HEEY ! ~
Comme je l'ai expliqué pour ceux qui me connaissent, je publie mes autres projets un peu simultanément car j'ai peur de ne pas avoir le temps pour la prochaine année scolaire à venir... Ces derniers se verront donc avancer plus lentement que les autres (normalement) donc je m'excuse d'avance pour les longues parutions !
BEHIND THE SCENE
Résumé : "Kuroko, je veux que tu te mettes en couple... avec un acteur de la Génération des Miracles." Tetsuya, l'un des six acteurs les plus populaires du Japon se voit forcé d'accepter un deal avec le Directeur le plus sadique de son agence. OOC!Kuroko
Rating : M
Pairing : AKAKURO- GDMxKuroko et plein d'autres
« We live in a Kingdom of Bullshit! »
Mr. Robot
Scène 01
o
Avez-vous déjà eu cette impression de porter un masque invisible parfois dans votre vie ?
Du genre, vous montrer dans une certaine apparence alors que la vraie se cache dans l'ombre de vos semblants d'émotions, ou comme dire des choses que vous niez ardemment tout au fond de vous ? Certains pensent que c'est une forme d'hypocrisie, d'autres affirmeront que ces actes sont une sorte d'instinct naturel qui nous permet de nous socialiser malgré nos différences, ou d'autres encore se contenteront de hausser les épaules et de vous cracher à la figure pour donner un exemple de leur ressenti.
Pour ma part, j'avais tendance à faire parti des trois catégories. Je faisais parti d'une communauté d'hypocrites, je me socialisais malgré moi et j'en avais strictement rien à foutre. Bizarre, vous dites ? Pourquoi il était si étrange d'avoir des caractéristiques aussi contradictoires ? C'était comme aimer regarder le sport et détester le pratiquer tout en se fichant de savoir où est la logique. C'était carrément pareil.
Mais cessons toute cette philosophie inutile. Je n'étais pas d'humeur à faire mon intellectuel, surtout en parlant avec moi-même. J'avais juste besoin de penser à autre chose pour ne pas laisser place à l'horrible envie de meurtre qui cogitait en moi au moment même où je bataillais avec mes émotions.
Ça faisait cinq minutes que je me retenais de tuer quelqu'un. Cinq minutes, et la seule chose que je pouvais faire était de hocher la tête comme un con et de rester le plus impassible possible.
J'étais en chasuble face à un panier de basket, un ballon dans les mains pendant qu'un grand gaillard collé à moi me dictait les consignes pour marquer. Sauf qu'à l'heure où je parlais, ça avait l'air de tout, sauf d'une simple scène d'entraide entre amis. Pas en étant ainsi serré contre l'autre avec sa voix suave qui pénétrait frénétiquement mon oreille tandis qu'il murmurait ses indications.
- Shi… Shinji-kun…
Je me tournai lentement vers lui, et c'est là que mon expression autrefois aussi stoïque qu'une plante était venue se changer en un regard noir plein d'intentions meurtrières :
- Vire tes mains tout de suite, ou je te jure que je t'arracherai les doigts et te les ferai bouffer un par un jusqu'à ce que tu t'étouffes.
Shinji, de son vrai nom Aomine, s'arrêta aussitôt en retirant ses paumes de mes hanches d'un air innocent. J'ai dû me faire violence pour ne pas lui balancer mon poing dans la figure. Je me suis uniquement retenu pour les énormes soucis que ça m'aurait causé. Dans le cas contraire, il y a longtemps qu'il n'aurait plus été capable d'articuler le moindre mot.
- COUPEZ ! Arrêtez tout !
Mon intervention ayant tout chamboulé, l'homme qui tenait le script à côté de la caméra se releva de sa chaise en venant dans ma direction.
- Qu'est-ce qu'il se passe, Kuroko ?
- Ce qu'il se passe ? Il se passe que cet enfoiré est en train de me peloter depuis tout à l'heure et que je suis obligé de supporter ça pendant dix minutes à cause d'une foutue scène de merde !
Ses yeux accusateurs se posèrent sur le dénommé Aomine qui arborait toujours son air idiot. Et quand Kagetora lui lança un regard insistant, il se défendit aussitôt :
- J'ai rien fait, je le jure !
- Aomine…
Le petit sourire au coin de ses lèvres ne passa pas inaperçu pour ma part. Ce crétin de basané trouvait la situation amusante en plus de passer pour un pervers complètement désinvolte ! Kagetora vint lui frapper l'arrière du crâne à l'aide du script d'une bonne centaine de pages. C'était tellement épais qu'Aomine avait vacillé quelques secondes. Y avait de quoi assommer un bison avec ce truc, sérieux.
- AÏE ! Ok, ça va ! Je lui ai juste frôlé la hanche, c'est pas si dramatique !
- Pas si dramatique ? fulminai-je, combien de fois je t'ai surpris en train de me tripoter pendant le tournage aujourd'hui ?!
- Deux fois ?
- SEPT ! SEPT FOIS, MERDE !
- Calme-toi Kuroko…
- Non, j'me calmerai pas ! J'en ai ma claque de devoir supporter ses sales manies d'homo sans-gêne !
- Je suis bi ! s'indigna le grand tanné.
- Tais-toi !
Je sortis du gymnase sans prêter attention aux assistants qui essayaient de m'arrêter et me dirigeai à grands pas à l'intérieur du bâtiment scolaire que la production avait emprunté pour filmer les scènes du tournage. Nous étions en pleine période de vacance, alors aucun élève n'était présent sur les lieux, et ce pour mon plus grand bonheur.
Ne pas les entendre piailler à longueur de journée était peut-être le seul point positif d'aujourd'hui. Je vous jure, les groupies d'ici étaient les pires. Elles s'acharnaient à vouloir nous parler en faisant de leur mieux pour attirer notre attention toutes les trois minutes. J'avais déjà du mal à garder intact mon espace vital avec certains, je n'allais certainement pas inviter ces stupides fan-girls à le pourrir davantage.
Après avoir marché à pas lourds pendant une bonne minute, j'arrivai devant le distributeur de boisson près du hall. J'insérai 100 yens dans la fente et en deux cliques, une brique de lait vanillé tomba dans le bac. Il n'y avait que ce truc qui pouvait me calmer quand mes nerfs explosaient. Ça ne remplaçait pas les délicieux milk-shakes de mon resto préféré mais l'effet était similaire.
C'était probablement le centième lait à la vanille que je prenais depuis le début de la série qu'on tournait. En passant mes journées contrarié, les gens ne s'étonnaient plus que ces boissons soient en rupture de stock lors de mes passages.
En même temps lorsque des crétins passaient leur temps à m'emmerder fallait pas s'étonner que leur soit-disant "mignon petit acteur" finisse par péter un câble !
- Kurokocchi ! Je te cherchais partout !
Oh génial. Encore un autre abruti venu me saouler. Je lui lançai un regard noir.
- M'appelle pas comme ça.
- J'ai entendu dire qu'Aomine avait encore fait des siennes. Qu'est-ce qu'il s'est passé ?
- Rien, grognai-je lorsqu'il ignora mes précédentes protestations. Qu'est-ce que tu fais ici ? Tu ne devrais pas être avec Midorima et l'autre géant ?
Kise était également un acteur de la série populaire qu'on était en train de produire, ainsi que d'autres gars avec qui je devais faire équipe pendant un certain moment. Son caractère était exactement le même que le rôle qu'il devait jouer, et c'était bien là son principal défaut pour ma part. Avoir un pot-de-colle bavard et enjoué vingt-quatre heures sur vingt-quatre était plus fatiguant que de courir un marathon !
- On vient de finir notre scène. On voulait aller voir la tienne mais on nous a dit que tu étais parti en plein dans ta prestation à cause d'Aominecchi.
- Ouais. Cette enflure mériterait que je le défigure sur-le-champ mais heureusement pour lui, son job lui sauve la mise.
- Haha ! Kurokocchi est vraiment effrayant~
- Je t'ai déjà dit d'arrêter avec ce surnom débile.
Je tournai les talons et commençai à marcher sans destination précise. J'espérais seulement que ce crétin cesse de me suivre et trouve une autre occupation que de me coller.
- Oh, allez ! Ça fait longtemps qu'on se connaît maintenant, je peux bien approfondir nos liens comme on le fait dans la série.
En effet, ça faisait un petit moment depuis notre première rencontre lui et moi. Deux ans si je me souviens bien. Ou peut-être trois ? Mais c'était déjà bien assez long pour l'avoir supporté un bon moment.
Je l'ignorai tout en continuant mon chemin. Bien sûr, ça n'avait pas suffi à le faire abandonner et Kise se précipita aussitôt sur mes pas. Sa main agrippa mon avant-bras, manquant de faire renverser ma boisson vanillée sur le sol.
- Hé !?
Mon corps fut entraîné contre la série de casiers devant lequel on était en train de passer. Kise plaqua ma main contre le support de métal derrière moi et rompit la distance initialement déjà bien assez courte. Un sourire amusé parcourut ses lèvres, et je vis ses yeux briller pendant qu'il se penchait vers moi.
- Nous pouvons même faire plus qu'approfondir nos liens… qu'en dis-tu ?~
- Qu'est-ce que tu...
Il était tellement proche que je pouvais sentir son souffle légèrement parfumé me chatouiller les narines.
- Je ne peux décidément pas laisser Aominecchi prendre les devants dans mon dos. Il faut que je me rattrape, pas vrai Kurokocchi ?
- T'es pas sérieux ?!
- Ça ne prendra qu'une petite minute, promis, susurra-t-il en effleurant mes lèvres des siennes.
Bon sang. Je venais de me débarrasser d'un pervers pour en croiser un deuxième. Merci, mais j'avais vraiment pas besoin de ça, surtout lorsque mon humeur ne s'était toujours pas apaisée. J'étais fort partagé entre lui lancer une attaque éclair entre les jambes qui le paralyserait une bonne dizaine de minutes, ou bien lui asséner un solide coup de tête dans la face au risque de le dispenser de tournage pour la semaine à venir.
Une sensation déplaisante commença à se faire sentir contre mon ventre. Je baissais les yeux avec stupéfaction. L'instinct masculin de Kise venait de se réveiller. En sursaut, en plus de ça. Nom de Dieu. Plus besoin d'y réfléchir à deux fois : cet imbécile allait goûter à la fureur de mon genou. Ici et maintenant.
- Kise, enfoiré !
La voix contrariée d'Aomine nous fit sursauter. Ô gloire à ce deuxième idiot, Kise n'eut pas le temps d'entreprendre ce qu'il allait commencer. Montrant une minuscule once de clémence, mon genou vint lui taper un peu plus haut que prévu afin de le repousser.
- Comment oses-tu profiter de mon absence pour faire des choses pareilles à Tetsu ! s'écria le basané qui s'avançait à grand pas.
Je vis Kise prendre un air offusqué pendant qu'il se tenait l'abdomen.
- Tu peux parler toi ! Rappelle-moi ce qu'il s'est passé tout à l'heure juste avant que Kurokocchi pète les plombs ?
- Je l'ai pas fait en douce, c'est différent !
- C'est encore pire !
Les deux se fusillèrent du regard, se lançant dans une bataille visuelle interminable. J'ai failli apercevoir des éclairs de rage sortir de leurs yeux pour s'affronter. J'y crois pas. Ils étaient en train de se disputer pour savoir lequel d'entre eux avait la meilleur excuse pour se permettre de me peloter ?! Non mais je rêve !
J'allais pour intervenir lorsqu'un soupir s'éleva à quelques pas de nous. Trois autres silhouettes apparurent, dont l'une qui faisait deux mètres de haut, une autre qui remontait ses lunettes d'un geste raffiné, et enfin la dernière qui venait de pousser un soupir...
- Aomine, Kise. Je peux savoir ce que vous faites ?
Des yeux rouges et dorés étaient dirigés vers nous tandis que le propriétaire de ces prunelles affichait une expression parfaitement stoïque. Mon sauveur venait d'apparaître. Enfin, pas vraiment mon sauveur au sens propre du terme. Akashi Seijuuro était le sixième acteur principal du scénario, et également le seul qui, aussi bien dans la série que dans la réalité, parvenait un tant soit peu à maîtriser les autres dégénérés.
Il était certainement le plus mature, et ce trait fondamental le désignait un peu comme le chef de notre petit groupe, bien que ça ne me réjouisse pas tant que ça.
- Rien du tout, grommela Aomine. Juste Kise qui nous tape sa crise de nerf parce qu'il a pas pu tripoter Tetsu comme il voulait.
- Hé, rejette pas toute la faute sur moi ! C'est toi qui a commencé je te rappelle !
Akashi leva un sourcil. Eh merde. Plus les secondes défilaient, et plus ces deux idiots attiraient les ennuis. Ils continuaient de se chamailler pour rien tandis que le rouquin s'avançait lentement vers nous, la lentille de son œil gauche scintillant le temps d'une seconde. Mon instinct me criait de reculer et c'est ce que je fis, connaissant parfaitement le déroulement qui allait suivre.
Comme d'habitude, Akashi était venu se mettre entre les deux, les avait chopé par le col et, dans un regard tout à coup meurtrier, les avait tirés en même temps de sorte que leur crâne se rencontre dans une collision sans merci. En un coup, c'était réglé. Vif, simple, efficace. Les deux garçons se tortillèrent, la main sur le front et grimaçant.
- Vous avez du culot, gronda Akashi. Je vous ai déjà dit de vous tenir correctement pendant les tournages, et c'est tout ce que vous trouvez de mieux à faire ?
Son ton se voulait neutre, mais son expression démontrait tout autre chose. Kise bredouilla une excuse entre deux couinements, mais Aomine garda son air menaçant.
- Akashi, enfoiré !
Il jurait mais ne fit rien contre lui. Il était au moins assez intelligent pour ne pas chercher à provoquer quelqu'un de son envergure. N'importe quel individu saint d'esprit aurait l'instinct de baisser la tête face à Akashi. D'ailleurs ce dernier se désintéressa bien vite de la bête à poils bleus et tourna la tête dans ma direction. Je sentis mon ventre se tordre le temps d'une milliseconde.
- Je suis désolé pour ces deux cas désespérés. J'espère qu'ils n'ont pas été trop loin ?
La politesse avec laquelle il s'exprimait régulièrement avait toujours le don de me mettre mal à l'aise. Akashi était du genre à rester calme dans toutes les situations possibles, à tel point qu'il était le seul que j'avais le plus de mal à cerner. Mes lèvres se crispèrent et je détournai le regard ailleurs en marmonnant.
- C'est bon, ça va. J'aurai pu m'en charger tout seul.
Il haussa un sourcil.
- Et finir tout débraillé comme la semaine dernière ? lança Akashi d'un ton sarcastique. Excuse-moi, mais je doute que tu aurais abouti à quelque chose...
- La ferme ! Je t'ai rien demandé.
- Ne crie pas Kuroko, tu vas attirer les staffs pour rien, fit Midorima qui parlait pour la première fois depuis sa venue.
- Kuro-chin est toujours en colère…
- La faute à qui ?!
J'allais encore répliquer lorsque Kagetora apparut pour nous prévenir qu'on allait reprendre les scènes. Ravalant mon irritation, je me mis en direction du gymnase, entouré des cinq autres acteurs tous aussi flashy les uns que les autres.
J'ai rencontré ces gars l'année dernière, lorsqu'on m'a proposé pour la première fois de tourner dans une série sportive. Ce n'était qu'un projet au début, puis tout s'est très vite mis en place avant même que le tournage soit officiel. Dès notre première rencontre, les choses se sont enchaînées. Aomine commençait déjà à se jeter sur Kise, Midorima les houspillait depuis sa position en énumérant les trente-six mille raisons de ne pas succomber aux mauvaises ondes de notre karma, puis Murasakibara les regardait en silence en éparpillant des miettes de cookies qu'il mâchait lentement.
Il n'y avait que moi et Akashi qui étaient restés en retrait, avec moi qui les fixais en me demandant avec inquiétude si j'allais vraiment faire parti de cette bande d'idiots, et lui qui semblait analyser la situation dans un calme imperturbable, comme un scientifique observerait deux espèces animales communiquer pour la première fois. La réalité n'en était pas loin, croyez-moi.
Faire parti du show-biz n'a jamais été ma vocation initiale. Pour être honnête, je n'en avais aucune pour commencer. Mais après plusieurs événements plus ou moins contraignants, dont la persistance de ma mère qui avait réussi à me faire céder au bout de quelques mois, me voilà devenu la possession de la plus célèbre industrie de show-business du Japon, Teikō's Entertainment Agency. Ou 'TEA' pour les intimes.
C'est ici que la Génération des Miracles s'est formée il y a un an. Nous avions tous par hasard débuté presque en même temps, personne d'entre nous ne se connaissait et du jour au lendemain, les six célèbres nouveaux modèles que nous étions avons été désignés pour jouer les rôles principaux dans une série réalisée par le fameux Aida Kagetora, reconnu pour avoir tourné les films les plus prisés du pays. Je peux vous dire que la nouvelle a vite fait le tour du territoire japonais. En à peine trois jours, la série tout juste évoquée était devenue le sujet principal de tous les potins de l'actualité people.
C'était à partir de là que les gens nous ont inexplicablement désignés comme la Génération des Miracles. Totalement absurde, n'est-ce pas ?
- Allez, on reprend. Et cette fois Aomine, contrôle tes mains baladeuses !
...
...
Le van se gara devant l'entrée de l'agence. Moi et les autre nous dirigeâmes dans le hall resplendissant au milieu duquel était disposé le bureau de l'accueil. Les demoiselles qui y travaillaient nous firent signe joyeusement tandis que nous continuâmes notre chemin jusqu'à l'ascenseur.
La porte s'ouvrit sur un couloir aussi impeccable que le rez-de-chaussée. Le sol en dalles noires renvoyait les rayons de lumières sur les murs pâles et lisses, décorés ici et là de tableaux et de photographies d'anciens modèles inconnus. On arriva enfin à notre étage respectif dans lequel se situait nos loges personnelles.
Nous six pénétrèrent dans le salon commun où on avait pour habitude de se réunir lorsqu'il s'agissait de travail en groupe ou d'information à nous faire passer. La plupart d'entre nous y passait le plus gros de leur temps quand on avait rien à faire. Cette salle disposait d'une télé, de larges fauteuils confortables et d'autres appareils utiles comme un mini-bar, une cafetière et une petite bibliothèque.
Sur l'un des deux canapés faisant face à une table basse, une silhouette féminine était en train de gribouiller sur un carnet de note, totalement concentrée dans son activité. Mon corps se tendit dès que je reconnus la longue chevelure rose qui retombait dans son dos en cascade de filament parfaitement soyeux. Ses yeux clairs se détachèrent de son carnet pour venir se poser sur nous lorsque la voix d'Aomine combla le silence de la pièce :
- Yo Satsu. T'es déjà là ?
Je reculai aussitôt, manquant de renverser Akashi juste derrière moi. Malgré mes réflexes qui ne manquaient jamais de me surprendre, la jeune fille autrefois assise était parvenue à se jeter sur moi sans crier gare, me faisant presque plaquer au sol.
- Tetsu-kuuuun ! Je t'attendais !
- Woaaah, il a vraiment failli voler cette fois… constata le blond d'un air compatissant.
- Hé ! Tu pourrais répondre au lieu de m'ignorer en sautant sur n'importe qui !
- Ce n'est pas n'importe qui, gronda la rose. C'est mon cher Tetsuya et je suis juste venue l'accueillir chaleureusement. Hein, Tetsu-kun ?
Je poussai un soupir fatigué en essayant de me dégager de son emprise.
- Momoi, la journée a été assez dure comme ça. Essaye d'éviter de me tuer chaque fois que je reviens à l'agence s'il te plaît.
Son expression se changea en une moue enfantine tandis qu'elle resserra encore plus sa prise que tout à l'heure. Sa poitrine imposante manqua de m'étouffer et je dus faire de mon mieux pour ne pas l'envoyer bouler comme j'avais toujours envie de faire dans ces moments-là. Je doute que j'en aurais la force nécessaire de toute manière.
Heureusement pour moi, Akashi se porta volontaire pour m'épargner l'asphyxie par la poigne incroyable de Satsuki.
- Ça suffit, dit-il en agrippant doucement son bras. Tu vas finir par le broyer.
Elle finit par céder contre son gré.
- Si vous me cherchez je suis dans ma loge, lança Midorima avant de traverser le minuscule corridor qui menait aux autres pièces après le salon.
Kise se mit à bâiller et salua Kuroko et les autres en rejoignant le grand à lunettes. Ne restait plus que Murasakibara qui marmonna une excuse à propos d'un rendez-vous chez un ami et qui partit rapidement à son tour.
- Comment ça s'est passé aujourd'hui ? demanda Aomine.
- Comme d'habitude. La séance photos sur la tour de Tokyo était géniale ! J'aurais adoré que vous soyez là. Si vous n'étiez pas aussi débordés je vous aurais demandé de m'accompagner, bouda Momoi en croisant les bras.
Je m'étais dirigé vers le mini-bar en les écoutant bavasser. Un soda à la main, je l'ouvris d'un coup d'index et m'enfilai quelques gorgées. Akashi s'était installé debout contre le fauteuil près des deux autres et je le voyais m'observer en silence d'un regard insistant. Je fis de mon mieux pour l'ignorer et me posa devant la fenêtre pour observer les voitures défiler devant l'agence. Je pouvais encore sentir ses yeux dans mon dos.
- Au fait Satsu, j'ai les CD que tu m'as filé l'autre jour. Suis-moi, je vais te les rendre.
Cette dernière m'embrassa sur la joue avant de rejoindre Daiki.
- À plus tard Tetsu-kun !
Aomine nous salua également moi et Akashi et s'en alla rejoindre sa pièce aux côtés de Satsuki. Le silence retomba comme du plombs autour de nous. Les voitures continuaient à défiler tandis que je faisais de mon mieux pour ne pas croiser les prunelles du mannequin N°1 du moment qui me fixait depuis un bon bout de temps.
- Quelle veinarde, lâcha-t-il après deux longues minutes de calme total.
- Qui donc ? me forçai-je à demander.
- Momoi. Il me semble qu'elle soit la seule à pouvoir te toucher sans subir de représailles de ta part.
- Momoi est une fille.
- Donc elle peut faire ce qu'elle veut parce que c'est une fille ?
Cette discussion qui me semblait familière n'allait décidément aboutir à rien, comme à chaque fois que Akashi abordait le sujet. Je me mis à soupirer et finit par me tourner vers ces yeux faussement hétérochromes. Il n'avait toujours pas retiré sa lentille gauche, et donnait encore l'impression d'être dans la peau du froid et autoritaire capitaine de basket du drama dont nous faisions parti.
- Jaloux ? lançai-je de manière plus ou moins sérieuse.
Je le vis esquisser un sourire. Puis il se leva du canapé et marcha lentement dans ma direction.
- Un peu.
Je n'ai pas bougé lorsqu'il s'était posté juste en face de moi, le même sourire que tout à l'heure affiché sur les lèvres.
- Il faut dire que tu es quelqu'un qui donne envie de te toucher et de t'enlacer chaque seconde, tu sais.
- Je ne crois pas.
- Vraiment ? C'est pourtant ce que tout le monde pense. Pourquoi crois-tu qu'Aomine et Kise agissent ainsi avec toi ?
- Ces deux idiots sont des cas à part. La plupart des gens me voient comme quelqu'un de normal.
- Tu n'as pas dû croiser grand monde dans ce cas.
Je fronçai les sourcils. Allons bon, voilà qu'il s'y mettait aussi maintenant. J'avais vraiment plus de difficulté à cerner Akashi. Contrairement aux deux abrutis mentionnés un peu plus tôt, il ne se mettait pas à me sauter dessus à longueur de journée juste par plaisir ou surplus de phéromones. Non. Lui préférait se la jouer plus subtil, évoquant son attirance à travers de nombreux sous-entendus placés ici et là dans ses conversations avec moi.
Au moins il était beaucoup plus gérable que les deux autres acteurs dénués de bon sens. Mais ça n'empêchait pas de trouver ses intentions tout de même assez perturbantes. Je détournai le regard, essayant de dévier la discussion.
- Il est temps de s'en aller…
- Déjà ?
- Je suis claqué, j'ai faim et je transpire. Donc oui, 'déjà'.
Il ne s'était toujours pas écarté cependant. Mon impatience me poussant à bout, j'allais pour me faufiler sur le côté lorsqu'un bras puissant se plaqua à côté de ma tête, paume contre la fenêtre. Impossible de détourner la tête avec ce visage perturbant juste en face du mien… Je voyais déjà la scène venir.
- Akashi… grondai-je doucement.
- Oui ?
- Non, pas 'oui'. Je peux savoir ce que tu fais ?
- Rien du tout.
Je réprimai l'envie de hausser un sourcil. Rien que ce geste aurait pu effleurer son visage tellement il était proche. Mon corps se crispa et je dus faire le maximum pour ne pas le frapper. Non pas que j'en aurais été capable de toute manière, mais ce moment me rappelais un peu trop celui de Kise dans la journée, et revoir cette scène agaçante avait tendance à titiller mon humeur.
Le silence était la seule chose qui nous séparait désormais. La moindre parole pourrait me coûter cher, c'est du moins ce que je pensais à l'instant où je pus sentir son souffle sur mes lèvres.
Je ne savais pas quoi faire entre le convaincre de reculer, le repousser moi-même ou bien tout simplement le laisser se retirer tout seul en espérant qu'il ne fasse que plaisanter. Le pire dans tout ça, c'est que j'avais l'horrible impression qu'il sondait mon esprit et savait en ce moment à quoi je pensais précisément. Je le vis par son rictus qui venait de remplacer son sourire encore normal il y a une seconde.
Ce fut les pas lourds qui se rapprochaient provenant du couloir qui finirent par briser cette tension dangereusement calme. On eu à peine le temps de relever les yeux qu'une présence déboula dans la pièce, haletante.
- Aida ? m'étonnai-je en reconnaissant les cheveux courts et l'uniforme du lycée Seirin.
- Kuro...ko ! Je te trouve enfin… Est-ce que tu-
L'adolescente s'arrêta un instant, les yeux rivés sur nous.
- … a un moment… ? finit-elle, incrédule.
… Rien ne se passa durant les dix secondes qui suivirent, jusqu'à ce que les joues de Riko viennent s'empourprer violemment à la vue de nos deux visages rapprochés. Elle se détendit un peu tout en affichant un air tout à coup plein de sous-entendus :
- Je vois que non. Désolée de vous avoir dérangés, je reviendrai plus tard…
Ce fut à moi de m'empourprer cette fois.
- Aida ! m'écriai-je en me dégageant d'Akashi. Reste ici. Il ne s'est rien passé.
- Vraiment ? C'est pas l'impression que j'ai eu.
- Je t'assure que tu t'imagines des choses.
- Oh, mais ça ne me pose aucun problème tu sais ! Beaucoup de mannequins sont homosexuels dans l'agence et partout dans le monde, c'est pas nouveau. Je suis juste un peu surprise que toi, Kuroko, sois tombé dans le piège du charme masculin… Mais je t'y encourage vivement hein ! Allez, fonce !
- C'est pas ça ! criai-je. Akashi ! Dis-lui, toi !
Ce dernier ne faisait qu'observer la scène embarrassante d'un œil amusé. À l'entente de son nom, il ne fit que sourire d'avantage et croisa les bras, tête penchée sur le côté.
- Voyons, Tetsuya. Les gens l'apprendront bien un jour ou l'autre. Nous n'avons plus à faire semblant, tu ne crois pas ?
- Qu'est-ce que… ?!
L'entendre prononcer mon prénom me crispa de partout. Et bien entendu, ça n'échappa pas aux oreilles de ma manager qui se mit à ricaner derrière sa pochette qu'elle tenait dans les mains. Akashi… tu me le paieras.
- Bref, coupa Riko, j'étais venue te dire que le président voulait te voir.
- Quoi, tout de suite ?
- Il a dit que c'était important.
- Important… répétai-je d'un ton peu convaincu.
J'aurais bien voulu reporter cette convocation mais les ordres étaient les ordres. D'un pas traînant, je me dirigeai vers le couloir à l'extérieur du salon sans prêter attention à Akashi qui me scrutait toujours.
- Je vais donner des papiers à mon père, me prévint Riko. Je rentre tout de suite après. On se voit demain, d'accord ?
Elle salua Akashi et me dépassa en courant tout en se dirigeant vers les escaliers où je l'entendis dévaler deux par deux. Quant à moi, me voilà déjà dans l'ascenseur qui allait m'amener au dernier étage. Durant la courte ascension de la cabine, je m'adossai lourdement contre la paroi en passant une main dans mes cheveux bleus et légèrement trempés de sueur. Il fallait que je prenne une douche…
Une douche bien froide, histoire de m'ôter cette journée pourrie de la tête. D'abord Aomine, puis Kise et enfin Akashi… Ces trois-là avaient eu cette horrible manie de me coller depuis quelques mois maintenant. Au début ça n'était qu'une plaisanterie lancée par Aomine qui affichait délibérément ses tendances bisexuelles en voulant prouver qu'il le vivait parfaitement bien -un peu trop d'ailleurs- et qu'il était libre de flirter avec qui il voulait -même si cette malheureuse personne [c'est-à-dire moi] n'avait aucunement donné son consentement.
Kise avait juste suivi le mouvement sans vraiment s'en rendre compte. Tout le monde savait qu'il préférait les hommes et puisqu'il semblait que j'étais tout à fait à son goût, il s'est mis lui-même dans une sorte de compétition contre Aomine qui avait, pour mon plus grand malheur, trouvé ce défi intéressant.
Quant à Akashi… c'était un mystère total. Je ne sais pas exactement à quel moment il est devenu aussi sournois que maintenant. Il a toujours été magnanime avec moi et son regard ne s'était jamais montré autre que bienveillant. Instinctivement et jusqu'à aujourd'hui j'avais eu cette impression étrange qu'il m'observait et m'analysait en tout temps. Et d'après ce que j'ai pu voir, mon instinct ne s'était malheureusement pas trompé.
- Bordel… soufflai-je en me redressant.
Je ne sais pas si je devais réellement considérer mon apparence comme une bénédiction. Se vendre au show-biz ne m'avait rien apporté de spécial si ce n'était des emplois du temps surchargés et des attaques surprises de mes propres collègues en manque.
Pourtant je me retrouve toujours là-dedans à jouer la marionnette de tous ces gens qui se saisissent de mon image, la déforme, la retouche sous tous les angles et la répand dans le monde entier, en me demandant pour quelles raisons les gens acceptent de la payer alors qu'ils ne me connaissent que de nom pour la plupart, qu'ils ne m'ont jamais adressé la parole et ne savent pas qui je suis réellement en dehors de ce qu'ils voient sur ces bouts de feuilles bourrées de substances chimiques qui se retrouvent dans les mains de n'importe qui.
L'ouverture des portes me sortit de mes pensées déprimantes.
Je mis le pas dehors et me dépêchai d'atteindre le bureau du président Kozō. Une fois devant la porte imposante, je toquai trois fois et attendis la réponse de l'autre côté.
- Entrez.
Le vieil homme assis à son bureau à remplir de la paperasse leva tout de suite les yeux sur moi, me gratifiant d'un sourire chaleureux que n'importe quel grand-père donnerait à ses petits-enfants. Enfin, même si je le désignais comme grand-père, son âge venait tout juste d'atteindre la cinquantaine en réalité.
Je m'avançais jusqu'à son bureau en essayant de ne pas faire attention à la grandeur des lieux. Ça brillait de partout, l'immense fenêtre dans le fond répandait une vive luminosité dans chaque recoin, les quelques tableaux d'art contemporains ne faisaient pas tâche sur les murs et les pots de plantes grimpantes disposés ici et là finissaient de combler la pièce sans en rajouter une couche.
C'était deux fois plus convivial que dans n'importe quelle maison du quartier.
- Vous m'avez convoqué ? demandai-je en prenant place sur le fauteuil face à l'adulte.
- C'est exact, dit-il en continuant de griffonner sur un document.
- …
J'attendis quelques secondes.
- … Et ?
Shirogane se mit à sourire.
- Comment s'est passé le tournage d'aujourd'hui ?
- Euh, normal.
Bien sûr, je n'allais pas lui raconter l'énième fiasco que j'avais failli causer par la faute de Daiki en plein filmage. Je sais que le président n'était pas du genre à se mettre en colère ou nous bassiner des heures avec des leçons de morale, mais sachez que lorsqu'il juge nécessaire de vous punir (avec le sourire), vous pouvez être sûrs de vivre l'enfer dans les prochaines vingt-quatre heures qui suivent !
Je me souviens encore parfaitement du nettoyage des toilettes de tout l'étage pendant trois jours, ou encore le rôle de la mascotte d'une émission stupide pour enfant que j'ai dû jouer à la plage, déguisé en étoile de mer à faire des chorégraphies immondes sous une chaleur de trente degrés, et ce durant toute une semaine. Je me tuerai bien avant d'être obligé de recommencer une chose pareille.
- Il n'y a pas eu de problème ? Vous avez bien avancé ?
- Je crois qu'on se débrouille pas trop mal. Aida-san saurait vous répondre mieux que moi si vous voulez plus de détails.
- Je suppose, oui.
- Mais je doute que vous m'ayez appelé juste pour avoir des nouvelles du tournage, je me trompe ?
- En effet, sourit le président.
Il lâcha enfin son stylo et reporta toute son attention sur moi, le menton posé sur le dos de ses mains jointes. Sans jamais changer d'expression, il finit par s'exprimer :
- Es-tu en couple, Kuroko ?
Alors là, si je m'attendais à ça… Pris au dépourvu, j'hésitai une seconde à croire ce que je venais d'entendre. Mais en voyant le regard fixe du président, je sus que je n'avais pas rêvé. Je fronçai les sourcils.
- Euh… non ?
- As-tu des vues sur quelqu'un de l'agence ou en dehors ?
- … non.
- Vraiment personne ?
- …
Je ne voyais pas du tout où cette discussion pouvait mener. Et voilà, je m'en doutais. Cette convocation n'avait absolument rien d'important. Il s'agissait juste d'un caprice de Shirogane qui voulait sûrement se débarrasser un moment de sa paperasse et taper la discute avec le plus disponible d'entre nous. Je réprimai l'envie de lâcher un soupir et de partir immédiatement.
Finalement ce fut le président qui soupira, se calant dans le dossier de son fauteuil de bureau.
- Vois-tu Kuroko, notre agence a pour principe d'exploiter le maximum de potentiel de ses modèles afin d'augmenter au mieux leur popularité, ainsi que nos fonds. Tout comme tes compagnons de tournage, tu es un joli diamant qui se démarque de tout autre pierres précieuses, mais tu n'as pas fini d'être totalement taillé.
- Que voulez-vous dire, Shirogane-san ?
- Ce que je veux dire, reprit l'homme, c'est que tu as besoin d'encore plus d'attention.
Décidément, je ne voyais toujours pas où est-ce qu'il voulait en venir. Comment ça, de l'attention ? J'étais déjà assez sous les feux des projecteurs, je n'avais pas envie d'avoir encore plus d'appareils braqués sur moi en permanence, merci.
- Kuroko, je ne tournerai pas autour du pot.
Je manquai de déglutir.
- Je veux que tu te mettes en couple.
… Ça dépassait de loin tout ce que j'imaginais. Je pensais avoir écouté la plus stupide des idées farfelues du président, jusqu'à ce qu'il ajoute :
- Avec un acteur de la Génération des Miracles.
… Tuez-moi.
.
.
.
Désolée Kuroko, mais je m'apprête à être super sadique avec toi...
Des avis pliiiz !
