Exactement un mois, jour pour jour, après la Bataille de Poudlard, un étrange homme se dirigea vers le Terrier, et frappa à la porte. Les Weasley étaient toujours en deuil de la perte de leur fils, et Arthur hésita un instant avant d'aller voir à la porte. Ils avaient en effet reçu de nombreux hiboux de condoléances, et de visites inattendues. Il ouvrit cependant la porte, et vu un vieux monsieur debout sur le perron.
" Puis-je vous aider ?" demanda Arthur avec lassitude.
"On m'a indiqué que Miss Granger avait élue domicile ici" répondit le vieil homme, sa voix tremblant à cause de son âge et de sa fatigue.
"On vous a dit juste" répondit lentement Arthur.
"J'apprécierais, si cela ne vous dérange pas trop, parler avec elle quelques instants." Le vieil homme appuya un peu plus son poids contre sa canne torsadée.
"Très bien. Mais puis-je connaitre votre nom ?" demanda Arthur en hochant vaguement la tête.
"Prince. Havenger Prince, monsieur" dit le vieil homme en commençant à tousser.
"Un moment, s'il vous plait". Arthur se retourna et quitta le vieil homme se tenant sur le pas de la porte. Il marcha jusqu'à la cuisine où était installée Hermione, qui buvait tranquillement une tasse de thé.
"Hermione, il y a une homme dehors qui demande à te voir. C'est un vieux monsieur du nom de Havenger Prince." Arthur fit un geste en direction de l'avant de la maison. Elle leva les yeux de son thé, et fronça les sourcils tandis qu'elle tentait de se souvenir de ce nom.
"Je ne connais personne qui s'appelle comme ça." Hermione secoua la tête, et posa doucement sa tasse. "Mais je vais aller lui parler". Hermione se leva et marcha jusqu'à la porte d'entrée, à la rencontre du vieil homme, qui tournait maintenant le dos à l'entrée et regardait les champs alentours. Hermione s'éclaircit la gorge, faisant sursauter le vieil homme, qui se retourna lentement.
"Seriez-vous bien Miss Granger ?" demanda le vieil homme avant de se mettre à fouiller dans les poches de sa veste.
"Oui c'est moi, monsieur" acquiesça Hermione.
"On m'a confié une lettre il y a quelques temps, avec comme instruction de vous la remettre seulement si son auteur venait à mourir. On m'a appris son décès tout juste hier." Le vieil homme fouillait toujours dans ses poches. Hermione le regardait ; elle ne voulait pas penser à cette personne qui avait pu lui laisser une lettre après sa mort. Trop de personnes sont mortes, et la lettre pouvait venir de n'importe qui. "Ah ! Je l'ai !" Il tira une enveloppe de sa poche et la tendit à Hermione.
"De qui vient-elle ?" demanda Hermione en prenant l'enveloppe. Son nom était écrit dessus, mais il n'y avait rien d'autre.
"Mon petit-neveu" répondit simplement le vieil homme, qui se retournait et commençait à s'en aller.
"Mais qui est-ce ?" Hermione secoua sa tête tout en l'observant descendre le chemin.
"Lisez la lettre, et vous trouverez ! Passez une bonne journée, Miss." Le vieil homme transplana quand il arriva au bout du chemin, quittant Hermione qui se tenait là, avec cette étrange lettre dans sa main, la confusion occupant son esprit. Elle fit deux pas en arrière dans la maison, et ferma la porte tout en fixant l'enveloppe dans sa main.
"C'était à propos de quoi ?" demanda Arthur, qui l'avait vu rentrer.
"Il m'a remis une lettre, de la part de quelqu'un qui est mort" dit Hermione en relevant son regard vers lui.
"Une lettre ?" demanda Arthur. "Qui te l'a laissé ?"
"Je ne sais pas." Hermione secoua sa tête.
"Tu n'as qu'à la lire, je suis sûr qu'on l'a signé." Arthur mis sa main sur son épaule.
"Je pense que je vais aller dans ma chambre, et d'abord la lire seule. Si ça ne vous dérange pas, bien sûr." Hermione se mordit les lèvres.
"Non pas du tout, je pense que c'est une bonne idée. Après tout, tu ne sais pas ce qui y est dit, ni de qui ça vient." Arthur tapota son épaule et elle acquiesça. Hermione s'en alla lentement, sans lâcher du regard l'enveloppe, jusqu'à ce qu'elle arrive dans sa chambre. Elle ferma la porte, s'installa sur son lit et retourna l'enveloppe ; elle déchira le sceau et en sortit le contenu. Hermione pris une profonde inspiration avant de déplier la lettre, se préparant avant de commencer à lire.
Miss Granger,
Si vous êtes en train de lire ceci, c'est que j'ai péri dans la guerre. J'espère sincèrement que la lumière a triomphé, et peut-être que je n'ai pas vécu assez longtemps pour voir cela. Ce n'est pas dans mon intention de vous bouleverser avec cette lettre, j'ai essayé de nombreuses fois d'écrire ceci, m'asseyant et recommençant souvent, mais maintenant vous êtes en train de la lire. Je suppose que c'est ma tentative de gagner une tranquillité d'esprit, comme on dit. Je n'ai pas une seule fois réussi à vous parler d'une manière qui vous amènerait à croire que nous étions amis, ou que j'ai pris garde à vous. Mais je vous ai apporté une attention toute particulière, ce qui donne une raison à ma lettre. Pardonnez-moi si ce que je dis n'a pas de sens, mais j'ai eu peu de temps pour dormir et mes problèmes commencent à prendre une part importante sur mon état mental et physique. Je suis donc très fatigué.
Je ressens le besoin de m'excuser auprès de vous, pour toutes les choses que j'ai dit ou faites, et qui vous ont blessées. Vous avez toujours été ma meilleure étudiante, et vous étiez toujours sympathique avec moi. Vous étiez gentille, même si vous avez des raisons suffisantes pour vous comporter autrement. Je vous en remercie. Votre gentillesse a pendant longtemps été mon seul réconfort. Je savais depuis le premier jour de classe que vous aviez tous les atouts pour être amie avec Harry. Je suis assis ici, et je me souviens de ce premier jour, et je dois admettre que ce souvenir me faire rire. Vous étiez désireuse de montrer tout ce que vous aviez appris. Seriez-vous surprise d'apprendre que vous êtes la première et seule étudiante qui ne se soit comporté comme ça un premier jour de cour ? De toute ma carrière de professeur, vous avez été la première et la dernière. J'ai regretté chaque mots déplaisant que j'ai pu vous dire, et ce dès l'instant où ils avaient quitté mes lèvres.
Vous êtes comme une rose dans un océan d'épine. J'ai pu voir beaucoup de choses que mes collègues ne voyaient pas, et je suis désolé si vous avez souffert à cause des élèves de ma maison. Je pense que vous leur avez cloué le bec au bal de Noël. Vous ressembliez à une déesse ce soir-là, si je puis dire.
Désolé, je n'avais pas l'intention de parler de façon déplacée.
Au moment où j'écris ceci, vous êtes sur la route. Je ne sais où vous êtes, ni si vous allez bien. Cela m'inquiète. Je suis tellement inquiet.
J'espère que mon oncle vous trouvera, j'espère que vous serez là où je le pense quand la guerre sera finie. S'il vous plait, pardonnez le pour le retard, il est très vieux, et il va sans doute vous apporter cette lettre longtemps après que j'ai été enterré. Vous êtes probablement au Terrier, maintenant. Cette idée me rassure.
Mon souhait le plus sincère est que vous aillez à ne jamais poser les yeux sur cette lettre. Je prie pour que vous ne lisiez jamais ceci, mon plus grand souhait étant de vous trouver, et de tout vous dire en personne, pour que vous puissiez entendre de vive-voix ces mots, et pour que vous puissiez voir l'expression de mon visage. Peut-être que j'ai trop d'espoirs. Je sais que j'ai trop d'espoirs.
Je devrais vous dire que vous êtes brillante, absolument brillante. Vous en êtes consciente, mais trop humble pour le reconnaitre.
Je vous ai vu dans la forêt, la nuit où j'ai apporté l'épée à Harry. Je suis persuadé qu'il vous montera ce que je lui ai partagé. Mais je ne vais pas tout lui dire, je l'avoue. Vous avez toujours été plus attentive, et il ne me surprendrait pas le moins du monde si vous ne vous étiez pas déjà rendu compte de ce fait.
J'ai un dernier secret, quelque chose que personne ne sait, car je n'ai jamais laissé cette pensée franchir le seuil de mes lèvres. Je crains de vous faire encore plus de mal, ce que plus d'une personne ne pourrait supporter. Cela me détruit de savoir que vous êtes autant en danger. Je voudrais terminer cette fichu guerre maintenant, si cela ne tenait qu'à moi. Non. D'abord, je n'aurai jamais voulu la laisser commencer. Oui, mais hélas, je ne peux rien changer à ce qu'il se passe, ou ce qu'il se passera.
Je ne sais pas quand ce que je vais vous révéler s'est produit. Je ne peux pas identifier à quel moment s'est arrivé, ni quand j'ai eu cette révélation. Je sais seulement que vous avez laissé quelque chose en moi. Comme une petit graine, dont je n'ai pas pris garde, et qui a grandi en moi. Je vous le dis maintenant car vous êtes en âge de savoir. Je dois aussi souligner le fait que j'ai réalisé ceci cette année, il me semble ; ce n'est pas quelque chose que j'ai nourris pendant des années. Je vous en donne ma parole.
En quelque sorte, et d'une façon inconnue, vous m'avez rendu amoureux. Oui, moi, je vous aime, Hermione. Je n'écris pas cela pour vous blesser. S'il vous plait, ne ressentez pas de tristesse à cause de ces paroles, sachant que je suis mort. Je ne veux vous causer aucune douleur.
À un moment, je vous ai observé d'une manière différente. Il y a un jour où vous m'avez regardé ; vous avez les yeux couleur caramel, et selon l'angle de la lumière, on peut y voir des taches dorées. Vous avez aussi ce petit sourire quand vous avez juste dans vos observations, et cette habitude de mordre vos lèvres lorsque vous êtes nerveuse. Vous avez aussi cette petite manie de mettre vos cheveux derrière votre oreille gauche, c'est plus qu'attachant.
Hélas, si vous lisez ceci, c'est que je suis partie. Ça importe peu. Si j'étais en vie et là pour vous parler, je voudrais vous demander s'il y aurait un jour une chance qui vous m'aimiez ? Je ne saurais jamais, ce qui le blesse au plus profondément. Mais je devais vous le dire, je voulais que cette pensée s'attarde dans votre bel esprit. Mais maintenant vous savez. J'espère que j'ai pu vous voir une fois de plus avant de tomber. Peut-être que vous y étiez. Non, j'aurais préféré que vous ne souveniez pas de moi de cette manière. Il y a peu de souvenir, je le sais, mais pensez uniquement à ceux où j'étais sous mon jour le plus favorable.
Je vous souhaite une belle vie. Je vous souhaite d'aimer, et d'aimer sans limite. J'espère que l'homme qui gagnera votre faveur saura à quel point il est chanceux. Quand vous serez une vieille dame entourée par vos enfants et petits-enfants, et que votre temps touchera à sa fin, j'espère que vous serez rassurée à l'idée de savoir que je ne suis pas loin de vous. Si vous voulez de moi, il ne suffit que de demander.
Vous n'avez pas besoin de partager ceci avec quelqu'un. Mais vous êtes libre de le faire si vous le souhaiter. Vous devriez brûler cette lettre une fois l'avoir lue, et ne jamais y repenser. J'emporterai ce secret dans la tombe, et vous êtes la seule personne avec qui je l'ai partagé.
Je vous aime.
Severus Snape.
Hermione replia la lettre et essuya les larmes qui descendaient ses joues. Elle ne savait pas à partir de quel endroit de la lettre elle s'était mise à pleurer. Elle posa sa tête sur ses genoux, tout en étreignant la lettre. On frappa à la porte, la sortant de son était d'hébétude.
"Oui ?" demanda Hermione. Son visage était rougi et gonflé par les pleurs.
"Hey 'Mione. Je voulais juste vérifier comment ça allait. Mr Weasley a dit que tu avais reçu une lettre..." Harry passa sa tête dans la chambre, mais s'arrêta de parler dès qu'il vit Hermione. "Merlin 'Mione, de qui vient cette lettre ?" Hermione secoua sa tête.
"Ferme la porte" dit-elle. Harry obéit et fit un pas dans la chambre. Elle tenait la lettre, qu'il prit en hésitant. Il commença à lire, ses yeux bougeant frénétiquement au-dessus du parchemin. Quand il eut terminé, il releva lentement ses yeux et rencontra le regard d'Hermione. Il était sans voix. "Il m'aimait" murmura Hermione.
"Hermione..." Harry secoua la tête et lui rendis la lettre.
"Non. Ne dis rien, je veux... Je vais... J'ai juste besoin d'être un peu seule." La voix d'Hermione vacilla et elle fondit en larmes. Harry acquiesça.
"D'accord, 'Mione. Ton secret est en sécurité avec moi, ne t'en fais pas. Je suis là si tu veux parler." Harry se retourna et ouvrit la porte. Il jeta brièvement un regard en arrière et la vue rouvrir la lettre et la lire encore. Elle tremblait, et il ferma doucement la porte, la laissant avec ses pensées et une lettre d'amour venant d'un homme mort.
