouta – il s'étala sur le lit et passa paresseusement un bras au-dessus de la masse douteuse allongée sous trois couvertures qui se rapprocha vite de lui.
Les cernes sur son visage s'étaient un peu atténués, ils paraissaient un poil moins sombres que d'ordinaire. Le blond se permit un immense sourire qui lui était propre, avant de s'effondrer de fatigue, sachant pertinemment qu'il trouverait le moyen de se lever avant Shouta, quand bien même celui-ci s'était endormi aux alentours de vingt-et-une heures.
OoO
Un communiqué officiel de la police annonça, quelques jours après, que le tueur sanglant d'omégas avait été arrêté, mais que cela n'empêchait pas les agents de la paix de conseiller – fortement – aux jeunes omégas de ne pas sortir trop tard, ou de rester accompagnés. C'était encore risqué, après tout, même si la situation était parfaitement sous contrôle. Tout était. Parfait.
Ou, tout du moins, c'est ce qu'ils prétendirent jusqu'à trouver quatre cadavres supplémentaires en une semaine. Cette fois, le pattern avait changé. Il s'agissait tous d'alphas, plus ou moins jeunes. La police ne trouvait rien qui les reliait entre eux.
L'un d'eux était un étudiant. Un jeune. Quinze ans. Blond. Explosif, même. Son meurtre avait été particulièrement immonde, plus que les autres sans doute, parce qu'il s'était débattu et que les traces de l'affrontement étaient visibles. Des traces noires se trouvaient un peu partout dans la ruelle étroite, les murs étaient violemment lacérés de coups droits d'une lame visiblement très résistante. Du sang avait été catapulté jusqu'à trois ou quatre mètres au-dessus du sol. On aurait pu croire à un adolescent apeuré qui aurait tenté de survivre autant que possible, mais ce n'était clairement pas le cas. Le corps de la victime était parsemé de petites coupures et de bleus, résultats d'un combat au corps à corps particulièrement violent.
Mais Katsuki Bakugou leur donna une information vitale. Au creux de sa main se trouvait une dizaine de cheveux sombres, qui ne lui appartenaient clairement pas, ainsi qu'un téléphone portable pratiquement déchargé, mais qui avait enregistré l'intégralité des bruits du combat, et s'était arrêté par manque de place après deux ou trois heures suivant le décès.
Les policiers étaient à deux doigts de découvrir l'identité du meurtrier.
Quand Shouta apprit le décès sanglant de son élève, il sentit quelque chose se briser au fond de lui. Quelque chose dont il n'ignorait pas l'existence, mais qu'il avait jusqu'ici préféré ignorer. Une sorte de frustration de ne jamais pouvoir serrer un nourrisson entre ses bras – Hizashi était stérile, et quand bien même, un couple de héros n'avait pas à adopter un enfant alors que ses activités entraîneraient la mise en danger du petit. Il s'était donc concentré sur ses élèves, à défaut, et s'il y avait toujours cette limite à avoir entre un professeur et sa classe, il savait malheureusement qu'il les considérait comme bien plus que de simples étudiants. C'était comme se retrouver face à une classe de maternelle abandonnée et pour laquelle il était la seule source de connaissances sûres – il fallait voir le nombre d'élèves qui lui demandaient des conseils sur d'autres choses que le sujet du cours.
Hizashi l'avait pris dans ses bras, doucement. Des excuses avaient été faites, et l'héroïsme du jeune alpha avait été particulièrement salué dans une conférence de presse où la mère du jeune homme avait été invitée à parler en direct – quand bien même elle n'était pas sa génitrice, elle était légalement le deuxième parent de Bakugou après tout.
Elle aurait pu noyer son discours sous les sanglots. Et c'était vrai qu'elle hoquetait un peu, entre deux hurlements féroces.
« C'EST DE VOTRE FAUTE ! Putain ! C'est à cause de votre merde ! De votre putain de société de merde où vous parquez les individus comme des chiens ! Si vous aviez pas raconté des conneries à mon fils, PUTAIN ! Peut-être qu'il aurait couru au lieu de croire que c'était son devoir de puissant alpha de merde, alors que merde, IL AVAIT QUINZE ANS ! VOUS AVEZ. TUE. MON. FILS ! »
La sécurité avait voulu la faire descendre de l'estrade, mais elle en étant partie elle-même en courant, suivie par son époux qui tremblait légèrement lui aussi, bien qu'un peu plus discret que sa compagne qu'on entendit encore frapper contre les murs, jusqu'à ce qu'un policier mette brutalement fin à la conférence.
Shouta pleura autant qu'elle. Mais au-delà des larmes, il y avait cette haine envers lui-même de ne pas avoir pu empêcher la mort de l'un de ses étudiants. De l'avoir trop préparé au cas où ce genre de scénario se présenterait. Que Bakugou soit aussi intelligent pour avoir pensé à tous ces détails-là. Peut-être que son métier n'était « que » d'agir en cas d'attaque d'un alter destructeur, évidemment. Il avait toujours suivi cette règle, de ne pas interférer avec la police.
Mais aujourd'hui, l'un de ses élèves était mort par sa faute.
Par. Sa. Faute.
Il ne pouvait pas rien faire.
Son blond de mari avait dû comprendre le cheminement de ses pensées – ils ne sortaient pas ensemble depuis près de douze ans et n'étaient pas mariés depuis huit sans raison – et il le fixa, ses yeux verts plongés dans ceux, sombres et impénétrables pour qui n'en avait pas la carte, de Shouta.
« Tu ne penses pas à faire quoi que ce soit pour le venger, je suppose ? »
Le trentenaire roula des yeux.
« Ce n'est pas mon travail. Je n'ai aucune raison d'enquêter là-dessus. Les policiers se débrouilleront très bien sans moi. »
Ce fut au tour d'Hizashi de lui accorder une moue entre adorable, perplexe, et « je sais que tu mens débile ». Il glissa ses longs doigts dans ses mèches noires désordonnées, maladroitement tirées en arrière par quelques épingles à cheveux particulièrement usées.
« Ce n'est pas une situation logique. Là, c'est tes émotions qui prennent le pas. And, yes, I know ; tu vas me dire que tu es pas émotionnel, et moi, darling, je vais te dire qu'on est together for like, 12 years. I know you better than you do. »
Un vague grognement pour seule réponse. Peut-être qu'il avait raison. A vrai dire, Shouta le savait : Hizashi avait raison, évidemment. Mais quand ses paupières se fermaient, ne serait-ce que l'espace d'un clignement, il revoyait le spectacle sanglant des membres inférieurs arrachés, et des lacérations violentes sur l'abdomen.
Ce n'était pas logique. Ce n'était pas raisonnable. Plus généralement, ce n'était pas bien.
Mais Shouta savait aussi que massacrer un adolescent, ce n'était ni logique, ni raisonnable, ni bien.
Il ne pouvait pas ne rien faire.
