Prologue
Ce matin, comme tous les matins il est ravissant, parfait. Une mèche ou deux barrent son front. Sa coiffure savamment décoiffée le rend encore plus séduisant. Ce matin, comme tous les matins, il sourit. Un sourire plein d'assurance, de chien et d'insolence. Ses deux lèvres cerises évoquent deux fruits mûrs, gorgés de sucre ne demandant qu'à être cueillis. Ce matin, comme tous les matins, ses deux grands yeux noirs en amande pétillent. Luxure et paresse s'y lisent. Ce matin, comme tous les matins, dans un air voluptueusement chargé de senteurs rares et délicieusement décadentes, il passe près de moi mais ne me voit pas, ne m'entend pas, ne me sent pas, ne me touche pas, ne me goûte pas. Je suis tout simplement invisible. Quoi ? Je ne vaux pas un regard ? Ce matin, comme tous les matins, son parfum légèrement épicé me transporte vers le pays des mille et une nuits. Malfoy lui murmure quelque chose à l'oreille. Il rit. Un rire cristallin qui me fait frissonner de la tête aux pieds. Sous mon regard, les deux Slytherins vont à leur place. Sa démarche est coulée, sensuelle, hypnotisante. Il ne marche pas, il ondule, il vole. Sa cambrure hautaine et délicatement maniérée souligne sa taille fine et ses hanches étroites. Dans un mouvement plus que félin, il s'assoit. Malfoy lui effleure le dos. Ben vas-y, fais comme chez toi ! Je suis sûr qu'ils sont amants. Il n'y a qu'à voir la manière qu'ils ont de se toucher, se parler ou se regarder. Tous ces gestes intimes et familiers… Que ne donnerai-je pour lui nouer sa cravate le matin ou lui arranger son col… Bon je suis pas très bien placé pour ça, je suis toujours débraillé ! Mais c'est pas de ma faute ! Je suis vraiment pas du matin ! Et puis je pourrais m'améliorer pour lui…
Lui : Mmm, mais qu'est-ce qu'il me veut le p'tit gryffy...?
Moi : T'es mal coiffé ce matin, dis à ta copine de te prêter son miroir. Pffff… Espèce de… fille !
Espèce de fille ? Qu'est-ce qui m'a pris de dire ça ? Plutôt de dire quelque chose d'aussi débile, j'aurai mieux fait de me taire , non ?
Lui : « Espèce de fille » ? Ouah, ça c'est de l'insulte mordante...
Je ne préfère pas relever, je me suis assez ridiculisé comme ça…Lui : Viens prendre des cours au Donjon, Harry... ça te ferait du bien.
Harry ? Harry ? Il SAIT comment je m'appelle ET utilise mon PRENOM ? YOUUUHOUU !
Lui : On pourra même t'apprendre à te coiffer... même si de ce côté, t'es une cause perdue, à mon avis...
Et voilà ! J'ai crié victoire trop vite ! Même si la petite moue qui accompagne ses propos est hyper sexy (mais, entre nous, qu'est-ce qui n'est pas sexy chez lui ? Malfoy peut-être…) Et là, pourquoi je me suis énervé ? Parce que mes cheveux en bataille, c'est SACRE !
Moi : Qu'est-ce qu'elle a, la gonzesse ? T'es pas allé faire du shopping alors t'es de mauvaise humeur ?
Et quand je suis vénère, je plisse le nez. J'y peux rien, c'est un effet secondaire !Lui : T'es mignon quand tu t'énerves, Potter...
Moi : Non, non, non. Je suis toujours mignon, moi. Et maintenant retourne jouer à la poupée avec ta copine, tu me saoules !
Quel con quand il s'y met ! Et paf ! Dans le mille, Potter ! T'es le meilleur ! Son joli petit cerveau doit être en ébullition là. « Qu'est-ce qu'il a voulu dire par « je suis toujours mignon, moi » » puis « Quel connard ! » Ce que je ne sais et n'entends pas : « Dommage, un si beau cul... S'il avait choisi d'être slythy... ah, le rêve ! On en aurait fait un dieu vivant ! »
Pathétique, non ? Incapable de dire un mot cohérent ou une insulte bien saignante en sa présence ! Et des scènes comme ça, je les ai cumulées l'an dernier. Comment j'en suis arrivé là ? Ah oui… Mon Yule Ball de cinquième année… un mois avant le bal, il me lançait des regards… interminables. Au début, j'étais gêné. Mais je me suis peu à peu laissé flatter par ces caresses invisibles. Jusqu'à ce qu'il vienne me voir et me crache : « Tu touches à ma sœur, Potter, je t'éclate la gueule. » Moi qui croyais qu'il me matait parce que je lui plaisais… Non ! Il voulait me tuer ! Pourquoi on fait pas des guides sur le décryptage des regards ? Sérieux, ça éviterait des problèmes !
- Regard dur : tu crois que ça me touche ?
- Regard noir : un faux pas et je te saute dessus.
- Regard assassin : tu es M-O-R-T.
- Regard méprisant : tu n'es qu'une amibe.
- Regard hautain : tu te prends pour qui pour oser me regarder ?
- Regard je-ne-vois-pas-Harry-Potter : celui-là, c'est celui que j'aime le moins.
Ou un livre rien que sur lui ! Oui ! Le Blaise Zabini illustré. Edition de luxe et papier glacé de rigueur ! Il y aurait biographie : date et lieu de naissance. Ce qu'il aime. Ce qu'il aime pas. Et des photos. PLEIN de photos. En couleur, sépia, noir et blanc. Des photos où il serait habillé, moins habillé, pas habillé du tout… Pas habillé ? Ca me laisse… rêveur !
Enfin ça c'était jusqu'à cet été… J'ai rencontré Yliès un peu avant la fin de l'école. C'est un tailleur à Hogsmead. Je suis allé le voir car j'ai déchiré une énième fois ma tenue de quidditch. Avant de partir, il m'a demandé si j'étais tenté de venir boire un verre après son dernier client. J'ai dit : « Ok, c'est cool. » Et voilà trois mois que je suis avec lui. J'aborde avec sérénité ma rentrée en dernière année dont le motto est : « Blaise Zabini, c'est FINI ! » (et ça rime !).
Résumons donc…
5ème année : admiration en silence du maaaaaaaagnifique Blaise, fantasme sur ses sucettes qu'il a toujours à la bouche, son clou à l'arcade sourcilière gauche et son corps de rêve, son tatouage que j'imagine un peu partout et que je rêve de lécher.
6ème année : tentatives déplorables et toujours ratées de séduction, fantasme grandissant sur son corps de rêve et sur ses sucettes puis cure de désintoxication : « non, tu n'es pas la sucette de Blaise » et « son tatouage pourrait être sur sa fesse droite que ça ne me ferait pas ciller » (ou alors juste un peu), Yliès.
7ème année : c'est qui Blaise ?
Mais ça, c'était bien avant le drame…
