Salut à tous!

Voici un three shot en réponse à une commande de Samoth: A la fin de la S1, quand on rencontre pour la première fois Bobby, on apprend que la dernière fois que John et Bobby se sont vus, ça a donné des étincelles et que Bobby a viré John de chez lui avec un fusil. Je veux savoir pourquoi.

Je n'ai jamais écrit des chapitres aussi longs... Mais je vous poste les 3 à la suite car c'est vraiment une seule histoire globale, inutile de mettre du suspens entre les chapitres.

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Our Own Private Hiroshima

1

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« Sale fils de pute. »

John encaisse l'insulte sans bouger. Comme d'habitude. Un ouragan ne parviendrait pas à désincarcérer ses pieds du sol quand il a décidé de se planter là et de vous regarder. Putain, je ne sais pas ce qui me retiens de lui foutre mon poing dans la gueule.

« Bobby… » commence-t-il et il m'énerve déjà « Tu savais que ça finirai comme ça, ne joue pas les vierges effarouchées…»

Et il sourit. L'enfoiré. Ca le fait rire. Sans déconner, je vais lui dévisser la tête. Ce con me regarde en souriant.

Tout à coup il redevient sérieux, est ce qu'il arrive à voir la fumée qui sort de mes oreilles ? Parce que je suis carrément en train de bouillir là. Il a du remarquer que je virais au rouge et surtout que j'avais toujours un pied de biche dans la main. Il fait même un pas un arrière.

Sage décision Winchester, protège tes fesses.

Il repart vers la maison sans rien dire. Il me plante là comme une merde avec la carcasse. Il s'en va et il se marre, je le vois à ses épaules, il est mort de rire.

Connard.

Ok, Singer, on se calme. Respire lentement. Inspire, expire…

Bon ça va mieux, j'arrive à ouvrir les yeux sans me voir en train d'arracher la tête de John mais je suis toujours planté là… et elle aussi. Merde. Il n'en reste plus grand chose maintenant. Le feu à tout ravagé. Mon dieu comme elle était belle… Mon dieu comme je l'aimais… Et maintenant il ne restait qu'une carcasse rongée par les flammes et l'autre connard de Winchester complètement mort de rire.

Techniquement, ce n'est pas lui qui à versé le sel et l'essence et craqué l'allumette. Je sais bien ça. Mais c'est quand même de sa faute. A deux cent pour cent. Voir plus. Et puis je ne vais quand même pas commencer à développer des idées de meurtre sur un gosse de 15 ans… quoi que des baffes se perdent parfois. Mais mieux vaut s'adresser à dieu plutôt qu'à ses saints. Autant être directement en colère après John. De toute façon, je ne le dirais jamais assez, tout ce merdier, c'est de SA FAUTE.

Quelque chose bouge à ma droite. Je n'ai même pas besoin de regarder pour savoir ce que c'est, une seule personne pourrait avoir l'audace de venir maintenant. Le seul Winchester capable de formuler 

des excuses avec de vrais mots, et pas seulement des regards compatissants et des sous entendus vaseux. Il se pose à côté de moi, il ne me regarde pas non plus. Il ne dit rien et observe la carcasse.

Il cherche un truc à dire, il est gêné, je le vois à la façon dont il balance d'un pied sur l'autre. Je suis calmé maintenant, enfin… en tout cas un peu plus que tout à l'heure, mais il m'en faudrait peu pour que j'explose. Il le sent. Faut lui reconnaître ça, le gamin a un don pour l'empathie. Il doit être en train de chercher les bons mots pour réussir à me dire qu'il est désolé et qu'il regrette. Comme il fait toujours.

Lui, je n'ai pas envie de le taper, mais il m'énerve quand même. Il m'énerve parce des trois Winchester qui sont chez moi, il est le seul à ne pas être responsable de ce carnage. Et il est le seul à s'excuser. Un jour on arrivera peut être à faire rentrer un peu de bon sens dans la tête de ce gosse, en attendant, il me gonfle à se tortiller à côté de moi pour essayer de couvrir les fesses de sa famille de débiles.

« T'es venu constater le décès ? »

Bon ok, je lui crache peut être ça un peu violemment à la figure considérant qu'il n'a vraiment rien à voir dans l'histoire et qu'il est venu pour me remonter le moral. Mais merde. Ca fait du bien d'envoyer chier tout le monde quand même. Et j'ai le droit d'être en pétard aujourd'hui, surtout si mon interlocuteur est génétiquement lié à John Winchester.

Dean tente un sourire, ça ne ressemble à rien. On dirait qu'il est content, désolé, triste et stupide en même temps. Finalement il se gratte la tête et me dit ce qu'il meurt d'envie de me dire depuis tout à l'heure.

« Sammy ne pensait pas à mal… il voulait aider… »

Cette fois je me retourne vers lui. Vraiment. Pas seulement la tête vers lui, mais tout le corps. Il a 19 ans, il est aussi grand que moi, mais je suis plus large, et plus vieux, et plus expérimenté, et j'ai un pied de biche dans la main. Alors il ne fait aucun commentaire de gros malin comme il en a l'habitude. Il essaie de se faire tout petit et me regarde avec ses grands yeux de gosse.

Il sait que c'est mon point faible. Sammy fait des yeux de chien battu comme personne et John tombe systématiquement dans le panneau. C'est presque pathétique. Mais Dean a ce regard là. De grands yeux innocent flanqués en haut d'un corps de tueur. On dirait un gamin à qui on a piqué sa sucette, marché sur son jouet préféré et amputé son ours en peluche. J'ai juste envie de le prendre dans mes bras… et il le sait, cet enfoiré.

Evidemment, il doit se douter que je n'ai pas vraiment l'intention de lui foutre un coup de pied de biche dans la gueule, mais il me sort quand même l'artillerie lourde. Je sais exactement pourquoi il fait ça, et ça m'énerve encore plus. Il pense certainement qu'en prenant le gros de l'engueulade et en jouant bien ses cartes, il pourra arrondir les angles quand viendra le jour du jugement pour le vrai fautif.

« Dean. » Je parle doucement, ça m'étonne de moi, je n'étais pas certain de réussir à contrôler mes cordes vocales. « Ton frère à carbonisé ma voiture. »

1958 Plymouth Fury, rouge, comme on en fait plus. Et c'est justement parce qu'on en fait plus que j'ai passé neuf mois à la reconstruire, pièce par pièce. Il a fallu moins de 5 minutes à Samuel Winchester pour la saler et la brûler.

Dean reprend son vacillement d'un pied sur l'autre. Je peux pratiquement voir les rouages se mettre à tourner dans sa tête : Ok, comment je sors Sammy de là ? Il me fait presque pitié. Je soupire.

…Tiens, ma barbe est plus longue que je pensais, faudra que je coupe ça un de ces quatre…

Revenons en à nos moutons, ou plutôt à notre Dean qui tente de sauver la peau de son pyromane de frère. Je prends une grande inspiration et je décide finalement de voler à son secours, parce qu'autant il peut m'énerver à toujours vouloir défendre l'indéfendable, autant il ne mérite pas de se torturer comme ça.

« J'en veux pas à ton frère. Pas seulement en tout cas. Je vais d'abord réduire ton père en bouillie. »

Et juste comme ça, j'ai l'impression d'avoir soulevé une demie tonne des épaules du gamin. Cette fois il me sourit vraiment et arrête de gigoter.

« Bonne chance ! » Me lance-t-il amusé.

Ouais, ouais. Comme si j'avais besoin de chance pour dégommer John Winchester. Je lui ai appris la moitié de ce qu'il sait. Bon, peut être pas la moitié, mais une bonne partie. Dean, à 19 ans, est toujours persuadé que seule la kryptonite est capable de tuer son super héro de père, mais s'il insiste, je me ferais une joie de lui montrer qu'on peut arriver au même résultat avec un pied de biche.

« Dean ? » Crie John depuis le pas de la porte. « Je ne crois pas que ce soit le moment d'emmerder Bobby… »

Oh, Johnny, tu as peur que j'éclate la tête de Dean alors que c'est la tienne que je vise ?

« C'est bon 'pa, je ne suis pas sur la black list. »

Et il a raison. Tout le monde ne peut pas en dire autant aujourd'hui. En me retournant vers la maison je vois le rideau de la chambre à l'étage bouger tout seul. Le morpion est en train de regarder comment son grand frère gère la situation pour savoir si c'est encore risqué de descendre. C'est futé, Sammy. Ce n'est pas très fair play pour Dean d'être envoyé en première ligne comme de la chair à canon, mais c'est futé.

Je dois bien reconnaître ça au mouflet, il a un cerveau de stratège. Et comme son imbécile de grand frère a un cœur de soldat, c'est lui qui se tape le sale boulot sans même s'en rendre compte.

Ne te crois pas tiré d'affaire, Sammy, quand j'en aurais fini avec ton paternel, je m'occuperais de tes fesses.

Dean me sourit, et j'ai soudainement envie de le taper aussi, parce que maintenant qu'il sait que je ne vais pas enterrer son frère au fond du jardin, il se permet de trouver la situation amusante. Comme son abruti de père. Mais j'ai encore une cartouche à tirer.

« Tu sais Dean, même si je ne suis pas un tueur d'enfant et même dans l'éventualité où je n'arrive pas à botter le cul de ton père correctement, je pourrais toujours foutre le feu à l'Impala. Juste comme ça, pour me détendre. » Et là Dean arrête de sourire et devient tout blanc. Ha ha ! je suis démoniaquement génial. « Œil pou œil. »

« C'était un accident… » Tente-t-il en bafouillant.

« Ouais, et bien je pourrais aussi accidentellement me balader près de ta chevy avec un bidon d'essence et un chalumeau. Qui sait. »

« Hey ! Je te rappelle que j'y suis pour rien moi ! Va bruler les caleçons de Sammy, ou ses bouquins si tu veux vraiment le foutre en rage, mais fous la paix à ma bagnole ! »

Ah ! Elle est donc là la limite au sacrifice du grand frère. Je peux l'écorcher vif à la place de Sam si je veux mais je ne peux pas toucher à l'Impala. C'est officiel, Dean Winchester est complètement cinglé. Considérant les origines génétiques, j'imagine que c'était inévitable.

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John s'assoit à côté de moi. Même s'il n'était pas en train de soupirer, j'aurais su que c'était lui. Je reconnaitrais son pas lourd sur les planches de ma terrasse entre mille. Pas que ce soit spécialement utile, mais j'ai ce don là. Il me tend une bière avec un demi sourire. Cette fois il ne se moque pas de 

moi, il a fini de rigoler sur l'incendie de ma voiture. Ce sourire là et la bière ressemblent à des excuses. Il aura quand même attendu de constater que je ne suis pas venu manger avec eux pour remarquer que j'étais vraiment en rage.

J'ai toujours envie de le tuer mais j'accepte la bière malgré tout. On est là tous les deux, assis sur les marches de mon porche, et la carcasse de ma chérie est là elle aussi, toujours aussi carbonisée. L'air est drôlement frais pour la saison et je porte juste un t-shirt, autant dire que je me gèle, mais je m'en fou. J'ai juste envie de rester là.

« Sammy n'a pas osé descendre pour manger, il a peur que tu l'attendes derrière chaque porte et que tu l'étripe. » Dit finalement John.

Intérieurement je souris. Sage gosse. Il sait se planquer quand il a fait une connerie, contrairement à son père qui vient sous mon nez pour finir de me rendre dingue. Extérieurement, je ne bouge pas d'un pouce, j'ai bien l'intention de lui faire comprendre que, cette fois, je suis vraiment énervé.

« Bobby ? »

Quoi ? Qu'est ce qu'il attend que je dise ? Il me regarde et je l'ignore. J'avale une gorgée de bière et je regarde dans le vide en essayant de ne pas trop me focaliser sur la carcasse. John soupire et se passe une main sur le visage. Il est sérieux maintenant. Si je croyais au père noël, je pourrais penser qu'il va me faire des excuses.

« Ecoute, je sais que tu m'en veux, je ne peux pas te dire que tu as tort… »

Tu marques un point là, Johnny.

« Mais Sam est un gosse sensible... Tu ne peux pas juste le rayer comme ça. Il n'a rien mangé de la journée parce qu'il est persuadé que tu vas le tuer si il franchit le seuil de sa chambre. Pourquoi est ce que tu ne vas pas essayer de lui parler ? Tu pourras toujours rester en colère après moi mais laisse au moins le gosse respirer. »

Ok, alors ce ne sont pas du tout des excuses, c'est une demande d'immunité pour Sammy. Il fallait s'y attendre en fait. Après Dean, John. Les deux aînés des Winchester qui sauvent le plus jeune. Grand classique. D'un autre côté ils n'ont pas tellement tort… Je veux dire, je ne suis pas si en colère que ça après Sam.

Alors je me lève, sans dire un mot à John, et je rentre dans la maison. Dean est sur le canapé, en train de lire un comic. Ses yeux fondent sur moi comme un aigle sur sa proie. Il voit que je me dirige vers l'escalier et il commence à paniquer. Dean, sérieusement, tu crois vraiment que je vais taper ton 

frère ? Apparemment oui, parce qu'il se lève du canapé et me jette son plus beau regard suppliant. Je l'ignore, je commence à monter. J'entends qu'il m'appelle mais j'entends aussi John rentrer et dire à son fils que c'est bon, qu'il ferait mieux de s'occuper de ses fesses et qu'il gère la situation. J'entend Dean marmonner et bien que je lui tourne le dos en montant l'escalier, je peux quasiment voir son visage déformé par le dilemme : écouter son père ou sauver son frère.

J'arrive devant la chambre à la porte close. Je l'ouvre et le morveux me regarde comme si j'allais commencer à cracher des boules de feu. Ce n'est pas moi le pyromane ici ! Sam se recroqueville sur son lit. Il me sort toute la panoplie du cocker abandonné sur l'autoroute un jour de pluie. Sérieusement, est ce que j'ai vraiment une tête à frapper des enfants ? Je m'assoie sur le lit à côté de lui en soupirant. Mes vieux os craquent, comme à chaque fois. Le gosse est plaqué contre le mur, les genoux remontés sur sa poitrine, de grands yeux suppliants braqués sur moi.

« Je ne vais pas te taper. »

Ce n'est pas une très belle entrée en matière, mais c'est la première chose qui me vient. Et surtout, j'aimerais qu'il arrête de me faire ces yeux là.

A dire vrai, l'une des raisons pour lesquelles je ne peux pas être vraiment en colère contre Sammy, c'est que je sais que dès que j'en aurais fini avec lui, John prendra le relais. Pour l'instant il n'a rien dit, rien fait, il sait que c'est entre le gosse et moi et qu'on doit régler ça entre hommes. Enfin.. entre morpion pyromane et chasseur meurtrier beaucoup trop vieux pour ces conneries. C'est pour ça que John à voulu que je vienne parler à Sam. Il veut que le gosse comprenne que les actions ont des conséquences et que s'il brûle ma voiture, je vais être en colère. Mais je sais aussi que dès que les choses seront réglées entre Sam et moi, John s'occupera de s'assurer que Sam à bien compris la leçon. Le gosse est bon pour des entrainements nocturnes avec double ration de pompes.

Et franchement, il ne mérite pas vraiment de se torturer l'esprit comme ça, parce que ce qu'il ne faut pas perdre de vue, c'est que tout ça, c'est la faute de John.

Je soupire en constatant que Sammy attend toujours que je lui porte le coup fatal. J'attrape le bouquin qu'il était en train de lire quand je suis entré.

« C'est ton père qui t'a offert ça ? »

Il hoche la tête sans me lâcher des yeux. Evidemment, il n'y a qu'un abruti comme John pour offrir ce genre de livre à un gosse comme Sam. Je passe mes doigts sur la couverture. La voiture dessinée dessus ressemble beaucoup à la mienne. Sauf que la mienne est un tas de cendre maintenant. Christine. Quel nom à la con pour une bagnole.

« Je l'appelais 'Chérie', tu sais. »

Je parle lentement, calmement. Sammy hoche à nouveau la tête. Evidemment qu'il le sait, il m'a suffisamment entendu parlé de ma voiture.

« Mais elle n'a jamais tué personne. Je veux dire… c'était une voiture Sam… »

Je me sens absolument ridicule en disant ça. J'ai l'impression de m'adresser à un gosse de quatre ans. Les voitures sont des objets, elle ne tuent pas les gens. Pourquoi avait il fallut que ce connard de Stephen King écrivent ce livre à la con ? Pourquoi avait il fallut que ce soit une Plymouth Fury rouge ? J'ai presque envie d'éclater de rire tellement la situation est ridicule mais Sam est toujours terrifié, alors je pousse juste un long soupir en me grattant la barbe.

« Sammy, c'est juste un livre. Les voitures démoniaques, ça n'existe pas. Ma voiture… hum… Ma voiture était juste une voiture. »

« Les phares s'allumaient tout seuls ! Je te jure Bobby ! La radio aussi ! Quand je me suis approché, la radio à commencé à hurler ! Les phares clignotaient ! Je te jure Bobby ! »

Ca y est, j'ai enfin réussi à le faire parler, ou plutôt s'écrier parce qu'il peine à reprendre son souffle.

« Je sais Sammy, je travaillais là dessus. Elle avait pas mal de problèmes électroniques, tout s'allumait tout le temps sans raison. C'était justement pour ça que je ne la sortais pas encore… »

Et maintenant je ne la sortirai plus jamais.

L'expression de détresse de Sammy empire un peu plus si c'était possible.

« Elle n'était pas possédée ? » me demande-t-il doucement.

« Sam, tu crois vraiment qu'entre ton père, ton frère et moi quelque chose de démoniaque pourrait franchir la barrière de mon jardin ? »

Il devient tout blanc, déjà qu'il n'avait pas beaucoup de couleurs avant ça.

« Je suis désolé… » murmure-t-il.

J'ai presque pitié pour le gosse. C'est vrai, ce n'est pas de sa faute si son père l'a conditionné pour détruire tout ce qui ressemblait de près ou de loin à du surnaturel. Et ce n'est pas non plus de sa faute si ce même et stupide père lui a offert ce livre d'épouvante sur une voiture meurtrière qui se trouve être exactement la même que la mienne. Et c'est encore moins de sa faute si on trouve de l'essence et des allumettes à tous les angles de ma maison.

J'avance lentement une main vers le gosse, il se plaque un peu plus contre le mur, alors je souris pour qu'il comprenne bien que non, je ne suis pas un monstre. Je pose ma main sur sa tête et je lui ébouriffe les cheveux. Ils auraient grand besoin d'un coup de ciseaux d'ailleurs. Sammy à l'air étonné, il se laisse faire.

« Ah Sammy… J'imagine que je dois quand même être content de savoir que tu protèges mes arrières. »

Je le sens se détendre sous ma main. Il essaie même de sourire. Alors je continue :

« Et puis tu sais quoi ? C'est vachement plus facile d'être en colère après ton père. Lui au moins je peux lui casser la gueule sans avoir mauvaise conscience. »

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Plus tard dans la soirée Dean est sortit faire 'mieux vaut pas savoir quoi' avec 'mieux vaut pas savoir qui' pendant que Sam prétend dormir mais est en fait en train de lire à la lampe torche sous sa couverture. Une soirée normale pour les Winchester en somme. On est donc obligés de se regarder dans le blancs des yeux Johnny et moi, seuls avec nos bières devant une rediffusion du premier 'Arme Fatale'. Oh, je sais que cet enfoiré ne s'excusera pas, c'est pas le genre de la maison. Mais je vois, à la façon dont il me regarde du coin de l'œil, qu'il marche sur des œufs. Et ça c'est tellement rare, que j'ai bien l'intention d'en profiter. Si j'avais une caméra j'immortaliserais même le moment.

J'ai l'impression qu'il va finir par dire quelque chose, mais c'est pile poil le moment que choisit son téléphone pour sonner. Et merde, j'étais à deux doigts d'un moment historique là ! John décroche rapidement et ça m'énerve parce que quand c'est moi qui appelle il met toujours deux heures à bien vouloir répondre. Visiblement c'est quelqu'un qu'il connaît, il sourit en lui demandant comment il ou elle va. Je fais tout mon possible pour ne pas avoir l'air de m'intéresser à la conversation. Je ne détourne pas la yeux de ma télé où Mel Gibson s'en donne à cœur joie mais j'ai quand même une oreille qui traine. J'ai toujours une oreille qui traine. Je ne serais pas un aussi bon chasseur si ce n'étais pas le cas.

Je suis certain que c'est un homme à l'autre bout du fil. Faut dire que John n'a pas beaucoup d'amies filles… qui ont son numéro je veux dire… parce que sinon... Je ne veux pas savoir. J'en sais déjà plus que je ne voudrais.

La seule femme qui soit assez familière de John pour qu'il lui parle comme ça, c'est Ellen Harvelle. Mais étrangement, depuis que Johnny a achevé Bill, ils s'entendent un peu moins bien… Non, je suis sûr que c'est un homme. Et aussi que c'est un chasseur. Parce que John se gratte le menton pensivement, comme quand il fait des recherches. Il finit par me laisser seul dans le salon et sort sur le porche. Comme d'habitude. Si ce type n'étais pas un chasseur, ce serait surement un agent secret. On a l'impression que tout est mystérieux autour de lui, même quand il donne la liste des courses à Dean on dirait qu'il lui passe un code militaire ultra secret.

J'entendais déjà qu'il se contentait de réponses par monosyllabes, comme s'il ne voulait pas que j'en entende trop, mais maintenant qu'il est carrément sortit, c'est officiel : Singer, t'es pas invité dans les messes basses des agents secrets. Qu'ils aillent se faire foutre. J'avale une énorme gorgée de bière, je rote, je m'enfonce dans le canapé et je regarde ce film que j'ai déjà vu dix fois en faisant semblant d'en avoir quelque chose à foutre.

John finit par revenir dans le salon. Il est toujours au téléphone, il a l'air préoccupé, mais pas plus que d'habitude. Il pose sa main sur le micro de l'appareil et s'adresse à moi.

« J'ai Jefferson en ligne, il a besoin de toi pour un truc. »

Un truc. Ca c'est bien de la description à la Winchester. Connaissant John, un truc, ça peut aller de planter un clou à refermer les portes de l'enfer. Je soupire et je hausse les épaules en attendant qu'il précise de quoi il s'agit. Il lève les yeux au ciel.

« Un problème avec ta commande, j'en sais rien. » et il me tend l'appareil.

Je soupire aussi. C'est dingue ce que j'ai envie de le taper aujourd'hui. J'attrape rapidement mon calepin que j'ai posé… ah oui, sur le bureau. Je prends tout mon temps en tournant les pages. Du coin de l'œil, je vois John qui s'impatiente et rien que pour ça, je décide de prendre encore plus de temps. Je passe lentement le doigt sur les pages, à la recherche de quelque chose que je sais ne pas être là. Bon je fais certainement chier Jefferson aussi dans le processus, mais j'en ai tellement rien à foutre à l'instant présent… Je finis par trouver la bonne page. Ma commande : une lame en acier pur, une lame en fer, trois Glocks semi-automatiques, de l'argenterie à faire fondre, 15kg de sel, une nouvelle plaque d'agent fédéral (parce que l'ancienne est au fond d'un lac en ce moment.), et du matériel médical, antidouleur et sutures essentiellement.

Je finis par prendre le téléphone des mains de John qui m'envoie un regard assassin. C'est ça Winchester, parce que t'as tellement d'autres trucs urgents à faire là tout de suite. D'ailleurs, a peine ai-je le téléphone dans les mains que Johnny s'ouvre une nouvelle bière et se pose sur le canapé. Je ne peux pas m'empêcher de lever les yeux au ciel et je comprends enfin pourquoi Dean et Sammy font ça aussi souvent.

La discussion avec Jefferson ne dure pas longtemps, comme toujours, c'est pour ça que j'aime autant traiter avec lui. Il ne pose jamais de questions, il va droit au but et surtout, il est capable de trouver à peu près tout et n'importe quoi du moment que tu peux y mettre le prix. Le seul souci, c'est justement qu'il y a souvent des soucis… Jefferson n'a pas mes Glocks mais si je le rejoins et que je l'aide pour une transaction il pourra me les échanger par des Berettas, quatre au lieu de trois et le stock de munitions qui va avec. Sinon il faudra que j'attende le mois prochain.

Je soupire en me pinçant l'arrête du nez. Ca me gonfle. Tout me gonfle aujourd'hui. J'aime pas les Berettas. En général les Glocks sont toujours un peu plus équilibrés à droite et ça compense un léger balancement que j'ai à gauche. Et puis ils sont plus lourds, je préfère. Mais bon… j'en ai besoin maintenant et pas le mois prochain. J'imagine que je pourrais toujours les revendre après. Jefferson sait que ça me fait chier, alors il évite d'enfoncer le couteau dans la plaie, lui au moins. C'est pas comme certains.

Bref, je fini par accepter la proposition. De toute façon, il fallait que je le vois pour lui revendre des conneries. Autant en profiter. Je lui annonce que je serais là demain dans l'aprèm. Je ne prends même pas le temps de demander à Winchester ce qu'il a l'intention de faire, qu'il reste ou qu'il parte, je m'en fou, moi demain, je suis à Aberdeen.

TBC