La tête dans les nuages

Le soleil déclinait déjà qu'une silhouette s'installa sur le toit d'une école que le temps avait à peine ternis. Allongé sous le ciel orangé, Hibari Kyoya, 21 ans, observait d'un air las les nuages, se demandant pourquoi il lui avait été choisi de devenir le gardien d'un élément aussi ennuyant. Peut-être l'était-il lui même? Les yeux clos, il écouta le silence qui lui avait tant manqué.

Le vent se leva brusquement, et Hibari ne daigna pas se sentir menacer par la présence qui s'annonçait devant lui, ni même ouvrir les yeux lorsqu'on lui demanda ce qui l'amenait ici par ces temps. Car oui, il ne connaissait que trop bien cette chaleur et cette voix douce teintée de nostalgie.

Alors, d'un geste lent qui lui était propre, il se redressa près de l'homme qui pendant longtemps fut le seul à le sortir de sa torpeur solitaire, et qui avait su trouver en lui une autre facette que personne, même pas Hibari, n'avait su exploiter. Il lui avait apprit, lors de leurs longues séances d'entraînements, que l'indifférence et le mépris n'amenaient pas à se sentir supérieur et exclus de tout, et que l'humanité et ses problèmes restaient couché à sa porte, même s'il ne voulait pas les voir. Grâce à lui, Hibari a su s'ouvrir, mais à cause de lui, il ne s'ouvrait à personne d'autre, conservant cette carapace, imperméable aux sentiments des autres. Mais quand étaient-ils des siens?

Il s'était surpris à aimer la compagnie de cette calme tempête blonde, souriant (intérieurement bien sur) à chacune de ses maladresses, le fixant lorsqu'il s'occupait de sa boîte arme ou d'Enzo, attendant des heures à l'avance son Cavalone, admirant le large tatouage lui couvrant tout le bras gauche et s'arrêtant sur son cou, qu'il se surprit un jour à convoiter, voulant le mordre à mort, mais pas comme il l'espérait d'habitude ..


Dino Cavalone, proche de la trentaine, observait lui aussi son ancien élève, perdu dans ses pensées. Ses yeux rencontrèrent ses mains, puis détaillèrent son corps, il se disait à quel point Hibari avait prit de la carrure, et à quel point son visage avait changé. Il cru lire une lueur dans les yeux du jeune ténébreux, et tourna vivement la tête lorsque celle de l'autre le fit pour lui faire face. L'étalon se sentie rougir.. rougir? Depuis quand éprouvait ce genre de réaction à l'égard de quelqu'un comme .. Hibari?

Furieux contre lui même de se laisser aller à des sentiments aussi puérils, il se dirigea vers la porte qui emmenait à l'escalier, mais sa légendaire maladresse lui fit perdre le contrôle et il se sentit glisser, s'attendant à s'étaler lamentablement devant son élève.

Le dit élève, quant à lui, ne rata pas d'une seconde ce qui se déroulait,et dans un geste assuré et presque imperceptible, il rattrapa son Sempai, qui fut surprit et rassuré de la vivacité du jeune homme. Il cru même apercevoir une légère rougeur au niveau du visage du brun, visage qui se tenait désormais à quelques centimètres du sien.

Lorsqu'il allait prononcer quelques mots de remerciements, Hibari le lâcha précipitamment, et s'en alla, laissant le Cavalone à ses réflexions, les yeux perdus vers l'horizon où le soleil allait bientôt totalement disparaître.

Dans un soupir, Hibari referma la porte avant de s'y laisser glisser en pensant "Ce n'est pas passé loin". Souriant, (il pouvait se le permettre maintenant qu'il était seul) il se dit qu'il reviendrait plus souvent.

Et il manqua pas. Désormais, ses visites à Nanimori ne se furent plus en solitaire, et il se mit à aimer ces moments,souvent silencieux, auprès du seul qui avait toujours su le comprendre, tellement que le nuage appréciait de plus en plus les doux rayons que lui transmettait le soleil, car son soleil à lui était bien maladroit, mais non moins sincère.