Bonjour à toutes et à tous.

Voici ce qui m'est sorti de la tête dernièrement. Malgré le background qui est le même, Beckett et Castle ne sont toujours pas sur les traces du Sénateur Bracken et "Always" n'a pas eu lieu…encore? Je situerais donc l'histoire durant la saison 4 mais les événements de "47 secondes" n'existent pas car je suis une éternelle romantique et j'ai toujours espéré que Kate trouve le courage d'avouer à Rick qu'elle avait tout entendu, sans passer par un intermédiaire.

Je vous souhaite une très bonne lecture!

P.S. : "Castle" et tous les personnages qui y sont rattachés ne m'appartiennent pas et restent la propriété d'Andrew Marlowe et de ABC


"Non! Il n'est pas question que je rentre dans votre petit jeu!" S'exclama Bradley Jones, s'énervant sur la personne qui se trouvait à l'autre bout du fil. Il se releva rapidement, faisant rouler sa chaise jusqu'à la fenêtre qui offrait une magnifique vue panoramique sur la ville de New-York. Du plat de sa main, le quinquagénaire frappa d'un coup sec la tablette de son bureau en chêne. "Ecoutez-moi bien! Libre à vous de vous engouffrer dans un puits sans fin, mais il est hors de question que vous m'attiriez avec vous!" Toujours à l'affut des paroles de son interlocuteurs, il secoua légèrement son visage, marquant son désaccord. Il ferma ses yeux marrons et fronça ses sourcils grisonnant et drus, laissant paraître les premières rides sur son front et autour de ses yeux. Brad serrait les dents, ses lèvres ne formaient plus qu'une simple ligne presque invisible au milieu de sa barbe de trois jours. L'homme se demandait comment il avait bien pu s'embourber dans un tel pétrin. Il avait toujours été présent pour ses amis, pour sa famille, mais cette fois cela allait beaucoup trop loin. Plus question pour lui de poursuivre sur cette voie sans issue. "Je refuse. J'en ai fait suffisamment pour que vous ayez accès à tout ce qui vous est nécessaire pour continuer sans moi. Je n'ai pas l'intention de vous laisser me conduire à ma perte." Insista-t-il, mais son interlocuteur ne semblait pas le prendre de cette façon. Jones dû éloigner le combiné de son oreille tant la personne s'énervait, tentait de mettre sa patience à rude épreuve, avec le secret espoir, il le savait, de le faire plier. "Quand je dis non, c'est non. Depuis le temps, vous devriez savoir que je ne reviens jamais sur mes décisions. En l'occurrence, elle est prise et je ne ferai pas marche arrière même pour tout l'or du monde." Un petit tremblement agita la main qui tenait le cornet, un frisson envahit le corps de l'homme d'affaire habituellement stoïque. "Je vous jure que si vous touchez à un seul cheveu de sa tête que la prochaine fois que l'on entendra parler de vous ce sera parce que la police vous aura passer les menottes et que vous passerai votre vie derrière les barreaux." Ceci dit, Bradley Jones raccrocha avec un grognement nerveux, son corps tout entier parcouru de tremblements incontrôlables.

En cinquante ans de vie, Bradley Jones n'avait eu peur qu'une seule et unique fois : le 11 septembre 2001. Lorsque le premier avion s'était écrasé sur la tour sud du World Trade Center dans laquelle son entreprise avait ses bureaux, il fut temporairement enseveli sous des gravats. Il se souvenait encore des cris, de la poussière, de la chaleur, des corps désarticulés qu'il avait vus passer devant ses fenêtres. Ce jour-là, il avait cru ne plus jamais revoir la lumière du soleil. Ne plus jamais revoir son épouse. Ne pas voir sa fille grandir. Il eut beaucoup de chance de trouver suffisamment d'air dans ses poumons pour héler un petit groupe de collègues, courageux, tout aussi fonceurs que lui, qui le dégagèrent. Ensemble, ils s'étaient faufilés entre dans les décombres des murs tombés ça et là, avaient enjambé les corps inertes de malheureux qui n'avaient pas eu autant de chance que lui. Les murs s'effondraient au fur et à mesure de leur avancée jusqu'à ce qu'ils voient enfin la porte de sortie et les pompiers qui s'agitaient dans le hall, encore persuadés qu'il s'agissait d'un accident. Leurs poumons les brûlaient, ils avaient, sans aucun doute, l'un ou l'autre membre froissé, voire cassé, mais l'air pur que leurs tendis les pompiers les aidèrent à récupérer. Sa peur fut à son comble lorsqu'il aperçut le second avion se diriger vers la deuxième tour jumelle, laissant pensé qu'il ne s'agissait pas d'un accident.

Aujourd'hui, à une moindre échelle, il avait à nouveau peur. Les murs se tenaient droits autour de lui, le silence régnait, mais il frissonnait, sentait tout son corps tremblant et faiblissant. Jones s'empara du verre de scotch qu'il s'était servi quelques minutes avant le coup de fil et le vida d'une traite. La douceur de l'alcool le rasséréna un court instant, avant qu'il ne sente une goûte de sueur perler sur sa tempe et sa gorge s'assécher. Après avoir reposé son verre, il se retourna et fit face au panorama que lui offrait la baie vitrée. Il neigeait à gros flocons depuis plusieurs jours maintenant et New-York était recouvert d'un épais manteau blanc. Sur la droite, il aperçut des lumières clignotantes orange qui surmontaient un chasse-neige qui déblayait la cinquante-troisième rue ensevelissant les voitures en stationnement sous des tonnes de poudreuses. Daphné, son épouse, avait prévu un dîner de famille, elle avait invité Trina, leur fille, et Jim, son petit-ami. Ils n'habitaient pas très loin mais il s'inquiétait de savoir si ils parviendraient à les rejoindre, tout comme il espérait pouvoir lui-même retrouver le chemin de son domicile sans trop de casse. Daphné et lui, n'avaient plus vu leur fille depuis bientôt six mois, et à l'idée de la revoir, un sourire se dessina sur le visage de l'employé de la First National Bank. Trina était le soleil de sa vie, celle qui l'avait aidé à traverser toutes les épreuves que la vie avait placées sur son chemin au cours des dernières années, notamment la crise financière de 2008 durant laquelle il avait bien cru perdre l'ensemble de ses possessions matérielles. Finalement, dans sa vie, la présence permanente et aimante de sa tendre épouse et de sa seule enfant l'avaient maintenus debout face aux tempêtes.

Son attention fut attirée sur la gauche du paysage, lorsqu'il entendit un énorme bruit de tôles froissées et vit un enchevêtrement de véhicules, il prit la décision de rentrer en métro, du moins s'ils fonctionnaient. Bradley était un bon conducteur. Dans son jeune temps, rouler sur des routes verglacées ne le dérangeait pas, l'amusait même à un certain point. Pour le plus grand plaisir de Daphné, l'âge aidant, il devenait beaucoup plus prudent et raisonnable et à la moindre alerte hivernale, son épouse le tançait pour qu'il se déplace dans les transports en commun. Jamais elle n'aurait accepté de le voir grimper à bord d'un taxi jaune new-yorkais par de telles conditions climatiques, ceux-ci étaient trop bien connus pour leur comportement routier dangereux. Il secoua légèrement la tête, la voix de sa femme raisonnait en lui et il devait admettre que sa présence à ses côtés à l'instant précis ne serait pas du luxe.

Bradley Jones avait bien besoin qu'on lui remonte le moral, que l'on vienne l'aider à sortir la tête de l'eau et de se sortir de cette embuscade dans laquelle il s'était lancé sans réfléchir. Sa famille n'étant pas là, il se jeta sur la chose suivante : l'alcool. Sur sa droite, sur un petit meuble en bois couleur chêne, sa bouteille de Whisky brillait sous la lueur de la lampe de bureau qui trônait à quelques centimètres. Il s'empara de son verre et le remplit à nouveau du liquide brunâtre. Sa main tremblait. La perle de sueur qui avait atteint sa tempe était maintenant rejointe par d'autres. Il ne faisait pourtant pas chaud dans la pièce. Loin d'être frileux, Brad allumait rarement la vanne du radiateur et il préférait nettement se réchauffer à coup de boisson. Une goutte de liquide sauta hors du verre tant sa main tremblait de plus en plus et, pour éviter de perdre une larme supplémentaire de son médicament, il l'avala d'une traite, reposa le verre et repartit s'asseoir derrière son bureau. La tête commença à lui tourner, une sensation qui s'attaquait à lui que lorsqu'il avait bu clairement plus. Il appuya ses coude sur son bureau et reposa sa tête entre ses mains, fermant les yeux, tentant vainement de mettre fin à cette sensation de tourbillon, mais rien n'y fit. Il émit un grognement de frustration avant, d'une main habile, de défaire quelque peu le nœud de sa cravate qui enserrait sa gorge sèche. Sa respiration se fit saccadée. Il prit une grande inspiration, puis une seconde, mais à chaque fois elle restait coincée dans sa trachée. Ses poumons semblaient bloqués. Bradley Jones compris rapidement, tendit la main vers l'interphone, pour appeler sa secrétaire, qui se trouvait de l'autre côté de la porte mais ses muscles ne répondaient plus. Il tomba face la première sur son bureau, sans plus pouvoir bouger, il sentait la vie le quitter, ses yeux s'embrumèrent, il essaya à nouveau d'appeler à l'aide. Sans succès. Il ferma les yeux et cessa de lutter.


"Castle!" S'exclama la détective Kate Beckett. La jeune femme avait été réveillée à quatre heures du matin par les aboiements du chien de ses voisins et n'était plus parvenue à trouver le sommeil par la suite. Même si habituellement elle n'avait pas besoin d'énormément d'heures de repos, elle n'appréciait que très légèrement les réveils en fanfares. Se retournant sans fin dans son lit, elle avait décidé de se levé, rejetant ses couvertures à ses pieds, passant ses mains sur son visage et émettant un grognement d'énervement. Ce fut avec beaucoup de difficultés qu'elle s'était servie son premier café, faisant le plein de caféine pour affronter cette nouvelle journée au commissariat, laissant le goût du sucre vanillé s'enroulé dans sa gorge et agiter les dernières cellules endormies de son cerveau. Le moka faisant tout doucement son action, elle s'était dirigée dans sa douche en traînant les pieds. Elle avait hésité un instant entre la douche froide, revigorante, ou la douche bien chaude, relaxante. Un instant seulement car lorsque les muscles tendus de son dos l'avaient rappelée à l'ordre, le jet bien chaud et calmant eut sa préférence. Pas pressée par le temps, elle avait profité de ces quelques minutes de silence retrouvé pour s'appuyer à la paroi et laisser l'eau la masser. Le bienfait de ce massage de fortune ne l'avait pas quittée depuis lors, cependant, son esprit n'avait pas suivi le même chemin et la migraine apparue à son arrivée au commissariat du douzième l'agressait toujours.

Arrivée au commissariat du douzième, la brunette fut accueillie par ses gars, les lieutenants Kevin Ryan et Javier Esposito qui s'afféraient à terminer la paperasse sur la dernière affaire que l'équipe venait de clore. Elle s'était assise et c'est là que son mal de crâne l'avait attaquée par surprise. La lumière jaunie et loin d'être naturelle émise par les néons piquaient ses yeux qu'elle avait du mal à garder ouverts. Elle tendit ses longues jambes fines sous son bureau, murmura quelques mots durs à l'attention de sa céphalée et jeta un rapide coup d'œil vers l'irlandais et l'hispanique qui l'observaient sans aucune discrétion. "Tu crois qu'elle va bien?" Entendit-elle Ryan interroger son partenaire alors qu'ils pivotèrent pour lui tourner le dos. "J'imagine." Répondit Espo en haussant les épaules. "Si elle veux nous le dire, je suppose qu'elle le fera" Murmura-t-il. Kate avait bien conscience d'avoir une tête de déterrée. Rien que son apparence dans le miroir au levé avait suscité sa propre inquiétude, la poussant un mettre un peu plus de blush qu'à son habitude pour camoufler sa pâleur sans réellement y parvenir. Encore une fois, force était de constater que ses partenaires la connaissaient bien. Du moins, il la connaissaient assez que pour ne pas la questionner.

Sa migraine s'était accentuée lorsque le tintement caractéristique qui annonçait l'arrivée de l'ascenseur à l'étage de la criminelle avait retentit, résonnant dans son crâne comme une boule de flipper. Elle avait grommelé quelques mots durs à l'encontre de l'appareil, se tournant du côté d'où provenait l'agression sonore. Son moral s'était un peu amélioré à la vue de l'écrivain à succès, Richard Castle, deux cafés fumants dans les mains et un sourire enfantin placardé sur le visage dès que leurs regards s'étaient croisés. Elle soupira à l'idée de devoir affronter ses questions. Beckett connaissait suffisamment l'homme que pour savoir qu'il était observateur et qu'elle ne parviendrait pas à échapper à son regard aiguisé. Autant Kevin et Javier savaient quand se retenir, autant Rick Castle était un gamin en overdose de sucre qui ne lui laissait aucun répit et s'immisçait bien trop souvent dans sa vie privée, grattant encore et encore jusqu'à ce qu'il parvienne à obtenir les réponses qu'il attendait. D'après lui, c'était une habitude due à son besoin de détail pour étoffer le personnage de Nikki Heat. D'après elle, il s'agissait juste d'une simple variante de curiosité maladive dont certaines personnes pouvaient faire preuve.

Depuis plus de trois ans, celui que le New-York Ledger avait baptisé le roi du macabre partageait ses journées entre son ordinateur et les enquêtes policières avec Beckett et son équipe. Les deux s'étaient rencontrés sur le toit d'un immeuble, lors de la soirée de lancement de son dernier opus, "Deadly Storm". Le romancier venait de tuer le personnage principal d'une série de livres prometteuse, il s'en était lassé et voulait passer à autre chose, se renouveler mais se retrouvait confronté au syndrome de la page blanche. Acculé par son éditrice, il se devait de trouver une solution mais, comme à son habitude, Richard ne voyait pas de souci, niait qu'il éprouvait des difficultés à retrouver la passion pour l'écriture qui l'animait depuis de si longues années. Le renouveau était venu en la personne de Katherine Beckett qui l'avait emmené au poste pour l'interroger sur un meurtre mis en scène de la même façon que dans ses romans. La brunette élancée, à la silhouette de mannequin, intelligente et à l'esprit vif le piqua au cœur. L'inspiration était revenue. Nikki Heat était née ainsi qu'une belle amitié.

Castle s'installa, tendit le gobelet contenant un café moka, avec deux sucres vanillés et du lait à sa partenaire dans le crime. Elle l'accepta avec plaisir, leurs doigts se frôlant. Il avait beau ne pas être un vrai policier, son intégration dans le groupe s'était faite sans accrocs, du moins en ce qui concerne les gars. Beckett eut beaucoup plus de mal à s'habituer à la présence quasi-permanente du playboy. Ensuite, petit à petit, l'oiseau des mots avait évolué, tout comme la flic. Il s'assit sur la chaise qu'il s'était approprié à côté du bureau de la détective. Cette chaise, l'auteur l'avait réquisitionnée et faite sienne dès le début, c'était celle qui, habituellement, était réservée aux témoins, aux membres de la famille des victimes ou à certains contrevenants. Maintenant elle était reconnue comme étant la chaise de Castle.

"Yo Castle! Vous avez mis maman en colère encore une fois?" Cria Esposito depuis sa place, toutes dents dehors. S'il savait ménager sa patronne, Javier savait aussi taquiner l'écrivain. Voir ce dernier se trémousser, mal à l'aise sur son siège, lui apportait toujours un plaisir non dissimulé. D'ailleurs, Ryan et lui adoraient se moquer gentiment de ceux qu'ils appelaient de façon affectueuse papa et maman. Ces surnoms étaient apparus du jour au lendemain, sans réellement avoir d'origine, si ce n'est que Kate était un peu leur maman de travail, les dirigeant à longueur de journée, et Castle, très proche de maman, ne pouvait que se voir affubler du titre de papa, scellant le clan familial du douzième arrondissement.

"Ouais, Castle." Renchérit l'irlandais. "Elle n'est pas comme d'habitude aujourd'hui." Rajouta Ryan avec un sourire en coin.

Beckett observa leur petit jeu à distance, replongeant sur le rapport qu'elle peinait à terminer. Pour faire passer sa migraine, elle but une gorgée du de l'or brun qu'il lui avait apporté. "De vrais gamins!" Pensa-t-elle sans vouloir se mêler de leurs boutades qu'elle savait sympathiques et sans arrières pensées. C'était devenu une habitude depuis l'arrivée de l'écrivain au commissariat. Lui qui aimait se jouer des conventions et plaisanter supportait moins bien être la cible des railleries des deux lieutenants, affichant régulièrement une moue particulièrement attendrissante dès que ceux-ci l'attaquaient gentiment.

Castle leur lança un clin d'œil complice, prêt à se lancer dans la bataille. "Si vous saviez les gars! C'est plutôt ce que je ne lui ai pas fait." S'amusa-t-il, tout en étant attentif à la réaction de sa partenaire, espérant toujours ne pas pousser la plaisanterie trop loin. Beckett n'était pas une adepte des plaisanteries à double sens mais son entourage professionnel étant principalement composé de membres masculins, au fil du temps, elle s'était habituée et y participait de temps à autres.

"Castle!" S'exclama la détective s'étranglant avec son café et lançant un regard noir à son voisin. Elle sentit la chaleur monter à ses joues et la colère l'envahir lorsqu'elle constata que son partenaire avait un sourire entendu fixé sur les lèvres.

"Cette fois elle est vraiment fâchée." se moquèrent Ryan et Esposito.

"Eh! Où est-ce que vous avez la tête les gars?" les tança l'auteur. "Je ne lui avais pas encore apporté sa dose de caféine." Expliqua-t-il, tout en sachant très bien qu'il valait mieux qu'il enrobe sa réelle pensée. "Vraiment Détective, vous pensez réellement que personne ne connaît votre addiction au café?" S'exclama faussement Richard.

La difficulté pour elle d'entendre ce genre de blague la concernant, et sous-entendant que Castle et elle pouvaient avoir une quelconque relation plus personnelle, trouvait son origine dans le fait que l'homme ne la laissait pas indifférente. Il était charmant, drôle, un père aimant, toujours présent et prêt à tout pour elle, pour l'aider, la protéger et la soutenir face à tous les obstacles qu'ils pouvaient rencontrer, tant au point de vue professionnel que personnel. Il était devenu son meilleur ami. Elle était devenue sa muse. Ensemble, ils soulevaient des montagnes qui semblaient infranchissables, résolvaient des enquêtes grâce à ses recherches et ses idées farfelues.

Beckett soupira et secoua légèrement la tête. Elle renonçait. Ils étaient incorrigibles. "Vous n'avez pas des devoirs les enfants?" Leur demanda-t-elle. Ses deux subalternes eurent un sourire contenu avant de retourner à leurs occupations. "Et vous Castle, plutôt que de dévoiler mes secrets à vos petites-amies, vous devriez mettre en pratique vos compétences pour m'aider avec la paperasse."

"La quoi?" S'enquit-t-il. "Je… vous…la communication … mauvaise… tunnel." Ce n'est pas sans une grimace qu'il imita avec une approximation maladroite la mauvaise communication téléphonique.

"Je me disais bien aussi." Elle roula des yeux. Une mimique que l'écrivain avait appris à aimer, un signe que sa présence était acceptée, une marque de fabrique tellement "mignonne".

"En parlant de vos sombres secrets, Détective, de quoi avez-vous discuté avec Alexis hier?"

"Oh, pas grand-chose d'important." Répondit simplement la policière qui s'étonnait qu'il aie tenu jusqu'à ce matin pour l'interroger. Toute la soirée, elle s'était attendue à recevoir un texto de l'écrivain réclamant à corps et à cris des informations.

A vrai dire, l'homme avait toujours été le confident de sa fille qui n'avait jamais réellement eu de figure maternelle. Sa propre mère, Meredith, ne venait la voir que lorsqu'elle avait des envies de shopping à New-York ou que la comédienne se voyait attribuer un rôle dans la région. Elle en profitait alors pour emmener sa fille avec elle dans ses délires dépensiers. Meredith n'avait jamais réellement voulu d'un enfant. Alexis était un accident. Castle et elle s'amusaient bien, ils étaient jeunes et insouciants, jusqu'au jour ou la rousse se rendit compte qu'elle était enceinte. Trop tard pour un avortement que Richard ne lui aurait jamais autorisé. Ce premier mariage s'était terminé par un adultère, un divorce facile et une garde exclusive pour le jeune père. Pour la première fois, Alexis s'était tournée vers quelqu'un d'autre. Il ne craignait rien, il savait Beckett équilibrée et de bons conseils mais l'inquiétude s'était insidieusement installée, ne lui laissant d'autre choix que de questionner Kate sur le contenue de leur conversation. "Mais encore?"

"Vous n'êtes pas prêt Castle. Peut-être dans quelques années vous l'accepterez." Dit-elle en secouant la tête.

"Prêt pour quoi?" Paniqua-t-il. Il imagina immédiatement le pire, les idées les plus saugrenues lui traversèrent l'esprit : la drogue, l'alcool, une grossesse inattendue,… Les idées se bousculèrent et il eut l'air totalement effrayé. Il savait très bien que la jeune femme refuserait de vendre la mèche, acceptant la vie privée de la roussette mais il ignorait s'il pourrait survivre avec ses doutes. "Vous savez que je peux tout entendre Beckett."

"Bien sûr Castle." Acquiesça sérieusement la policière. "Je dois dire que quand elle m'a annoncé la nouvelle, je pensais que pour ce genre de chose elle se serait plutôt tournée vers votre mère." L'informa-t-elle. "Martha aurait certainement fait un très bon boulot. Je lui ai juste dit de foncer, si ce type était le bon qu'elle ne devait pas hésiter, s'installer avec lui et avoir beaucoup d'enfant tant qu'elle est encore jeune."

Et puis un sourire moqueur apparut et la vérité le percuta. "Ah Ah Kate. J'adore votre humour."

Kate! Elle aimait la façon dont il prononçait son prénom. "Elle me fait confiance Castle. Quand elle voudra vous en parler elle le fera."

"Oui mais quand? Quand elle sera dealer en chef dans les rues du Bronx?"

"Ecoutez Castle." Kate se tourna vers lui gentiment, se pencha dans sa direction et déposa sa main sur celle de son partenaire qui reposait sur ses cuisses. "Alexis est raisonnable, vous pouvez lui faire confiance et vous le savez.". Leurs regards s'accrochèrent, le jade de la détective se perdant dans l'azur de l'écrivain.

Soudain le téléphone de la détective sonna, les sortant de leur petite bulle, et ramenant sa migraine. "Beckett." Répondit-elle. "Très bien, on arrive. Envoyez-moi l'adresse exacte par texto. Merci" La jeune femme raccrocha et interpella ses collègues. "Les gars, on a un meurtre sur la cinquante-troisième Est."

"La cinquante-troisième Est. Waw, on fait dans les quartiers chics maintenant!" S'exclama Castle. "Peut-être qu'en revenant on passera par la cinquième Avenue." Continua le romancier en se levant comme un clown hors de sa boîte pour aider sa partenaire à enfiler sa veste. "Je suis certain qu'un peu de shopping vous rendra moins grognon."

Kate ne releva pas et se dirigea vers l'ascenseur, suivie du regard par Rick, scotché sur place. "Ben quoi?" Interrogea-t-il ses amis.

"On vous avait dit de faire attention Castle. On ne plaisante pas avec Beckett." Lança Esposito. Ryan et lui rejoignirent leur boss laissant Castle interdit durant un court instant, avant de les rattraper à mi-chemin et de passer un bras autour des épaules de chacun.

Il leur murmura "Si vous êtes sages, je connais une boutique super sympa qui vous conviendra à tous les deux."

"Ah oui? Quel genre de boutique?" Demanda Ryan suspicieux.

"Ne soyez pas si curieux Ryan. Vous le saurez au moment voulu." Il les relâcha et tous les quatre firent route vers l'adresse qu'avait envoyé l'agent du dispatching.


Les précipitations hivernales ne leur rendirent pas la tâche facile pour accéder à leur scène de crime. Un embouteillage monstre s'était formé sur la cinquante troisième rue, débordant sur la cinquième Avenue complètement bouchée. Kate dû user de toutes ses connaissances des recoins de Manhattan pour parvenir à destination, utilisant les petites routes parallèles, croisant des véhicules en difficulté tout au long de la route. Elle-même, malgré son expérience de la route par tous les temps, eut du mal à naviguer entre les obstacles et à maintenir le cap. Elle prit la cinquante-deuxième, bifurqua sur Park Avenue et fut bloquée par un camion de remorquage dans l'entrée de la cinquante. Elle marmonna dans ses dents, attirant l'attention de Castle qui jusqu'à présent s'accrochait à sa ceinture de sécurité.

"Euh Beckett!" Osa-t-il, levant le doigt comme un petit garçon terrifié par la maîtresse. Il savait la jeune femme irritable lorsqu'elle ne parvenait pas à son objectif. Depuis quelques minutes, il se permettait d'analyser ses réactions et chaque fois qu'elle frappait de la paume de la main sur le volant, il voyait son visage se métamorphoser, passant de sa muse agréable à la policière vindicative.

"Quoi?" Son ton était sans appel, du moins elle l'espérait car elle n'avait aucune envie de discuter avec lui de ses théories sur des savants fous ayant pour projet secret de détruire New-York en utilisant leur arme à fabriquer de la neige. Bon ok, elle exagérait peut-être un peu se concéda-t-elle, mais elle n'aimait pas conduire sur les routes enneigées. Non pas qu'elle ne maîtrisait pas son véhicule, du moins elle le faisait comme on lui avait appris lors de ses cours de perfectionnement à l'académie de police, mais elle se sentait impuissante face à cette attaque hivernale. Et s'il existait bien une chose que la détective Katherine Houghton Beckett ne supportait pas c'était bel et bien l'impuissance.

"Wow! Du calme Détective." Répondit-il en levant les mains en signe de reddition. "Je pense qu'on est arrivé." Annonça-t-il en désignant du doigt le croisement suivant.

En effet, Kate jeta un coup d'œil sur sa gauche, dans la direction pointée par Castle. L'embranchement suivant ne se trouvait pas à plus de deux cents mètres, cependant, les congères qui s'étaient accumulées bloquaient suffisamment la vue pour que la jeune femme n'aie pas aperçu la voiture de ses collègues, stationnée en double file, les gyrophares encore allumés. Juste derrière, elle vit dépasser un morceau de la camionnette noire du coroner annonçant qu'une famille venait de perdre un de ses membres. Beckett gara la voiture tant bien que mal, laissant le gyrophare sur le tableau de bord et tous deux traversèrent pour rejoindre les autres membres de l'équipe.

"Bonjour LT." Les deux compères saluèrent l'agent en uniforme qui gardait l'entrée, empêchant curieux et journalistes avides de franchir le périmètre de sécurité.

"Lieutenant Beckett, Monsieur Castle, Cindy Parks du New-York Ledger." Les interpella une jeune blonde qui tendait un micro vers ses nouvelles cibles, suivie de près par un grand gaillard qui portait une caméra sur l'épaule. Kate Beckett n'appréciait pas la presse. Souvent les journalistes ne cherchaient que le sensationnel, sans se soucier de la vérité ou du respect des morts et de leurs familles. Les proches des victimes n'avaient pas besoin de voir étalé dans la presse les moindres détails ayant conduit au décès de leur père, de leur sœur, de leur enfant ou d'un ami. Ce qu'ils avaient besoin de savoir c'était que leur proche les aimaient et que le coupable serait mis derrière les barreaux dans les plus brefs délais, sans que leur vie ne soit jetée en pâture à tous les curieux des Etats-Unis. Le sang de la policière ne fit qu'un tour et toute l'animosité que Beckett fit passé dans le regard qu'elle adressa à la reporter n'eut pour effet que de pousser Cindy Parks à poser d'autres questions. Pour elle, une brèche se créait dans la carapace de la flic et elle sentait une opportunité pour parvenir à ses fins. "J'ai entendu dire que vous enquêtiez sur la mort de Bradley Jones. Est-ce qu'il est vrai qu'il était impliqué dans le blanchiment d'argent?"

Comme elle le craignait, la chasse au scoop pour le journal du soir avait déjà commencé et comme à chaque fois, les vautours échafaudaient déjà des théories infâmes sur la victime.

"Monsieur Castle! Allez-vous utiliser ce meurtre dans votre prochain roman? Ce crime est-il suffisamment intéressant."

Cette fois, la moutarde monta au nez de la détective qui fit demi-tour, bousculant l'écrivain sur son passage, et s'approcha de l'indésirable. "Un meurtre n'est pas intéressant, Mademoiselle Parks." Intervint Kate, tentant de maintenir un semblant de calme mais s'assurant que le ton qu'elle utilisait faisait parfaitement son œuvre. "Un meurtre est une tragédie qui peut détruire toute une famille. Un meurtre est un acte ignoble alors je vous conseille de respecter un minimum les victime." L'enquêtrice pivota à nouveau et s'introduisit dans le bâtiment sous les yeux médusé de Castle qui n'avait pas l'habitude de voir son amie dans un tel état.

Bien entendu, il savait pourquoi. On approchait la date fatidique, le jour où la jeune femme était devenue une victime. Elle n'avait que dix-neuf ans, lorsque la police avait retrouvé sa mère dans une allée sombre, tuée de multiples coups de couteau. Même si elle ne s'accommodait pas du terme de victime, c'était bien ce qu'elle était devenue à ce moment là. Cette disparition soudaine avait failli tuer son père, qui s'était perdu dans l'alcoolisme, et elle, qui était destinée à être avocate, comme ses parents, entra à l'académie de police pour donner un sens à sa vie, pour éviter que d'autres personnes ne soient traitées comme son père et elle. Les policiers qui avaient enquêté sur le meurtre de Johanna Beckett avaient des théories tellement avilissantes que Kate et Jim voulaient partir se terrer dans leur cabane dans les bois et ne revenir que lorsque tout ce cauchemar serait terminé. Ils avaient affronté les accusations de tromperies, de détournements pour que, finalement, le flic revienne à ses sens et admette que la mort de l'avocate était peut-être dû à ses activités professionnelles. A ce jour le crime était toujours impuni et Kate s'était jurée de rendre justice à sa mère et à toutes les autres victimes de tueurs insensibles.

Cette mésaventure avait isolé Beckett. Elle avait érigé des murs autours d'elle, ne laissant personne s'approcher d'elle suffisamment que pour lui voler son cœur et sa confiance. Avec beaucoup d'aide et de soutien de sa fille, Jim Beckett s'était sorti de l'alcoolisme au bout de sept longues années d'un difficile combat, un long chemin jonché d'embûches, de rechutes et de reprise de contrôle. Depuis Kate avait peur. Peur qu'il tombe à nouveau dans ses travers, peur de s'attacher à quelqu'un et de le perdre, peur de se livrer à qui que se soit, se lançant à corps perdu dans son travail, peur de vivre tout simplement. Seulement, elle n'avait jamais perdu le contrôle face à une caméra, face à quelqu'un qui n'avait d'autres attentes que de remplir la case horaire du journal d'informations croustillantes.

Castle jeta un coup d'œil en direction de la journaliste et secoua à la tête, désapprobateur, mais Cindy Parks était déjà passée à autre chose, interrogeant des badauds ignorants, il passa à la suite et trotta pour rattraper la détective qui avait pris une certaine avance. "Tout va bien Kate?" Lui demanda-t-il en posant une main sécurisante sur son épaule.

"Tout va pour le mieux Castle." Lui répondit-elle en lançant les mains vers le ciel, exaspérée. Elle se tourna vers l'écrivain et l'inquiétude qu'elle vit en lui la radoucit. "Désolée. J'ai un mal de tête carabiné depuis ce matin qui ne veux pas partir et cette pimbêche m'a poussée à bout." Soupira la détective. Rick l'observa, tentant de lire en elle, ce qu'il faisait relativement bien la plupart du temps, mais là il ne parvenait pas à faire la part des choses entre la vérité et le mensonge. "Vraiment Castle, je vais bien, alors n'insistez pas."

"Très bien." Lui concéda-t-il. "Pour le moment, je vous laisse tranquille mais…" Ajouta-t-il lorsqu'il vit qu'elle allait parler. "à condition que vous acceptiez une invitation à la Casa de Castle ce soir. Mère m'a prévenu qu'elle ne prendrait pas non pour une réponse valable."

"Votre mère?" Elle posa ses mains sur ses hanches et le fixa. "Ne serait-ce pas plutôt vous qui m'invitez?" Le taquina-t-elle, sachant très bien depuis un long moment que ses sentiments plus qu'amicaux étaient partagés par le romancier. Ils se taquinaient, se tournaient autour sans jamais franchir les limites des murs érigés par la jeune femme.

Rick haussa les épaules. "Depuis votre entretien avec Alexis, Mère insiste pour que vous participiez un peu plus souvent à nos dîner de famille." Kate eut un mouvement de recul. "Rien de bien important." S'empressa-t-il d'ajouter en voyant sa réaction.

"On verra tout à l'heure Castle. Pour le moment, il y a un cadavre qui nous attend." Et elle reprit sa route.


Voili voiloù. Je serais ravie de pouvoir lire vos reviews et ce que vous avez pensé.

A bientôt.