Et voilà, je fais un grand retour sur avec une fic d'un fandom nouveau pour moi, au moins côté écriture : Kuroko no Basket !

J'ai le plaisir d'entrer sur le fandom avec les deux personnages les plus captivant du manga : Oreshi et Bokushi, qui, pour ceux d'entre vous qui l'ignoreraient, sont les noms donnés par les fans aux deux personnalités d'Akashi. (Oreshi se référant au premier Akashi, deux yeux rouges, et Bokushi à Akashi après le réveil de l'œil de l'empereur)

Cette fic devrait rester assez paisible, bien que probablement longue, j'ai voulu la rapprocher au maximum du principe des « Slice of Life » tout en conservant un petit scénario.

Le premier chapitre sert de prologue, l'histoire commencera réellement au second (avec un petit saut dans le passé).

Pour ce qui est des nombreuses références au folklore japonais, merci de garder à l'esprit que ce sont des interprétations des légendes et que parfois je prends de grandes libertés. Donc si vous avez des questions n'hésitez pas !

Je vous laisse découvrir le reste au fur et à mesure de votre lecture !

Pour ce qui est de l'illustration de cover, vous pouvez la trouver sur mon DeviantART en effaçant les espaces du lien suivant : louna - ashasou . deviantart

Et enfin, merci à ma petite Nemeseia pour m'avoir jetée sans pitié dans ce fandom et avoir la bonté de devenir ma bêta'.


Premier Parchemin

« La montagne n'est immobile qu'aux yeux des simples d'esprits. » Cette phrase ne venait aucunement de la compilation d'un érudit, et encore moins d'un parchemin secrètement gardé dans les coffres de l'empereur. Mais ce fait était loin de la discréditer.

A vrai dire, cette phrase était venue à l'esprit de son père au lendemain d'un typhon particulièrement violent. Ses frères et sœurs étaient encore tremblants de peur contre les genoux de leur mère, aussi avait-il été le seul à l'entendre, donnant aux mots de son paternel toute la force d'un secret chuchoté sur son lit de mort. Ironiquement, ce ne resta pas une métaphore très longtemps.

Ces mots l'avaient d'abord marqué comme étant d'une banalité affligeante. Bien entendu que la montagne n'était pas immobile, ils étaient les mieux placés pour le savoir. A chaque saison elle changeait un peu plus et, loin de tomber dans le cycle routinier que l'on voulait bien lui prêter, elle revenait chaque printemps avec une toute nouvelle végétation. Ce ne fut que plusieurs années plus tard, lors d'une matinée des plus routinières qu'il comprit l'étendue de cette vérité. Des pentes s'écroulaient, des crevasses se comblaient, des rivières se détournaient… et cela tous les jours.

Le simple d'esprit vit dans la montagne, le sage lui vit avec elle.

C'était là des réflexions que l'on ne trouverait pas sur l'étagère d'un érudit. Tout simplement car c'était un concept trop complexe pour un homme occupé à vainement marquer la sagesse dans l'encre, et trop banal pour susciter l'intérêt des créatures le comprenant pleinement.

Il avait pour habitude de s'asseoir à l'ombre de ce vieux chêne pour observer le ruisseau et ses environs en début d'après-midi, la monotonie du petit rituel ne faisant que contraster un peu plus les évolutions de l'endroit. Il pouvait encore se rappeler des jours où ce n'était qu'un filet d'eau à peine visible qui courrait dans les herbes hautes, suite à la décrue d'une rivière coulant au sud de là. Le courant s'était fait plus important et la terre s'était creusée pour céder le passage.

Il plaignait ceux qui n'avaient pas eu l'occasion de voir le procédé prendre place, mais il n'avait pas non plus le culot d'appeler les concernés « simple d'esprit ». Même la plus grande des sagesses ne pouvait pas offrir les deux siècles requis par le procédé après tout. Ainsi, il était obligé d'admettre que les plus grands changements de la montagne restaient certainement trop lents pour les yeux des mortels. C'était bien entendu sans compter les deux flammèches qui dansaient de l'autre côté de la rive.

Il y a plusieurs semaines de cela, l'endroit avait été complètement transfiguré, et ce du jour au lendemain. Le vert luxuriant des feuillages s'était fait détrôner, concurrencé par le rouge flamboyant qui, s'ils avaient été en automne, aurait sans aucun doute même fait oublier les robes orangées des arbres.

Les pelages hérissés se balançaient de plus en plus rapidement dans le dos des deux enfants, et il comprit par expérience qu'il allait bientôt devoir quitter son point d'observation pour séparer les deux teignes. Qu'avait-il fait aux Dieux pour mériter cela au juste ?

Les deux regards quasiment symétriques se tournèrent dans sa direction à son approche. Quelques maigres poissons battaient désespérément leur queue aux pieds des apprentis chasseurs, dans l'espoir de bondir jusqu'au courant d'eau et de retrouver leur liberté. De toute évidence, la simple tâche de rassembler de quoi dîner s'était encore une fois transformée en compétition entre les nouveaux venus. Ils avaient été si pressés de sortir un grand nombre de proies du courant d'eau qu'ils n'avaient pas pris la peine de les mettre dans le panier prévu à cet effet.

Leur silence prolongé ainsi que l'intensité de leur regard lui intimaient de choisir un vainqueur. Chacun avait ramené trois poissons sur la berge, le seul moyen de les départager reposait alors sur la taille des spécimens, mais il n'allait certainement pas leur faire ce plaisir. Il se pencha pour récupérer le panier et de quelques mouvements rapides commença à y loger leur futur dîner.

Aussitôt des sourcils se froncèrent sur un regard hétérochrome, tandis que la seconde petite forme se rapprochait de lui en trottinant. Les deux yeux rouges le fixèrent en silence jusqu'à ce qu'il finisse sa tâche et se redresse, le panier maintenu contre sa hanche pour plus de stabilité.

« Il y en a-t-il assez, Nijimura-san ? Finit-il par demander, les quatre queues dans son dos restées figées en hésitation.

— Ne t'en fais pas pour ça, vous avez bien travaillé. »

Un petit sourire timide trouva son chemin sur les lèvres de l'enfant, et l'homme se félicita de son mensonge. Les poissons étaient bien trop maigres pour rassasier un adulte, mais c'était sa faute pour les avoir laissé se charger du dîner sans leur apprendre à pêcher auparavant. Il avait de toute façon déjà fait des repas bien moins copieux.

Une voix identique à celle du jeune garçon qui lui souriait toujours fit son apparition, et ce ne fut que par habitude qu'il identifia le ton impérieux comme propre au second enfant.

« On rentre, Shuuzou ? On s'ennuie ici ! »

En temps normal il serait resté près du ruisseau jusqu'au coucher du soleil, ou jusqu'à ce qu'il soit appelé ailleurs par un évènement ou un autre. Mais cela faisait longtemps qu'il n'avait pu rester tranquillement assis au pied de son arbre favori. Il ne put contenir un soupir vaincu à cette pensée.

« Comme vous voudrez, mais je vous conseille de courir pour vous sécher, ne croyez pas que je vous laisserais mettre un pied à l'intérieur dans cet état. »

Même l'œil doré, d'habitude plus froid que la glace, s'écarquilla de surprise. Les deux enfants baissèrent ensuite leur regard vers leurs vêtements et constatèrent que les tuniques normalement blanches de leurs kimonos s'étaient retrouvées alourdies et obscurcies par les eaux boueuses. Il ne fallut pas longtemps pour que l'enfant aux yeux hétérochromes retrouve sa compétitivité.

« Oreshi ! Je vais te prouver que je suis le plus rapide ! »

Sans attendre de réponse du concerné il se positionna sur une ligne de départ imaginaire, Oreshi ne fut pas long à le rejoindre, laissant Nijimura se demander une fois de plus où il trouvait autant de patience. Une poignée de secondes plus tard, il abaissait sa main pour donner le départ et les deux têtes rousses surmontées d'oreilles canines s'élancèrent hors de la clairière. Lorsqu'il ne restait plus une trace des touches de blanc au bout de leurs queues de renards dans l'horizon, sa lèvre supérieure se courba légèrement en un sourire discret et il quitta à son tour la clairière, d'un pas tranquille.

Une fois qu'il eut quitté le couvert des arbres et gravit une volée de marches menant au vieux temple dans lequel il avait établi résidence, il aperçut les deux jeunes garçons qui couraient toujours. Certain qu'ils avaient une fois de plus oublié leur objectif premier, il ne vit pourtant pas l'intérêt de les appeler à l'intérieur alors qu'ils débordaient toujours autant d'énergie et en profita plutôt pour déposer son fardeau dans le coin de la plus grande pièce qui servait de garde-manger.

Le petit temple lui servait principalement de refuge contre les intempéries, on ne pouvait pas en attendre grand-chose d'autre. Il avait le luxe de disposer de trois pièces distinctes assez bien isolées pour ne pas devenir étouffantes sous le soleil d'été, mais l'endroit ne disposait d'aucune sorte de confort : il avait été construit pour héberger des êtres rarement visibles aux yeux des hommes après tout, et dont le style de vie n'était que mystère. Ainsi s'il ne voulait pas risquer d'enflammer la fragile toiture, ils devaient faire un feu à l'extérieur pour cuisiner quoi que ce soit.

Il n'avait pas franchement hâte de se mettre à la tâche, mais il se rappelait encore du regard indigné que lui avait jeté le plus audacieux des nouveaux venus, Bokushi, lorsqu'il avait tenté de s'épargner la peine de cuisiner.

Un léger bruit de pas entrant dans le temple le sorti de ses pensées et le fit se retourner avant même que les oreilles canines noires perchées sur sa tête n'aient le temps de s'agiter. La petite figure s'arrêta net, fixant l'adulte de ses grands yeux rouges. Nijimura constata que le séchage accéléré n'avait aucunement débarrassé les kimono blancs des traces de terre laissées plus tôt et il ne put s'empêcher de se reprocher d'avoir habillé des enfants avec du blanc en premier lieu. Le regard acier finit par convaincre le sujet de ses observations de s'approcher, ce qu'il fit avec une confiance digne de celle de son jumeau. Seul son silence prolongé aurait pu trahir un quelconque malaise alors qu'il réduisait la distance entre eux et lui tendait une poignée de fleurs sauvages fraîchement cueillies.

Une des grandes mains de l'adulte trouva rapidement son chemin entre les mèches rouges et les ébouriffa rapidement. Un instant plus tard il se retrouvait seul avec la poignée de fleurs éparses dans les mains. Allumer un feu ne semblait plus si contraignant que cela.

Parfois cependant, même les meilleures intentions ne sont pas suffisantes. Il avait tout juste pu réunir du bois sec stocké sous les pilotis du temple et l'avait placé dans un cercle approximatif, qu'un bruit de frottement inhabituel captura son attention. La scène qui se passa par la suite lui aurait certainement parue moins absurde s'il avait fait attention au regard hétérochrome fixé sur son échange avec Oreshi. Mais il dût se contenter de sa grimace la plus emblématique quand Oreshi couru jusqu'à lui et, que d'un pas bien plus lent, Bokushi se dessinait à l'angle du temple en traînant derrière lui ce qui ressemblait tout à fait au jeune cerisier qui poussait à l'entrée du temple. Après mûre réflexion, c'était forcément le cerisier en question. Où en aurait-il trouvé un autre dans les environs ? Mais plus important :

« Je peux savoir ce que tu as fait, abruti ? » Le plat de sa main alla s'abattre sur le crâne de l'enfant pour ponctuer ses mots, le forçant à lâcher la pauvre plante pour recouvrir le point d'impact. Le fauteur de trouble lui avait déjà prouvé toute sa fierté par le passé cependant, et il ne fut aucunement surpris de le voir camper sur ses positions sans exprimer le moindre remord.

« Montre moi plus de gratitude, Shuuzou !

— Mais bien sûr, et quoi encore ? » L'adulte finit par se résigner à observer avec plus d'attention le massacre, et fut soulagé de voir que malgré les nombreuses branches cassées dans le déplacement, Bokushi avait réussi à sortir l'arbre de terre sans couper trop de racines. S'il se dépêchait il n'était sûrement pas trop tard.

Nijimura abandonna alors toute tentative de comprendre le comportement du rouquin qui lui échappait de toute façon la majorité du temps, et souleva le tronc fin contre son épaule avant de ne se retourner une dernière fois vers les deux rouquins.

« Ne pensez même pas à commencer le feu sans moi, j'ai pas envie de replanter toute une forêt. En fait restez là, sans bouger, ne clignez même pas des yeux. » Sans attendre de confirmation, il contournait déjà le temple en priant silencieusement pour que le jardinier en herbe n'ait pas poussé le zèle jusqu'à reboucher le trou d'où venait le pauvre malheureux.

Un peu plus tard il retrouva les deux jeunes têtes de mules à l'endroit même où il les avait laissés, sauf que cette fois-là ses propres étoffes gris foncé étaient elles aussi couvertes d'une fine pellicule de terre et que Oreshi avait fini par s'asseoir par terre et observait Bokushi avec un mélange d'inquiétude et d'admiration. Les yeux anormalement rougis du jeune garçon et les larmes qui s'y formaient petit à petit furent la réponse à toutes les interrogations qu'y avaient pu se lever. Il fut rapidement accroupi devant lui, un air vaincu plaqué au visage.

« Tu n'as vraiment pas cligné des yeux, hein ? Ca va tu as gagné, tu peux arrêter de te retenir. » Rajouta-t-il devant le silence prolongé. Et il ne se retint pas un instant de plus, les petits poings volèrent jusqu'à son visage pour former un cocon autour des orbes sensibles dans un petit cri de soulagement qui tenait plus d'un grincement. Le bruit inattendu sût faire venir un rire franc dans le ton grave de la voix de Nijimura alors que sa main alla ébouriffer une tignasse de feu pour la seconde fois de la journée.

Un œil rouge et un autre d'un or envoûtant se levèrent alors dans sa direction et, bien que larmoyants, la fierté qu'ils enfermaient lui fit se dire que, finalement, replanter un arbre n'était pas si contraignant que ça.

Les deux jeunes enfants restèrent calmes le temps de la préparation du dîner, seules leur quatre queues rousses respectives s'agitant sans cesse dans leur dos alors qu'ils refusaient de lâcher les poissons embrochés du regard, comme par peur qu'ils trouveraient le moyen de s'enfuir. Nijimura réussit à les faire patienter le temps de faire cuire du riz pour accompagner le tout, mais ne tenta pas plus sa chance avec un quelconque autre condiment et les laissa avaler leur repas avec la hâte des prisonniers affamés, leur rappelant vaguement de mâcher avant d'avaler.

En seulement une saison, la montagne avait décidément bien changé. Deux habitants de plus s'y étaient introduits et ils ne pouvaient rien toucher sans le transformer, lui et ses habitudes en premier. Il peinait à croire que seulement une saison s'était écoulée depuis que leurs chemins s'étaient croisés…

Finalement, élever deux jeunes kitsune ne semblait presque plus si contraignant que ça. Presque.