Bien le bonjour jeunes gens - et moins jeunes !
C'est la première fois que j'écris sur South Park... Je ne sais pas encore ce que ça va donner. On verra bien ! Cette histoire risque d'être vulgaire et crue à souhait (vous êtes prévenus et je sais que ça peut ne pas plaire), assez violente avec du yaoï et pas du tout dans le registre comique original. Les répliques homophobes de Cartman sont, malheureusement, des répliques que j'ai déjà entendu plus jeune et ce n'est en rien exagéré. Je sais pas encore si je mettrai du lemon, mais au minimum il y aura du lime, à voir. Elle met en scène notre cher Kenny (qui est mon véritable coup de cœur) et la relation avec Craig qui va se développer au cours des chapitres. Je ne maîtrise pas très bien l'univers, il se peut que je sois OOC. Enfin, vous me direz (si quelqu'un me lit...).
Pour être honnête, je ne sais pas combien de chapitres fera cette fanfiction. Je ne suis pas du tout régulière dans la publication, alors ne m'en voulez pas trop. Par contre, je tiens dors et déjà à m'excuser pour les fautes, n'étant pas une flèche en la matière.
Disclaimer : J'ai repris les personnages de Trey Parker et Matt Stone dans leur oeuvre South Park.
Sur ce... Je vous souhaite une bonne lecture.
La vie n'est pas rose quand on s'appelle Kenneth McCormick, encore moins tendre ou agréable. Un père alcoolique, une mère droguée, pas une thune, à peine un toit sous lequel s'abriter. Les reproches, les insultes, les cris ou bien les coups rythment son quotidien. D'ailleurs, d'aussi loin qu'il se souvienne, il n'a jamais connu autre chose que cette atmosphère malsaine. A-t-il déjà reçu une parole sincère ou un geste affectueux de la part de ses géniteurs ? Faut pas rêver ! Cela fait bien des années qu'il ne les a plus appelés « papa » ou « maman ». Fut un temps où il les aimait véritablement, mais ça, c'était avant que l'aveuglement innocent de son enfance ne se dissipe pour laisser sa place à la dure réalité.
Aujourd'hui le petit Kenny a bien grandi et il attend patiemment le jour de ses dix-huit ans pour se barrer de ce taudis, comme son frère avant lui. Ça tombe bien, plus qu'un an à tirer. Avant de claquer définitivement la porte à ces enflures qui lui pourrissent la vie depuis sa naissance, il emmènera sa petite sœur, seule chose à sauver de cette famille de dégénérés.
Assis sur le perron, comme tous les soirs avant d'aller se coucher, il fume une cigarette. La nuit est tombée depuis quelques heures déjà et la fraîcheur du vent le fait frissonner. Tout est sombre autour de lui, les lumières de sa maison ne sont pas allumées. Cette connasse de Carol a encore oublié de payer les factures d'électricité pour s'acheter sa saloperie de dope. L'adolescent recrache la fumée qui aussitôt se fait balayer par le vent. Ses fines mèches blondes lui gênent la vue, mais il ne fait rien pour les enlever.
Des cris à l'intérieur de l'habitat résonnent. De la vaisselle se fracture contre les murs. Et voilà, ils devront encore manger dans des couverts en plastique. Il tire de nouveau sur sa cigarette, le bout s'allume et éclaire ses traits fins et délicats. Il tend un bras derrière lui pour s'y appuyer. Sa tête bascule en arrière et la capuche de son anorak la lui découvre entièrement. De ses yeux d'un bleu cristallin, il observe les étoiles qui sont sa seule source lumineuse dans cette nuit couleur d'encre. De nouveaux cris déchirent le calme du quartier, les voisins ne s'alarment pas.
L'habitude surement.
Il expulse de nouveau la fumée. Ses yeux se ferment et il laisse son esprit s'évader quelques instants, faisant abstraction des bruits de lutte. Comment se fait-il qu'ils ne se soient pas encore écharpés ces deux énergumènes ?
Il porte la clope à son bec et inspire profondément jusqu'à ce qu'il ne reste plus rien à consumer. Se sortant de sa rêverie, il frotte le mégot contre le sol et l'expulse d'une chiquenaude. Les deux Autres ne font rien pour entretenir les lieux, il ne va certainement pas s'y coller à leur place.
D'un bond, il se redresse et enfourne ses mains dans les poches de son anorak orange. Certaine chose ne change pas, il n'y a que dans cet habit chaud et ample que le blond se sent à son aise.
Il ouvre la porte de sa maison qui n'est jamais fermée à clés, de toute manière, qu'y aurait-il à voler ici ? Une grimace déforme son visage lorsqu'il inhale l'air vicié qui ne s'évacue jamais. Ces relents d'alcool mal-digéré, de tabac froid et d'autres substances nocives imprègnent les murs, il ne peut plus les supporter. La gorge nouée et l'estomac serré, il progresse dans la pénombre sans même tâtonner.
L'habitude surement.
Son père le bouscule d'un coup d'épaule sans que Kenny n'hausse un sourcil. Il l'entend grogner quelque chose avant de sortir à l'extérieur. La porte claque violemment. Parfait. Sans le visage de ce connard de Stuart sous les yeux, peut-être pourrait-il enfin avaler quelque chose sans avoir envie de gerber.
L'adolescent avance sans rien y voir, des bouts de céramique craquent sous ses pieds qu'il envoie paître sur le côté. Il bute dans un tibia. Sa propriétaire geint avant de se recroqueviller. Encore une fois, Kenny ne réagit pas et atteint le frigidaire qu'il ouvre. Pas de lumière.
Évidemment.
Il sort de sa poche son vieux téléphone à clapet pour y voir plus clair. Sans grande surprise, il ne trouve que des bouteilles de bière, quelques yaourts et des restes de raviolis. Son visage ne montre aucune expression. Blasé, il attrape l'un des yaourts, préférant laisser le plat plus consistant pour sa sœur.
« C'est toi Kenneth ? marmonne une voix horripilante à proximité.
— Mrf.
— Aide moi à me relever. »
Les deux mains prises, il referme la porte du frigo avec le pied. Il s'avance vers sa maternelle d'un pas las, libère ses mains et la soulève par le dessous des bras. La drogue la transforme en zombie en manque -mais pas de cerveau humain. Un rire sarcastique aurait pu lui échapper si la situation n'était pas aussi pitoyable.
Carol s'appuie sur son fils qui la soulève comme un poids plume. Sa consommation abusive de stupéfiant ne laissant que peu de place à l'alimentation, il ne lui reste plus grand-chose autour des os.
« Je te pose sur le canapé à côté de tes sachets, je suppose. Hein Carol ?! » lâche Kenny, mauvais.
La femme ne lui répond rien et se laisse emmener, titubante, vers le sofa sur lequel le garçon la jette négligemment. Elle geint légèrement en s'affalant de tout son long. Il tourne les talons sans un mot et va récupérer son maigre repas qu'il engloutit en quelques bouchées. Son estomac crie famine, mais tant pis, il mangera mieux demain.
Il balance la cuillère dans l'évier, le pot vide dans la poubelle et se dirige vers les chambres. Une faible lueur éclaire le dessous de la porte close de sa sœur, il s'y accote. Il frappe quelques coups timides et attend une réponse.
« Quoi ?
— Tu as mangé ?
— Non, répond-t-elle sans détour.
— Il reste des raviolis.
— Je sais. »
La tempe du blond se colle contre la porte et un faible soupir franchit ses lèvres. Il n'apprécie pas le fait que Karen ne s'alimente pas. Lui, passons, c'est son problème. Mais sa petite sœur…
« Tu as un devoir demain. Mange.
— Arrête de te priver pour moi. Tu en as autant besoin si ce n'est plus.
— S'il te plait, Karen. »
Un souffle bruyant se fait entendre en même temps qu'un claquement de bouquin que l'on referme. Kenny se redresse. La porte s'ouvre sur les yeux cernés de sa sœur. Elle tient une lampe torche dans la main, des feuilles sont disposées en pagaille sur son lit.
En pleine révision surement.
Son visage juvénile se lève vers celui de son frère qui lui sourit tendrement. Les sourcils se froncent sur ses yeux et elle lui donne un petit coup de poing dans l'épaule.
« Idiot, » ronchonne-t-elle.
Elle se met finalement sur la pointe des pieds et lui dépose un baiser fugace sur la joue. Le sourire de Kenny s'élargit sur ses lèvres face aux réactions puériles de sa sœur. Avant qu'elle ne parte, il lui ébouriffe les cheveux d'un geste affectueux.
« De rien microbe. »
Elle s'éloigne, décoiffée, en direction de la cuisine et grommèle des mots incompréhensibles, ce qui amuse un peu plus le jeune homme. Qu'est-ce qu'il pouvait aimer sa petite sœur. La seule personne qui en vaille la peine dans cette famille d'attardés. Calme, studieuse, intelligente, ravissante et encore bien des choses qui ne correspondent pas au tableau McCormick Père et Mère. A se demander s'ils ne l'avaient pas enlevé à la naissance.
Il reprend le chemin de sa chambre, y pénètre et s'avance vers son lit sur lequel il se laisse tomber en travers. Les ressorts du matelas miteux le font rebondir légèrement. Ses yeux se posent sur son réveil. 01h00. Sans se relever, il se débarrasse de ses vêtements qu'il jette en boule aux pieds de son lit. Fatigué, il s'enroule sous les couvertures. La fraîcheur des draps le fait frissonner. Pas d'électricité donc pas de chauffage. Le quotidien, quoi. Il se recroqueville sur lui-même et ferme les yeux, cherchant le sommeil.
Demain sera un autre jour… un rire amer résonne dans son esprit. C'est beau d'espérer.
Morphée vient s'emparer de lui quelques minutes plus tard, le projetant loin de sa réalité. Mais à peine le temps de fermer les paupières qu'un son strident le tire déjà de son sommeil. Il tape plusieurs fois sur l'appareil qui s'arrête de sonner.
06h30. Machinalement, il se redresse et pose un pied au sol, puis le second. Ses muscles sont transis par le froid du vieux carrelage ébréché. Malgré tout, il tend les bras en l'air pour s'étirer et dégourdir ses membres. Vêtu d'un boxer on ne peut plus basique, il se dirige vers la salle de bain.
Les rayons de soleil éclairent maintenant l'intérieur insalubre de la maison. Par endroit, de la tapisserie jaunie par la fumée de cigarette et d'autres substances se décrochent des murs. Le mobilier poussiéreux sans fioriture répond au minimum vital. Aucune décoration n'enjolive l'intérieur, si ce n'est un vieux tableau affreux de nature morte récupéré dans une déchetterie pour camoufler l'un des plus grands trous qui ornent le plâtre. A l'autre bout du couloir, il croit apercevoir une blatte se faufiler sous les plaintes.
Merveilleux !
Des fois, mieux vaut être aveugle.
En face du lavabo, il s'observe un instant dans le miroir crasseux. Ses cheveux sont en bataille, complètement emmêlés et ses paupières mi-closes refusent de s'ouvrir plus larges.
Bravo Kenny, tu as encore une gueule de déterré, pense-t-il en passant ses mains fraîches sur le visage.
Il se tourne vers la baignoire et enjambe les rebords. Des tâches de moisissures rongent les joints posés à la va-vite. Il tire le vieux rideau lui aussi moisi par l'humidité et allume l'eau chaude. Quelques instants s'écoulent. Toujours pas d'eau chaude. Un soupir résigné lui échappe.
Pas d'électricité donc pas de chauffage.
Il passe le pommeau de douche sur son corps qui se crispe au contact du liquide glacial. Sa toilette ne dure pas plus de trois minutes. A peine terminé, il s'enroule dans une serviette à l'odeur infect pour se sécher et enfiler ses vêtements propres au plus vite. Afin de domestiquer sa chevelure blonde, il donne quelques coups de peigne. Un dernier coup d'œil à son reflet atone, voilà qu'il ressemble enfin à quelque chose.
6h45. Au moins, il est en avance. Sans grand enthousiasme, il va dans la cuisine et fait chauffer une large casserole d'eau. Heureusement, ses géniteurs ont eu la présence d'esprit d'acquérir une gazinière. Son regard se reporte dans le salon où sa mère dort sur le canapé, le bras pendant sur le sol.
Peut-être qu'elle est morte ?
Elle renâcle bruyamment.
Pas encore.
Adossé avec nonchalance contre le plan de travail graisseux, il attend quelques instants que l'eau tiédisse. Il l'apporte finalement dans la salle de bain. Karen ne se gèlera pas les os à cause de l'incompétence des deux Autres. Hors de question.
Une fois sa mission achevée, il retourne dans la cuisine. Sans se préoccuper de la vieille rombière, il fait tous les placards à la recherche d'un petit quelque chose à se mettre sous la dent. Les portes claquent et des grognements émergent du salon. Il recommence encore plus fort jusqu'à ce qu'une boîte de céréale lui passe sous les doigts. Sa main s'enfourne dedans, en récupère trois grosses poignées et laisse le reste en évidence sur la table de la cuisine. Avant de retourner dans son antre, il se brosse les dents et regarde son image à la fois négligée et agréable.
6h55. Bientôt l'heure de prendre le bus. Il enfile son anorak orange et balance son sac sur l'épaule. De son portefeuille, il sort un billet de 5$ et le glisse sous la porte de sa frangine pour son repas de midi. Sans perdre plus de temps, ses pas le guident vers la sortie afin de rejoindre l'arrêt de bus.
7h10. La vieille carcasse métallique passe le prendre. Les quartiers pauvres sont loin de tout, y compris des écoles. Ce n'est donc pas étonnant que le trajet pour s'y rendre dure plus d'une heure. Silencieux, il s'assoit au fond, dans les dernières rangées. Comme toujours il est le premier. Alors il attend patiemment que l'heure passe, le menton sur le poing et les yeux rivés sur l'extérieur qui défile à toute allure. Arbres, plaines et champs enneigés laissent leur place au paysage urbain. La ville s'éveille peu à peu.
A l'un des arrêts, un grand roux aux cheveux bouclés, une ounchanka verte vissée sur le crâne monte à bord, suivis de près par un brun d'une taille inférieure, mais trapu et son bonnet bleu aux bordures rouges à la main. La moue désabusée du blond se volatilise alors presque instantanément. Kenny ne peut s'empêcher de sourire en les voyant prendre place à ses côtés. Ses amis d'enfance qui fréquentent le même lycée que lui sont l'une des rares sources de bonheur qui lui sont encore accordées. Une véritable bouffée d'oxygène.
« Putain mec ! Dommage que tu sois pas venu à la soirée de Token hier ! clame Stan, excité.
— Ouais. Désolé. J'pouvais pas.
— T'as encore fait la fermeture ? s'empresse de demander Kyle, coupant la parole à Stan.
— Affirmatif.
— Fais gaffe Kenny. J'ai l'impression que ton patron abuse de la situation et j'sais même pas s'il a le droit de te retenir aussi tard ! T'es même pas majeur.
— J'ai pas vraiment le choix, » dit-il en haussant les épaules, résigné mais le sourire aux lèvres.
L'autobus s'arrête à nouveau et un petit gros monte en insultant copieusement le chauffeur, le gratifiant de charmants noms d'oiseaux sous l'œil moqueur des trois comparses et du reste de l'assistance. Ses vêtements sont détrempés et dégoulinent d'eau boueuse, laissant dans l'allée des traînées de saleté.
« Quel bâtard, j'suis sûr qu'il a fait exprès ! » s'écrie Cartman en passant les mains sur ses habits qu'ils essuient ensuite allégrement sur les fauteuils où sont déjà assis certaines personnes.
Le chauffeur a surement dû rouler sciemment dans cette flaque au vu du sourire qui se profile au coin de ses lèvres que Kenny aperçoit furtivement dans le rétroviseur. Ce-dernier croise ensuite les bras sur le dossier en face de lui et dépose délicatement son menton au centre. Comme tous les matins depuis leur entrée au lycée, son attention se reporte sur quelque chose de bien plus attrayant à son goût. Un grand brun aux cheveux rasés sur le côté et plus longs sur le dessus qui lui retombent en quelques mèches ébouriffées devant les yeux. Il est élancé mais finement musclé. L'allure fière et la réplique facile. Un piercing spiral noir avec deux pointes orne sa lèvre inférieure du côté droit. Parfois des cocards ravagent sa belle gueule, mais il n'en reste pas moins séduisant si ce n'est plus encore.
Une véritable brute se cache sous ces traits graciles, mais Kenny sait que si l'on gratte le vernis en surface, il ne reste plus qu'un enfant blessé par la vie.
Comme lui.
Tandis que le blond choisit la voie de la résignation, le brun prend celle de la violence. Leurs manières d'encaisser les coups ne sont, tout simplement, pas les mêmes. L'un soupir. L'autre fracasse. Depuis tout petit déjà. Kenny ne peut s'empêcher de l'admirer. Lui n'hausse jamais le ton ni ne donne de coups alors que l'autre part généralement au quart de tour et ce même pour des broutilles.
« Putain Cartman ! Tu dégueulasses tout ! Fais gaffe ! »
Pas même les chamailleries de ses comparses ne viennent perturber ses rêveries. D'habitude, il ne se fait jamais prendre ou lorsque leur regard se croise, il fait mine de regarder dans le vide. Pourtant cette fois-ci, ses iris rencontrent ceux d'un bleu sombre, tirant presque vers le noir sans qu'il feigne de ne pas l'observer. Un frisson lui parcourt l'échine devant l'éclat inquiétant de ses yeux. Le contact dure à peine quelques secondes avant qu'un doigt d'honneur rageur ne vienne interférer dans son champ de vision, le ramenant sur terre.
« Oh ! Kenny ! Tu m'écoutes ?! »
Il décroche difficilement son regard de ce doigt qui lui est adressé pour la première fois depuis le début du lycée, se faisant secouer comme un prunier par Cartman. L'adolescent insolent se laisse finalement tomber sur un fauteuil à l'avant du véhicule. Encore chamboulé, Kenny se redresse et tourne le visage en direction de l'agitateur qui le bouscule et lui hurle dessus pour obtenir un peu d'attention.
« T'as raté la nouvelle du siècle hier soir ! T'es pas au courant ? »
Il arque un sourcil. Qu'a-t-il l'intention de lui annoncer ?
« Au courant de quoi ? » demande Kenny indifférent.
Eric bombe le torse, frappe quelques coups de poings sur sa poitrine dans un geste théâtral et tousse pour s'éclaircir la voix. Un large sourire fend ses joues comme satisfait à l'avance de la connerie qui allait sortir de sa bouche.
« Tucker est une tarlouze ! »
Sa voix porte loin dans le bus et un rire gras ne tarde pas à lui échapper. A cette annonce, les autres élèves se retournent vers lui et il ne peut s'empêcher de glousser encore plus fort sous l'œil incrédule de Kenny. Des messes basses commencent à s'échanger de part et d'autre du véhicule.
« Merde, ouais, c'est un pédé ! » confirme Stan avec énergie.
Cela explique donc la raison pour laquelle il semblait excité un peu plus tôt, mais Kyle ne lui avait pas laissé le loisir de l'en tenir informé.
« Ça va, vous n'allez pas en faire toute une histoire non plus, » essaie de temporiser ce-dernier.
Du coin de l'œil, le blond aperçoit Craig se ratatiner sur son fauteuil. Il ne voit plus que le pompon jaune de son bonnet péruvien dépasser.
Aucune réaction ? Etonnant…
« En plus d'être juif t'es aussi une lopette, Broflovski ?
— Ta gueule, gros lard ! »
Kenny, pensif, reste silencieux. Pour être une nouvelle, ça en est une de taille. C'était bien la dernière chose à laquelle il s'attendait. Tucker ? Gay ?
Faisant l'impasse sur les insultes de son ami, Cartman enchaîne à voix haute :
« D'ailleurs, c'est Kyle qu'est tombé sur Tucker qui faisait des trucs pas très nets avec un gars à la soirée ! »
L'attention des autres élèves est entièrement dirigée à son encontre comme des hyènes affamées de nouveaux ragots. Des petits rires discrets résonnent. Excédé, Craig bondit de son siège et se retourne vers la bande. Sans dire un seul mot, le blond braque alors son regard cristallin sur lui. L'expression de son visage est indescriptible, mais terriblement excitante.
« T'as un problème à régler Cartman ?! Viens me le dire en face, connard !
— Je préfère que tu restes loin de moi, j'ai pas envie d'avoir mal aux fesses parce que t'es incapable de contrôler tes pulsions d'homo.
— Répète un peu pour voir !
— Désolé Tucker, mais tu ne m'intéresses pas. Moi j'aime les vagins, pas les vieilles bites poilues.
— Non mais tu t'es regardé, pauv' con ? Quand bien même tu serais le dernier mec sur terre, les meufs elles voudraient pas de toi !
— Une chose est sûre, c'est qu'c'est pas toi qui sauverais l'humanité de l'extinction puisque t'es qu'une sale pédale. »
Provocateur, Cartman trône au milieu de la rangée du fond. Son regard condescendant et ses lèvres étirées en un sourire arrogant font enrager Craig qui serre les poings. Un adolescent aux cheveux hérissés lui agrippe la manche et essaie de le retenir. Inquiet, il lui murmure quelque chose que Kenny n'entend pas. D'un geste rageur, le grand brun se dégage de l'entrave et commence à avancer d'un pas déterminé en direction de Cartman qui ne cille pas.
Quel imbécile, il est vraiment allé trop loin. Il va se faire démolir...
Un coup de frein brutal ralentit sa progression. L'adolescent se rattrape de justesse à l'un des sièges, évitant de tomber en arrière. Cartman, quant à lui, n'a pas anticipé et se retrouve affalé en plein milieu de l'allée. Un sourire terrifiant se dessine sur le visage du brun qui est prêt à repartir à l'assaut. Seulement avant qu'il n'atteigne l'autre qui se redresse en pestant, le chauffeur du bus lui empoigne les épaules et le retourne face à lui.
« Y a pas de violence dans mon bus ! Je vais en référer à votre proviseur. Et si vous tenez tant que ça à vous foutre sur la gueule, la porte est grande ouverte, mais vous ferez le reste du trajet à pied, » vocifère-t-il.
Craig essaie de se défaire du contact, mais l'homme baraqué âgé d'une quarantaine d'années l'empêche de se mouvoir. Son regard sombre se reporte dans celui du jeune homme.
« Est-ce clair ? » demande-t-il menaçant, sa prise se resserrant sur ses épaules.
Énervé, l'adolescent détourne le regard. Frapper le conducteur ne ferait que lui apporter davantage de problème et ce n'est probablement pas ce qu'il désirait. La pression se relâche et l'homme retourne au volant tandis que Craig regagne sa place auprès de Tweek.
Une grimace de douleur déforme le visage de Cartman.
« Ça t'apprendra mon vieux ! » assène Kyle en levant les yeux au ciel.
Le reste du trajet se déroule dans le plus grand des calmes, l'intervention musclée du conducteur ayant freiné les ardeurs. Le menton de Kenny rejoint de nouveau ses bras croisés sur le dossier, rêveur. La personne qu'il pensait inaccessible depuis tout ce temps serait homosexuel ? Son cœur, blessé par des années de galères sentimentales, bat la chamade comme jamais auparavant. Peut-être aurait-il une chance ?
Ses sourcils se froncent sur ses yeux et il jette un coup d'œil furtif à Stan et Éric qui rigolent comme des idiots de leur connerie. Malheureusement, ce n'est pas demain la veille qu'il tiendra informé ces deux zouaves de son orientation sexuelle au vu de leur comportement d'aujourd'hui. Des fois, ils peuvent vraiment être les pires des raclures.
Le jugement de ses amis est ce qui importe le plus à Kenny. Par peur du rejet. Par peur de la solitude. Pendant de longues années, il a essayé de se cacher à lui-même sa nature quitte à souffrir et se forcer à avoir des relations avec l'autre sexe sous les encouragements de ses deux amis. Maintenant, il reconnait ce qu'il est sans pour autant être prêt à l'assumer. C'est si mal vu dans cette petite ville merdique du fin fond du Colorado… Pauvre et homosexuel. Quel combo !
Son regard blasé croise celui de Kyle qui lui sourit.
« Ce sont des crétins, on n'y peut rien, » confie-t-il en haussant les épaules.
Parfois Kyle lui donne l'impression de voir clair dans son jeu. D'ailleurs, il a plusieurs fois hésité à lui en faire part, le poids de ce secret lui pesant trop sur les épaules. Mais Kenny reste Kenny. Jamais personne ne sait réellement ce qui lui passe derrière la tête. Il ne se confie à personne et intériorise tout sans moufter puisque c'est ce qu'il a toujours fait…
Le bus s'arrête et les élèves descendent. Une fois dehors, le blond cherche des yeux le bonnet péruvien qu'il ne trouve pas. Sans montrer sa déception, il suit son groupe les mains dans les poches. L'heure d'aller en cours ne va pas tarder à arriver. Avant de rentrer dans la grande bâtisse, il taxe une clope à Stan. Première de la journée. Rien de meilleur. Ses paupières se ferment et il se délectent de la douce sensation qui emplit ses poumons.
Adossé à un muret, il plaisante avec ses amis, essayant d'oublier leur comportement abject. Seulement dans un recoin de son esprit ces paroles dévalorisantes tournent en boucle et refusent de partir. Merde ! Même quand Cartman le traite de pauvre ça n'a pas cet effet. Son rire est amer, mais comme à son habitude il ne montre rien. Puis plus le temps passe, plus il rumine les paroles et plus elles lui font du mal. Vexé, il écrase sa clope sans même la finir et la balance par terre. Il s'arrache de là et monte les quelques escaliers qui le séparent de l'entrée du bâtiment sans les attendre.
« Qu'est ce qui lui arrive ? demande Stan, perplexe.
— Je sais pas… lui répond Kyle.
— Pff, ça lui passera ! » peste Cartman.
Ce sont les dernières paroles qu'il entend avant de dépasser les grandes portes de l'entrée du lycée.
Seul et la haine au corps.
Quelle bande d'enfoirés.
J'espère que le premier chapitre vous a plu, n'hésitez pas à me déposer une review (je ne mords pas, promis), ça me permettra de voir si je suis sur la bonne voie et si mon histoire n'est pas trop nulle...
En plus, il se peut que je me décourage alors une petite piqure de boost est appréciée !
Bises, Farouche.
PS : Vous pouvez m'écrire une review négative, je suis ouverte à cela tant qu'elle est argumentée dans le respect.
