Rêve, Cauchemar… ou Réalité ?

Auteur : Moi, alias Rubis-san

Anime : One Piece

Genre : Horreur, angoisse, drame

Crédits : Le monde de One Piece ainsi que ses personnages appartiennent à Maître Oda. Je ne fais que les emprunter (pourtant c'est pas faute d'avoir essayé de les obtenir XD). Par contre it's my scénario. :)

Le petit mot de l'auteur : Surtout prenez plaisir à lire ! J'essaie de respecter le caractère des personnages le plus possible ainsi que leur univers. Et n'hésitez pas à commenter, les reviews, qu'elles soient négatives (essayez d'être constructifs par contre dans ce cas, que je puisse cerner ce qui va ou pas ^^) ou positives, ne peuvent que m'aider ! Bonne lecture !

Chapitre I : Les prémices d'une descente aux enfers

NDA : Bonne lecture de ce premier chapitre, n'hésitez pas à donner vos impressions !


Les prémices d'une descente aux enfers

Je me trouvais dans une vaste place circulaire. Tout autour de celle-ci et me surplombant, des gradins s'élevaient. Et sur ces gradins, la foule, telle une immense fourmilière, grouillait. Les gens se bousculaient, se poussaient, se précipitant vers les rares places libres restantes. Je n'arrivais pas à saisir le sens de leurs paroles. La seule chose que je pouvais entendre était le tumulte incessant de leurs voix qui se mêlaient, créant un brouhaha assourdissant et insupportable. Mais tout cela ne m'intéressait en rien. Ce n'était qu'un insignifiant détail, inutile. Toute mon attention était focalisée sur l'arène, en contre-bas de ces gradins.

Au centre de celle-ci, une croix sombre se dressait, contrastant fortement, et presque douloureusement, avec le jaune pâle du sable qui tapissait le sol. Mais, là encore, ce n'était pas cette potence macabre, symbole indéniable de la mort, qui attirait mon regard. Et pourtant comme je l'aurais préféré ! Non, ce dont mes yeux ne pouvaient se détacher, ce dont j'aurais désiré, presque au point de me damner, qu'il ne soit pas suspendu à ce lugubre morceau de bois, les bras et les jambes attachés de parts et d'autres, était une chétive créature. Humaine, et qui, malheureusement, paraissait ne m'être pas totalement inconnue. Mes pupilles se dilatèrent sous l'effet de l'horreur lorsque je reconnus les mèches abondamment souillées de sang séché, répugnante teinte rougeâtre qui ne parvenait pourtant pas à masquer la couleur cuivrée de la chevelure. Ma navigatrice ! Je suffoquai. Elle n'était vêtue que du strict minimum ; une culotte et un soutien-gorge qui avaient sans doutes connu des jours meilleurs, et qui, du fait de leurs nombreux accrocs et déchirures, peinaient à dissimuler les parties intimes de la jeune femme. Le crâne de celle-ci était poisseux de liquide rouge écaillé, tout comme le reste de son corps que je découvris couvert d'innombrables cicatrices et blessures. D'horribles hématomes, colorés d'une palette allant d'un obscur violet à un vert criard en passant par le bleu, s'étalaient sur ses épaules et ses avant-bras ainsi que sur la totalité de ses jambes. Des cloques brunâtres meurtrissaient son ventre et la naissance de sa poitrine. Des griffures, d'où perlaient encore des gouttes d'hémoglobine, parsemaient ses hanches et son épiderme. Je vis également des plaies béantes, probablement infectées, d'où suintaient du liquide écarlate et du pus. Un spasme de dégoût me secoua. Un infâme goût de bile me remonta dans la gorge. Qu'elle était affreusement mutilée cette nymphe autrefois rayonnante !

Outre son aspect misérable et sanglant qui me retournait l'estomac et m'asséchait la bouche, ce qui me choqua le plus fut ses yeux. Habituellement d'un marron chocolat chaleureux et animés d'une lueur espiègle, ils n'étaient plus que ternes, comme éteints. Certes, ils étaient toujours d'une jolie nuance noisette, mais la douleur et la torture les avaient obscurcis, comme si ces châtiments corporels avaient posé un voile grisé sur les iris autrefois chatoyants. Ses pupilles n'avaient plus ce petit éclat de vie et de malice que je leur avais toujours connu. Non, elles étaient vides, un vide ignoble, un vide épouvantable, un vide terrifiant. Des abîmes comme ont ceux qui en ont trop vu et qui ne veulent plus qu'une seule chose : oublier. Oui, ces yeux avaient la couleur de l'oubli. Quelques larmes s'accrochaient désespérément aux délicats cils, seuls vestiges de sa beauté d'antan, qui ornaient toujours les fenêtres de son âme. Une âme qui ne représentait que le rien. Un trou noir sans fond. Le néant. Le néant. Depuis combien de temps était-elle là, à souffrir ? Comment cela était-il possible ? Nous avions toujours sauvé nos compagnons. Alors pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi était-elle là, attachée à cette potence, prête à mourir ? Je ne comprenais pas. J'avais envie de hurler, malgré le légendaire sang-froid que l'on m'attribuait. Je sentis, moi aussi, un flot humide envahir ma vision qui se troubla, m'empêchant de distinguer avec netteté les alentours. Je perçus cependant le regard éteint de Nami qui me fixait. Sans que je ne saisisse pourquoi, j'y discernai une inexplicable étincelle de peur et l'incompréhension la plus totale. Etait-ce vraiment à moi qu'était adressée cette œillade terrifiée ? Encore une fois, je ne comprenais pas, en dépit de l'intelligence qu'on me prêtait. Mon amie prit tout à coup une profonde inspiration qui me sembla douloureuse et, tout en continuant de me scruter dans le blanc des yeux, me cria soudain d'une voix éraillée et désespérée :

« Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi m'as-tu fait ça ? Pourquoi nous as-tu fait cela ? Nous voulions te sauver ! Nous étions un groupe soudé et uni ! Ne te rappelles-tu pas nos aventures ? Alors pourquoi ? Pourquoi as-tu rejoint la Marine ? Pourquoi nous fais-tu autant souffrir ? Pourquoi as-tu tué Chopper et Usopp ? Nous croyions que tu étais de notre côté ! Pourquoi ? Pourquoi nous as-tu trahis ? Pourquoi ? Pourquoi ? Je ne comprends pas ! Pourquoi ? Réponds-moi ! Pourquoi ? Pourquoi ? » acheva-t-elle dans des sanglots hystériques.

Je demeurai pétrifiée. Etait-ce à moi qu'elle parlait ? Pourquoi sa voix était-elle aussi accusatrice ? Qu'avais-je fait ? Moi aussi, je ne comprenais pas. Je voulus avancer vers elle. Je m'aperçus que je ne le pouvais pas. J'en étais incapable. Que se passait-il ? La peur s'insinua en moi. Une folle envie de pleurer me saisit à nouveau. Il y avait forcément une explication. Luffy, Zoro ou Sanji allaient arriver et tout rentrerait dans l'ordre. J'observai Nami en tentant de me calmer. Elle sanglotait toujours, la tête plongée vers le sol. Je voulais plus que tout me rapprocher d'elle, la délivrer, mais, malgré tous mes efforts, mes jambes refusaient d'exécuter ne serait-ce qu'un pas. C'était comme si elles n'existaient pas, que j'étais immatérielle. Et pourtant, je sentais mes jambes, mes chevilles, mes pieds ! Mais je n'en avais pas le contrôle. Que se passait-il ? Quel était cet odieux traquenard ?

Une chose me fit soudain me re-concentrer sur les environs de l'arène. Je remarquai avec un temps de retard que la foule s'était tue, plongeant la place circulaire dans un silence inquiétant. Le genre de silence qui ne présageait rien de bon. Mon mauvais pressentiment se confirma lorsque des membres éminents du Gouvernement Mondial vinrent se placer dans une loge derrière moi. Je me figeai en avisant l'amiral en chef Sengoku suivi des trois amiraux : Akainu, Kizaru et Aokiji. Celui-ci me regarda d'une façon étrange qui me terrifia encore un peu plus. Ils s'assirent sur des sièges à haut dossier tandis que Sengoku s'approchait de la rambarde de leur loge pour s'adresser au public.

« Population de Marie-Joie, et vous du monde entier qui nous écoutez, aujourd'hui un grand moment s'inscrit dans l'Histoire. Aujourd'hui, va être exécutée Nami, dite « La chatte voleuse », la navigatrice de l'équipage de Monkey D. Luffy, sur laquelle repose une prime de 16 000 000 de berrys. Sachez que cette exécution est un pas supplémentaire sur le chemin qui nous conduira à la paix dans le monde. Cette criminelle est le troisième membre de ce dangereux équipage dont nous bannissons l'existence démoniaque et indigne. Bientôt nous capturerons les autres également. L'Humanité sera débarrassée d'un danger et cela sera une nouvelle victoire de la justice contre le fléau qu'est la piraterie. J'en profite également pour saluer les nobles Dragons célestes et leur souhaiter un bon spectacle. » déclara-t-il avant d'incliner légèrement le visage sous les applaudissements de l'assistance.

Je me forçai à la sérénité. Les autres allaient arriver, c'était certain. La Marine ne disait que des mensonges. Aucun de nous n'était mort, et aucun de nous n'allait mourir. Je rouvris les yeux, rassurée. Oui, ils viendraient nous sauver, la sauver, et prouveraient une fois de plus qu'ils étaient forts. Oui, je devais avoir confiance. Comme à Water Seven, nous nous en sortirions vainqueurs. Sans aucun doute. Un personnage inconnu fit alors son apparition à côté des amiraux.

« L'exécution peut maintenant commencer. » annonça-t-il.

Mon corps se mit alors à se mouvoir. J'écarquillai les pupilles. Je n'avais rien demandé, de plus je n'avais pas réussi à bouger auparavant. Alors pourquoi ? Mon anatomie amorça un mouvement vers la potence, sans que, effarée, je ne puisse contrôler quoi que ce soit. Je vis, effrayée, le visage de Nami devenir de plus en plus net, de plus en plus proche. Je pouvais voir le sillon creusé par ses larmes sur sa peau blafarde. J'étais maintenant en face d'elle, une vingtaine de centimètres seulement nous séparait. Elle leva son minois affolé et meurtri vers moi et recommença à hurler d'une voix enrouée et hystérique :

« Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi leur obéis-tu ? Tu vas me tuer n'est-ce pas ? Pourquoi les as-tu rejoints ? Que t'avons-nous fait ? Pourquoi ? Explique-toi ! Pourquoi ? Je croyais que tu nous aimais ! Je croyais que tu étais notre amie, Robin ! »

A l'entente de mon prénom, je sursautai violemment. Du moins mon esprit, car mon corps, lui, resta imperturbable. C'était donc bien à moi qu'elle parlait ? Je les avais donc, comme elle le disait, trahis, abandonnés, tués ? Je sentis un gouffre immense, froid, glacial, comparable aux abysses des tréfonds marins, envahir ma poitrine, paralysant insidieusement mes muscles. J'eus soudainement du mal à respirer, mes poumons manquaient d'air. Je tentai en vain d'inspirer un peu d'oxygène. Au bout de ce qui me sembla une éternité, j'y parvins enfin. Mais ce n'était pas mon anatomie qui avait éprouvé ces difficultés, c'était mon esprit, rien que mon esprit ! Mon enveloppe charnelle, elle, ne ressentait rien. La terreur prit possession de moi lorsque je compris : j'étais prisonnière de mon propre corps !

« Tu vas me tuer ? Robin ! Robin ! Réveille-toi je t'en supplie ! Tu n'es plus toi-même ! Robin ! » supplia ma navigatrice, en pleurant.

Je pouvais voir tout le cheminement de son flot, sa mer, son océan de larmes qui jaillissaient de ses iris terrifiés et s'écoulaient le long de son nez, de ses pommettes, de ses joues, de sa bouche écorchée, de son menton pour inonder le sable. Comme je voulais les essuyer ! Mais je ne pouvais pas ! On me le refusait. Qui contrôlait mon corps ? Par pitié qu'on me délivre ! La même détresse que j'avais éprouvée à Enies Lobby revint, me faisant pleurer mentalement. Mais ô combien elle était démultipliée ! Je voulais parler, crier : « Non, ce n'est pas moi ! Je veux rester avec vous ! ». Aucun son ne sortait. Je m'écorchais les cordes vocales pourtant ! Mais j'étais enfermée, séquestrée en moi.

Je tressaillis en sentant un objet dur et froid, apparemment en métal, serré dans ma paume. Non ! Ce n'était pas ce que je croyais ! Mais c'était bien la fatidique vérité : ce que je serrais dans ma main droite – du moins mon corps – était bel et bien un poignard. Mes globes oculaires s'agrandirent d'effroi : j'allais donc véritablement ôter la vie de celle que je considérais comme ma meilleure amie ? Non ! Mentalement, je luttai de toutes mes forces, je me débattis, me démenai pour me soustraire à cette autorité supérieure et ô combien cruelle qui tirait les ficelles de ma propre prison de chair. Mais, inexorablement, la lame effilée et aiguisée se rapprochait de ma compagne décharnée et éplorée. Non ! Non ! Je franchis un seuil de terreur jamais atteint en comprenant que tous mes efforts, même les plus désespérés ne serviraient à rien. Non ! Je n'abandonnerais pas pour autant. Non ! Jamais ! Je sentais les gouttes salées couler le long de mon visage immatériel. Non ! L'hystérie s'empara de moi.

Et finalement, alors que mon amie rousse me suppliait, blessée et aux portes de la mort, l'inévitable dénouement se produisit. Celui qui mettrait un terme absolu et irréversible à l'existence de notre navigatrice. Celui qui me plongerait pour l'éternité dans la peine et le regret, l'aversion envers moi-même. Le glaive mortel et fatal mordit la peau de ma nakama. Il la déchira, comme on déchire une feuille de papier en tirant dessus, alors que j'assistais, impuissante, à cet acte ignoble, ce meurtre, perpétré par ma propre main. Le sang gicla, écarlate, frais, éclaboussant le sol et moi-même par la même occasion. Nami hurlait de douleur, l'eau de ses yeux prenant une nuance rouge sur ses joues. Ma main ressortit l'instrument de trépas de la chair de la jeune femme, et l'y replongea aussitôt, arrachant un autre cri à sa victime. Moi aussi, je criais, j'hurlais, je m'égosillais à m'arracher la gorge, m'étranglant presque. Mais rien ne pouvait changer le présent. Oui, j'en avais commis des crimes, des tas ! Mais toujours, je l'avais fait consciemment, volontairement. Jamais on ne m'y avait obligée de cette odieuse manière. J'entendis ma compagne geindre lamentablement, en longs râles qui n'annonçaient aucun autre avenir, aucun autre futur, que la mort.

Je me laissai tomber à terre, mes jambes ne me soutenant plus, ayant miraculeusement repris possession de mon corps, hélas trop tard, farce ironique et cruelle du destin. Une fleur coupée, fanant dans une mare de sang… Voilà ce que j'étais. Pathétique. Je n'avais même pas pu sauver ceux auxquels je tenais et, en fin de compte, je les privais moi-même de leur substance vitale. Misérable. Mes larmes amères roulèrent sur mes joues, tombèrent au sol, se mêlant au sang. Mais jamais, ô grand jamais, elles ne pourraient laver mes péchés. Le rouge aurait toujours le dessus. Je lâchai le glaive ensanglanté, souillé, maudit. Je m'effondrai, anéantie par l'action que l'on m'avait forcée à accomplir.

« Ro… Robin… Je sais…que…ce…n'…était…pas…pas…toi…Je…je…ne…t'en…veux…pas…pas… Je…te…pard…on…ne… A…d…i…eu… » murmura-t-elle, agonisante, une dernière fois avant de se taire à jamais.

Et elle expira. Jamais plus elle ne respirerait. Jamais plus, elle ne réprimanderait Luffy pour sa goinfrerie, Sanji et Zoro pour leurs disputes enfantines. Jamais !

« Na…Nami ! Je suis désolée ! hurlai-je à la mort. Je regrette tellement ! »

Mais, même avec cela, jamais plus elle n'ouvrirait les yeux, ne serait-ce qu'une seule seconde. Jamais.

Tout autour de moi, si proche mais pourtant si loin, j'entendais les cris de joie et les rires de la foule, se moquant de ma détresse et du cadavre de mon amie. Le bruit me parvenait confus, brouillé. Pouvait-on se réjouir autant du trépas de quelqu'un ? Pouvait-on s'esclaffer à ce point autour d'une tombe ? Je voulais tous les tuer, leur faire payer.

« Taisez-vous ! Taisez-vous ! Taisez-vous ! » leur vociférai-je violemment, avec une haine si intense que j'eus peur qu'elle ne me fasse perdre la raison.

Mais ils continuaient. Encore et encore. Leurs rires redoublaient, ils se réjouissaient du magnifique animal de foire qui les distrayait. Prise de folie et cédant à mes pulsions meurtrières, je ramassai le poignard et m'élançai vers les gradins, mon fruit du démon ne fonctionnant apparemment pas. Je les tuerais, tous ! Autant qu'ils étaient. Tous. Jusqu'au dernier. Je crus entendre des couinements de peur à ma vue. Bien. Ils payeraient. Toute à ma vengeance, je ne vis pas les soldats de la Marine s'approcher. Ils m'entourèrent et me maîtrisèrent avant que je n'aie le temps de réaliser. Ils me menottèrent et m'entraînèrent sans ménagement à l'extérieur de l'arène, me traînant dans la poussière, m'éloignant de la dépouille de celle que j'avais tuée. Celle à laquelle je tenais. Celle que je ne reverrais plus. Ils m'enfermèrent dans ce qui me semblait être une cellule, m'emprisonnant dans l'obscurité et l'ombre, me laissant seule face à la réalité et aux terribles remords ainsi qu'esclave de cette épouvantable certitude : j'avais pris la vie de quelqu'un qui m'était cher.