Disclaimer : Les personnages cités dans l'épopée d'Harry Potter sont propriétés de son auteur, madame Rowlings, les autres sont de mon cru. Je ne tire aucune profit de cette histoire.
Première fic de la saga des Madusiècles. Celle-ci comporte 5 chapitres et se concentrera sur les cinq premières années des Maraudeurs et Lily à Poudlard.
Bonne Lecture.
Les Madusiècles I
We were friends
No one could ever know me
Une pluie diluvienne s'était abattue sur le château de Poudlard. Dehors, le vent tonnait, faisant courber les arbres en émettant un sifflement strident. Les normales saisonnières auraient voulu un beau soleil, tout du moins un temps à oser sortir son chien; on était fin avril tout de même. Mais le soleil jouait à cache-cache avec les nuages gris et la plupart des élèves avaient été contraints à des révisions précoces dans la moiteur de leur salle commune. Seuls quelques-uns s'étaient risqués à un vagabondage incertain tandis que les plus studieux avaient envahi la bibliothèque.
Lily faisait partie de ceux-là. A l'abri derrière une grande étagère, tout au fond de l'immense salle, elle révisait bien sagement les sorts qu'elle devrait connaître pour son examen deux mois plus tard.
Elle avait d'abord prévu de rester avec ses copines mais celles-ci restaient avec les garçons et Lily n'aimaient pas les garçons de Gryffondor. Pas que ceux-ci se plaindraient de son absence de toute façon. Ce n'était pas qu'ils ne l'aimaient pas, c'était juste qu'ils n'avaient aucun atome crochu avec elle : ils la pensaient aussi introvertie et timide qu'eux étaient bruyants et chahuteurs. Bien sûr, cela n'était que chimère, Lily était loin d'être introvertie, elle était juste calme et mesurée, pas intéressée par les conversations futiles de ces gamins. D'ailleurs, ses amies étaient sûrement plus amies avec elle qu'elle ne l'était avec elles. Lily préférait de loin la solitude de la bibliothèque au babillage incessant de ces filles, ce qui la faisait souvent taxer d'être asociale.
Elle ramassa ses affaires éparses sur la table et se dirigea vers la tour des rouge et or. Il devait avoisiner les cinq heures de l'après-midi et ses yeux commençaient à piquer. Alors qu'elle était dans l'escalier, celui-ci commença à bouger.
« Oh non… »
A quoi bon être une sorcière lorsqu'on ne peut même pas se déplacer sans risquer de se perdre au détour d'un couloir, par la faute d'un escalier ? Lily respira, essayant de rester calme et de ne pas tout dramatiser comme à son habitude. Elle était à Poudlard, en sécurité, rien ne pourrait lui arriver de grave. En tout cas, rien de pire que la dernière fois, durant laquelle elle s'était fait attraper par le concierge qui l'avait collée en retenue…
Elle se retrouva dans un couloir sombre que seules quelques rares fenêtres éclairaient. De grosses gouttes de pluie s'écrasaient à rythme régulier contre celles-ci et le soleil avait bien du mal à filtrer à travers l'épaisse couche de poussière qui les recouvrait. Lily avança prudemment. Il ne lui aurait servi à rien d'attendre sur le marbre : le château bougeait selon ses envies et cela pouvait prendre des heures avant que les choses ne rentrent dans l'ordre.
A peine en fut-elle là de ses pensées que l'escalier se remit à bouger, laissant Lily fasse au vide, dans une partie inconnue de l'immense château et sans aucun moyen de revenir sur ses pas.
Elle pesta un coup et continua sa marche mal assurée. C'est à ce moment qu'elle entendit des pleurs venir de la droite. Elle ne distinguait rien à un mètre et était sure qu'elle venait de poser sa main sur une araignée. Retenant un cri de dégoût – elle enleva aussitôt sa main du mur – elle laissa ses pas être guidés par les sanglots. Elle savait qu'il ne fallait jamais se fier à ses sens dans un lieu aussi magique que celui-ci mais si ce bruit provenait bien d'une personne, c'était au-dessus des forces de Lily de passer son chemin.
Arrivée à un tournant, elle distingua une faible lumière et se dirigea vers celle-ci. Elle provenait d'une baguette à l'abandon. Un mètre plus loin, une jeune fille blonde d'environ dix-sept ans pleurait de tout son soûl.
Lily s'approcha. Puisqu'elle ne l'avait pas vue arriver, la jeune blonde poussa un cri lorsque celle-ci posa une main sur son épaule. En moins de deux secondes, Lily était désarmée et immobilisée au sol. L'autre fille parut se rendre compte de l'identité de son adversaire et leva directement le sortilège de bloque-jambe qu'elle avait lancé puis s'adossa au mur en reniflant bruyamment.
La plus jeune se remit rapidement de ses émotions et s'agenouilla devant son aînée. Elle essuya une des larmes sur sa joue.
« Il ne faut pas pleurer, » lui dit Lily en la regardant dans les yeux.
La septième année releva les yeux sur Lily, cette petite Gryffondor qui allait bientôt terminer sa première année à Poudlard et qui était toujours si solitaire et semblait sur une autre planète même entourée des autres filles. Alice ne savait pas très bien pourquoi elle se rappelait de Lily quand elle aurait été incapable de donner le nom d'une seule autre des premières. Peut-être était-ce parce que Lily n'avait pas beaucoup d'amis et passait beaucoup de son temps à la bibliothèque, tout comme Alice elle-même au début de son aventure poudlardienne, avant de comprendre qu'il y a tellement plus à apprendre en dehors des livres.
Ou peut-être était-ce simplement l'aura de force et de fragilité qui se dégageait de l'enfant – il y avait quelque chose, chez Lily, qu'elle ne pouvait nommer mais qui éveillait l'intérêt de toute personne posant le regard sur elle. Alice avait toujours été très sensible à ce que dégageait les autres autour d'elle, c'est d'ailleurs ça qui l'avait attirée vers Frank au début, elle pouvait lire en lui quel garçon droit, franc et courageux il était. Elle n'aurait sans doute pas dû se livrer si totalement à lui – et certainement pas faire confiance à ses instincts. Car Franck n'était pas droit et certainement pas franc.
« Ne t'en fait pas, ça va aller, » murmura Alice entre deux larmes. Au moins ne hoquetait-elle plus. Alice tenta de sourire mais son effort fut vain. Elle avait envie de dire à cette gamine de la laisser seule à se morfondre, que ça ne la regardait pas. Mais avoir quelqu'un, une présence, même celle d'une fillette, faisait du bien.
« Tu veux en parler ? » demanda Lily et Alice ne put s'empêcher de sourire de dérision.
« Non, je ne crois pas – »
« Oh, ne me dis pas que je suis trop petite ! » l'interrompit immédiatement Lily, une lueur pleine de défi dans les yeux. « Je suis beaucoup plus mature que les autres de mon âge ! »
« Ah oui ? » souffla Alice, amusée. Et pourtant, la boule dans sa gorge ne demandait qu'à trouver une échappatoire et quelque chose dans l'attitude de Lily, dans son comportement, sa position, l'air légèrement électrique autour d'elle – Alice ne savait pas pourquoi, mais elle avait envie de confier ce qu'elle avait sur le cœur.
Tellement envie qu'elle devait lutter pour empêcher les mots de passer sa bouche. Pendant un instant, elle se demanda si Lily ne lui avait pas lancé un sort pour la forcer à délier sa langue, mais elle balaya l'idée plus vite encore qu'elle n'était arrivée. C'était non seulement ridicule de penser que quelqu'un s'intéresserait à ses problèmes à ce point mais en plus, Lily n'était qu'en première, jamais elle n'aurait été capable d'un tel niveau de magie.
« C'est à cause d'un garçon, c'est ça ? » demanda Lily après un moment comme Alice se mordait les lèvres pour ne pas parler.
« C'est toujours à cause d'un garçon, pas vrai ? » railla Alice en sentant de nouvelles larmes naitre au coin de son œil. « De garçons et de meilleures amies que tu trouves dans leurs lits et de fausses excuses qui ne ressemblent à rien et … » Alice renifla. « Crois-moi, Lily, faut jamais faire confiance à un garçon. Ils sont tous les mêmes, même ceux qui semblent mieux. »
« C'est ce que ma mère dit aussi, » marmonna Lily, ce qui arracha un autre sourire triste à Alice. Une douce chaleur envahissait sa poitrine, un peu de calme et de sérénité qui venait panser son cœur brisé. Elle ne comprenait d'où pouvait bien venir la sensation mais elle n'avait la force de s'en soucier et se laissa simplement la paix l'envahir un peu plus.
Lily, de son côté, n'était pas en paix.
Une sensation étrange était en train de naitre au creux de son ventre. Ses doigts picotaient là où ils étaient posés sur la main d'Alice et un feu prenait naissance et ronflait avec de plus en plus de puissance et de chaleur dans ses entrailles.
Lorsqu'Alice fondit à nouveau en larmes, le feu commença à remuer et prendre forme, devenant un petit animal hargneux et colérique prêt à tout ravager sur son passage et qui plantait ses griffes dans l'estomac de Lily et la faisait voir rouge.
Quand Alice finit par déglutir avec difficulté et reprendre le contrôle avec la force de caractère qui la caractérisait si bien – chose que Lily ne découvrirait pas avant de nombreuses années – la première année avait perdu tout contrôle. Seul restait cette voix sourde dans sa tête qui hurlait qu'elle devait faire quelque chose, cette présence à côté d'elle qui la poussait à agir, ce petit diable qui lui aurait soufflé, perché sur son épaule, ce qu'elle devait faire maintenant.
Elle aurait été incapable de dire comment elle était retournée à la Salle commune. Elle était presque sûre d'avoir employé un passage secret dont elle ne connaitrait pas l'existence avant plusieurs années d'amitié avec les Maraudeurs et emprunté trois couloirs qu'elle n'avait jamais traversés. Elle arriva pourtant dans la Tour Gryffondor plus vite qu'elle ne l'aurait jamais cru possible et elle se dirigea immédiatement vers le préfet en chef qui était assis au milieu de son groupe d'amis, la tête entre les mains, les coudes sur les genoux, un autre garçon lui tapant dans le dos à un rythme régulier.
« Toi ! » dit-elle d'une voix forte. Le jeune homme leva sur elle des yeux surpris et autour d'eux, le volume des conversations baissa.
« Toi, » répéta-t-elle. « Tu n'es qu'un minable de la pire espèce. Tu devrais avoir honte ! T'es le préfet en chef, t'es supposé montrer l'exemple et c'est comme ça que tu traites ta petite copine ? »
Le jeune homme la regarda d'un air perdu puis aperçut Alice à l'entrée de la pièce. Le soulagement s'inscrivit dans ses traits mais Lily prit cela pour une ombre de sourire.
« Tu es immonde et tu n'as même pas eu la décence de t'excuser ! »
Lily parlait tellement fort - en fait, elle criait à présent - que tout le monde s'était tu et regardait le Préfet-en-chef de Poudlard se faire remonter les bretelles par la jeune fille.
« T'es qui, toi ? » demanda-t-il, puis il tenta de se lever pour aller rejoindre Alice mais Lily le repoussa durement dans son siège. Elle avait réellement beaucoup de force pour une gamine si petite.
Avant qu'il ait pu ouvrir la bouche de nouveau, elle l'avait giflé. Franck sentit son cou craquer sous la force du coup et sa joue bruler et il se dit vaguement que se faire gifler par une gamine de douze ans n'aurait pas dû être si douloureux.
Et que sa réputation ne s'en remettrait sans doute jamais.
«Tu n'y comprends rien, gamine, » dit Franck en voulant pousser Lily hors du chemin pour aller rejoindre Alice mais le petit monstre était campé sur ses pieds et ne bougeait pas d'un millimètre.
« Ca suffit, allez, dégage la mioche ! » déclara Ethan en sortant sa baguette.
Franck était sur le point de lui dire d'arrêter ses conneries – ils n'avaient pas besoin d'une baguette contre une gamine de première – quand il se sentit coller sur son siège, comme si on venait de lui lancer un sortilège de Colle-tout-sut-tout et au même moment, la baguette d'Ethan lui sauta hors des doigts. Franck redirigea les yeux vers Lily, complètement interloqué, mais se rendit rapidement compte qu'elle n'avait même pas remarqué le geste d'Ethan (ou sorti sa propre baguette).
Lily le regardait d'une telle façon que Franck se sentit minable et pitoyable jusqu'au plus profond de ses os bien qu'il sache parfaitement n'avoir rien fait de mal. Son cœur remonta dans sa gorge et il songea pendant une seconde qu'il allait être malade sur ses nouvelles chaussures.
« Dégage de là, gamine et laisse-moi – »
La douleur dans sa joue s'intensifia à un point qu'il manqua de crier et il se dit qu'elle avait dû lui casser une dent ou quelque chose du genre (même s'il avait plutôt l'impression de s'être pris un joli sortilège cuisant) et il fut incapable de terminer sa phrase sous le coup de la douleur.
Lily secoua la tête d'un air dégouté. « Pauvre type, » cracha-t-elle en faisant demi-tour pour rejoindre son dortoir.
Franck fut malade.
Au fond de la pièce, James Potter s'était interrompu lorsqu'il avait entendu Lily parler d'une voix aussi forte et assurée à un septième année. Cette fille avec laquelle il n'avait jamais eu vraiment le temps de parler, avec laquelle il n'avait jamais eu envie de parler tant elle lui semblait dépourvue de personnalité, cette fille-là l'avait littéralement subjugué. C'était clair qu'en fait, elle méritait peut-être qu'on s'intéresse vraiment à elle.
Après tout, elle venait de vomir ses tripes sur un gars qui ne lui avait rien fait, à elle. A tel point que c'était le type qui avait fini par vomir.
Elle venait de risquer ses précieux petits points, une retenue et Merlin seul savait combien d'autre chose (le souffle de James s'était coupé quand il avait vu cet handicapé d'Arlow sortir sa baguette qu'il avait sans raison apparente lâchée) – et tout ça pourquoi ? Franck s'était disputé avec sa copine ?
Si ça suffisait à déclencher une rage pareille, James donnerait beaucoup pour voir ce que Lily ferait quand c'était à elle qu'on s'en prenait.
« Rappelle-moi de rester en dehors de son chemin, » murmura Sirius dans son dos.
James pencha la tête sans lâcher du regard l'escalier des dortoirs des filles. « Je vais d'abord essayer de pas m'y retrouver. »
oOoOoOoOoOo
Lorsque Lily se réveilla le lendemain matin, l'énorme sentiment de remord et de honte qui l'avait tenue éveillée une partie de la nuit ne s'était toujours pas dissipé. La seule et unique chose qu'elle était capable de penser en ce moment était : Pourquoi ai-je fait ça, qu'est-ce qui m'a pris par Merlin ?
C'est donc pleine d'appréhension qu'elle se rendit au petit déjeuner.
Elle avait pris l'habitude d'aller petit-déjeuner à côté d'un groupe de quatrième qui l'avait prise en amitié. Mais ce matin-là, comme tous les week-ends, les filles n'étaient pas là et celles du dortoir de Lily avaient déjà été déjeuner plus tôt.
Lily se résolut donc à manger seule. Pour tout ce qu'elle appréciait la solitude durant la journée, le matin, elle avait beaucoup de mal à la supporter. Surtout quand tout le monde la regardait comme une bête de foire, ayant sans doute entendu parler de ce qu'il s'était passé la veille.
Elle devrait peut-être se renseigner sur les possessions – elle aurait juré qu'elle n'était pas elle-même pendant qu'elle criait sur Franck Londubat. (Oh mon dieu, j'ai frappé le préfet en chef de l'école !)
Dix minutes plus tard cependant, un garçon de son année aux cheveux ébouriffés vint s'asseoir à côté d'elle. Il lui sourit chaleureusement et se servit.
Lily se sentit assez bizarre car elle voyait parfaitement tout le monde la regarder comme si elle était devenue folle la veille et Potter venait justement aujourd'huià côté d'elle.
« Bah, fait pas cette tête, dans trois jours ils auront tout oublié. C'est comme le jour où j'ai fait perdre cent points à Gryffondor. Au début, tout le monde te tire la tête et t'isole et puis, ils oublient. Faut pas leur en vouloir s'ils ont une mémoire à passoire,» commenta James comme si c'était l'évidence même.
Lily haussa les épaules et continua à déjeuner silencieusement. Elle n'aimait la façon dont il se comportait. C'était comme s'il la trouvait intéressant juste parce que tout le monde la regardait. Et ça ne devrait pas vraiment l'étonner : il faisait tout ce qu'il était humainement possible de faire pour se faire remarquer.
C'est alors qu'Alice surgit… main dans la main avec Franck. La jeune rouge et or faillit s'étrangler dans son lait. Alice posa un baiser sur la joue de son petit ami et se dirigea vers Lily sous les yeux de toute la grande salle, silencieuse. Elle s'assit en face de James et regarda Lily avec un sourire entendu.
« Je ne sais pas si je suis supposée te dire merci ou te passer un sermon pour avoir agressé un autre élève, » déclara Alice sans préambule. A côté d'elle, James ricana dans son thé pour Dieu seul savait quelle raison.
« Tu lui as pardonné ? » demanda Lily, incrédule. C'était encore pire – ça voulait dire que tout ça, c'était pour rien ?
« Je n'avais jamais rien vu de tel ! Tu l'as remis en place comme personne ne l'avait fait avant. Ca nous a donné l'occasion de discuter et qu'il s'explique… alors, merci Lily. » Avec un autre sourire, Alice serra la main de Lily qui était posée sur la table, abasourdie, puis s'en alla.
Lily haussa un sourcil, se demandant si réellement, elle n'avait pas un problème. Qu'elle trouve les enfants de onze ans immatures et gamins et qu'elle ne puisse pas les supporter, passe encore. Mais qu'elle trouve la réaction d'une jeune fille de dix-sept ans, de beaucoup son aînée donc, tellement disproportionnée et … futile ? – la fit se sentir étrange. Différente, encore un peu plus. Elle se leva pour se diriger de l'autre côté de la table. Elle s'arrêta au niveau de Franck Londubat qui la regardait lui aussi, assez bizarrement.
« Excuse-moi. Je n'aurais pas dû m'emporter comme ça, surtout que tu n'avais rien fait. Et je suis désolée de t'avoir frappé. »
« C'est moi ou ils sont de plus en plus petits en première ? » demanda-t-il à ses copains, tournant le dos à Lily sans prendre la peine de lui répondre.
« Hey ! » s'exclama-t-elle. « J'ai dit que j'étais désolée. Je sais que ça n'excuse rien du tout mais tu pourrais essayer de dire quelque chose, non ? »
Lentement, le jeune homme déposa sa cuillère dans son bol et se retournant, il parla d'une voix calme devant une Grande Salle qui ne perdait rien de l'échange et des profs prêts à intervenir.
« Tu as raison, être désolée n'excuse rien car il n'y a rien à excuser. Je t'ai longtemps observée, Lily Evans, c'était mon rôle de préfet de veiller que personne ne soit exclu et tu l'as été pendant toute l'année. Non, ne dis pas que c'était un choix, ça c'est le prétexte que tu t'es inventé. Un prétexte comme je l'ai été hier soir. Tu as profité de l'occasion pour déverser sur moi toute cette rancœur que tu as accumulée pendant huit mois. C'aurait pu être n'importe qui, tu en avais juste besoin. Alors, disons que je ne t'en veux plus à la condition que tu ailles vers les autres et que tu leur montres à quel point tu es une fille exceptionnelle. Parce que je suis persuadé que certains auraient beaucoup à tirer de toi. Tiens, retourne t'asseoir à côté de Potter, je le sens particulièrement concerné ! »
Lily, qui avait sagement écouté sans rien dire, se sentit comme mise à nu devant tout le monde.
Oui, Franck aurait pu s'énerver, même lui enlever des points et l'envoyer en retenue. Il en avait le pouvoir. Mais il avait choisi une façon bien plus sournoise de prendre sa revanche et Lily avait juste envie à présent de s'enfuir de cette salle, où tout le monde la regardait maintenant avec une once de pitié.
Salaud.
Elle s'apprêtait à partir lorsque Potter s'approcha d'elle. Autour d'eux, personne ne perdait une miette de ce qui se passait.
« Dégage de là ! »
Elle le poussa, les larmes aux bords des yeux et sortit précipitamment de la Grande Salle. Le jeune garçon la poursuivit et la rattrapa au détour d'un couloir.
Lily avait bien compris, longtemps avant, qu'elle n'avait rien à faire à Poudlard. La vie – sa vie – était tracée. Elle devait être médecin, s'élancer dans la recherche et devenir une grande scientifique. C'était ça, son rêve. Non pas que remuer une baguette n'était pas amusant. Mais c'était juste ça, amusant. Et elle avait beau être performante, elle ne voyait comment agiter un bout de bois pour suspendre une plume dans les airs l'aiderait à survivre.
« Attends ! » Il la maintint en place en lui saisissant le poignet, la regardant d'une manière impénétrable. Jamais elle ne l'avait vu si… impliqué. Il ne semblait pas prendre son agissement à la légère. Pourtant, il prenait tout à la légère. « Je sais que c'était vache de parler de tes problèmes personnels devant tout le monde comme ça, mais Franck a raison, tu devrais éviter de t'enfuir à chaque fois qu'on t'approche. »
Se retenant à grand peine de pleurer face au "lynchage public" qu'elle venait de subir, Lily le regarda attentivement pour la première fois. James était un des premiers enfants de son âge qu'elle avait repéré sur le quai de la gare lors de la rentrée. Mais il avait semblé si loin d'elle, si sûr de lui, comme si tout ce qui l'entourait était normal, banal, barbant, que Lily n'avait pas osé lui poser de questions. Elle s'était sentie à part, comme pas à sa place dans ce monde magique où personne à part elle ne semblait perdu. Et après avoir passé son voyage en train à entendre Alessio Nott parler des enfants de Moldus et voir que Severus ne faisait rien pour prendre sa défense, se contentant de baisser la tête en assentiment, elle était sûre que sa place n'était pas à Poudlard. Qu'elle ne voulait pas d'une place à Poudlard.
Lily n'était pas idiote. Elle avait remarqué la guerre incessante entre les maisons, la course aux points – jeu auquel elle s'était laissée prendre – et le besoin de tout à chacun de prouver sa valeur magique. Mais elle n'avait fait aucun effort. Elle n'avait pas été vers les autres, elle avait perdu son air jovial qui la caractérisait si bien, dans son autre univers, et elle n'avait même pas essayé d'être hypocrite au point de les trouver intéressant.
Elle n'avait pas voulu d'un monde magique, privé de ses repères, de sa famille, de ses amis. Elle voulait juste que tout redevienne comme avant. Quand tout le monde l'aimait bien, quand ses parents étaient heureux, quand elle avait sa place et ne jamais être une sorcière, une Sang-de-bourbe, une bonne à rien.
Mais ça, jamais Potter ne le saurait jamais, croyait-elle.
« Lâche-moi, je n'ai pas besoin de ta pitié, » lui cracha-t-elle à la figure, sentant, à nouveau cette ivresse de colère prendre possession d'elle.
« Et pourquoi j'aurais pitié ? Même ça, tu ne le mérites pas ! » Il desserra sa poigne et la choqua par son ton dur et froid, sans appel. Prise au dépourvu, elle le regarda et ses épaules tremblèrent. Qu'est-ce que cachait un tel regard ?
« Si tu es là pour m'insulter – »
« J'ai mieux à faire de mon temps que le perdre avec toi ! »
Quoi ? ! C'est lui qui était venu lui parler, lui qui l'avait suivie, lui qui la retenait. Et Lily avait envie de lui dire ce qu'elle ressentait, ce qu'elle avait vraiment sur le cœur et elle ne comprenait pas pourquoi parce que Potter était juste comme tous les autres mais – mais il y avait quelque chose, là, juste sous la surface que Lily ne pouvait pas voir et qui ne faisait que la frustrer encore plus.
La première fois qu'elle avait vu James sur le quai de la gare, il lui avait donné l'impression de vivre dans un monde différent (et, à bien y réfléchir, c'était le cas) et elle s'était senti irrésistiblement attirée par lui, par le désir de devenir son amie et d'avoir la chance de graviter autour de lui. Et ce sentiment avait été si inattendu et violent qu'elle l'avait rejeté en bloc et s'était mis à ne pas pouvoir le supporter – et quel grand bien lui avait pris, quand elle avait vu quelle brute sans cervelle il était en réalité, toujours à critiquer ceux qu'il ne considérait pas comme aussi géniaux que sa propre personne, à jouer mille et une farces souvent humiliantes pour la victime et à insulter ceux qui ne riaient pas.
« Tu ne sais rien de moi ! » s'énerva-t-elle en lui tournant le dos, se préparant à partir.
« J'en sais beaucoup plus que tu ne crois ! » répliqua-t-il sur le même ton, comme si toute leur conversation n'était qu'un prétexte à une toute autre discussion qu'aucun d'entre eux n'avait conscience d'avoir.
Lily était sur le point de se mettre à courir mais quelque chose dans sa voix la retint. Elle détesta une fois de plus l'étrange fascination que James Potter semblait exercer sur elle et le maudit une fois de plus d'exister, et d'être là derrière elle et ses jambes de refuser de bouger. Elle soupira et se retourna, exécrant sa curiosité, honnissant sa faiblesse.
« Tu ne me connais pas, » répliqua Lily en rétrécissant les yeux.
James Potter souriant de son sempiternel air moqueur et elle le détestait pour ça.
« Non, c'est vrai, » répondit-il en haussant les épaules – et prenant Lily au dépourvu. Depuis qu'elle était arrivée à Poudlard, elle avait changé. Devenue plus mature, diraient certains, mais c'était plus que ça. S'il lui était déjà arrivé de se sentir un peu en avance sur son âge par le passé, comme tout le monde de temps à autre, depuis son arrivée dans le château, ce sentiment n'avait fait que croitre et l'éloigner des autres de son année. Parce qu'ils étaient stupides, sans intérêt, ridicules et Lily se détestait de penser une telle chose car elle n'avait jamais été une pour critiquer inutilement les autres.
Jusqu'à son entrée dans le monde magique, du moins. Et elle n'aimait vraiment pas cette fille vindicative et intransigeante et amère et cynique qu'elle pouvait, presque littéralement, se sentir devenir.
« Mais à ma décharge, personne ne sait rien de toi, » continua Potter, le visage toujours souriant, toujours aussi avenant, mais un tel sérieux dans les yeux que Lily se sentit incapable de détourner le regard.
« Laisse-moi tranquille, » s'entendit-elle murmurer. Est-ce que tu veux me connaitre ?, s'entendit-elle penser.
« De quoi tu as tellement peur ? » continua Potter. « Pourquoi tu fuis tout le monde ? Pourquoi tu ne parles avec personne ? On est si terrible que ça ? » plaisanta-t-il mais il cessa de sourire immédiatement après, comme s'il avait senti que tout au fond d'elle, oui, Lily pensait vraiment qu'ils étaient si terribles.
« Lily… »
« Reste loin de moi, ça vaut mieux ! » assura-t-elle en faisant demi-tour, le mal-être qu'elle ressentait depuis son entrée dans le monde sorcier plus terrible que jamais, le fossé la séparant des autres à jamais infranchissable.
Qu'avait-elle donc fait de mal pour se sentir si étrangère dans sa propre vie, exactement ?
C'est alors que James Potter la rattrapa et referma sa main autour de celle de Lily.
Elle se figea sur place et se tourna vers lui, et vit que lui aussi semblait surpris de réaliser que c'était la première fois que leurs peaux se touchaient depuis le début de l'année.
Comment elle le savait, elle n'en avait pas la moindre idée. Mais elle savait. Elle savait qu'à cette seconde précise, pour la première fois de toute son existence, James Potter la touchait.
Presque immédiatement, il la lâcha, et tout comme elle savait que c'était la première fois qu'ils se touchaient, elle savait également qu'il avait ressenti la même chose qu'elle. La chape de plomb qui semblait peser sur ses épaules depuis des mois disparu, la nervosité qui lui enserrait la poitrine depuis son arrivée dans le château se relâcha et quelque part, Lily sut que les choses étaient sur le point de changer pour elle.
Juste parce que James Potter l'avait touchée.
Il recula de plusieurs pas, un air apeuré sur le visage et en toute autre circonstance, Lily aurait souhaité avoir un appareil photo pour capturer cette émotion si rare sur le visage du garçon, mais pas cette fois. Il balbutia quelque chose qu'elle n'entendit pas et ce fut lui qui partit comme s'il avait le Diable aux trousses, alors que Lily restait là, complètement hébété à regarder sa main sans comprendre ce qu'il venait de se passer.
Mais le petit monstre qui vivait dans son estomac et faisait de sa vie un enfer depuis des mois et polluait son esprit de mauvaises pensées et de critiques injustifiées sembla se calmer et disparaitre quelque part tout au fond d'elle, quelque part où il ne pourrait plus gâcher sa vie.
Lily finit par retourner à la tour Gryffondor, s'asseoir au milieu des autres filles et participer à la conversation, bien déterminée à oublier ce qu'il venait de se passer dans le couloir.
oOoOoOoOoOo
Un autre problème surgit.
« Miss Evans ! » Le cri de McGonagall oscillait entre outré et surpris. Lily baissa les yeux, regardant son caneton se déplacer sur la table en boitant. « Qu'avez-vous fait là ? » Cette fois, c'était la panique qui surplombait. Lily se fustigea mentalement. Elle n'était pas censée montrer au professeur qu'elle avait pris un peu d'avance sur le programme, parce que finalement, elle ne voulait pas être toujours dissociée des autres.
« Ben, j'ai transformé ma plaquette de bois en caneton, » avoua-t-elle piteusement alors qu'un murmure parcourait la salle. Ce qu'elle pouvait détester être le centre d'attention. « Je sais que j'aurai dû en faire un dé à coudre, mais vous comprenez, c'est un peu – » Elle eut beau chercher un mot non péjoratif, elle ne trouva pas. C'est à ce moment qu'elle sut qu'elle et ses camarades ne s'entendraient pas, qu'ils ne jouaient pas, ou plus, dans la même dimension. Ils seraient choqués, tant pis. « – rébarbatif ? »
« Rébarbatif ? Rébarbatif ! » Cette fois, le ton était affolé. « Est-ce que vous vous rendez compte, est-ce que vous – » Elle retint un petit cri quand ses yeux se posèrent sur Potter, qui était jaune. Réellement jaune, toute sa peau avait été colorée. « Mr Potter ! »
Lily sourit, elle avait cru à un moment que les yeux de McGonagall allait lui sortir de la tête tant ils étaient écarquillés. Elle et James Potter – non, James Potter et elle pour être polie – s'étaient embarqués dans une guerre idiote, à la chasse au meilleur en classe, à celui qui ramènerait le plus de points mais surtout, à celui qui irait le plus loin.
Au début, c'était plutôt bien passé. Lily et James étaient passés de bons élèves à très bons élèves, n'ayant besoin que d'un petit coup de baguette pour réaliser un exercice pouvant prendre plusieurs heures à leurs camarades. Les profs étaient ravis. Mais rapidement, l'ennui avait saisi les deux petits génies, qui n'avaient pas hésité à aller piocher dans des cours plus avancés pour toujours se dépasser : si Lily avait été capable de réaliser un enchantement qu'on n'enseignait qu'aux troisièmes années la semaine précédente, James n'avait pas hésité à tenter une Métamorphose qu'on étudiait l'année de ses Buses; Lily avait répliqué en transformant sa plaquette de bois inerte en caneton vivant, chose qui donnait encore du fil à retordre à plusieurs septièmes, et James s'était donc enchanté lui-même, chose qui posait problème à nombre de sorciers durant toute leur vie.
Il n'était pas commode, ni normal – ce n'était même plus bizarre – qu'un tel phénomène soit possible. Des élèves n'étaient pas capables d'avoir plus cinq ans d'avance. Leur magie ne pouvait être assez mature pour réaliser de tels exploits et leur contrôle de celle-ci n'aurait jamais dû permettre un tel niveau de maitrise. Particulièrement quand James et Lily n'essayaient même pas vraiment d'être surdoués, ils s'amusaient, simplement, à s'impressionner, s'entraînant dans le sillon de l'autre. Un affrontement menant à un progrès mutuel.
Mais Lily était loin d'être impressionnée par ce petit 'tour de magie', comme elle se plaisait à rabaisser chacun de ses exploits. Avec un air de petite fille qui ne sait pas ce qui vient de se passer, elle s'approcha de Potter.
« Laissez-moi régler ça madame. » Elle le tapota de la baguette. « Une fausse manipulation sûrement, vous savez, il a beau essayer, il n'arrivera jamais à mon niveau – le pauvre. »
« Evans, je vais te –»
« Suffit ! » s'exclama McGonagall, plus blanche qu'un linge. « Le cours est terminé ! »
Le professeur de Métamorphose, directrice des Gryffondors et sous-directrice de l'école de sorcellerie de Poudlard était connue pour son sang-froid en toute situation. Quelques soient les évènements terribles se déroulant sous ses yeux, Minerva ne paniquait pas et parait au plus urgent, gardant toujours le contrôle de la situation.
Elle dut cependant se faire violence pour ne pas courir alors qu'elle tentait de rejoindre le bureau du directeur. Quelque chose clochait avec deux de ses élèves, quelque chose de grave – car comment expliquer que James Potter et Lily Evans, qui n'avaient jusqu'ici démontré aucune capacité particulièrement avancée pour la magie, si ce n'était un bon niveau de base, soient soudainement devenus capables de tels exploits ? Il avait forcément dû leur arriver quelque chose, et Minerva redoutait le prix qu'ils auraient à payer.
Paniquée comme elle ne l'avait encore jamais été, elle se rendit dans le bureau du directeur à qui elle expliqua rapidement la situation. Celui-ci ne parut pas surpris et un petit sourire étira ses lèvres alors qu'il jetait un coup d'œil à la gazette devant lui – une famille venait d'être tuée.
« Nous venons de les trouver, Minerva. » Le ton était calme mais le professeur de Métamorphose connaissait bien son collègue, suffisamment pour s'avoir que cette lueur dans ses yeux signifiait bien plus que ses mots.
« Qui ça, Albus ? »
« Monsieur Potter et mademoiselle Evans s'étaient-ils déjà parlés avant l'incident Londubat ? » demanda Dumbledore sans quitter la marque des ténèbres des yeux. Sa collègue suivit son regard et retint à temps un hoquet de surprise.
« Albus ! Vous ne croyez tout de même pas – ce sont des enfants ! »
« Une destinée bien compliquée s'offre à eux. » Avec un soupir las, il laissa son regard dériver sur les objets brillants et bruyants de son bureau. « Je pense que les Madusiècles sont parmi nous, ma chère. »
« Par Merlin » Minerva sentit sa tête lui tourner. James et Lily, des Madusiècles ? Pauvres enfants. « Faut-il le leur dire, Albus ?»
« Il sont encore jeunes. Laissons-leur le temps d'apprendre à s'aimer. »
oOoOoOoOoOo
« Elle fait peur. »
« C'est peut-être un monstre ? »
« Merci Sirius, je te rappelle que j'arrive à faire comme elle. »
« Hey, qu'est-ce que tu nous caches d'autre Jamie ? » Sirius se mit debout sur le lit. « Tu nous as pas dit que t'avais lu le manuel des 5e ! »
« Sirius, » soupira Remus d'un air las. « James et Lily sont surdoués. »
« Surdoués, hein ? Et Peter est nul aux échecs ! »
James écouta ses amis se disputer pendant un moment alors qu'ils essayaient de décider si oui ou non, lui et Evans étaient surdoués et pourquoi exactement ils avaient commencé à faire des étincelles en même temps.
James posa les yeux sur sa main. Parfois, il pouvait encore sentir la peau de Lily sous ses doigts. A l'instant même où il l'avait touchée, il avait senti quelque chose changer. Il aurait été incapable de dire quoi – peut-être la Terre avait-elle tourné sur son axe, peut-être l'air avait-il crépité autour de lui, peut-être quelque part une licorne était-elle morte – il n'en savait rien mais soudainement, c'était comme s'il était capable de penser clairement pour la première fois depuis son arrivée à l'école, comme si son esprit s'était soudainement débarrassé du brouillard qui le rendait continuellement confus.
Il avait trouvé ce qu'il avait passé sa vie à chercher sans avoir conscience d'être à la recherche de quelque chose – et ce quelque chose était Lily Evans.
« Peut-être que c'est mon âme sœur, » murmura James – parce que c'était le seul cas dont il avait jamais entendu parler où deux sorciers se retrouvaient à devenir plus puissants car leurs magies se répondaient l'une l'autre.
C'était un phénomène auquel on n'avait plus assisté depuis des siècles et qui faisait partie des Mythes et légendes du monde sorcier – et James était au courant uniquement parce qu'il l'avait lu un des romans à l'eau de rose de sa mère l'été précédent, pensant qu'il trouverait dans le bouquin la raison pour laquelle il l'avait vue pleurer à plusieurs reprises, le livre ouvert sur les genoux. (L'histoire était la plus pénible et ennuyante que James avait jamais pris la peine de lire et il ne savait toujours pas ce qui rendait sa mère si triste).
Les garçons autour de lui le fixèrent pendant trois longues secondes en silence avant d'éclater de rire. Sirius dut même s'essuyer les yeux tant il riait.
« Lily Potter… » murmura Peter quand le calme fut plus ou moins revenu, et il déclencha une nouvelle crise d'hilarité.
James grogna. « C'est pas marrant ! »
« C'est hilarant ! » répliqua Sirius. « Bon sang, vous imaginez un peu le boxon que ce serait chez eux ? Et moi qui trouve que mes vieux se disputent beaucoup… »
James lui balança un oreiller dessus.
« Si James et Lily finissent ensemble, on aura plus qu'à tous s'exiler sur Mars, » commenta Remus en reprenant un peu son sérieux.
« La lune, » marmonna James.
« Quoi ? » Remus cessa de sourire et le dévisagea comme s'il venait de préférer une insulte.
« On dit s'exiler sur la lune, pas sur Mars, » le corrigea James.
« Tout façon, si t'arrives à devenir pote avec elle, je veux bien ne pas me laver pendant un mois ! » s'exclama Sirius.
« Pari tenu ! » déclara James en sortant immédiatement du dortoir en laissant Peter et Remus à leurs grimaces.
oOoOoOoOoOo
« Evans »
« Potter, je travaille là. »
James s'assit face à elle, bien décidé à ne pas la lâcher. Elle avait passé un survêtement rose pastel, jurant horriblement avec sa couleur de cheveux carotte. Mais, pour donner le change, elle avait relevé ses cheveux en queue de cheval sur le haut de la tête, ce qui lui donnait l'impression d'un visage plus long et d'une carrure plus sportive.
« Potter, » répéta Lily en soufflant. « Qu'est-ce que tu veux ? »
« Mais rien, chère Lily. »
Elle lui lança un regard soupçonneux puis reprit sa plume. Il se leva, fit le tour de la table – elle crut qu'il venait juste essayer de l'énerver et, sa tactique ne marchant pas, s'en allait.
« Ensemble, c'est mieux, » grommela-t-il, l'air de rien, en lisant par-dessus son épaule.
« Dégage Potter. »
« J'y arrive pas quand t'es pas là. » Sur cette phrase énigmatique, James s'en alla, laissant Lily stupéfaite.
Qu'est-ce qui lui prenait ? Et puis, qu'est-ce que ça voulait dire ces phrases ? Lily secoua la tête, grogna et replongea dans son travail, se promettant de ne plus jamais laisser James mettre le doute dans son esprit.
Cinq minutes plus tard, il réapparut, un énorme livre sous le bras. Elle fronça les sourcils, il s'assit à nouveau et lui sourit d'un air sincère.
« C'est un dictiaire magique, » lui indiqua-t-il du bout du menton. « C'est comme ça qu'on dit en Moldu, non ? »
Lily secoua la tête, résolue à ne pas se laisser déranger par cet imbécile – un dictiaire, non mais vraiment ! – et ne leva pas les yeux. Déçu, James ouvrit le gros ouvrage puis le tourna vers elle. « Tu sais, avec les définitions pour les mots. » Cette fois, la jeune fille regarda le contenu du livre. « Et l'orthographe, parce que la tienne est nulle ! »
Il s'en allant en courant, riant dans les escaliers tandis que Lily, devenue rouge, se mit à hurler des qualificatifs qu'il ne serait pas bon de répéter…
« Drôle de méthode, » commenta Sirius en entendant Evans gueuler dans la salle commune. James s'étala sur son lit et sourit.
« Donne-moi une semaine. »
Il fallut des mois, maintes et maintes disputes, des pleurs et des cris, des blagues et des retenues en série, avant que Lily ne se retrouve assise dans la salle commune, au milieu des garçons de son année qui semblaient étonnement ravis de l'accueillir parmi eux.
Lily ne saurait sans doute jamais vraiment pourquoi les garçons l'avaient accueillie avec autant de ferveur dans leur petit cercle fermé, ni même pourquoi le directeur de l'école en personne les avait convoqué, elle et James, afin de leur rappeler les vertus de l'amitié et leur faire promettre de tenter de s'entendre.
Et même s'il leur faudrait des années pour découvrir que Dumbledore ne faisait jamais rien sans raison, James et Lily ne pourraient jamais se douter de l'influence qu'ils avaient eux-mêmes exercée sur les autres et à quel point leur propre désir de devenir amis malgré leurs différences avait inconsciemment moulé le désir des personnes autour d'eux.
Et au final, cela n'avait que peu d'importance.
Car l'amitié n'était que la première marche vers une histoire bien plus compliquée encore.
No one could ever know me, no one could ever see me.
Seems like you're the only one who knows what it's like to be me.
Someone to face the day with, make it through all the rest with,
Someone I'll always laugh with, even at my worst,
I'm best with you.
I'll be there for you – The Rembrants
