Bonjour tout le monde !
Voilà une nouvelle traduction d'une fiction de Maiden Of The Moon, cette fois-ci à chapitres. J'espère qu'elle vous plaira ^-^
[ Pour les lecteurs de Phantom High School Host Club, je m'excuse du retard que j'ai pris dans la traduction ( le dernier chapitre en anglais est déjà sorti ), mais j'ai eu un décès grave dans ma famille, et je n'ai donc pas pu accéder aussi souvent que d'habitude à l'ordinateur. En tout cas, la traduction arrive ~ ]
Retour à cette histoire…
Disclaimer : Je ne possède aucun des personnages de Kuroshitsuji, et je ne fais que traduire la fiction de Maiden Of The Moon.
Lien vers la fiction originale : http(:/)www(.)fanfiction(.)net/s/6620059/1/Bicentennial
PS : Une vidéo magnifique a été réalisée à propos de cette fiction, par la talentueuse Neneko, la Doujinka de 'Phobia'. Voici le lien ( Mais je vous conseille de lire ce premier chapitre avant de regarder la vidéo ^-^ :
http(:/)www(.)youtube(.)com/watch?v=nyOSFBY30ZQ [ Enlevez les parenthèses pour accéder à la vidéo ]
Bonne lecture !
Bicentennial :
8h 43
« Bonjour, petit garçon. Es-tu perdu ? »
La voix est douce et basse, comme un ronronnement, et s'accorde parfaitement avec le sourire 'à la Chat du Cheshire' qui se dessine sur le visage de l'inconnu qui parle. Portant un jean serré, un tee-shirt savamment déchiré, et une veste en cuir ouverte, l'attirant jeune homme tend sa main à l'enfant en question ; les mitaines recouvrant ses mains sont aussi noires que ses cheveux, sa veste, et ses ongles. La couleur sombre intensifie la blancheur d'albâtre de sa peau, lui donnant un air presque fantomatique.
Malgré son apparente jeunesse, le garçon à qui l'homme vient de parler est un superbe spécimen. Fin et élégant, l'enfant porte une veste à boutons, d'un vibrant bleu azur, et des bottes en cuir assorties à ses attaches noires. Au son de la voix du jeune homme, il lève son regard de ses genoux roses pâles ; il s'est assis sur le bord d'une fontaine en marbre, désignée pour être élégante, mais dans le contexte, ce n'est qu'une distraction tapageuse. Elle ne sert que de rendez-vous pour les meetings ; une tache blanche, une tache de 'rien', apaisante, tranchant sur le patchwork de couleurs, de sons, de lumières, et de gens. Alors que le garçon scrute celui qui parle, un jet de liquide bleu artificiel est lancé vers le ciel, et l'odeur de chlore se répand dans l'air frais du mois de Janvier. Par-dessus le hissement d'une machinerie cachée, de petites mélodies peuvent être entendues, sortant de la bouche de chanteurs masqués.
« Si je le suis, » réplique le garçon de treize ans d'une voix égale, enlevant une poussière de son habit immaculé, « me ramènera-tu à la maison ? »
Le plus âgé a un petit rire, ses yeux de biche flashant un éclair vermillon quand le soleil apparait de derrière les nuages. « Ne devrais-tu pas au moins attendre qu'un étranger t'offre une sucrerie avant de faire une telle proposition ? » taquine-t-il, ses doigts s'enroulant possessivement autour de la petite main qui s'est glissée dans la sienne, aussi minuscule et apparemment aussi fragile qu'une main de poupée. L'homme tire gentiment, et l'enfant se retrouve debout. « On pourrait penser que tu es désespéré. »
Le garçon grogne, levant son regard; par-dessous la courbe appuyée de ses cils sombres, ses iris d'un bleu cobalt brillent de maturité.. Comme un saphir, ancien et séduisant.
« J'ai à l'esprit de meilleurs délices à déguster, » répond il suggestivement, d'un ton séducteur, qu'aucun enfant de son âge ne devrait savoir mettre en pratique, et encore moins utiliser de façon aussi douée. Mais son sourire se radoucit, perdant son air dépravé pour prendre une allure de pur contentement.
« Mais je ne veux pas que l'on pense que je suis désespéré, donc je crois bien que tu dois maintenant m'acheter une sucrerie. »
9h 17
« Ou voudrais-tu aller d'abord, Ciel ? »
Cela ne devrait pas le faire rougir, vraiment pas, ce simple petit assemblage de mots. Deux syllabes : Normales, familières, et ' tout simplement naturelles ', comme l'autre pourrait dire, avec son regard sournois. Simplement naturel, aujourd'hui et maintenant. Simplement naturel, quand on voyait l'évolution de leur relation. Mais alors même que Ciel avait été celui qui avait demandé à ce que soit utilisé son prénom - Tu attires bien trop l'attention sur nous, en m'appelant par ce titre archaïque, Sebastian ! -, le courant électrique qui le parcourt chaque fois qu'il l'entend ne semble pas faiblir ; comme un éclair, l'intimité qui ressort de ces quelques gestes d'affection verbale inattendus envoie un feu d'artifice de ses oreilles à ses poumons et son cœur. A chaque fois que son prénom tombe de ces lèvres recourbées, brillantes, Ciel se sent fondre et rayonner de l'intérieur.
Et il est presque certain que c'est la même chose à l'extérieur.
Un peu gêné ( mais toujours heureux, en secret ), le garçon cache la partie inférieure de son visage - nez, sourire, la couleur rosée de ses joues - derrière le col de sa veste, et parvient à faire sortir un prétentieux, « Je n'ai pas de préférence particulière. »
Sebastian a un petit rire.
« Comme tu veux. »
La main qui entoure la sienne se resserre un peu, comme pour le rassurer. Comme pour dire qu'il ressent tout cela, lui aussi.
Ciel a déjà très chaud à ce moment là, son petit corps étant habillé de laine, et son cœur battant à toute vitesse, mais il utilise l'excuse du temps froid pour se rapprocher un peu. Pour mettre son bras autour de celui de Sebastian. Et il ne peut pas s'empêcher d'imaginer - alors qu'ils passent à coté de couples naïfs, d'hommes mariés, de femmes fiancées, et d'adolescents ricanant nerveusement - si ils ont l'air d'être en couple, eux aussi.
10h 34
En vérité, ils connaissent ce parc d'attraction comme leur poche. Ou la poche de l'autre, pourrait-on dire. Ils connaissent bien la popularité de chaque attraction, quand tel manège commence et finit, la longueur de chaque chemin, quel stand vend la meilleure nourriture… Ils n'ont aucune raison de se balader sans but, suivant des chemins quelconques, s'arrêtant à des intersections pour vérifier les directions.
Mais ils le font quand même, parce que cela occupe le temps qu'il ont.
Après avoir fait leur premier tour, marchant dans ce lieu grouillant de visiteurs, parfumé au pop-corn, Sebastian s'arrête près d'un lampadaire, décoré de fleurs pour les vacances. Sous des rubans en velours bon marché, un nombre ridicule de flèches apparait, pointant à gauche, à droite, par ici, par là - comme au Pays des Merveilles.
« Hé bien ? » demande Sebastian, baissant les yeux vers l'enfant qui se trouve à coté de lui. « Quel manège voudrais-tu faire ? »
Ciel semble pensif, et lui rend son regard…. Puis s'autorise à laisser ses yeux glisser vers les rubans pourpres accroché au lampadaire qui se trouve devant eux. Il penche sa tête, ses lèvres se plissent, son regard va d'avant en arrière, d'avant en arrière, parcourant les lettres bien formées qui pointent vers manèges et montagnes russes, jeux d'arcade et stands de nourriture.
Une idée fait se soulever les coins de sa bouche.
Avec un petit sourire révélateur, et en tirant sur la manche de Sebastian, le garçon guide son compagnon vers les toilettes, sa main libre commençant à déboutonner son manteau.
11h 02
« J'aimerais acheter le rouge, s'il vous plait. »
« Bien sur, » s'exclame le vendeur, et sépare avec adresse le ballon rouge de son bâton. Tout aussi amicale, une blonde enthousiaste ( qui, d'après son âge, est probablement au lycée ) fait un sourire de grande sœur à Ciel, pendant que Sebastian sort son porte monnaie.
« N'es-tu pas un adorable petit garçon ? », babille-t-elle en souriant, et son cœur fond encore plus quand Ciel se cache instinctivement derrière Sebastian, observant l'étrangère par-dessous le coude de son compagnon.
« Ciel, enfin , quel âge as-tu, cinq ans ? » le réprimande Sebastian - d'un ton à la fois affectueux et exaspéré - alors que lui et la fille font leur échange. « Tu n'as pas besoin d'être aussi malpoli. »
« Oh, il n'y a pas de problèmes, ne vous inquiétez pas, » rit l'employée, regardant toujours Ciel avec une expression énamourée. « Il est juste timide, le petit bout de chou. N'est-ce pas, petit ? »
Ciel la fixe, mais ne se donne pas la peine de répondre verbalement à la question. La fille ne semble pas le moins du monde perturbée, allant même jusqu'à lui tapoter la tête ( quelle insolence !) avant de revenir vers Sebastian. « Est-il votre fils ? »
Et quand la jolie jeune fille regarde Sebastian d'un air signifiant que ça ne la dérangerait pas, Ciel décide qu'il en a assez. Il est peut-être habitué à ces situations, mais cela ne veut pas dire qu'il les apprécie ; comme réplique, il se jette sur Sebastian, l'entourant de ses bras possessifs et de ses jambes fines… Et une fois qu'il a eu l'attention de la fille, Ciel se met sur la pointe des pieds et fait entrer sa langue dans la bouche qui s'ouvre pour donner une réponse.
« Ah-! »
Le baiser est bref, mais sans aucun doute sexuel ; Ciel se recule avec un sourire et un coup de langue, prenant son ballon des mains figées de Sebastian. « Merci, Papa, » chantonne-t-il ensuite, puis s'enfuit joyeusement, heureux de laisser son domestique à la dure tâche d'enlever l'expression de pur dégout qui s'est fixée sur le visage blanc de la vendeuse.
Quand Sebastian le rattrape, une minute plus tard, il ne partage pas l'amusement de son compagnon.
« Tu vas nous faire arrêter, » le gronde-t-il, alors même qu'il entrelace une nouvelle fois ses doigts avec ceux de Ciel.
« Laisserais-tu vraiment la police se mettre entre nous ? » réplique l'enfant avec un froncement de sourcils, pas dérangé le moins du monde par l'irritation de son compagnon. A la place, il regarde son nouveau jouet flotter et voler dans les airs… Au moins jusqu'à ce que la main de Sebastian prenne son menton, et au lieu d'un ballon rond et pourpre, il se retrouve face à deux iris eux aussi ronds et pourpres.
« Non, » murmure Sebastian, « Je ne laisserais pas faire cela. Mais je ne laisserais pas non plus une simple mortelle se mettre entre nous. »
…. Touché.
Le garçon ne parle pas. Il ne grommelle pas, ne s'excuse pas, n'a même pas l'air coupable. Mais le démon peut dire, par la façon dont il change son pied d'appui, que le message est passé.
Il continue à marcher sans mentionner l'accident une nouvelle fois, remarquant à peine le ballon rouge se libérer et s'envoler au loin.
11h 47
N'importe quoi pour passer le temps.
« Est-ce que tu as froid aux mains ? » demande Sebastian, alors qu'ils attendent parmi une bruyante foule de touristes, alignés comme des fourmis, et serrés comme des sardines entre les barrières et les portails. L'enfant - pris dans la foule - à l'air un instant surpris par la question, et prêt à demander à son compagnon pourquoi est-ce qu'il penserait cela… Mais c'est alors que Ciel réalise qu'il a commencé à danser d'un pied sur l'autre et à se frotter les mains, comme tous les autres garçons et filles qui se sont réunis autour d'eux.
Quel caméléon.
« Voilà », dit le plus âgé avec un petit rire, attrapant doucement les mains de son compagnon pour les entourer des siennes. Puis il glisse les deux mains enlacées dans les poches de sa veste ; des poches qui semblent maintenant être deux petits coins de paradis faits de chaleur et de cuir. A travers le tissus usé et fin qui tapisse l'intérieur du manteau, les jointures de Ciel caressent des formes d'os et de chair - des touchers tentateurs se posant sur une hanche, un muscle, leur chaleur délicieusement familière au satin d'une peau sensible.
« Hé bien voilà. Cela semble marcher plutôt bien, » remarque Sebastian. Et le garçon peut entendre le rire sous entendu, qui vibre sous le velours de sa voix… peut presque le sentir, comme si c'était quelque chose d'aussi tangible que le sang coulant pour colorer les pommettes de ses joues. « Comment est-le reste de ton corps ? Toujours aussi frigorifié ? Dois-je te faire un câlin ? »
La suggestion est innocente ( et faite pour le paraître ), mais il y a une promesse démoniaque cachées derrière cette proposition inoffensive. Et c'est pour cette raison que les joues de Ciel passent de rouges à cramoisies, son esprit remuant des pensées, des souvenirs, des souhaits, tous plus scandaleux les uns que les autres.
Mais ils sont presque arrivés au bout de la file, maintenant, donc il ne fait que grommeler. « Cela me suffit, merci. »
11h 53
« Donc rappelle toi bien, » annonce Ciel, ses mots à peine audibles par-dessus le crissement suraigu de la barre protectrice du wagon de montagne russe. Avec un thump décidé, la barre en question retombe comme une guillotine, entourant les passagers dans une embrassade sécuritaire ( ou du moins, 'paraissant' ). Au même moment, les personnes installées dans les wagons commencent à être secouées et à vibrer au même rythme que la machine invisible actionnant l'engin. « Les montagnes russes sont plus drôles si tu gardes tes mains en l'air. »
En exemple, le garçon lève ses bras : fins, délicats, et parfaitement verticaux ; puis, il lance un regard appuyé vers Sebastian. Le regard devient un froncement de sourcils quand son compagnon ne l'imite pas.
« Si je puis me permettre, » rétorque Sebastian à la place, l'air étrangement hésitant, alors que ses doigts entourent la barre reposant sur leur ventre. « Il est bien plus prudent de- »
Une lèvre inférieure est poussée en avant, le jeune visage prenant inintentionellement une moue boudeuse ; et rien que cette expression fait dérailler le train des pensées de Sebastian. Il a perdu la bataille bien avant que l'ordre de Ciel ne résonne dans l'air… Mais tout de même, il parvient à résister jusqu'à ce que le garçon s'exclame, « Je t'ordonne de lever les bras ! »
Leur wagon coloré a un grognement métallique, se penchant avec hésitation vers l'avant. Sebastian soupire, sourit, puis obéit.
« Yes, my Lord ».
12h 29
L'affamé mange n'importe quoi, même de la nourriture purement industrielle. Et il n'y a surement rien de plus « industriel » que les épis de mais tournant sur les kiosques des vendeurs installés dans la rue - tournant et tournant et tournant, comme des hamsters sur une roue… et, qui sait ; qui pourraient très bien être entrés dans leur composition. Mais même, cela ne dérangerait pas Ciel ; après tout, il a eu de bien pires repas.
« Je me demandais, » dit-il d'un air songeur, alors qu'il fait glisser la nourriture dorée dans sa bouche, la friture recouverte par des couches et des couches de beurre chaud. Sa langue en lèche le bout ; il préfère quand l'extérieur est un peu moelleux. « Pourquoi les roues des stands de ces vendeurs sont-elles aussi grinçantes ? Ces trucs dégoulinent littéralement d'huile - pourquoi est-ce que cette huile ne pourrait pas glisser et lubrifier les roues ? … Sebastian ? »
Il tourne la tête dans la direction de son silencieux compagnon, assis à coté de lui sur le banc. Ciel considère à moitié le rappeler à l'ordre, mais réalise rapidement que ce serait inutile ; si Sebastian avait effectivement entendu son papotage, il n'avait probablement retenu que le mot 'lubrifier.' Ciel est depuis bien longtemps familier avec l'éclat animal qui luit dans les yeux pourpres qui le fixent pendant qu'il mange. C'est un regard si douloureusement affamé, que l'enfant ne peut s'empêcher de minauder et de laisser s'échapper un petit rire, enlevant l'épis de maïs de sa bouche avec un pop mouillé, l'agitant entre lui et son majordome.
« Je m'excuse, est-ce que tu voulais y gouter ? » le taquine le plus jeune, sa langue fine sortant caresser les coins de son sourire moqueur. « Je serais plus qu'heureux de partager. Comme tu me dis toujours, il faut donner pour recevoir… »
Il lèche l'épis sur toute sa longueur une fois de plus, sa petite poitrine douloureuse à force de retenir son rire, alors qu'il regarde les rouages de l'esprit immoral de Sebastian tourner …. Un peu comme les roues grinçantes de ce stand ambulant. Glaces, sucettes, bananes - recouvertes de chocolat, ou d'autre douceur -, glaces à l'eau, et ( évidement ), glaces à la crème, canes en sucre, sucres d'orge, Toblerone, et maintenant…
« Tu n'est plus jamais autorisé à manger des épis de maïs. » annonce Sebastian, sa voix de velours rendue un peu rauque par le désir, alors qu'il réajuste sa posture sur le banc. Comme si il pouvait empêcher Ciel de remarquer qu'il s'était indubitablement penché vers lui ( Difficile ). « Ils sont mauvais pour ta santé et la mienne. »
« Oh, seigneur. Est-ce que tu ne serais pas un peu… pâlot ? » demande Ciel, son ton aussi moqueur et innocent que son regard écarquillé, exagérément inquiet. Il suce le bout de l'épis pendant encore quelques secondes ; le beurre commence à fondre, révélant un bout rose qui pousse l'enfant à se dire, lui aussi, que oui, les épis de maïs devraient vraiment être bannis. Mais en même temps, son sourire s'élargit quand Sebastian semble s'étouffer sur un grognement. « Tu as vraiment l'air bizarre. Est-ce que tu as besoin d'aller aux toilettes ? »
Le plus âgé dirige vers son pupille un regard clairement désapprobateur. Cela aurait cependant été plus effectif, pense Ciel, si les joues de son majordome n'avaient pris une teinte aussi rouge que celle du ballon maintenant envolé.
« Je t'emmènerais avec moi, » réplique Sebastian, et ce n'est pas tant une menace qu'une promesse. Ou peut-être pas tant une promesse qu'une menace. L'enfant n'est plus vraiment sûr, mais cela ne l'empêche pas d'afficher un grand sourire.
« Oh, je saurais me débrouiller seul pendant une minute ou deux, » réplique-t-il d'un ton sucré, léchant une goutte de beurre déposée sur un petit doigt. « Et je n'ai pas besoin d'aller aux toilettes pour l'instant, merci. »
Un autre bruit étouffé de léchage, un autre gémissement étranglé.
« … tu peux vraiment être un sale gosse parfois, tu le sais ? » dit Sebastian d'une voix tendue, et a l'air à la fois frustré et amusé lorsque son maitre ( faussement vexé ), se lève comme pour partir à grands pas… mais décide en fait de se laisser tomber sur les genoux de son majordome, se rajustant, se tortillant, se frottant contre lui tout en faisant entrer et sortir son déjeuner diabolique de sa petite bouche pécheresse.
Autour de l'épis de maïs, les lèvres de Ciel se recourbent en un sourire tordu.
« Je sais. »
13h 04
Franchement, c'était plutôt embarrassant, de se faire prendre sur le fait aussi souvent…
« Vas-y ! Vas-y, Wild Earl, tu peux- Sebastian ? » Ses joues rendues rouges par l'excitation et la morsure du vent hivernal, le maître enthousiaste de Sebastian détache son regard des costumes colorés et des actes mélodramatiques des personnes présentes sur scène, pour fixer son majordome, une expression inquiète sur le visage. « Tu ne t'amuses pas ? »
La réponse du démon est un sourire affectueux, l'arc formé par ses lèvres cependant interrompu par ses mains croisées. Il réajuste son menton sur la cambrure de ses paumes, le coude posé sur son genou, et hoche de la tête.
« Je passe un très bon moment, » rassure-t-il à voix haute, et quand Ciel est bien convaincu de cela ( ou plutôt, quand il ne peut plus ignorer l'action qui se déroule sur la scène ), Sebastian recommence à regarder son spectacle favori : des yeux bleus marine, brillants, des bras fins agités en tous sens, une voix mélodieuse rendue rauque à force de crier, de s'exclamer, et de rire….
« Non, imbécile ! Est-ce que tu es sourd ? Attrape le - attrape le - oui ! Allez, allez, allez ! »
Souvent, il est difficile de se souvenir que Ciel Phantomhive est un enfant. Mais, dans des moments comme celui-ci, Sebastian ne peut s'empêcher de se demander comment oublier pareille chose.
« Yeah ! Wild Earl a gagné ! »
14h 19
Ciel n'a pas de quoi avoir peur, bien sur. Il connait son chemin parmi le parc, sait comment appeler son domestique, et sait que ( si le pire devait arriver ), il n'aurait qu'à dire, « Je suis ici. »
Mais quand il se retourne et s'aperçoit que Sebastian n'est plus derrière lui - que la foule d'inconnus quittant la zone l'avait caché à sa vue -, la première réaction de l'enfant est d'avoir peur. Une panique pure, qui semble le ronger comme de l'acide. Et, en vérité, il ne sait pas vraiment pourquoi. Il peut se débrouiller tout seul, après tout - cela fait ( littéralement ) des dizaines d'années qu'il est devenu complètement indépendant ; Ciel est fier de savoir que les jours durant lesquels il était faible et pathétique sont depuis bien longtemps derrière lui.
Pourquoi est-ce que Sebastian n'était pas derrière lui ?
A sa gauche et à sa droite, un océan d'amis, de familles qui se déverse ; il bouge en rythme avec la foule, mais ne part pas de l'endroit ou il est ( Cet ilot de sécurité ). Il sera retrouvé plus vite, il sait cela, si il reste ici. Donc il se prépare à ne faire que ça ; enfouir ses poings dans ses poches, et son esprit au fin fond de ses pensées, mordillant sa lèvre inférieure tout en attendant. Seul. Ce qui ne devrait pas le déranger plus que ça - non, vraiment. Que pourrait-il arriver d'horrible, en restant seul ? Seul sous la lumière dorée des décorations, sous les bannières, les rubans qui flottent au vent, à coté d'inconnus au visage caché sous des masques de carnaval : familiers, sans regard, parcequ'il sont des acteurs, des acteurs, des acteurs-
Ciel sursaute, sa gorge se resserrant autour d'un cri lorsque quelqu'un attrape son poignet avec vitesse. Mais quand il se retourne pour se libérer, sa main libre l'aidant, il réalise soudainement que les masques ne sont pas les seules choses familières. Il connait ce toucher, cette odeur, cette chaleur mieux que n'importe quoi d'autre au monde….
« Te voilà, » soupire Sebastian, et ses épaules s'affaissent comme si un poids venait de s'envoler. C'est une sensation qui n'est pas inconnue à Ciel, puisqu'il ressent exactement la même chose… Même si lui, bien sur, a une réputation à tenir, et cache donc son visage avant que son majordome n'ait eu la chance de remarquer l'expression soulagée qui a pris ses traits en otages. Mais pourtant, Sebastian peut surement la ressentir - ressentir ces yeux larmoyants, et autres -, car la cachette de Ciel se trouve être le tee shirt du démon.
« Je m'excuse d'avoir perdu ta trace - certains de ces enfants sont de vicieux bousculeurs. »
Le démon est parcouru d'un petit frisson, comme revivant un mauvais souvenir ; Ciel grommelle, le son étouffé par le tissu du haut de son compagnon.
« Tu es vraiment idiot, d'avoir l'air si anxieux, » grogne-t-il ensuite, alors même que ses doigts tremblants viennent s'enrouler autour du tissu noir. Un reniflement ; une toux humide. Le voyant se tortiller, Sebastian ne peut s'empêcher de sourire; la main qui n'est pas posée sur l'épaule tremblante de Ciel vient reposer sur le sommet doux de sa tête. Le petit hypocrite… « Tu l'as déjà dit. De par notre Contrat, tu sais toujours où je suis. Comment je me sens. »
C'est un rappel, et pas uniquement adressé au majordome.
« En effet, » acquiesce Sebastian, ses doigts bougeant à nouveau. Cette fois-ci, les doigts minces viennent soutenir le menton de Ciel ; d'une touche légère, il relève le visage de son maitre, et pose un baiser aérien sur sa tempe. « Mais ce n'est pas parceque je le sais, que je ne m'inquiète pas. »
Pendant un moment, l'enfant ne dit rien.
Puis, marmonnant quelque chose qui ressemble étrangement à « idiot », il tourne les talons et s'en va…. S'accrochant fermement à la main de Sebastian.
15h 57
Sebastian a vécu depuis beaucoup plus longtemps que l'on pourrait imaginer. L'humanité a toujours fait trop confiance aux apparences, bien sur, mais même ses pairs démons n'arrivent souvent pas à deviner son âge véritable. Il n'existe pas depuis des dizaines, des centaines d'années, ou même un millénaire - il est plus âgé que cela. Il serait plus simple de le considérer comme hors du temps.
Et pourtant - même après les milliers et les milliers d'années qu'il a vécues, même après les milliers et les milliers de choses qu'il a vues - Sebastian ne pense pas qu'il ait jamais vu quelque chose qui le fasse autant rire qu'à présent.
« Est-ce que tu vas la fermer ? » s'exclame Ciel, ses joues d'un rouge soutenu, tout en enlevant le bonnet bleu de sa tête. Dans son poing tremblant, les yeux en relief du bonnet tremblent et tressautent, regardant Sebastian s'écrouler contre la porte. « Ce n'est pas si drôle que ça ! »
La perte du spectacle ne fait qu'exacerber la situation ; Sebastian l'encourage moqueusement de sa main, alors qu'il se penche en avant, tellement amusé que cela lui ferait mal.
« N-non-non-non, » dit le démon en respirant avec peine - bien qu'il ne cesse de s'interrompre avec de petits ricanements. « Pour l'amour de Satan, Ciel… R-Remet ça sur ta tête, c'était vraiment trop adorab-ble-bahaha…! »
L'enfant continue de le fixer d'un regard meurtrier, de derrière la collection des bonnets de mascottes, chacun d'eux créé pour ressembler à un personnage de dessin animé célèbre. C'était un choix stylistique auquel Ciel n'avait pas vraiment prêté attention quand il avait posé ses yeux pour la première fois sur le bonnet ; il avait juste pensé que cette couleur bleue foncée était jolie. Et s'était dit qu'il devait tenir bien chaud. Et il n'avait pas pensé que Sebastian serait en train de regarder dans sa direction, quand il s'était penché derrière les mannequins en plastique pour le mettre sur sa tête. Mais, bien sur, il ne pouvait rien cacher à son domestique….
« Tu ressemble à l'Undertaker. » persiffle Ciel, tirant avec colère sur les yeux décoratifs du bonnet. Mais il réalise alors que cela fait partie du problème ; il jette ainsi le bonnet sur l'étagère, parmi ses frères et sœurs, heureux de le laisser moisir derrière le sigle 'Sesame Street'. * « Laisse tomber ! Je jure que je ne mettrais plus jamais de chapeau.. »
« Oh, si, tu en mettras …! » corrige Sebastian, toujours en train de ricanner comme un dément, tout en se redressant difficilement, ses mains crispées sur son estomac comme si quelqu'un venait de le frapper. ( Ce qui serait une bonne idée, maintenant que Ciel y pense.) « Nous allons acheter ça. Et tu le porteras dimanche prochain. »
« Non, pas question. » l'informe l'enfant, croisant fermement ses bras sur sa poitrine, et jetant un regard furieux à Sebastian, alors que celui-ci prend le bonnet dans ses mains. Des larmes de rire ont donné un éclat particulier à ses yeux ; Ciel pourrait presque voir son reflet dedans. « Même si tu l'achètes, je ne le porterais jamais. »
« Tu as dit la même chose à propos des oreilles de chat, » lui rappelle Sebastian - à deux doigts de chantonner -, alors qu'il se dirige presque en dansant vers la caisse, souriant d'une oreille percée à l'autre. « Si tu te rappelles bien. »
Et Ciel se rappelle. Il se rappelle aussi ce moyen très… passionné …. que Sebastian avait utilisé pour le pousser à porter les accessoires absurdes. Bien qu'il n'ait pas supplié, le démon avait rampé à quatre pattes devant lui… Et, en entendant les ronronnements joyeux qui sortaient de sa bouche, Ciel s'était dit que peut être - juste peut être -, que ce ne serait pas si mal de rendre Sebastian heureux de temps en temps…
Porte monnaie sorti et achat emballé, le démon a un sourire triomphant, savourant sa victoire.
Mais c'est alors qu'il entend le petit ting d'un second achat.
« Hey, Sebastian, » roucoule Ciel quand son domestique baisse les yeux vers lui, son regard chargé de curiosité. « Est-ce que tu as vu qu'il avaient un bonnet Elmo pour aller avec celui de Cookie Monster ? »
Il a un grand sourire, tout en soulevant un bonnet rouge tout aussi poilu, et partageant les mêmes yeux en forme de balles de ping-pong. La vengeance est un plat qui se mange froid, après tout. « Je pense que ça ira merveilleusement bien avec tes yeux. Et maintenant, nous seront accordés l'un à l'autre, dimanche prochain. »
Se dressant sur la pointe des orteils, le garçon remercie poliment le vendeur ébahi, et reprend sa monnaie et son sac en plastique. Et Sebastian, malgré son dégout à l'idée de porter une telle monstruosité sur sa tête, ne peut s'empêcher d'exhiber un autre sourire, un peu plus doux que les précédents.
« Comme l'on pourrait s'y attendre de la part du jeune maitre, », rit-il, et les deux échangent leurs achats tout en sortant de la boutique enluminée.
16h 32
Il nous reste encore du temps, avait dit Sebastian.
Un halètement, un grognement. Sur les carreaux froids du mur, un genou s'appuie et glisse, maintenu au dessus du rouleau de papier toilettes en métal. Après chaque poussée qu i atteint son but, le genou en question tremble et se convulse, faisant grincer le rouleau de métal et tinter la barre qui le traverse. Sur le coté opposé de la cabine étroite et surchauffée, une seconde jambe est pressée contre une parois en plastique. Tout comme le garçon auquel elle appartient, la jambe glisse et frotte, gardant son équilibre uniquement grâce à un effort de volonté, aux frictions, et à la tension qui le parcourt, orteils repliés dans la botte qui s'accroche au mur vert pâle. Les ongles de Ciel font de même, incrustant de profondes marques dans la porte que ses paumes gardent fermée, son visage couvert de sueur roulant entre ses bras levés, alors qu'il tortille ses hanches ; des gémissements de plaisir sont couverts par les bruits de claquements que produit la porte, les gonds tremblants de façon rythmique, animale, désespérée.
Nous pourrions faire un tour sur ton manège préféré, si tu veux.
17h 09
« … il commence à se faire assez tard, n'est-ce pas ? » murmure Ciel, essayant de paraître nonchalant, tout en regardant à travers la vitre sale de leur cabine de grande roue ; vers la foule et les lumières du carnaval, brillant comme des étoiles multicolores dans le crépuscule. « L'imbécile va surement rentrer bientôt. »
Sebastian acquiesce, regardant son maitre regarder le monde. « Nous sommes probablement déjà en train de pousser notre chance, » ajoute-t-il entre ses dents, un petit froncement de sourcils assombrissant son visage dessiné à la perfection. « Tu sais ce qu'il pense de moi. Il sera très mécontent quand il réalisera ce que tu fais - et avec qui tu le fais -, quand il travaille. »
« Laisse le s'énerver, » grogne le jeune garçon, ses ongles s'allongeant de quelques millimètres, et ses mains se recourbant en poings. « Il ne peut pas faire grand-chose contre ça. Si il m'ordonne de rester à la maison, je te convoquerais là-bas. Si il m'ordonne de ne plus te voir, je fermerais les paupières. Ce n'est pas comme si j'avais besoin de mes yeux, de toute façon. » Il soupire, de façon hachée, reposant son visage fatigué contre le Plexiglas sale. « Je suis devenu très fort, pour ce qui est de trouver des failles dans les mots, Sebastian. Et il le sait. La seule façon dont il pourrait me contrôler les dimanches serait de m'emmener à l'église avec lui… mais dommage pour l'ancien, - je ne peux pas entrer dans ce fichu endroit. »
« En effet, vraiment dommage. Tu aurais fait un garçon de chœur si mignon. »
Ciel jette un regard mécontent à son majordome, sachant parfaitement qu'il avait seulement voulu lui remonter le moral, mais n'appréciant pas particulièrement ce genre d'humour. « Ne pense pas que le vieux fou n'a pas essayé, » il marmonne, et cela fait Sebastian se taire dans la seconde. « Il me force encore à m'habiller comme ça, de temps en temps… Si tu vois ce que je veux dire. »
Avec un lourd et triste soupir, le petit démon laisse sa voix se perdre, son regard se baisser. Des doigts aux ongles d'ébène tracent des dessins sur ses genoux, emprisonnés entre ses jambes serrées ; avec un petit flop, presque silencieux, Ciel repositionne sa tête - la laisse tomber sur l'épaule de Sebastian.
« Parfois… » avoue-t-il ensuite, sa voix réduite à un murmure rauque, se brisant entre les syllabes, « J'aimerais vraiment être un enfant perdu. » Le garçon offre un sourire abattu - laissant s'échapper un rire amer -, tout en se lovant plus près, fermant ses yeux et expirant lentement, son souffle calme et sucré. « Je veux que tu me ramènes à la maison. »
Cette petite phrase déchire le cœur de Sebastian ; le pur désespoir de cette confession laisse résonner son écho dans le soupir d'affirmation qui passe la barrière de ses lèvres. Bouche fermée sur un torrent d'émotions partagées, Sebastian enroule un bras possessif autour du corps fragile de son maitre - l'enserrant fermement, au plus près de lui, lovés dans la coquille parfumée de désespoir de leur cabine.
« Bientôt, », promet-il silencieusement, déposant un baiser papillon sur le front de l'enfant. « Nous allons bientôt rentrer à la maison, Ciel. »
Le trajet est relaxant et lent, mais se termine bien trop tôt.
17h 31
« Même heure, dimanche prochain ? »
« Bien sur. Oh attend, dimanche prochain est un retour de vacances… Retrouvons nous un peu plus tôt, d'accord ? A 7 heures ? »
« Comme tu veux, » ronronne Sebastian, et un sourire se dessine sur son visage parceque Ciel n'est pas le seul qui le veut. Comme beaucoup d'autres couples en train de se quitter, ils se tiennent les mains à coté de la fontaine kitsch - balançant leurs doigts enlacés d'avant en arrière, d'avant en arrière. C'est un geste idiot, aussi dépourvu de sens que stupide… mais Sebastian a appris à apprécier ce genre de frivolités, ces dernières années. Peut être qu'il est en train de s'adoucir. Ou peut être qu'il a tout simplement appris à chérir chaque moment qu'il passe avec Ciel. « Mais le parc n'ouvre pas avant 8 heures. »
« Je suis sur que l'on peut bien trouver un moyen de nous distraire d'ici là, » décrète le garçon, offrant à son majordome un sourire coquin et suggestif. « Par exemple, je pourrais porter mon nouveau bonnet. Cela te distraira jusqu'à ce que le parc ferme, j'en suis sur. »
« C'est ta faute, tu es trop mignon, » réplique Sebastian, caressant le nez de Ciel avec le sien, en un baiser d'eskimo. La température avait baissé avec le soleil ; maintenant, même la peau chaude comme l'enfer du démon est rongée par la glace. Son maitre frisonne…. Mais ce n'est pas qu'à cause du froid. « Fait attention sur le chemin du retour. Appelle moi si tu as besoin, et au diable ton maitre. »
« Oh, il y est déjà, » réplique négligemment l'enfant, du ton de celui qui est occupé par de plus importantes pensées. Des pensées qu'il - après une brève pause -, décide de partager.
« Sebastian, j'ai pensé à quelque chose, récemment. C'est-à-dire, depuis les cent dernières années, à peu prés. » Il hésite, comme si il attendait un signe pour continuer ; son compagnon le lui donne, avec un petit hochement de tête. « J'ai eu beaucoup de Contrats, jusqu'ici. J'ai eu toutes sortes de maitres. Et j'en suis venu à réaliser, que… en fait, je ne les traite pas comme tu m'as traité. C'est-à-dire que - même dans tes pires moments, tu avais toujours l'air de… de te soucier de moi. Parfois, je repense à ce moment, sur l'Ile, avant… que tout cela arrive… et la façon dont tu as agi à la fin. Ou plutôt, au moment que nous pensions être la fin. Je ne suis jamais aussi gentil. Jamais. Et je ne vois aucune raison de l'être. »
Ciel s'éclairci la gorge à l'aide d'une toux maladroite, leurs mains enlacées s'arrêtant de bouger. Sebastian, en retour, cligne des yeux, un peu étonné par cet impulsif et complètement inattendu monologue. Et pour être franc, il est aussi intrigué - à la fois par ce discours sorti de nulle part, et par la rougeur qui s'est étendue jusqu'à la gorge du jeune garçon : allant de son menton jusqu'au bout de ses oreilles.
« C'est alors que j'en suis venu à réaliser que… que même avant, tu ressentais quelque chose pour moi. Tu n'étais pas juste en train de faire semblant, comme je le fais… bref. Tu ressentais quelque chose pour moi, tout comme je ressentais quelque chose pour toi - quelque chose que je ne voulais pas nommer ou accepter. Et même après des dizaines d'années plus tard, même après que l'on ait commencé … hum, c'est-à-dire, ahem, seuls les idiots expliquent l'évidence, tu vois ? Cela serait une perte de temps d'expliquer ce que nous savons déjà, je pense. Mais… je ne sais pas, peut être que c'est parce que mon maitre nous a forcé à passer autant de temps loin de l'autre, mais… Mais j'ai pensé, que peut être - même si c'est stupide - que je pourrais te dire ce que je ressens.. Vu que je ne suis plus aussi souvent en ta présence pour te le montrer. »
Explications faites, oratoire fini, Ciel dégluti bruyamment-
Puis secoue furieusement la tête, son visage embarrassé tournant au rouge soutenu sous la lumière de la lune de Janvier. Il se reprend ; Il essaye encore. Les lèvre entrouvertes de l'enfant tremblent ( tout comme ses petits poings ), mais il ne semble pas pouvoir faire sortir les mots coincés dans l'arrière de sa gorge ; ses lèvres bougent silencieusement, et il commence à se sentir de plus en plus stupide.
Au milieu de tout cela, Sebastian a un petit rire. Le pauvre petit est en train d'essayer si dur…. « My Lord, vous n'avez pas à vous- »
« Ferme là, et laisse moi encore un moment ! » s'exclame Ciel, gigotant - comme à l'agonie -, tout en dansant d'un pied sur l'autre. « Je peux le faire. Je veux le faire. Je vais le faire. D'accord. Je … Je t'ai-….. -oh, et puis zut ! »
Un coup de vent, un tourbillon de plumes. Sebastian ne peut s'empêcher de sursauter, apparemment surpris quand il se rend soudainement compte qu'il est seul à coté de la fontaine. Enfin, ce n'est pas complètement vrai. Il y a toujours des touristes dans les environs, bien sur, mais son jeune maitre n'est visible nulle part. A sa place, un élégant corbeau noir s'est perché sur son épaule, sa tête couleur ébène penchée, et ses yeux ronds brillant. Avec un cri sec et un coup d'ailes, le corbeau se déplace vers la droite, son bec entrouvert à quelques centimètres de l'oreille attentive de Sebastian…
Un murmure résonne dans sa tête, timide mais sincère. Et ces trois mots font battre le cœur de Sebastian, ses nerfs parcourus d'électricité et de chaleur malgré le froid. Après sa déclaration mortifiante, le timide petit oisillon s'accorde un instant pour quelques caresses affectueuses, puis s'élève dans la nuit - croassant une phrase de congratulation qui fait se figer l'autre démon.
Un instant pris de court, le diable restant compte sur ses doigts les jours s'étant écoulés depuis le Nouvel An.
C'est bien cela. Aujourd'hui est le quatorze, n'est-ce pas ?
« … oh, jeune maitre, » soupire un Sebastian ému, souriant tellement qu'il craint que son visage ne se déchire. Il a l'impression que cela pourrait vraiment arriver, tellement il ressent de picotements…. Ou peut être que ses joues brûlent pour une tout autre raison. Après un regard de coté vers sa réflexion dans l'eau de la fontaine, les soupçons du démon sont confirmés ; ses traits ont pris une teinte d'un rose soutenu. Quelle honte. Mais pourtant… « C'était vraiment un très bon anniversaire. »
Je t'aime aussi.
Et avec un rire final - se transformant, tout comme son propriétaire, en un croassement - Sebastian, lui aussi, s'envole.
* Pour voir les bonnets en question, tapez "Elmo and Cookie Monster Hat" sur google...
Sympathique, n'est-ce pas ? xD
J'espère que ce premier chapitre vous a plu ~
