« Cœur de Stratège, Œil de Démon »

Lord Ma-koto Chaoying


Titre : « Cœur de Stratège, Œil de Démon »

Auteur : Lord Ma-koto Chaoying (ou Lordess Ananda Teenorag)

Série : Beyblade Métal Fusion

Genre : Aventure, Semi-Alternate Universe, avec une pointe de romance

Résumé : Seul dans l'ombre, grâce à son intelligence exceptionnelle, celui que l'on surnomme « le Stratège Blanc » planifie toutes les tactiques des Bladers et tire les ficelles des opérations menées par l'Armée Métal Fusion. Blader doué, mais Eternel Second, derrière Pégase et Léone, Ariès le Magnifique protège ses amis dans l'ombre et use de ses multiples talents afin de servir la cause grandiose de ses supérieurs. Mais, un jour, la rencontre avec un être profondément maléfique réveille un démon intérieur en lui, le forçant à accepter le côté le plus sombre et secret de sa personnalité... et à accepter l'étrange potentiel de ses origines cachées.

Personnage principal : Hyoma.

Personnages : Reiji Mizuchi, Yuu Tendo, Tsubasa Otori, Kenta Yumiya, Madoka Amano, Hikaru Hasama, Kyoya Tategami, Ginga Hagane.

Pairing : Hyoma x ...surprise !

Autres pairings : Probablement une petite mention de Madoka x Benkei, et de Ginga x Kyoya.

Notes : Fanfiction liée à « Twin Blade Legacy ».

Mot de l'auteur : Bon courage à tous les auteurs de la série Beyblade Métal Fusion !


Chapitre 1 : Le Secret du Stratège Blanc


Sous-titre : « Tu sais que tu es le seul à pouvoir façonner ton destin. Mais tu sais également que je suis le seul qui pourra à jamais te le rappeler. » (Livre III, chapitre 7, ligne 32)


Aube.

Forêt, de la montagne… ?

« 'Au Grand Stratège Blanc.

Prochaine mission : Infiltrer la Base des Etoiles.

Objectif : Rassembler tous les Beybladers d'élite. Assembler les Twinbladers.

Délai : Le plus rapidement possible.' »

Les délicates lèvres, finement dessinées, se pincèrent légèrement. Un froissement imperceptible provint de l'arbre, mais ce n'était que l'ordre de mission qui avait été plié brusquement pas une des feuilles du sycomore n'avait laissé échapper un bruissement lors des mouvements du Blader.

Le jeune garçon savait se déplacer sans un bruit dans la montagne.

'Mais à quoi est-ce qu'ils jouent donc ?'

Un mouvement, et d'un saut gracieux, seule une traînée d'air avait laissé une trace parmi les arbres.

'Le Conseil des Quatre abuse vraiment…'

Il fallait d'excellents yeux, pour ne serait-ce qu'entrapercevoir l'éclair blanc qui se faufilait dans la végétation, franchissant les cours d'eau et les pierres sans marquer le moindre ralentissement.

Ce n'était pour rien qu'il avait été le Gardien de la Montagne Hagane, dans le temps passé.

'Pensent-ils donc que je sois capable de tout voir ? Je suis stratège, pas voyant !'

Athlétique, agile, le jeune garçon avait une constitution robuste, quoique d'une élégance svelte et délicate.

'Tsss !'

Les traits fins, si délicats, qui dessinaient son visage, semblaient avoir été taillés comme une œuvre d'art cette dernière eût paru presque féminine, sans l'expression un peu calculatrice et froidement déterminée qui apparaissait de temps à autre dans les orbes bleues, magnifique reflet de l'intelligence glacée du jeune Blader.

'Esprit de ma toupie, guide-moi.'

Car, oui, avant tout, c'était un Blader, ou plus exactement un Beybladeur ces as de la toupie qui conquéraient le cœur des gens, en s'engageant dans une ronde de combat, où tournoyaient les créatures animant leur cœur. Dans l'Ancien Monde, dans l'Ere de la Lumière et des Ténèbres, l'affrontement du Cheval Ailé et de l'Empereur Dragon avait sublimé le cœur du Beyblade.

Mais aujourd'hui, certaines choses avaient changé…

'Pff, être un agent ne fait pas de moi un faiseur de miracles… parfois, je me demande si entrer dans l'Armée Métal Fusion étaient une sage décision.'

Bruissement.

En un éclair, les instincts du jeune agent se réveillèrent, prêt à s'enfuir ou à attaquer. Ce n'était pas lui qui avait fait ce bruit.

« Sors de là. »

La voix avait résonné, invitant le jeune stratège à émerger. Elle n'était pas menaçante, mais pas amicale non plus.

« … »

Il choisit donc d'obtempérer, non sans rester sur ses gardes.

« … »

'Alors, ce doit être eux.'

Devant lui, se tenaient le groupe d'hommes chargés de recueillir l'information. Il pouvait les reconnaître, grâce au signe distinctif qui ornait leur coiffe.

« Nous t'attendions, Ariès. »

Prudemment, le jeune garçon jaugea ses interlocuteurs du regard. Ses orbes bleus allaient des uns aux autres, s'arrêtant sur celui qui semblait être le chef.

« As-tu ce qu'il nous faut ? »

Pesant ses mots, le Blader fixa droit dans les yeux celui qui avait pris la parole.

'C'est lui.'

« Oui. »

L'homme, sans dévoiler la moindre expression, s'approcha du jeune agent. Ce dernier n'avait pas cillé non plus.

« … »

« … »

« Qu'attends-tu pour parler, Ariès ? »

Sans marquer la moindre gêne devant ces paroles – qui eussent pu marquer une humeur d'impatience, si l'expression du visage de l'homme avait reflété quoique ce soit – le jeune garçon se déplaça, allant de l'un à l'autre. Avec une légèreté toute calculée, il dardait l'intensité de ses prunelles bleues sur chacune des personnes présentes.

'Eprouvons-les.'

« Voyons voir… »

Se permettant une expression ambigüe, au milieu des soldats assez interloqués, il s'arrêta, devant l'un d'entre eux et d'un sourire tout à fait charmeur – quoiqu'entièrement calculé – il tapota l'épaule carrée.

« Oh, tu me sembles tellement costaud, dis donc… pour un peu, je me dirais que tu viendrais de l'armée Noire ! »

Outré, l'individu géant se leva avec brusquerie.

« Hein, QUOI ? Mais c'est n'importe quoi, je… ! »

Il tenta de saisir le garçon par le col, mais d'un mouvement élégamment calme, ce dernier s'était posté hors d'atteinte.

« Oh, je suis vraiment désolé, je ne voulais pas insinuer que vous étiez un ennemi ! Mais, c'est juste que vous aviez l'air tellement fort, que… je ne pouvais qu'être un peu impressionné. »

Souriant de plus belle – toujours avec hypocrisie – le jeune Blader fit un semblant de révérence au mastodonte interloqué et furieux, avant de se tourner vers un autre assez maigre.

« N'est-ce pas, mon ami, qu'il paraît tellement fort qu'on pourrait avoir peur de lui ? Au point… (un éclair un peu aigu luisit dans les prunelles de glace) … de le prendre pour l'armée Noire ? »

De plus en plus énervé, le précédent homme se précipita sur lui, pour lui donner une correction. Cette fois – intentionnellement – le jeune stratège se laissa saisir par le col. Mais quand l'autre leva le poing pour le frapper, il fit mine de se protéger le visage, avec un cri de terreur.

« Mais, mais, arrêtez ! »

D'un geste rapide, le maigre avait saisi le poing de son camarade. Intérieurement, le Blader se permit un sourire.

'Parfait.'

« Arrête ! Tu vas quand même pas le frapper ? Ce n'est qu'un gamin… il pourrait avoir l'âge de mon fils. »

« Mais, il vient de m'insulter ! Il ose dire que j'appartiens à l'armée ennemie ! »

'J'ai ma confirmation.'

« Ce n'est qu'un gamin. Il ne se rend pas compte de ce qu'il dit. Ce n'est probablement qu'une nouvelle recrue sans expérience… tu peux bien lui avoir fait peur ! »

Un léger rictus apparut sur le visage du 'gamin' en question.

'Ces hommes sont de la Métal Fusion.'

« Ça suffit à présent. »

La voix du chef, tranchante et calme, avait résonné. Le garçon, quant à lui, leva les yeux.

'Celui-là ne sera pas facile à manipuler. Je devrais être prudent.'

« Vous venez de dévoiler votre appartenance, vous deux. Vous êtes tombés droit dans son piège. »

Rendus muets par la remarque, les deux concernés ouvrirent de grands yeux. Soudain, le chef – du moins, celui qui avait l'air du commandant – se tourna vers le jeune garçon, les yeux inexpressifs en dépit d'un très, très léger sourire appréciateur.

« Gamin, tu éprouves mes hommes ? Ils sont loyaux, si c'est ce que tu veux savoir. »

'Toi aussi, je dois t'éprouver.'

Le jeune agent baissa la tête, détournant faussement le regard.

« Je n'avais pas une telle intention… je ne suis qu'un gamin, après tout. Comme vos hommes l'ont dit… »

« Tu me parais beaucoup plus intelligent que la moyenne, pour un 'gamin'. »

'Tsss, toi, tu joues au méfiant. Attends un peu.'

Avec un soupir affecté, le 'gamin' détourna le visage.

« Quand bien même ce serait le cas… que pourrais-je faire face à un groupe de soldats fort entraînés et bien plus expérimentés que moi ? »

« Utiliser la ruse, par exemple ? »

L'homme ne paraissait pas changer son attitude d'un iota. Le Blader sut qu'il devrait frapper fort – beaucoup plus fort.

'Tu ne te laisses pas démonter, toi. Tu es fort.'

« Que peut la ruse contre la force ? »

« Beaucoup. » répondit son interlocuteur, toujours aussi calme.

'Si tu n'es pas décidé à parler, alors je te ferais me dévoiler par tes gestes ton appartenance.'

Le jeune garçon soupira, à nouveau, toujours aussi fort. D'un geste – intentionnellement – très maladroit et brusque, il saisit son lanceur.

« Eh bien, eh bien… »

Instinctivement, l'homme avait posé la main sur son propre lanceur et sa toupie, prêt à dégainer.

'Ah ha. Mes calculs étaient justes. Un homme compétent et sur ses gardes reste prêt à sortir sa toupie à chaque instant, afin de combattre.'

Cela n'avait duré qu'une fraction de seconde, mais le jeune garçon avait le temps de jeter un coup d'œil sur l'arme. Les yeux bleus tombèrent sur la toupie du chef. Dessus, figurait le motif de la Métal Fusion, signe indiscutable de la loyauté de l'individu.

'Cette fois, c'est certain. Ils sont tous de notre côté.'

« Très bien. »

D'un coup, le Blader cessa de sourire de façon affectée, et se redressa, avec une attitude toute militaire. Il leva la main, et montra sa toupie face à eux, accomplissant ainsi le salut militaire de l'Armée Métal Fusion.

« Lieutenant Ariès, de l'escadron n°8 'Bélier Gardien', issu du QG principal. Vous devez être l'escadron n°16 'Etoile Filante', en provenance de la base sud-est. »

A son tour, son interlocuteur se présenta, suivant le même modèle. Complètement interloqués, les autres hommes les fixaient, sans comprendre la vérité. Comprenant qu'il devait s'expliquer, le jeune stratège se tourna vers eux, avec une expression plus sincère.

« Veuillez m'excuser pour mon attitude de tout à l'heure. Je devais m'assurer que vous apparteniez bien à la Métal Fusion. »

Toujours abasourdis, les deux individus eurent besoin de plusieurs secondes avant de se remettre à parler.

« Attends, tu… tu… tu es… le chef du fameux escadron n°8 ? L'escadron chargé des missions tactiques ? »

« Lieut… Lieutenant… Ariès ? Toi ? »

'Ceux-là ont l'air un peu long à la comprenette, on dirait…'

Avec un soupir exaspéré, le chef les coupa brusquement, faisant un grand geste de la main.

« Oui, vous avez devant vous le Lieutenant Ariès. Ou encore, le fameux 'Ariès, le Magnifique', chef de l'escadron des missions tactiques. Maintenant, pouvons-nous passer à l'essentiel ? »

Voyant que ses deux hommes ouvraient toujours grand la bouche, le meneur du groupe entreprit d'ajouter, avec une note de sermon.

« Je vous avais déjà dit de ne pas juger quelqu'un sur la mine. On dirait que vous manquez d'entraînement. Nous verrons cela en rentrant. Mais, pour l'instant… »

Il se tourna vers Ariès le Magnifique, avec une attitude toute professionnelle.

« …pouvons-nous aller droit au but ? »

Ce dernier acquiesça, sur le même ton.

« Tout à fait. Maintenant, je peux vous délivrer l'information. »

Il rangea sa toupie avec une agilité qui égalait sa maladresse affectée, lors de la prise de son lanceur.

« 'Les animaux se rassemblent pour la grande chasse. Mais la proie désignée n'est pas encore affaiblie. La prudence s'impose dans la réflexion.' »

'Tous les escadrons sont prêts pour la mission d'assaut. Mais la cible ennemie conserve encore énormément d'effectifs. Il faut réfléchir à des stratégies sans attaquer en force.'

Un imperceptible signe de tête avait animé la posture de l'homme. Sans doute, songea le jeune stratège, était-ce sa manière d'approuver la démarche.

'Cet homme est compétent et discret, apparemment.'

« Très bien. C'est du bon travail. Sauf que… »

Toujours monocorde, la voix de l'homme continua.

« Ce n'est pas ce qu'il nous faut. »

'Hein ?'

Les sourcils finement dessinés, sur le visage aux traits fins, eurent un mouvement d'incompréhension.

« Comment ça, 'ce n'est-ce pas qu'il vous faut' ? Ces informations sont… »

D'un coup sec sur le tronc d'arbre, l'homme avait posé sa main, faisant quasiment sursauter son interlocuteur. Son bras emprisonnait de sa grandeur le jeune Lieutenant, qui était, en comparaison, bien plus petit que lui.

« …exactes et intéressantes, mais nous sommes venus chercher autre chose, Lieutenant Ariès. Une chose que le Conseil des Quatre détient. »

Soudain, un éclair de réalisation – empreint de terreur – frappa son esprit.

Ils connaissaient le Conseil des Quatre.

Pour la première fois, depuis la rencontre, le jeune Lieutenant se sentit nerveux. Quelque chose était anormal.

« Mais de quoi… »

« Nous sommes venus chercher le Stratège Blanc. »

'Ils savent… qui je suis ? C'est… impossible ! Cette information est top secrète, même pour nombre de hauts gradés !'

Avec un aplomb digne de ses talents de menteur, le jeune Blader répondit avec calme.

« Je suis désolé, mais je crains de ne pouvoir vous l'apporter. Je suis seul, voyez-vous. »

L'homme n'avait pas changé d'expression, mais à présent, le stratège avait compris que ce n'était qu'un leurre.

« Oh, c'est dommage, alors. »

Il était en danger, il pouvait le sentir.

Ses muscles se tendaient… prêt à bondir.

« Alors, nous allons nous emparer de lui par la force ! »

D'un seul coup, sans crier gare, des toupies avaient foncé sur lui, prêtes à le mettre à mal. Mais, plus rapide que l'éclair – plus rapide que l'instinct même – le détenteur d'Ariès avait bondi sur le talus, et donné l'ordre à la valeureuse créature qui habitait sa toupie, de riposter.

« Ariès, Assaut de la Tempête de Vent ! »

Les toupies se renversèrent violemment au contact de l'élégante créature des montagnes, mais le chef des hommes gardait un sourire sarcastique.

« Oh, tu joues déjà tes cartes, petit Blader ? Je pensais qu'un tacticien gardait toujours ses atouts en réserve… »

Sans se décourager, les possesseurs des toupies les relancèrent à l'attaque.

'Cette précision ! C'est sûr, c'est un coup monté. Mais, pourtant, ils sont bien de la Métal Fusion !'

« Ariès, Axe de Rotation Eternelle ! »

De nouveau, le magnifique bélier détourna les attaques féroces de ses ennemis en un amas désordonné de courses zigzagantes.

« Décidemment, tu es plus rentre-dedans que tu en as l'air. Tu es assez doué… comme on nous l'avait dit. »

'Comment ça, « comme on vous l'a dit » ?'

Avec sang-froid, le jeune garçon reprit, sans jamais cesser de combattre.

« Ainsi, vous me connaissez ? »

Pour la première fois, une lueur un peu démoniaque étincela dans les prunelles du chef.

« Qui sait, petit ? Aqua Otter, Attaque du Rapide Implacable ! »

Et de lancer violemment sa propre toupie contre celle de son jeune vis-à-vis, dans une vague d'eau qui n'était sans rappeler le courant d'une rivière en folie. Si puissante paraissait-elle, le Détenteur d'Ariès calcula qu'il était cependant capable de l'encaisser, et se prépara à utiliser ses légendaires coups de défense. Mais, au dernier moment, alors qu'il se préparait à utiliser son Axe de Rotation Eternelle, Aqua Otter dévia brusquement de sa trajectoire…

'Hein ?'

…pour se diriger directement sur lui !

« Ahhhhhh ! »

Avec un grand cri, le jeune stratège s'était jeté par terre, esquivant le bolide dans un saut désespéré.

« Enf- ! »

Les éclats d'eau aspergèrent sa figure, brouillant sa vision momentanément. Il avait réussi à éviter un coup assez violent pour l'envoyer dans le coma, mais Rock Ariès, également aveuglé par l'écume, zigzaguait dans le décor, avec moins de grâce qu'à l'accoutumée.

« Espèce de… ! Depuis quand vise-t-on le possesseur d'une toupie au lieu d'attaquer normalement ? »

« Aqua Otter, continue à attaquer le gamin, et laisse tomber Ariès ! »

Le Blader, dans un sursaut de réflexe désespéré, plongea de nouveau sur le côté. Mais, cette fois, il fut moins chanceux, et bien que la toupie ennemie filât à côté de lui, un rocher heurta méchamment son épaule.

« Aaaarrggh ! »

Comme si la situation n'était pas déjà assez critique, les soldats se mirent à imiter leur chef et à le viser lui.

'Ah, ça suffit, à présent ! Je commence sérieusement à en avoir assez !'

« Ariès, Assaut de la Tempête de Vent ! »

Et la toupie plongea dans le sol, disparaissant au regard des ennemis, qui s'esclaffèrent.

« Alors, c'est tout ce que tu peux faire, petit ? Te cacher ? Tu ferais mieux de te rendre, à moins que tu aimes te montrer ridicule ! »

Le visage dans l'ombre d'Ariès s'illumina soudain d'une expression calme.

« Les seules personnes ridicules… sont celles qui sont incapables de lire un coup. »

« Hein ? »

'Prenez ça, bande de vauriens !'

Alors le magnifique bélier surgit de la terre, percutant un ennemi qui alla rouler sur un autre, tout en envoyant des mottes de terre non seulement dans les toupies adverses – ce qui eut pour effet de les stopper progressivement – mais également dans les yeux des soldats !

« ARGGGH ! PETIT… ! »

Affichant un sourire victorieux, le Détenteur d'Ariès se posta sur un rocher, prenant son épaule blessée dans la main.

'Bien fait pour vous ! C'est un jeu qui peut se jouer à deux, vous saviez ?'

« Ne sous-estimez jamais Ariès. A moins que ce soit votre dernière volonté. »

En bas, le chef était calme, fort calme.

« … »

Trop calme.

« Très bien. Tu es vraiment fort, c'est certain. »

Soudain, Ariès eut un mauvais pressentiment. L'expression de ce visage… la tonalité de sa voix… tout indiquait que la marche d'un plan se déroulait comme prévu.

« Mais ça coïncide avec les données communiquées. Alors, maintenant… »

Un immense cri métallique résonna, vrillant les oreilles du Blader.

« …que dis-tu de ça, Ariès ? »

Une ombre sembla envahir l'espace-temps, et avant qu'il eût le loisir de comprendre quoique ce soit, le jeune Lieutenant ressentit une folle douleur au crâne, qui lui fit perdre connaissance.

Quelque temps plus tard – était-ce quelques minutes, ou quelques secondes plus tard ? – le jeune garçon réalisa qu'il était maintenu par le groupe qui l'avait agressé, et que – chose assez contrariante – ses mains avaient été liées afin d'entraver ses mouvements.

'Les enf-… non contents d'envoyer directement leurs toupies sur moi, il faut qu'ils mettent au point un système pour s'en prendre au Blader et non à la toupie ?'

Une douleur au crâne, lancinante, lui martelait le crâne.

'J'ai baissé ma garde, car je pensais qu'ils se battraient à la manière de la Métal Fusion !'

Autour de lui, les hommes s'affairaient, entreprenant de le maintenir solidement.

« C'est un mouvement osé, tout de même. Envoyer le Stratège Blanc du Conseil des Quatre comme agent de liaison. A croire que l'Armée Métal Fusion ne tient pas à ses piliers. »

L'un d'entre eux, à sa droite, eut un reniflement dubitatif.

« Ce gamin est vraiment le Stratège Blanc du Conseil des Quatre ? Il se bat bien, mais ça ne ressemble en rien à une formation tactique. »

« Peut-être est-il un auxiliaire… »

« Venant de ceux qui l'ont pris pour un simple gamin, alors qu'il a été capable de se jouer de vous et de vous repousser à lui tout seul, c'est assez ridicule. Emmenez-le, et ne le laissez partir sous aucun prétexte. Mais ne lui faites aucun mal non plus, c'est un ordre venant de là-haut. »

'Pour ce qui est de me faire du mal, c'est déjà, bande d'enf- ! On a pas idée d'attaquer directement quelqu'un, c'est la toupie que l'on combat, en général !'

S'il avait pu, le jeune Lieutenant se serait frotté le crâne. La douleur était horrible.

'Si je savais qui ou quoi… comment ont-ils pu… me frapper ainsi… avec leurs toupies ?'

Autour de lui, les soldats semblaient deviner son cours de pensée.

« Inutile de te creuser la tête, tu ne comprendras pas. Tu t'es fait avoir, même si tu es plutôt fort au Beyblade. C'était un plan parfait. »

Les yeux du jeune stratège clignèrent, avec intelligence.

'Tiens tiens, un plan… parfait ? Ce qui veut dire… que c'était prémédité.'

« Cessez de bavasser et emmenez-le. Vous parlez trop. »

Obéissant, le groupe commença à se diriger vers une autre place, où se trouvait un camion.

'Il doit donc y avoir… quelques chose, ou quelqu'un qui a aidé. Attends, je crois que je sais !'

Alors qu'il était emmené de force, le jeune Lieutenant parcourut du regard le lieu où ils s'étaient battus. Ses orbes bleus balayèrent la végétation, calculant à la vitesse de l'éclair toutes les possibilités existantes.

'Si mes calculs sont bons… aucun d'entre eux n'aurait pu me lancer un coup avec une telle force, sans aide. Il y a forcément quelque chose, et je crois que je sais ce que c'est. Mais, si c'est ce que je pense, c'est vraiment diabolique.'

« Humph. C'est minable… »

« Quoi encore, petit ? »

« Vous y mettre à dix contre un, et contre un gamin de surcroît. Pas très glorieux. »

La main du chef se referma sur son bras, avec une force démentielle. Sous le coup de la douleur, le Détenteur d'Ariès grimaça.

'Eh, eh, calmos !'

« Tais-toi, ou malgré l'ordre de te ramener indemne, tu te prendras un gros coup. Après tout, si tu ne fais que t'évanouir, ou que tu es un peu blessé, on peut encore considérer ça comme indemne… »

'Pas très rassurant, tout ça.'

Le garçon cessa de cligner des yeux, son regard bleu se figeant en une détermination glacée. C'est alors qu'une idée de génie le traversa.

« Ha ha ha ha… »

Complètement sidéré par l'attitude du captif, un des gardes s'écria, sans le lâcher un seul instant.

« Tu trouves encore la force de rire ? Tu ne comprends pas ta position, ou quoi ? »

'Si, je la comprends. Et c'est pour ça… que je vais m'en sortir.'

Le jeune garçon eut un sourire narquois, malgré sa posture désavantageuse.

'Je ne suis pas le Stratège Blanc pour rien.'

« Ne vous est-il pas venu à l'esprit, que le Stratège Blanc ne serait pas venu en personne échanger des informations avec de potentiels ennemis ? »

Fronçant les sourcils, un soldat le fixa.

« Explique-toi. »

'Parfait…'

Ariès eut un rire narquois.

« Pensez-vous qu'il serait là, à se battre contre un escadron tel que le vôtre ? Ou à planifier, du haut de son bureau, un autre mouvement pour tous vous écraser ? »

Le regard du chef fut dur. De nouveau, la prise enserra le bras du jeune garçon avec agressivité.

'Eh, j'ai dit, calmos !'

« C'est inutile de jouer la comédie. Ariès et le Stratège Blanc ne font qu'un. Nous le savons. »

Les orbes bleus le fixèrent avec calme.

« Qu'est-ce qui vous le prouve ? »

Ce fut au tour de l'homme de sourire.

« Tu es seul, tu viens de le dire. »

« Nous sommes venus chercher le Stratège Blanc. »

Avec un aplomb digne de ses talents de menteur, le jeune Blader répondit avec calme.

« Je suis désolé, mais je crains de ne pouvoir vous l'apporter. Je suis seul, voyez-vous. »

En un éclair, le jeune Blader se souvint.

'M-… je me suis dévoilé !'

« Maintenant, tu vas gentiment nous suivre. Si tu ne fais pas d'histoires, il ne t'arrivera rien de désagréable. »

Le visage caché dans l'ombre, le jeune stratège gardait une expression indéchiffrable.

« En fait… je ne crois pas. »

« Comment ça ? »

Les orbes bleus étincelèrent comme de la glace.

« Je ne crois pas que je vais gentiment vous suivre, ou qu'il m'arrivera quelque chose de désagréable. »

Incrédules, les hommes se regardaient entre eux.

'C'est le moment, ou jamais.'

« Ariès, MAINTENANT ! Assaut des Cornes du Bélier ! »

Malgré l'emprisonnement de son détenteur, le magnifique bélier avait démarré en un éclair ! Eberlué par un tel spectacle, le groupe faillit en lâcher le jeune Blader.

« Quuooooii ? Son maître est entre nos mains, mais Ariès tourne toujours ? »

Avec audace, la toupie d'Ariès s'était envolée de sa précédente position, pour venir frapper le filet caché dans les arbres, qui avait fait rebondir les toupies ennemies – et contribué ainsi à asséner un coup puissant sur son crâne en guise de cadeau.

« Aaaaaahhhh ! »

Et l'arme, qui avait travaillé à sa défaite provisoire, vint précipiter la perte de ses adversaires, en ensevelissant les hommes. Ces derniers, plus grands que le jeune Lieutenant, se virent contraints de le lâcher, tant le poids du filet était conséquent ! Ce dont profita le Blader, en se glissant par terre, hors d'atteinte de ses ennemis.

« Vous pensez que vous m'auriez aussi facilement ? »

D'un geste rapide, le chef avait attrapé son bras, malgré son emprisonnement dans le filet. Mais d'un mouvement brusque – quoique désespéré – le jeune stratège s'était arraché de son étreinte, se postant prêt du talus protecteur, avec un halètement de souffrance.

'Ma… tête ! Les bougres, ils n'y sont pas allé mainmorte…'

« Ne me sous-estimez pas ! Mon nom est Ariès, le Magnifique. Et je vous ferai mordre la poussière ! »

Pourtant, malgré sa tirade, le jeune garçon dut s'asseoir sur le talus, tant sa faiblesse était grande.

« Espèce de petit… ! »

'Heureusement… que le filet les retient. Je dois… récupérer. Et… m'enfuir…'

Terriblement affaibli, le Blader s'appuya sur la pierre, sans pouvoir faire un mouvement.

« Comment a-t-il pu éventer la présence du filet ? Il est indétectable, à moins de connaître son existence ! »

« Aurait-il prévu la formation de ce piège et sa constitution ? Mais… c'est impossible ! Cette formation tactique est d'un niveau supérieur. Personne ne peut… ! »

Une étrange expression apparut sur le visage du chef ennemi.

« Personne ne peut, à par lui. »

Le Détenteur d'Ariès était si fatigué, qu'il n'arrivait pas à se lever. Quand à s'enfuir, c'était à fortiori hors de question. Heureusement pour lui, le chef semblait trop occupé à penser à quelque chose, pour faire attention à ses halètements de souffrance – qui eussent révélé à ses ennemis son état de faiblesse actuel, ainsi que le moment idéal pour un assaut.

« Ainsi, tu es bien le Stratège Blanc. »

Songeur, l'homme en tête du groupe le fixait, sans prêter attention à la débâcle de ses soldats.

« Seul le Stratège Blanc, du Conseil des Quatre, aurait été capable d'éventer cette formation tactique. »

'Je suis percé à jour, on dirait.'

Avec une voix solennelle – où perçait une tonalité admirative – le leader dardait sur lui son regard aigu, sans ciller un seul instant.

« On raconte… qu'il en a inventé plus de mille. Celle-ci doit bien correspondre à une de celles qu'il a pu imaginer… »

'Mais je n'avais pas le choix. Je ne peux pas me laisser faire prisonnier.'

Le jeune tacticien sut qu'il n'était plus temps de mentir. Il était percé à jour. Alors il prit la parole, avec un aplomb calme.

'Autant jouer mon va-tout !'

« Il y a une variante… mais je dirais que c'est 'L'Edelweiss des Neiges'. Cette façon d'attirer un élément jugé important pour la survie de l'ennemi, en le piégeant dans les avalanches de couches successives enneigées, provenant de la montagne – symbole du sommet ennemi. Sauf que… »

« Sauf que ? »

« Vous avez commis une erreur cruciale. Et même deux, d'ailleurs. »

Dans un souffle de répit, Ariès s'assit sur le rocher, sans les lâcher du regard.

« Je ne suis pas l'élément important de l'Armée, malgré ma place de Stratège. Même si je disparais, celui – et ceux – que je sers vous battra tous avec sa force et son charisme ! Et, deuxième chose. »

Les yeux glacés du jeune stratège étincelèrent de détermination farouche.

« Vous n'êtes pas encore assez forts pour me battre, avec ou sans tactique ! »

Et de se remettre sur pieds, dans un ultime effort.

« Ariès, Stratégie Infernale de la Danse du Vent ! »

C'était une stratégie consacrée aux toupies de défense – ce qui convenait parfaitement à Ariès. Elle était simple de conception, mais exigeait une habilité assez hors du commun. Ce qui avait eu pour conséquence de réduire son utilisation aux meilleurs éléments.

« A toi de jouer, ma créature ! »

C'était communément une stratégie du 'un contre tous'. Elle constituait – trait de génie – en une absence d'attaque totale. Il fallait seulement esquiver, mais avec une habilité suprême, pour que chaque ennemi se cogne dans leurs différents assauts. Triple avantage : économiser ses forces, laisser les ennemis se porter des coups involontaires, et saper leur moral ainsi que leur patience.

« Wouah, wouah, wouah ! »

La toupie du magnifique Bélier semblait esquiver les assauts avec une telle facilité, et se mouvait avec une telle grâce, qu'une fleur des vents paraissait se dessiner dans les airs, comme une valse de protection ultime qui défiait les cieux en beauté et en élégance. Et alors que les toupies ennemies se fracassaient les unes contre les autres, Ariès dansait avec la grâce du vent et tranchait comme les lames de la tempête.

'Une fusion de l'Assaut de la Tempête de Vent et de l'Axe de Rotation Eternelle.'

En bas, éberlués, les hommes en restaient sans voix. Seul le chef prit la parole.

« Tu es doué pour le combat et un maître en matière de tactique. J'ai du mal à comprendre qu'un personnage comme toi, qui cumule des talents pour la stratégie et le combat, ne soit pas un élément-clé de la Métal Fusion. »

« … »

Ariès ne considérait pas cette stratégie comme une 'tactique de formation', ni même comme une véritable stratégie, d'ailleurs. Loin d'être une de ses meilleures œuvres, c'était plutôt une technique de combat individuel, certes belle, mais hors de sa spécialité, les tactiques de groupes. Ce qu'il aimait, c'était utiliser tout le génie des données multiples que représentait toute l'armée des Bladers, leurs différentes qualités, leurs motivations, le terrain, les intentions… et bien d'autres facteurs. Car, bien que profondément individualiste, Ariès excellait dans les stratégies collectives.

'Mais, je ne vais pas faire le difficile, vu ma situation.'

Car c'était la seule utilisable dans les circonstances actuelles.

« Raaaaaahhh ! »

Finalement, alors que le jeune garçon croyait qu'il allait s'écrouler d'épuisement, les toupies tombèrent.

Il avait gagné.

Toutes les armes étaient par terre, immobiles, alors qu'Ariès tournait toujours. Cependant, son détenteur était tellement à bout de forces, qu'il n'eut pas le courage de la reprendre, ni de commander son retour. S'il s'était écouté, il se fût adossé au rocher pour souffler, mais l'instinct de conservation lui dictait tout le contraire.

« Ariès le Magnifique, Stratège Blanc du Conseil des Quatre. Est-ce là ta décision ? Es-tu décidé à rester dans l'ombre, à servir une cause perdue d'avance ? Tu as des talents extraordinaires. Pourquoi les consacrer à des personnes qui ne représentent rien ? »

'Si vous connaissiez Ginga, et tous les autres, vous ne diriez pas cela.'

« Ce n'est pas à vous de décider qui représente quelque chose pour moi. Même si je vous l'expliquais, vous ne comprendriez pas. Alors, maintenant, disparaissez. C'est mon dernier mot. »

L'homme ne changea pas de ton, en dépit du respect qui perçait dans sa voix.

« Si tu ne veux pas venir, alors, peut-être Lui, pourrait t'en convaincre ? »

« Comment ça ? »

Ariès leva les yeux, puis devint blanc comme un linge – si c'était encore possible, avec son état actuel. La silhouette qui se dessinait progressivement devant lui avait – à la différence de ses précédents ennemis – des allures de cauchemar. Venu droit des enfers…

« Oh, non. C'est pas vrai… c'est impossible… pas… toi… »

Le jeune garçon pâlissait de plus en plus, à la limite de la mort. Ces yeux dorés, sadiques, il les connaissait. Et trop bien.

« Tsss… tssss… Ça faisait longtemps… tssss… »

Une main décharnée se tendit, dans une moquerie de caresse.

« …mon cher Hyoma. »

Passé. Quelques temps auparavant.

Base de l'Armée Métal Fusion.

Tout avait commencé, avec la refonte de l'Ancien Monde. On l'appelait « l'Ere de la Lumière et des Ténèbres », car c'était durant cette époque que Pégase et Dragon s'était livré un duel épique.

Cet univers de jadis, fait de toupies tournoyantes, de créatures fantastiques et d'esprits puissants, avait muté dans une nouvelle époque et dimension. L'Ancien Monde était devenu la Nouvelle Légende et l'Ere de la Lumière et des Ténèbres porterait désormais un nouveau nom.

Mais lui, en bon stratège qu'il était, avait bien compris que certaines choses n'avaient pas changé.

Tout d'abord, le Porteur du Cheval Ailé, son très cher et étonnant ami d'enfance – Ginga Hagane. Même privé de ses souvenirs, il était resté fidèle à lui-même et à la voie qu'il avait toujours suivie, la Voie de l'Esprit du Blader. Cela n'aurait pas été un problème, si tout le monde autour de lui, ne s'était pas regroupé, comme avant.

Ce n'était pas qu'il n'aimait pas ses amis, bien au contraire. Ils lui avaient beaucoup apporté…

…mais ce bénéfice avait un prix.

Un ultime prix.

'Mon inutilité…'

Il n'y avait pas que Ginga, qui était resté le même. Il y avait aussi Kyoya, qui était toujours égal à lui-même. C'est-à-dire aussi puissant, aussi arrogant, aussi féroce.

'Ah la la…'

Le jeune garçon soupira, d'un soupir sans joie, quoique sans ressentiment.

« Kyoya Tategami. Toi non plus, tu n'as pas changé. Tu es toujours aussi puissant. »

Non, en fait, le Détenteur de Léone n'était pas aussi puissant : il était encore plus puissant – si c'était possible. Car le Nouveau Monde avait développé d'autres aptitudes chez chacun des anciens Bladers, en correspondance avec leur personnalité originelle et leur talent de base.

Ginga avait augmenté ce charisme flamboyant qui lui permettait de surmonter n'importe quel obstacle, Kyoya était devenu si féroce et si puissant que seul Pégase semblait pouvoir encore lui tenir tête, Kenta – un autre de ses chers amis – avait considérablement progressé dans son cœur comme dans sa technique, et quant à Benkei, il s'était transformé en un puissant élément de soutien qui épaulait – et protégeait occasionnellement – son ami le Seigneur Lion.

Et ils avaient tous acquis des grades dans l'Armée Métal Fusion, à la hauteur de leurs nouveaux talents et de leur personnalité flamboyante.

'Heureusement que je n'ai pas fait exception.'

Lui, était devenu un des membres du Conseil des Quatre, organisme secret de l'Armée Métal Fusion. Spécialisé en stratégie au sein de cette réunion d'élite, il avait très brillamment appris les stratégies enseignées dans les vieux manuels de guerre et avait élaboré des tactiques de formations de Bladers qui avaient prouvé à maintes reprises leur efficacité.

Auparavant, dans l'Ancien Monde, il était uniquement capable d'imaginer des tactiques individuelles et de les appliquer en combat singulier – ce qui, il fallait l'avouer, était terriblement restreint, en comparaison avec ses possibilités actuelles. Car, depuis qu'il avait pénétré l'immense domaine qu'était la stratégie de groupe et des formations de l'armée, Hyoma avait compris qu'il ne pourrait plus jamais revenir aux tactiques solitaires, de jadis.

Il était fait pour la stratégie collective, la création de tactiques de formation.

C'était son talent, sa force véritable. Personne, au sein de la Métal Fusion, ne pouvait le nier. Ginga, bien que toujours gentil et chaleureux, était sincèrement fier de lui et de ses œuvres. Même Kyoya, qui n'était pas du genre à complimenter, semblait tacitement reconnaître qu'il était le meilleur dans ce domaine. Kenta, Madoka, et même Benkei qui n'était pas réputé pour son intellect, le tenait pour un tacticien d'élite.

'En même temps, c'est tellement bête de ne pas combiner les forces de tout le monde, vu les qualités de chacun. Quand je pense que je cantonnais à utiliser mes forces et le terrain dans l'Ere précédente… pas étonnant que j'ai subi des échecs.'

De fait, ses tactiques de formation avaient eu un franc succès dans l'Armée, bien que l'identité réelle de leur auteur fût restreinte au Conseil des Quatre et qu'elles fussent diffusées sous le nom de « Stratège Blanc ». L'Armée entière connaissait ces stratégies géniales, mais seuls quelques hauts gradés savaient que le Lieutenant Ariès – c'est-à-dire lui-même – les avaient conçues.

'Mais, ça me va très bien. Après tout, j'ai toujours œuvré dans l'ombre. Hier, comme dans l'Ere précédente, où je gardais la montagne Hagane et le Village de Koma… et aujourd'hui, dans cette nouvelle époque, où je sers la Métal Fusion et tous ses éléments.'

Cependant, ses talents de Blader lui avaient valu le commandement d'un escadron et ses hommes avaient pris l'habitude d'appliquer ses formations et stratégies dans les missions, s'accoutumant par la même occasion à sa personnalité un peu étrange.

« Ariès… Stratégie Infernale des Mille Toupies ! »

Cette stratégie, c'était lui qui l'avait conçue. Elle l'avait d'ailleurs rendue célèbre parmi ceux qui savaient qu'il en était l'auteur (c'est-à-dire, pas grand monde, en fait). Elle consistait en une formation complexe de toupies évoluant dans une position ambigüe et des angles morts redoutables, ne laissant aucune chance à la cible de prévoir les attaques ou même de s'en échapper.

« Allez donc ! Volez, et que vos… oh, non ! »

Accidentellement, Ariès avait heurté un de ses propres chefs d'escadron chargé d'une de ses lignes directrices et son poids avait désorganisé l'ensemble des toupies, qui se cognèrent méchamment, pour ne ressembler plus qu'à un amas chaotique d'armes immobiles.

'Non… c'est impossible…'

Tout s'était effondré.

'Comment ai-je pu… ?'

Loin de l'élégance habituelle d'Ariès, créateur de ces formations tactiques si propres et efficaces, et de la grâce magnifique de cette intelligence combinant les forces de chacun…

« Lieutenant Ariès… »

'Est-ce que ça signifie… qu'il est temps que je m'arrête ?'

Non seulement sa formation tactique habituellement sans faille avait complètement échoué, mais de surcroît – et c'était bien plus grave – il avait blessé certains de ses soldats par sa propre incompétence.

« … »

'Peut-être est venue l'heure pour moi… de partir.'

Par sa propre incompétence, et avec Ariès, il avait blessé ses propres hommes !

« …ça ira. On arrête l'entraînement pour aujourd'hui, on ne peut pas continuer avec des blessés. »

« Lieutenant Ariès… »

'Je n'ai plus ma place ici… Ginga.'

Retour au présent.

Forêt de la Montagne.

« Non… pas toi… »

Mais, aujourd'hui, il était seul, avec son incompétence et sa faiblesse.

'Non… pourquoi… pourquoi ici ? Pourquoi maintenant ? Pourquoi… lui ?'

Face à l'ennemi le plus redoutable qu'il avait jamais rencontré, qui plongeait ses proies dans la terreur, et leur insufflait un désespoir qu'elles n'oubliaient jamais.

« … »

Un sifflement s'éleva dans les airs, chant d'un serpent à sonnette qui s'apprête à frapper.

« Maintenant que je t'ai retrouvé, Hyoma… tsss… je ne te laisserai plus m'échapper. »

Un bras décharné se tendait vers lui, dangereux appendice d'un crochet empli de venin mortel, mais le jeune Bélier ne fit pas un seul mouvement pour fuir.

C'était inutile.

« Que dirait ce cher Ginga, en apprenant… tsss tsss… »

Les yeux d'or brillèrent, marque infernale de sa destinée.

« …ta véritable nature ? »

« Tu n'es pas un Blader. Tu n'es pas un stratège. Tu es… un démon. »

'Non… non !'

Immobile, le jeune Blader avait renoncé à se défendre, et même à bouger. Et les mots qui tombèrent, sonnèrent le glas d'une destinée infernale, emplie de ténèbres.

« Démon Blanc… »