Non. Non, non, non. Non, pas encore une fois, c'est impossible, c'est TROP, non, non, NON !
Le premier réflexe de Connor aurait été de s'enfuir en courant, de monter dans sa voiture et de rentrer dare-dare à l'appartement 303, se réfugier sous la couette et dans les bras d'Oliver, en sécurité. Il fermerait les yeux, et il dormirait tout son soûl, et avec un peu de chance, le lendemain matin, tout cela ne serait qu'un affreux mauvais rêve. Oui, c'était ce qu'il aurait voulu faire.
Sauf qu'il ne pouvait pas faire ça, pas vrai ? L'excuse de la drogue avait marché une fois, mais Oliver n'y croirait plus à présent. Surtout depuis qu'ils vivaient ensemble, et qu'il avait bien vu que Connor était clean. Non, il ne pouvait pas aller se jeter dans les bras de son amant, pas avant de s'être calmé, et de s'être trouvé une excuse valable pour expliquer l'heure tardive à laquelle il rentrait.
Tout ça, c'est la faute d'Asher ! C'est lui qui a tué Sinclair ! Alors pourquoi Annalise essaye de le protéger, au lieu de le laisser assumer son crime ? Pourquoi ? Pourquoi je me retrouve de nouveau mêlé à ça ? Je n'ai rien demandé ! Pour Sam non plus, je n'y étais pour rien, c'est Wes qui l'a tué, je suis innocent ! Alors pourquoi, POURQUOI, je me retrouve encore dans cette situation ?!
Ses jambes ne le portaient plus. Il tremblait de tout son corps, il avait le souffle court, et il se sentait la tête légère, à un point tel qu'il dut s'appuyer à la paroi pour ne pas tomber, avant de se laisser glisser lourdement au sol. Il se sentait gelé, et ses dents claquaient incontrôlablement, mais il savait que ça n'avait rien à voir avec les pierres gelées contre lesquelles il s'était adossé. Comme lors de cette aube fatale où il était allé frapper à la porte d'Oliver, paniqué après le meurtre de Sam, il éprouvait de plus en plus de mal à respirer. Il entendait son propre souffle, irrégulier et sifflant, résonner à ses oreilles, et assourdir tout le reste.
- Connor ! Connor, je t'en prie, ne pars pas sans moi ! lui parvint la voix de Michaela, de très loin.
Le visage tuméfié d'Emilie Sinclair, superposé au regard vide de Sam. Le corps de la proc' s'écrasant juste devant moi et Michaela. Bonnie me menaçant d'être le prochain cadavre si je n'obéis pas. Annalise me disant que Frank ne s'est pas débarrassé de ma voiture, et qu'ils peuvent s'en servir comme preuve contre moi. Annalise, me disant qu'elle peut ruiner la vie d'Oliver, s'assurer qu'il aille en prison, où il se fera certainement violer. Le poids du flingue dans ma main – beaucoup plus lourd que ce que j'aurais imaginé. Et la haine… Intense. Viscérale. Aveuglante. J'ai voulu le faire. J'ai vraiment failli le faire. Si Michaela n'avait pas été là…
Un coup de feu déchira la nuit, et Connor sursauta violemment. Quelqu'un avait donc fini par tirer sur leur professeur ? Qui ça ? Pas Michaela, elle s'était enfuie après lui. Alors, qui ? Wes ou Laurel ? Certainement Wes. Après tout, c'était déjà un assassin. Et il avait toujours été le petit toutou d'Annalise, faisant tout ce qu'elle lui demandait… Un rire hystérique s'éleva soudain, timide d'abord, puis s'enfla de plus en plus, et Connor réalisa que c'était lui qui riait ainsi, sans pouvoir s'arrêter. Ses mains tremblaient, et tout son corps, et sa vision était floue, ses yeux brûlaient, et il était sûr de sangloter en même temps. Heureusement que personne n'était là pour le voir ! Il devait sûrement avoir l'air pathétique !
Maintenant, il se sentait étouffer entre le rire et les larmes, et il n'arrivait plus du tout à reprendre son souffle, hoquetant comme un poisson hors de l'eau.
Respirer ! Il faut que je respire ! Qu''a dit Oliver pour me calmer, la dernière fois ? Ah oui. Compter jusqu'à dix. Il faut que je compte jusqu'à dix. Plutôt simple, pas vrai ? Jusqu'à dix. Je suis capable de le faire. Allez. Un – inspirer – deux – expirer – trois – inspirer…
Petit à petit, sa respiration se calma, et la sensation de vertige qui embrumait son cerveau se dissipa, ne laissant plus derrière elle qu'une migraine lancinante. Connor renifla plusieurs fois, essuya ses joues ruisselantes du revers de sa manche, et se remit debout sur ses jambes flageolantes. Il fallait qu'il aille voir, c'était plus fort que lui. Il avait envie de voir Annalise souffrir, autant qu'elle le faisait souffrir lui. Mon Dieu, qu'est-ce qu'il pouvait la détester… Si elle ne l'avait pas empêché d'aller se rendre à la police, après le meurtre de Sam, il n'en serait pas là.
Et Oliver non plus. Oliver, qui s'était déjà fait enlever (brièvement) par un potentiel tueur en série, lequel connaissait leur adresse. Oliver, qui trouverait sans doute beaucoup moins excitant de travailler pour Annalise, s'il savait toute la vérité. Oliver, qui ne devait surtout rien savoir de toute cette merde dans laquelle Connor était plongé jusqu'au cou. Il était déjà bien assez impliqué comme ça !
Mais lorsqu'il arriva enfin dans le salon des Hapstall, Wes et Laurel n'étaient plus là, et Annalise n'était pas juste blessée à la jambe. Au lieu de ça, elle se vidait de son sang par un trou béant dans son flanc, le regard fixe et la respiration erratique. Connor sentit la nausée l'envahir à nouveau, mais il parvint à ne pas vomir, et s'agenouilla précipitamment à côté de son professeur.
- Non, non, non… murmurait-il frénétiquement, comme s'il s'agissait d'une formule magique qui lui permettrait de modifier la réalité.
Ce n'était pas le plan. Il fallait juste lui tirer dans la jambe, pour que toute cette mise en scène soit plus convaincante. Mais il ne fallait surtout pas qu'Annalise meure ! Il avait beau la détester, elle avait juré de les protéger, tous, et sans elle, ils étaient perdus. Il n'arrivait pas à lui faire confiance, et il n'y arriverait sans doute jamais, mais elle était leur seule chance de s'en sortir, désormais. C'est pour cela que Connor se mit à faire pression sur la plaie, tentant désespérément d'arrêter l'hémorragie.
- C'est votre faute. C'est toujours votre faute ! pesta-t-il, essayant d'appuyer sur la blessure malgré les tremblements violents de ses mains.
A ce moment-là, Laurel, Wes et Michaela (Michaela ? quand donc était-elle revenue ?) firent irruption dans la pièce à leur tour, et Connor leur jeta un regard éperdu.
- Elle… elle est en train de mourir. Elle est en train de mourir !
- Connor, on ne peut rien faire pour elle, lui dit Laurel en s'agenouillant près de lui.
- Non !
- La police va arriver d'un instant à l'autre, ajouta Wes en lui agrippant l'épaule.
- Je m'en fous !
- Bordel, Connor ! intervint Michaela. Le seul moyen de nous en sortir, c'est de partir maintenant. S'il-te-plaît, Connor. S'il-te-plaît.
Et son amie – parce que oui, Michaela était son amie, et peut-être même sa meilleure amie, même s'il aurait éclaté de rire si on lui avait dit ça en début d'année – lui caressa tendrement la joue en disant ces derniers mots, l'obligeant à la regarder dans les yeux, et Connor se sentit céder immédiatement. Il pouvait faire confiance à Michaela. C'était elle qui l'avait empêché de commettre l'irréparable, plus tôt, et de devenir un assassin comme Wes. Il était complice, certes, mais il n'avait pas encore de sang sur les mains – et c'était entièrement grâce à sa rivale. Alors, il hocha la tête, et se laissa entraîner à l'extérieur.
Ce ne fut que plus tard, dans la voiture de police conduite par Nate, qu'il s'aperçut que ses mains étaient bel et bien couvertes de sang, celui d'Annalise, et qu'il se mit à les essuyer de façon compulsive, vidant l'entièreté du paquet de mouchoirs de Laurel.
Salut, amis lecteurs. Je reviens avec une petite fic sur HTGAWM, mais cette fois-ci je compte écrire plusieurs chapitres, en partant de la nuit du meurtre 2.0 jusqu'à après l'épisode 15. J'espère que ça vous plaira ! Bisous à tous !
