Bonjour à tous ! J'ai l'honneur de publier la première fic Suliet française sur ce site en espérant qu'elle vous plaira ! Enjoy :)

Je croise ton regard et je te souris. Je sais que celui-ci m'est destiné et en moi le doute s'installe.

Ces dernières années résonnent comme une parenthèse dans les méandres du temps. Cette alchimie merveilleuse qui nous a surpris tous les deux. Un bonheur éphémère auquel je n'osais même plus rêver et que la vie m'a accordé telle une seconde chance. Nous nous sommes laissés porter, jouissant de chaque instant comme le dernier. Car nous ne savons que trop bien à quel point la vie est fragile, le temps capricieux. Jamais dans d'autres bras je ne me suis sentie si vivante, si chérie. Et pourtant son ombre n'a cessé de planer sur notre béatitude.

Parfois, lorsque tu t'abandonnais corps et âme dans nos étreintes fiévreuses, je serrais les paupières à m'en faire mal, dans la crainte viscérale que ce soit son prénom qui franchisse tes lèvres. Ton amour pour elle coule dans tes veines. Un poison insidieux qui t'anéantit peu à peu. Et moi, naïvement, j'ai crû que tu pourrais l'oublier, que je pourrais la détrôner dans ton coeur. Son retour a marqué la fin de ce doux rêve dont j'ai peiné à m'éveiller. Car la réalité a un goût bien amer. Il a suffi que tu poses les yeux sur elle pour que je réalise que tout était terminé. Je t'ai perdu. Cette ère de mensonges est révolue.

Trois ans dans une époque qui n'était pas la nôtre, prétendant appartenir à une communauté dont nous n'avons jamais été membres, dissimulant ceux que nous sommes réellement, feintant d'être un couple heureux. Des imposteurs. Voilà ce que nous sommes devenus pour survivre en ce lieu hostile. Mon erreur a été d'y croire. Tu as fait de moi ta complice dans une nouvelle arnaque.

Ma déception a été si profonde et pourtant, je le savais. Je savais au fond de moi que pour rien au monde tu ne cesserais d'espérer la revoir. Alors c'est moi qui t'ai laissé partir James. J'aurais pu fuir de cette île avec toi et poursuivre ce simulacre dans la vie réelle comme nous aimions l'appeler. Mais je ne voulais plus me bercer d'illusion. Lorsque tu l'as regardée, j'ai soudainement compris les motivations de Jack. Par ce geste aux apparences nobles, il veut seulement faire taire cette indicible souffrance de la savoir tienne pour toujours. Si elle ne peut être à lui, de cette manière elle ne sera à personne. Egoïstement, j'ai pris son parti. Peu m'importait si des innocents perdaient la vie dans cette folle entreprise.

C'est la fin. Je croise ton regard et je te souris. Je sais que celui-ci m'est destiné et en moi le doute s'installe. Est-ce le regret que je lis dans tes yeux ? Moi, je ne regrette rien. J'ai pris de toi tout ce que je pouvais et c'était bien plus que je ne l'espérais. En retour, je t'ai tout donné et c'était sans doute bien plus que tu n'avais jamais reçu, mais malgré tout pas assez. Maintenant, il est temps de remettre les choses en ordre et ne plus souffrir.

Tout se passe vite. L'explosion salvatrice n'a pas lieu. Au lieu de cela, je me retrouve subitement enchaînée et entraînée vers cette cavité. Comme toujours, tu es là pour assurer mes arrières. Ta main agrippe fermement la mienne et tandis que tu tentes de me hisser à la surface, la force magnétique qui sommeillait paisiblement m'attire dans son antre. Je ne peux réprimer mes larmes sous cette horrible sensation d'être écartelée. La réalité me frappe brutalement. Tu ne peux rien pour moi. Je vais mourir.

Le regard désespéré, telle une supplique, tu m'intimes de ne pas abandonner. Tu me connais si bien. Je voudrais tenir ta main encore un instant, t'entendre me dire que tu m'aimes une dernière fois. Mais c'est trop tard. J'aperçois le pylône prêt à céder au-dessus de toi et dans un dernier regard, je lâche ta main. Alors que je m'enfonce dans les ténèbres, ton hurlement de détresse me déchire le coeur. J'avais tort.

Je reprends lentement connaissance au fond de mon tombeau. Mes paupières papillonnent un instant. Je ne pensais plus les rouvrir un jour. Ma vue s'accommode lentement à l'obscurité. Seule une faible lueur me parvient à travers le conduit obstrué. Alors qu'une quinte de toux m'assaille, je goûte le sang qui afflue dans ma bouche. Le goût de la mort. « Vivre ensemble ou mourir seul ! » Le Destin est d'une ironie cruelle ! Je vais mourir seule pour que vous puissiez enfin vivre ensemble. De violents sanglots secouent mon corps meurtri. Je tente de revêtir, pour la dernière fois, le masque de l'indifférence, pensant que peut-être... peut-être qu'elle aussi fermera les yeux dans la crainte que tu ne gémisses mon prénom.

Après tout, ce n'est pas son regard que tu as soutenu alors que nous pensions tous vivre nos derniers instants. C'était le mien. Nous unissant par un lien invisible et inaltérable. Ce n'est pas elle que tu as tenté de sauver au risque de ta propre vie. C'était moi et je l'emporterai avec moi dans la mort.

Finalement, ce n'est peut-être pas le Destin qui m'a conduit dans ce trou, mais mes propres incertitudes, mon propre entêtement. Je regrette tant de ne pas avoir crû en toi, en nous. Toi qui a été de mon côté jusqu'à la fin. La plus belle preuve d'amour que tu pouvais m'offrir. Si seulement je l'avais réalisé plus tôt !

Silencieusement, j'implore la Faucheuse de venir me cueillir. Tes mugissements de désespoir me sont insoutenables et mon coeur se serre sous le poids de la culpabilité. Coincée sous cet amas métallique, je me sens impuissante, plus prisonnière que jamais. Et alors que je cherche du regard une improbable issue à mon sort, mes yeux se posent sur un moyen inespéré. La tête nucléaire gît quelques centimètres plus loin, attendant de moi un acte de foi.

Alors c'est pour toi, James, pour que tu n'aies plus à souffrir, que je vais achever la tâche que nous nous sommes fixées.

***

A suivre...