Résumé:

Yenyeli n'aime pas les êtres humains, qui le lui rendent bien. Yenyeli déteste les sorciers, qui après tout ne sont que des humains avec plus de pouvoir. Elle rêve souvent de tous les tuer, les torturer, recommencer. Excepté un. Severus. Il est sur terre ce que le ciel est à la lune, indispensable, irremplaçable, un tout. Cette homme précieux lui a tout appris, ab-so-lu-ment tout mais aujourd'hui elle tente de l'éloigner. Yenyeli n'est pas très abordable, elle s'emporte avec des mots, elle déborde avec des gestes et terrorise tout le monde de par son apparence très légèrement trop sombre. Harry Potter ? Oui c'est un problème en soi, particulièrement quand il débite des mots d'amour ou d'autres inepties qui lui provoquent le désir irrépressible de l'assassiner. Ajouté que sa chère mère tout aussi abjecte du fond de son tombeau a décidé d'intervenir, de se mêler de ce qui ne la regarde pas.

Je vous ai dit que Yenyeli avait un caractère de chien ? De dragon en fait mais l'expression n'existe pas. C'est vrai depuis toujours et pire depuis deux mois. Depuis le jour de la mort de Voldemort, depuis le jour où Severus a été sauvé. Mais chut ! C'est un secret, Serpentard ne doit pas savoir, pas encore il ne pardonnerait pas. La rentrée est là, elle n'a plus le choix. Une promesse à tenir, un cœur empathique et malade à contenir, des changements, des nouveaux élèves pas tout à fait humains, une nouvelle aventure se destine pour Poudlard quand le passé a dessiné une ligne un peu différente de l'œuvre d'origine. Yenyeli, Severus, Harry, Dumbledore, Lily, Sacha, Hermione, Sirius et tant d'autres sont là pour nous distraire et raconter une belle histoire. Du moins c'est ce qu'ils croient mais je me fais l'honneur de les trahir avant la fin. La lune brille dans le ciel, le soleil vole sur la terre. Ciel et Terre, un petit Prince a décroché la Lune.


CIEL ET TERRE, UN PETIT PRINCE A DÉCROCHÉ LA LUNE

PARTIE I: SEVERUS


Prologue :

Tout était noir ici. Sans vie ici. Tuée la lumière, gagnées les ténèbres. Le temps, stoppé, hier et demain n'existaient plus. Tout à l'envers, tout à l'endroit, aucune boussole pour désigner le nord et retrouver sa route.

Dans cette obscurité, une âme était perdue.

Egarée l'âme promise au sacrifice, égarée l'âme sacrifiée pour l'être élu.

Marcher et avancer, errer sans détourner, celle née par la complicité du sang des morts, mourait, dévorée par son obscurité. Accompagnée par Solitude, alliée de son inexistence, maintenant disparaissait pour elle, elle avait échoué.

Adieu, ne restait qu'à prier la Mort et oublier.

Une mort déguisée, un énorme sablier trônait au milieu de nulle part.

Ironie du ciel, on lui dessinait d'un trait de pinceau sa ligne sans demain. Le sable, pétrifié à la porte du passé, n'écoulait plus maintenant, et enfermé dans sa statue de verre comment marquer le temps et annoncer demain ?

Une mort à l'humeur détraquée.

Dans cette obscurité, un ange priait être trouvé.

Moquerie du ciel, quelqu'un voyageait dans ses ténèbres, tout auréolé de lumière, pour lui venir en aide et la sauver. Affront du ciel, c'était un ange déchu. Une âme effacée des vivants, un souvenir du pays des vivants, un cauchemar innommable pour le cœur évaporé dans son néant.

Echos à ses démons, l'âme à l'agonie retarda l'instant d'observation. Impossible la réalité de l'hallucination. Improbable la présence du cauchemar. Comment celle haïe toutes ces années pouvait renaître dans l'ombre de son inexistence ? Elle devait l'ignorer et continuer, mais l'esprit disloqué, aliéné dans cette obscurité à l'allure de tombeau, inconcevable était l'indifférence. Ce qui aurait dû n'être qu'une chimère, un passé révolu, se métamorphosa en véritable mer de la vengeance.

Au milieu de nulle part, deux femmes se livrèrent un combat sans merci.

D'un côté les ténèbres, de l'autre la lumière, le combat du bien et du mal. Une âme égarée et un ange déchu. L'une, enfermée dans une opacité noire et infranchissable, ne laissant que l'étincelle de son regard briller rouge et jaune -un regard du diable, un regard de dragon déchaîné. L'autre, nimbée d'un cercle nitescent et tranquille, soulignant la beauté humaine teintée par le joli vert au milieu de ses yeux -de l'émeraude.

En position d'attaque, buste penchée vers l'avant, les mains enterrées dans les ténèbres, le visage déformé par la colère et la haine, une bête sur le point de charger, le dragon passa à l'offensive, se déplaçant à la vitesse impressionnante des ténèbres, suprêmes et indestructibles ici.

Sa perdition inéluctable se dégradait inguérissable.

Défier cet être du passé, raviva la flamme immensurable de sa rancœur. L'image d'un petit garçon malheureux hélant le prénom de l'amie pour se réconforter, se réimprima dans l'amnésie de sa mémoire. Hantée par le fantôme d'un adolescent martyrisé et braillé -rêvant l'amie devenue grande comme d'une amante-, elle fut catapultée aux portes de Souvenirs. Passée en boucle la vision d'un jeune homme, trahi et condamné, vendu son âme et pleurant l'amour de sa vie, celle qui oubliait jusqu'à son existence, se para de son épée de feu, bouleversée à perdre la raison qu'elle était dans cette hérésie de l'espace et du temps.

Conférée de la force destructrice du ciel et de la terre, elle s'implanta féroce et menaçante dans son monde entièrement noir. Ici, c'était chez elle, personne n'était permis d'entrer sans la signature de son accord. Et surtout pas cette femme mariée à Griffondor et judas des Serpentards.

La haine était l'absolution dans ce lieu où tous les sentiments étaient anéantis. La haine et la colère, comparses de l'infinie ténèbres.

Que se déversent de flots dévastateurs les flammes du châtiment divin, que se forge d'un acier inoxydable la lame impardonnable.

L'autre femme, paisible, recula d'un pas et se prépara à l'assaut. En garde, les deux bras croisés sur le devant et les paupières abaissées, elle aspecta la déflagration du dragon respirant la mort. Quand siffla la houle, elle rouvrit les yeux et amortit d'un grand charivari la vague magique lui arrivant plein sur le cœur.

Bang, tous les sorts se multiplièrent dans cette obscurité. Les bâfres du dragon percées pour tuer, tandis que l'ange, bienveillant, se contentait d'esquiver. Combattre n'était pas l'objectif de sa mission.

- Tuer, tuer, tuer, tuer, tuer, tuer, tuer, tuer, tuer, tuer, répéta l'âme égarée possédée par la folie du ciel et de la terre et assénant ses coups funestes sur l'adversaire.

- Non ! para la lumière charitable et profitant d'une décélération brève des ténèbres pour fuir la salve prochaine et espérer la paix. Evadée de plusieurs mètres pour les séparer, elle s'expliqua, sérieuse et décidée.

»Je veux vous aider.

Mal interprétée l'explication, mal reçue la main secourable. D'une réaction immédiate, l'âme égarée se projeta sur elle, l'assaillant avec la conviction du Malin gravé sur le visage. Absolue, elle l'absorba dans ses ténèbres. Devancée, basculée, chutée la lumière. Assiégée, ensevelie par un nuage impénétrable, deux mains noires serpentées jusqu'à son cou firent le serment de l'expédier six pieds sous terre.

- M'aidez ? s'excita d'un rire de démon le dragon enragé. Inhumaine la voix du dragon, un grondement sourd, guttural, un animal sauvage. M'aider ! Hypocrites ! Sales hypocrites que vous êtes tous, que soit tuée toute l'engeance de l'humanité hier et demain.

Un cri, un aveu, une délivrance, que sonne le glas du jugement ici et maintenant.

Ne plus éluder et affronter.

Elle l'affronta. Soumise à son intempérie, l'âme proche de se casser déchargea tel un geyser expulsé des abysses de l'enfer tout son ressentiment. La voix aussi élimée qu'un sabre, du venin mortel, elle s'extériorisa en foudre fendue sur la terre, tout en raffermissant sa prise.

- Vous l'avez abandonné ! Rejeté jusqu'à l'inexistence !

Effréné, mais misérable le ciel tombé sur la terre, les lèvres se précipitèrent, une psalmodie en l'honneur de l'être élu.

»Vous connaissiez sa réelle pensée au jour de votre séparation, quand comprimé par la pression des autres et inférieur, il vous a injurié. Il avait peur, esseulé. Vous chez Griffondor, entourée des Maraudeurs, lui chez Serpentard, cerclé par Solitude. Il était faible, fragile, mais malgré tout il vous avait choisie. Amie, élue, vous l'avez renié d'un revirement terrible, avant de l'oublier. Il vous aimait, mais d'un remerciement sinistre vous ne lui avait offert que la haine.

Il était malheureux de témoigner votre éloignement tous les jours, jaloux de l'amitié éprouvé pour ces Maraudeurs. Alors oui, il a prononcé l'interdit, scandé l'irréparable, mais il se présentait si humilié dans cet instant. Si frustré de ne pas savoir se défendre que vous voir apparaître encore et toujours pour l'aider comme un enfant qu'il n'était plus, a fait chaviré l'impassible de sa légende. Un raz de marée a pris possession de son cœur. Il a décrié les mots sans les penser. Il est comme ça.

Il vocifère, poignarde avec talent là où ça fait mal quand son cœur saigne jusqu'à l'insupportable. Maladroit, il se préserve et trouve le courage de vivre demain. Vous auriez dû comprendre, mais vous n'avez rien vu, rien accepter d'entendre.

Il pratiquait la magie noire, et alors ? Il s'était juré d'une promesse se faire chevalier afin de protéger tous les êtres thésaurisés dans son cœur. Chevalier noir, tabou et dangereux, il préférait se voir banni du royaume des dieux que de souffrir sur terre un être cher disparu à cause de sa faiblesse. Son cœur souffrait déjà la perte d'un être cher.

Mais encore une fois, vous n'avez rien compris. Sans même le soutenir ou lui donner la chance d'apprendre l'autre chemin, vous l'avez brisé, vous avez bafoué d'un revers de la main tous ses rêves et ses espoirs. Inhumaine, vous avez assassiné le cœur de Severus Snape !

Affligé, voilà ce qui resta du ciel après maintenant.

Silencieuse, la lumière écouta, devinant avec conscience tout le trouble de celle qui se perdait et qui nécessitait la sauvegarde pour demain. Sans bouger, elle sollicita être entendue à son tour.

- Vous… grésilla-t-elle en crachotant pour respirer par-delà la nocivité qui continuait de lui mordre la gorge. Me… dé-testez, je-com-prends…

Manque d'inspiration, un nouvel éclat de rire abominable raisonna dans la bouche du dragon. Ebranlé, le sablier se fissura.

- Vous détestez ? hoqueta la voix à faire trembler les cieux et le sourire sadique. Non, je ne veux déteste pas, je vous… Abjecte !

Crachés les mots, éructés les mots. Elle resserra ses doigts, son regard de démon hypnotisé dans celui proche d'être tué. Ivre, elle exultait d'assister à l'expiration du dernier souffle de vie de cette femme. Jouir sa douleur et récolter sa peur au moment de trépasser de souvenir à rien du tout.

»Son allégeance aux Mangemorts, le sacrifice du fil de son destin, tout est à cause de vous. Il soupirait de vous impressionner, désireux de s'attirer votre regard. Être admiré et reconnu par vous et nul autre que vous était sa lumière pour demain. Il était si innocent, si torturé par vos précieux amis rouge et jaune, vous auriez dû le défendre de plus de voix, de plus de cœur, de plus de puissance. Parce qu'il vous avait recueilli. Il vous avait choisie. En votre nom, il a vendu son âme. Par la lune, il a vécu toute sa vie à travers vous !

Survivre demain quand le cœur est déjà mort, pas de mesure pour battre l'âme, il faut survivre. Egoïste, vous avez kidnappé sa lumière. Au final, ne sont restés que ses ténèbres et ses remords pour avancer demain. Un survivant oublié, un fantôme esseulé, voilà ce qu'il est advenu de Severus Snape ! Alors non, je ne vous déteste pas, je vous maudis, je vous abjecte dans la mort, soyez maudite Ô Sainte Lily des Griffondors. Tout est votre faute ! Et maintenant que votre mort soit pénitence, je jubile d'avance visionner votre dépouille dans mon monde des ténèbres.

- Mais je suis déjà morte, contredit Lily Potter, affaiblie et la trachée aussi brûlante que de la lave en fusion. Etranglée, elle étouffait. Tuer mon fantôme ne vous soulagera pas pour vivre demain.

- Justement ! L'œil rouge s'intensifia, un rubis au milieu des ténèbres. Votre fantôme comme vous dites se définit à travers lui et votre descendance. Vous survivez même du tréfonds de votre tombe, soyez châtiée ! Je n'ai pas besoin de vous pour demain. Demain n'existe plus pour moi.

- Vous avez tort ! Vous êtes le salut de ma mission, le salut pour demain.

- Ohhhh…. mais je me contre-fiche de votre sacro sainte mission, et si éliminée votre mission, alors éliminé votre salut. Eliminé Demain !

Nouveau cri.

Le noir, comme d'un appel répondu à son maître, augmenta, s'appesantissant de plus de poids au milieu de nulle part.

Une entreprise stérile. L'opiniâtreté de la sorcière rouge et or en rien altérée dans sa souffrance tenta de renverser la situation. Sans chercher à réchapper à son bourreau, elle invoqua sa magie. Etirée la main, elle vola vers le poignet meurtrier, avant de s'y cramponner. Puis, elle se concentra. Que sa lumière se répande dans le corps en proie à ses démons et l'en délivre pour la sauver. L'âme égarée, prise au dépourvue et brusquement éclairée d'un malaise qu'elle ne désirait pas, rétrograda. Flétrie la rose assurée de sa mauvaise humeur, elle se retrancha. Une lumière voulait vaincre ses ténèbres, non !

- Lâ-lâchez-moi ! Qu'est-ce que vous faites, arrêtez !

Elle n'aimait pas la lumière. Elle ne voulait pas la lumière.

- Je veux vous aider, résista de plus de certitude Lily en pleine maîtrise de la situation. Influente, elle ajouta l'autre main pour doubler sa puissance. Vous aider vous et Severus.

- J'ai dit : LÂCHEZ-MOI !

Le dragon, paniqué, se rehaussa, essayant de battre des ailes tout en tirant en arrière pour se délivrer, en vain. Alors elle tapa du pied, cognant fougueusement le corps de la lumière. Encore et encore, toujours, s'acharnant sur ses ventrailles comme sur un sac de cailloux, mais l'autre invariable, ne relâcha rien. Encaissant la douleur atroce des coups répétés des ténèbres, elle se focalisa sur sa lumière. Elle gagnait du terrain, le dragon prisonnier s'illuminait, révélant peu à peu l'existence de l'inexistante au milieu de nulle part.

- Ceci n'est pas le chemin pour vous demain. Les ténèbres ne sont pas votre solution pour demain.

- S-s-stop, suf-fit ! se débattit de toute la hargne du ciel l'âme égarée terrorisée.

Lily Evans lui souriait, d'un air de sauveur, tandis qu'elle plongeait inexorablement.

Sauveur ?

Non ! Abomination, ignominie, exécration, voilà comment se figurait cette femme dans sa mémoire oubliée. Hors de question de lui permettre plus avant l'étendue de sa lumière. Ici, seules les ténèbres devaient survivre. Pas de lumière pour demain, plus de lumière dans la mort, noir, noir, noir, noir, elle ne désirait que du noir. Invisible dans l'obscurité, elle supplia la fin ici et maintenant. Le silence des voix chantant leur requiem. Teindre en noir toute son inexistence et annihiler pour l'éternité toute la lumière de ces humains menteurs et lâches et si capables sur terre et dans le ciel de se déchirer.

»Maudis, maudis, maudis, soyez MAUDITE !

Lily, impérissable, continua de sourire, sereine et rassurée. Parier sur demain était l'espoir pour demain. Parier sur elle était l'espoir pour Severus. Mais périlleux était demain et terminer maintenant pour vivre demain était le salut de sa mission.

- Que soit fêtée votre existence !

- Quoi ?

- Vous tenez si fort à lui avec l'inconscience d'une première fois, Severus a cueilli l'idéal pour veiller sur lui. Il mérite l'idéal. Vous avez raison, je l'ai abandonné, et détesté. Mais j'étais si jeune et fragile à l'heure de nos séparations. Jeune, influençable, j'ai commis l'erreur irréfutable.

La colère dégrada l'âme égarée, les ténèbres s'obscurcirent, fuligineuses, elle se libéra, s'arrachant de ses liens. Trois mètres en arrière, elle se rétracta telle une bête acculée, une bombe sur le point d'exploser, puis vomitive, elle incrimina de toute la puissance de l'érosion de sa voix.

- Une erreur ? L'erreur est commune à l'expérience de la vie, mais d'un apprentissage elle donne la réflexion pour mieux choisir demain. Si le regret tatouait votre séparation, pourquoi l'avoir proscrit sans édicter le mot pardon. Vous réconcilier était facile. Un geste de vous, un souffle, et Severus était ressuscité, ramené du royaume des morts par la lumière de l'être aimé.

Lily, toujours aussi tranquille, se releva, doucement. Un pas, deux pas, elle se présenta haute et grande dans son dôme de lumière. Nostalgique, elle signa non en face de sa mission.

- Je n'avais pas la force de m'y confronter. Cette part enténébrée, profondément enracinée à l'intérieur de lui me terrifiait, je la déjetais. Il était un Mangemort, il était l'ennemi.

- IL ETAIT TOUJOURS LUI ! SEVERUS !

Bang, une autre vague à la rime mortelle jaillit droit sur Griffondor, l'envahissant par-delà ses frontières. Bousculée, blessée, mais toujours debout, elle riposta.

- Et c'est ainsi que se témoigne toute la différence entre nous. Vous prenez tout de lui, le bon et le mauvais.

- Toute la vie se peint en noir et blanc, il faut les deux couleurs pour exister. L'échiquier du monde a besoin d'ombre et de lumière pour se différencier.

- Je vous l'accorde, mais Severus est si difficile d'appréhension.

- PARCE QUE VOUS NE SAVEZ –PAS- VOIR !

Des ténèbres, plus de ténèbres, ils se nourrissent de la colère et de la haine, l'âme en fut recouverte de partout, elle se mourait pour l'être élu. Il fallait agir et vite.

- Ce savoir est votre don. Je bénis votre rencontre à tous les deux. Blessée et meurtrie, vous avez creusé le tunnel menant jusqu'à son existence. De cette force et de cette sincérité capable de déplacer les montagnes. Ce regard, qui se regarde si différent de la majorité, a discerné la lumière de Severus, tout en s'accommodant de son obscurité. Vous affirmez que j'avais la capacité de sa re-vie, je proteste. Ce miracle est le vôtre. Severus n'est plus seul depuis longtemps. Vous maintenez le cap à ses côtés et l'accompagnez aveuglément sur le chemin de demain.

- Foutaise ! qu'importe mon existence furtive à ses côtés, il n'a de quête que votre inexistence. Son cœur vous est dédié.

Douleur, tristesse, désespoir, abnégation, quelle épreuve pour le ciel que de reconnaître qu'il n'était rien du tout, une aberration à la chance miraculeuse d'avoir d'un jour inespéré, fait la rencontre d'un homme précieux et estimable. Un soleil en plein milieu de la nuit.

Heureusement, obstinément, Lily relança les dés, essayant avec ardeur tenace de dévoiler les chiffres de la vérité.

- Vous êtes aveugles tous les deux.

- Je vous demande pardon ?

- Vous ne compreniez rien. Severus est loué de la chance de vous avoir à ses côtés.

- Non ! Je- suis chanceuse d'avoir rêvé à ses côtés.

- Par Griffondor ! Cette manière innocente de continuellement le replacer par-dessus vous. Vous êtes naïve, vous sous-estimez la valeur que vous représentez à ses yeux.

- Je ne sous-estime rien du tout, c'est vous qui…

- Vous pourriez tuer pour lui.

Une affirmation.

»Vous l'avez déjà fait par le passé.

- Que… quoi ? trembla aussitôt les ténèbres, lucide du tournant abrupt de la conversation. Elle ne voulait pas l'entendre, elle ne voulait pas s'entendre dire par cette femme qu'elle avait commis l'impardonnable, l'incorrigible, elle avait franchi la ligne de démarcation la séparant à jamais de son soleil. Mais toujours, Lily, qui détenait les fils du chemin destiné pour vivre demain, exhiba le masque enduré péniblement sur le portrait du ciel.

- Sentie souillée du sang des morts, vous persistez à lui cacher, de même que votre nature en devenir. Par crainte qu'il vous déteste dans votre métamorphose.

- Stop, arrêtez…

- Parce que vous le connaissez et savez ce dont il a besoin. Néanmoins, que Griffondor vous frappe de sa lucidité, il vous manque l'élément déterminant tout votre avenir. Le ciel peut témoigner de mes mots, il est inconcevable pour le jour et la nuit de renier son cœur âme-sœur. Or par miracle, vous êtes le cœur de Seve…

- J'ai dit : ARRÊTEZ !

Cette fois, impossible de contenir la flamme destructive du dragon. Le ciel embrasé et flotté du drapeau de la mort, Lily n'eut pas la moindre chance pour se défendre. Pénétrée sa lumière, balayée sa lumière, ses fortifications magiques en un éclair furent réduites en poussière. Un voile noir empiéta sur son territoire et débuta l'ascension de son corps.

Au milieu de nulle part, l'âme égarée se consuma. Drapée d'une sphère entièrement noire, elle n'existait plus. Mais ne plus exister n'était pas suffisant et au pire de l'horreur, une eau rouge suinta au travers de cette indescriptible chose. Du rouge de sang, du rouge des morts, débordant, et inondant tout le périmètre. Un bain de sang uni aux ténèbres, c'était la fin du ciel et de la terre.

- Non ! s'écria Lily la peur au ventre d'être apparue trop tard pour la sauver. En détresse, elle se noyait dans l'océan de la mort.

»Résistez, survivez, il faut vivre demain ! Par Merlin, Dumbledore j'ai failli à ma mission, le ciel pleure sur la terre, le ciel meurt pour la terre, il pleut rouge sur la terre, la lune pleure sur la terre. QUE QUELQU'UN M'ENTENDE PAR PITIE !

Une prière, entendue.

Expelliarmus éloquent, une voix impériale s'affranchit au milieu de nulle part. Un homme, un invité inattendu s'immisça dans les ténèbres. Un invité vêtu tout de noir et muni de son impassible légende. Sûr de lui, il avança, précédé de sa magie aussi rayonnante qu'un soleil de feu. Un pas, deux pas, il visa le dragon incontrôlable et recommença par deux fois. Puis le bras étendu, il s'infiltra. Déterminé et courageux, il fouilla avec la précision de son talent toute cette masse visqueuse et synonyme du vide lorsque touché la cible, il tira.

L'instant suivant, disparu le sang des morts, évacué le noir des morts, l'âme égarée frissonnait contre le cœur de Severus Snape.

- Se-Seve-rus, haleta-t-elle bercée par une chaleur semblée familière et amie. Tu ne de-vrais pas-être là, c'est… dangereux.

Un contraste saisissant.

D'une note à la consonance désagréable et amère auparavant sur l'ennemie, c'est douce et harmonieuse qu'elle chantonna dans la poitrine du Serpentard.

- Imbécile stupide, vilipenda Severus en la secouant sans ménagement. Inconsciente et idiote, tu t'es encore endormie vers ta stupide lune. Yenyeli, réveille-toi !

Les yeux à demi ouverts, l'interpelée contempla l'homme surgi de nulle part, comme d'un héros tombé du ciel pour la sauver.

Yenyeli, tel était donc son nom au milieu de nulle part.

Yenyeli hésita. Interpréter le vrai du faux, discerner le rêve du cauchemar était compliqué. Severus était l'espoir. Mais il n'y avait plus d'espoir ici. Perturbée, elle chercha la solution, inspectant rapidement l'alentour quand d'un opprobre des plus criminelles, la peur l'asphyxia d'un souffre plus toxique que celui d'un volcan. Ses ténèbres attaquaient Serpentard, une contamination. Non ! Elle recula, vacilla, supplia l'échappatoire, mais Severus résolu, l'accrocha de son ancre. Imprégnant son regard dans le sien, il glissa sa main dans la sienne et conforté de sa magie, il lui restitua du réel.

- Severus non, lutta Yenyeli épouvantée. Elle essaya de le quitter, il scella plus fort leurs deux mains entrelacées.

»La promesse du sacrifice, le vœu pour la promesse, tous les sceaux ont été rompus, t'aventurer ici est néfaste pour toi, va-t'en !

- Que m'importe toutes ces élucubrations, renvoya l'homme intransigeant et les lèvres articulées de leur sévérité habituelle. Je ne pars pas sans toi ! Et surtout ne va pas t'imaginer dérober à mon impératif car je ne te laisse pas le choix.

Sans lui permettre le temps d'objection, il la tracta dans l'autre sens, commençant à les guider dans les ténèbres vers sa direction d'origine.

- Severus, intervint alors Lily abandonnée en arrière et redorée de sa lumière. Le vœu pour la promesse, c'est à toi de…

- Non !

Magistral, professoral, le Serpentard se dressa. Viré 180°, il se positionna plein champ sur Yenyeli pour la protéger.

»Il est assez de converser avec les morts !

- Mais c'est important, endura Lily tendue et intriguée de leur tableau. Curieuse, elle se donna du temps pour regarder. Ils formaient une dualité singulière et inimitable tous les deux. Si maladroits l'un et l'autre, si constamment révolutionnaires du monde en général, ou à l'inverse indifférents des autres, les dévisager était comme assister à la naissance d'une étoile filante. Ils étaient le ciel et la terre, deux êtres à n'être qu'un.

»Tu as changé Severus… Une jolie lumière brille à travers toi.

- C'est l'étincelle d'une étoile, commenta celui-ci en lui accordant l'attention de son sombre regard. J'ai rencontré une étoile.

- Une étoile, oui évidemment. Le soleil et la lune, ainsi parle la prophétie. Ah…Severus, s'il te plaît attends, ajouta-t-elle privée de sa divination.

Par Merlin, elle n'avait pas rempli sa mission. Severus s'éloignait, obsédé de réveiller la jeune femme tenue fermement au creux de sa main.

»Severus, écoute-moi ! Ne perds plus ton temps. Cesse de te leurrer sur tes sentiments, c'est important. Severus ? Elle tenta de les suivre, mais c'était difficile, ils empruntaient la route du monde où elle n'existait plus.

»Je suis sérieuse, le sable du temps est compté, ouvre les yeux où il sera trop tard.

Severus n'écoutait pas. Même implorante, il accélérait et disparaissait dans l'horizon, alors d'un va tout, et s'engorgeant d'un grand bol d'air, elle cria le seul nom capable de bloquer Serpentard.

- Harry !

Unique et expulsé du dernier espoir, Severus, heurté, se figea.

»Harry est la clef Severus. Ce qu'il ressent et ce qu'il voit, tout est lié, il est la réponse pour vous demain. Comprends Harry et tu obtiendras toutes les réponses pour vous deux.

Etrange, Severus se retourna, désireux d'élucider cette femme si obnubilée de leur venir en aide. C'était une mise en garde et une révélation que l'ancienne amie s'échinait de leur narrer. Mais imparfait, il éluda. Le noir de ses yeux aussi insondable qu'au quotidien de sa légende, il s'en alla, sans un mot.

- Severus, oublie l'indifférence, persévéra Lily en un refrain funèbre. Tu vas tout perdre si tu t'entêtes à verrouiller la porte de la vérité. Ne te censure plus contre la vérité. Bon sang, Severus, qu'es-tu prêt encore à sacrifier avant de démolir ton mur et consentir enfin tes sentiments à purifier ton cœur ? Elle se meurt Severus, tu te meurs avant elle. Le ciel pleure sur la terre, le ciel meurt sur la terre… Le dernier dragon a survécu, incendié et tué le ciel du dragon, en cendres et morte la terre du dragon. Pleure le dernier dragon, il crie pour son âme-sœur. Arrachées les ailes du ciel, il ne peut plus voler vers son soleil. Le soleil a disparu, il pleut rouge sur la terre, la lune pleure sur la terre. Severus, je t'en conjure, ceci est l'oracle prédit pour vous deux, il faut que tu comprennes. SEVERUS !

Inutile les cris, Severus et Yenyeli, dans la brise du silence, avaient disparu.

Lily, rompue et impuissante, tomba à genoux dans les ténèbres.

- Ne vous en faites pas Lily Potter…

Comble du ciel, une autre jeune femme franchit les portes d'outre-monde. Pétillante et les yeux emplis de la chaleur de tout un peuple, un souvenir.

»Vous n'êtes pas la seule à prier pour leur porter secours. Nous sommes plusieurs à ordonner la lune pour que triomphe demain.

Le visage haut, Lily contempla la reconnaissance souriante et fière dans cet instant et allongea la main pour attraper la sienne.

- Vous, mais…

Avant même que les doigts ne se frôlent, le sablier au milieu de nulle part explosa. Tout fut terminé, toutes les âmes, évaporées.

Tout était noir ici, sans vie ici. Tuée la lumière, gagnées les ténèbres.

Déversé le sable dans ce monde inexistant, le temps recouvrait sa capacité d'hier, d'aujourd'hui et de demain. Mais délivré de ses chaînes, et délaissé sans carte pour se guider, comment reconnaître le chemin de Destinée ? Comment trouver la route amenant vers demain ?

Le Ciel pleure sur la Terre,
Le Ciel meurt sur la Terre.
Le dernier Dragon a survécu,
Incendié et tué le Ciel du Dragon,
En cendres et morte, la Terre du Dragon,
Pleure le dernier Dragon,
Il crie pour son âme-sœur.
Arrachées les ailes du Ciel,
Il ne peut plus voler vers son Soleil.
Le Soleil a disparu,
Il pleut rouge sur la Terre,
La Lune pleure sur la Terre.
Que soit contée l'épitaphe du Ciel et de la Terre.