Première fic sur le fandom Avengers, je ne suis pas une habituée en tant que lectrice, donc j'espère ne pas avoir fait de maladresses, auquel cas n'hésitez pas à me prévenir !
Se situe juste après le tout premier film.
Bien entendu, l'univers et ses personnages demeurent la propriété de Marvel et de Joss Whedon, je ne fais que les emprunter. En revanche, chaque OC m'appartient.
Je ne suis pas un grande fan des Marvel, mais j'apprécie énormément le personnage de Loki, et puis un matin j'ai eu une idée comme ça… Impossible de m'en défaire jusqu'à ce que je la fasse sortir de ma tête sur un document texte. Ce premier chapitre est un peu un genre d'avant-première, il y a toute une suite de prévue mais elle n'est pas encore écrite. Elle ne sera pas postée tout de suite, voire même jamais si l'histoire ne plaît pas. J'ai déjà énormément de travail et je souhaite privilégier la rédaction de mon autre fiction pour l'instant. A vous de me dire si vous voulez la suite ou non.
/!\ : Il faut bien comprendre que le récit est fait à travers les yeux de Loki, bien que la narration ne se fasse pas à la première personne. Ça explique les descriptions un peu étranges d'objets pourtant communs.
Alors je vous souhaite une bonne lecture et vous demande de rester indulgent(e) : ce n'est que ma deuxième fiction.
Si vous voulez une bande son pour votre lecture, je vous conseille celle du jeu The Legend of Zelda: Twilight Princess avec le thème de Snowpeak pour les scènes à l'extérieur et le thème de Snowpeak Ruins pour l'intérieur. Après, vous faîtes comme vous voulez ;)
Chapitre I
Les terres enneigées
…
Rien ne s'était passé comme prévu. Et pour la première fois, cela arrangeait bien les affaires de Loki.
Au moment même où Thor et lui s'apprêtaient à retourner à Asgard, pour y juger et probablement y emprisonner le Dieu du Chaos, quelque chose c'était, à l'évidence, mal passé. Le Bifrost étant endommagé et par conséquent inutilisable, ce devait être à Odin lui-même de les ramener en son royaume.
Mais comme indiqué précédemment, rien ne s'était passé comme prévu. Du moins tout portait à le croire.
C'est pourquoi Loki fut extrêmement surpris de découvrir de grandes étendues blanches devant lui, au lieu des pavés irisés formant la route menant au palais royal. L'asgardien se demanda même s'il était toujours à Midgard ou s'il se trouvait dans un autre monde. Ce qui était sûr, c'est qu'il n'était ni à Asgard, ni à Jotunheim, la terre qui l'avait vu naître, à en croire la présence d'arbres sur sa droite.
Sa tête lui faisait atrocement mal, si bien que tout mouvement trop vif lui donnait la nausée et lui causait quelques soucis d'équilibre, bien qu'il soit fermement campé sur ses deux pieds. Son propre corps semblait sur le point de s'effondrer dans la neige qui crissait légèrement sous ses chaussures. Le prince déchu se doutait qu'une telle faiblesse physique ne pouvait être due qu'à la magie. Pourtant, il ne se souvenait pas en avoir user, ni même avoir subi un quelconque sortilège. Son dernier souvenir était celui de Thor saluant une dernière fois ses compagnons midgardiens avant leur départ pour Asgard. La manière dont il avait atterri ici lui était inconnue.
Toutefois il se doutait que le Dieu de la Foudre devait être actuellement à sa recherche. Et il n'est pas dit que Loki l'attendra ici bien sagement. Au contraire, il comptait se cacher le temps de retrouver ses forces et ses esprits. Il fit donc quelques pas pour rejoindre les bois mais se mit à chanceler. Quelques mètres plus loin, à l'orée de la forêt, il s'effondra dans la poudreuse. Incapable de se relever, comme terrassé par une lourde fatigue, il se sentait partir progressivement dans les méandres obscurs de l'inconscience. Il se fit la réflexion qu'au moins il ne mourrait pas de froid, sa condition jötunn étant parfaitement adaptée aux températures glaciales de son nouvel environnement. Toutefois, ce n'était qu'un maigre réconfort face à sa situation. Pas que Loki se laisse abattre non-plus, mais cette histoire le mettait en rogne car bien qu'il ait échappé à Thor, il était toujours privé de ses pouvoirs. Preuve en était de la présence des chaînes reliant les deux larges bracelets en métal qui lui couvrait les poignets, le tout ensorcelé par les bons soins du Père de toute chose. Impossible donc de s'en défaire, surtout dans l'état actuel. Et le pire était probablement ce masque de fer qu'il lui couvrait tout le bas du visage, le bâillonnant de la façon la plus humiliante qui soit.
La fatigue finit par avoir raison de ses paupières, obligeant ainsi le prince déchu à les fermer. De toute façon, il ne pouvait plus bouger, alors au point où il était…
Ses oreilles bourdonnaient de plus en plus. Il lui sembla même entendre la terre trembler doucement, comme martelée par il ne savait quoi. Loki s'était d'abord imaginer que le son perçu n'était qu'une fable de son esprit épuisé, une bête illusion sonore, et il aurait préféré qu'il en soit ainsi et qu'il demeure seul dans cette étendue glacée. Mais force était de constater que la source du bruit semblait se rapprocher et que les bourdonnements se distinguaient progressivement en aboiements. Probablement des chiens ou peut-être même des loups, ce qui était sûr, c'est qu'il y en avait beaucoup. Allez savoir. Loki n'avait absolument aucune idée de ce qui pouvait vivre dans ces contrées désolées. Il se demanda juste si la bande de canidés comptait le dévorer ou non. Parce que dans le premier cas, ça n'arrangerait pas vraiment ses plans… Maintenant, les bêtes se trouvaient tout autour de lui, il pouvait désormais entendre le piétinement incessant de leurs pattes sur la neige et leurs halètements entrecoupés de grognements sourds. Ils étaient bien trop bruyants pour les oreilles fatiguées de l'asgardien et Loki n'avait aucune envie d'ouvrir les yeux pour savoir à quel genre canin il avait à faire. Pour ce que ça changeait…
Peut-être qu'en faisant ainsi le mort, ils allaient se désintéresser de lui et s'éloigner. Le dieu n'y croyait pas trop, mais ça restait une possibilité qu'il fallait tenter.
De toute façon, les ténèbres l'envahissaient déjà, le poussant à l'évanouissement. Quoique cette meute décide, il n'y avait déjà plus rien à faire, alors pourquoi lutter ?
Mais au lieu de se jeter sur lui pour lui arracher la chair de ses os, les canidés se turent d'un seul coup, dans une synchronisation parfaite. Le silence fut alors bien plus assourdissant que précédemment ce qui donna un regain de conscience au prince toujours étendu sur le tapis neigeux. Par curiosité mais aussi un peu de fatalité, Loki décida d'ouvrir les yeux.
Il distinguait sans peine les pattes des animaux reposant sur la neige, ainsi que le bas de leur corps. Des chiens ou des loups ? Ils pouvaient aussi bien être l'un ou l'autre et pourquoi pas les deux à la fois. Mais qu'importe. Il allait refermer les yeux lorsqu'il entendit un son qu'il redoutait.
Des bruits de pas.
Impossible de se méprendre sur le fait que l'être qui s'approchait se tenait sur deux jambes. La question était de savoir qui venait vers lui, ou plutôt quoi.
Ce qui s'apparentait à une main se posa sur son épaule pour le secouer légèrement. Le mouvement lui fit tourner la tête, son mal de crâne revint alors avec force. Il n'entendit donc que vaguement la voix qui s'adressait à lui et n'émit qu'un grognement de protestation et de douleur étouffé par son bâillon métallique. On le retourna sur le dos, doucement mais pas suffisamment pour l'empêcher de perdre conscience une bonne fois pour toute.
La dernière chose qu'il vit fut le visage de l'inconnu penché au dessus de lui, masqué par une épaisse écharpe et d'étranges et grands verres sombres lui couvrant les yeux. Puis ce fut le néant.
…
Il était ballotté dans tous les sens et il sentait des lames de bois entrecroisées dans son dos. Loki était à moitié assis, presque allongé à vrai dire, et vulgairement ficelé à l'amas de bois et de fourrures qui se trouvaient sous lui. Devant lui, il voyait ce qui devait être la bande de canidés de tout à l'heure, harnachés et reliés par diverses lanières rejoignant toutes la structure à laquelle on l'avait attaché.
Les chiens ou loups, il ne savait pas et s'en fichait toujours autant, courraient, propulsant ainsi l'embarcation sur laquelle il se trouvait, ce qui expliquait qu'il soit ainsi secoué dans tous les sens, malgré la corde qui le retenait.
Loki se demanda où pouvait bien se trouver l'inconnu et obtint immédiatement la réponse sous la forme d'un cri fort, mais définitivement féminin, encourageant la bande canine dans ses efforts. La personne se trouvait donc juste derrière lui et guidait visiblement cet étrange et rustique moyen de locomotion. En relevant la tête et en se tordant légèrement le cou, le prince déchu put apercevoir l'étrange être qui conduisait au son de sa voix la meute. Malgré l'épaisse couche de vêtement, il distingua la silhouette d'une femme dont les formes étaient gommées par sa tenue vestimentaire. Toutefois, son visage demeurait impossible à discerner à cause des tissus qui le couvrait et des deux morceaux de verres fumés qui lui protégeaient les yeux. La seule chose de discernable fut l'extrémité de ses cheveux rendus blancs par le givre qui s'y accrochait.
L'inconnue finit par se rendre compte qu'on la dévisageait et tourna donc sa tête vers lui. Bien qu'il ne voyait pas ses yeux, ça ne l'empêcha pas de la toiser avec curiosité et défi. Elle maintint son visage dans sa direction, l'étudiant probablement autant que lui, et finit par s'adresser à lui :
« Ça va aller ? »
Elle n'avait pas eu à parler fort comme lorsqu'elle s'adressait à ses bêtes, puisqu'il était suffisamment proche pour l'entendre sans peine. Il se contenta d'un bref hochement de tête pour lui répondre car son masque de fer bloquait toute tentative de paroles.
« Ok. Tant mieux car on ne va pas s'arrêter avant au moins une bonne heure. La meute aurait du mal à reprendre le rythme jusqu'au bout si on le faisait. » expliqua-t-elle.
A première vue, la fille ne lui semblait pas hostile, mais comme Loki ignorait encore ce qu'elle lui voulait, il préféra rester méfiant. Et puis le fait qu'elle l'ait entravé l'empêchait de la considérer comme une quelconque forme d'aide. Comme si son masque et ses menottes ne suffisaient pas…
Comme pour répondre à ses réflexions, l'inconnue lui indiqua en reportant son attention sur le groupe de canidés :
« Désolée pour les cordes, mais sans elles tu ne tiendrais pas sur le traîneau, donc j'ai fait au mieux… »
Ce fut les dernières paroles qu'elle lui adressa, le reste du trajet fut seulement ponctué par les encouragements et indications qu'elles criaient à ses bêtes. Les paysages qui défilaient sous les yeux du dieu n'était que neige, glace et végétation noircie par l'atmosphère hivernale qui régnait sur les lieux. Loki fut surpris de voir d'autres chiens/loups les suivre, courant pour se maintenir au même niveau que la structure en bois tirée par leurs congénères.
Après avoir traversé une plaine qui pouvait très bien être un lac gelé, le prince déchu aperçut au loin ce qui pouvait ressembler à une habitation et qui était probablement leur destination. Cette idée lui fut confirmée par la conductrice de l'étrange convoi, qui tendit un doigt en direction du bâtiment tout en le regardant et en lui déclarant un bref et encourageant « on y est presque ».
…
A l'évidence, c'était ici que la fille s'était établie. La grande maison qu'elle appelait "chalet" était faîte de bois et de pierres, et un immense terrain où se trouvaient de nombreuses niches jouxtait l'habitation.
Pendant que l'inconnue s'appliquait à couper les cordes qui l'entravaient avec un couteau, elle lui indiqua :
« Prend le temps de te dégourdir le temps que je détache les chiens. »
A défaut d'en savoir plus sur elle, il avait au moins appris la nature des canidés qui la servaient, ce qui ne l'avançait pas plus que cela. Il fit néanmoins ce qu'elle lui dit et constata sans surprise qu'il n'avait pas été engourdi par le froid. Après tout, il était un jötunn à la base…
Elle prit le temps de féliciter chacune de ses bêtes avant de ranger la structure en bois qu'elle appela "traîneau" contre le mur de sa maison et de l'inviter à la suivre à l'intérieur, laissant les chiens crapahuter dehors. Bien qu'à l'extérieur le bâtiment lui paraissait rudimentaire, il n'en était rien de l'intérieur. Les lieux respiraient une modernité et un style qu'il se souvint avoir vu chez l'homme à l'armure de fer et d'autres humains. Le dieu était donc toujours sur Midgard, si tant est qu'il en doutait encore... En revanche, il ne savait pas si ce constat était bon ou mauvais. Dans le vestibule, la femme se dévêtit de son lourd manteau de fourrures et de cuir avant de retirer le tissu qui lui couvrait le bas du visage et la curieuse lanière sur laquelle reposaient les deux morceaux de verres sombres. Elle capta probablement son regard insistant et curieux sur l'objet puisqu'elle lui dit :
« Oui je sais, les vieilles lunettes de pilote c'est un peu particulier, mais pour moi elles sont extrêmement pratiques. »
Il prit le temps de la détailler espérant déterminer à qui il avait à faire, mais son observation ne lui apporta pas grand chose. Sa peau était très blanche et Loki se demanda brièvement si c'était ainsi que les humains réagissaient au froid ou si elle était simplement malade. Ses yeux étaient très sombres, presque noirs et comme couvert d'un léger voile. Il pensa pendant un instant qu'elle était peut-être aveugle ou malvoyante et se dit que si c'était le cas cela l'arrangerait beaucoup, surtout s'il était amené à devoir fuir ou à la maîtriser. Dans le dernier cas, il ne se faisait pas trop de souci, car premièrement c'était une femme de taille moyenne et deuxièmement elle ne semblait pas posséder une grande force physique. Toutefois il devrait se méfier de la robustesse dont elle avait fait preuve jusqu'ici.
Il la suivit jusque dans ce qui ressemblait à une cuisine, s'il en croyait les divers ustensiles accrochés aux murs et les nombreux rangements. Elle lui tira une chaise pour qu'il puisse s'installer et ne s'offusqua pas du bruit que fit sa chaîne lorsqu'il posa ses avant-bras sur la table en bois. Quelle genre de folle était-elle pour ne pas être effrayée par ce que signifiait la présence de ses entraves ?
Elle revint dans la pièce avec une caisse en bois contenant divers outils et vida le tout sur la surface boisée sans plus de cérémonie.
« Si tu vois quelque chose qui pourrait m'aider à te débarrasser de ton… masque, n'hésite pas. »
Elle s'écroula sur sa chaise et commença aussitôt à chercher parmi les différents ustensiles. Au bout de plusieurs minutes elle finit par relever le visage vers Loki qui n'avait cessé de la fixer étrangement. Comprenant la question muette, elle lui répondit avec un sourire amusé :
« Je suis curieuse de savoir ce que tu as à dire. »
…
Rien à faire, aucune des petites barres en métal tordues qu'elle possédait ne semblait convenir pour le libérer. La midgardienne avait finit par abandonner et semblait maintenant en proie à d'intenses réflexions, ses mains finement gantées couvrant de part et d'autres son visage toujours aussi décoloré. La pointe de ses cheveux dépassant du morceau de laine qui couvrait sa tête, n'avaient même pas dégelés depuis leur arrivée, ce qui lui permit de deviner qu'il devait faire un peu froid dans la maison.
Le silence les entourant n'avait rien de gênant ou de pénible, et ravissait même les oreilles de Loki, surtout après leur bruyante arrivée chez la jeune femme (à cause des chiens). Toutefois, celui-ci finit par être brisé par des grincements provenant du premier étage et qui ressemblaient curieusement à des bruits de pas.
Le midgardienne jura et se leva pour prendre les escaliers.
« Je reviens. » lui indiqua-t-elle.
Mal installé sur sa chaise, le dieu se mit lui aussi debout une fois qu'elle eut quitté la pièce, pour aller s'appuyer contre le plan de travail de la cuisine. Il fit tomber un drôle d'objet rectangulaire qui, au contact du sol, alluma un écran. Le tableau mouvant accroché au mur lui montra des images de personnes attablées et tenant chacune un paquet de feuilles. Il y avait un vague murmure qui provenait du miroir parlant, le son entendu semblait être les paroles de ces deux humains qui semblaient s'adresser à lui. Il se rapprocha, curieux d'entendre ce qu'ils avaient à dire et de connaître le fonctionnement du dispositif, mais se figea lorsqu'il reconnu des images de la cité appelée New York, qu'il avait récemment dévastée. Là, au beau milieu des hauts bâtiments, il reconnut sans peine sa propre silhouette donnant des ordres aux chitauris attaquant la grande ville.
Aucun doute, la midgardienne devait savoir qui il était et ce qu'il avait fait, peut-être même était-elle en train de contacter le SHIELD ou une quelconque autorité pour qu'ils viennent le cueillir. Le risque était trop grand alors le prince déchu ne perdit pas une seconde et quitta le plus discrètement possible la maison.
Dehors, le crépuscule venait de faire son apparition, faisant rougeoyer la neige sous les faibles rayons de soleil. Il passa devant les chiens qui grognèrent d'avertissement à son passage, mais qui le laissèrent traverser sans accroc le terrain pour gagner la forêt. Le dieu voulait s'éloigner le plus possible des lieux, préférant affronter le vent glacé qui s'était levé et le risque de mort probablement élevé auquel il s'exposait plutôt que de se faire capturer à nouveau. Crever libre lui paraissait préférable à croupir en prison jusqu'à la fin de ses jours.
…
L'ennui, c'est qu'après plus d'une heure de marche, mis à part le fait qu'il ne voyait plus la maison dans son dos, il n'eut pas l'impression d'avoir beaucoup avancé. Absolument tout ici se ressemblait, chaque arbre semblait identique aux autres et la neige rendait difficile sa progression. Mais c'était le cadet de ses soucis pour l'instant… L'urgence actuelle consistait à se débarrasser de ce masque qui l'empêchait de se sustenter et, pire encore, de boire. Le dieu ressentait déjà douloureusement les premiers signes de la déshydratation. Il se maudit de ne pas avoir laissé la midgardienne le défaire du morceau de métal avant de prendre la fuite. Cette erreur risquait de lui coûter le prix fort…
Et pour couronner le tout, la nuit était tombée et d'étranges bruits se faisaient entendre depuis quelques minutes. Au début, Loki avait craint d'avoir été rattrapé, mais dû reconnaître qu'à l'évidence il ne s'agissait que de la faune nocturne qui reprenait possession des lieux. Sauf qu'après plusieurs pas, il entendit très distinctement un grognement profond et bas. Rien à voir avec les chiens midgardiens, le son était beaucoup plus intense et, il fallait l'avouer, effrayant. L'asgardien se stoppa net, se demandant quelle attitude adopter.
L'animal ne chercha pas à se faire discret, les craquements du petit bois sous ses lourdes pattes le prouvant. Il apparut soudainement sur la gauche de l'asgardien. La bête était énorme et Loki ne sut à quoi il faisait face. La seule chose qui était certaine, c'était qu'il n'avait pas l'ombre d'une chance de survivre en cas de confrontation. Le mastodonte qui se rapprochait lentement de lui se tenait à quatre pattes et était couvert d'une épaisse fourrure sombre qui ne masquait rien de sa musculature très développée. Les pattes puissantes étaient pourvues de longues griffes noires et sa gueule légèrement ouverte laissait entrapercevoir quatre larges dents pointues pouvant probablement déchiqueter sa chair sans rencontrer de résistance. Le grognement sourd et continu qu'émettait l'animal n'avait rien d'encourageant non-plus.
Ils se toisèrent quelques minutes et Loki put constater que la bête semblait aussi en colère que curieuse de sa présence sur ce qui devait être son territoire. Elle lui tournait autour comme pour le jauger et le prince déchu ne la quitta jamais des yeux. Les grognements menaçants finirent lentement par se stopper. Et, à la surprise de l'asgardien, le monstre se redressa sur ses deux membres inférieurs pour humer l'air dans sa direction. La haute silhouette était ainsi bien plus imposante et Loki fit inconsciemment un pas en arrière. Ce fut probablement le signal qu'attendait la bête pour le charger avec un cri guttural.
Il évita tant bien que mal les coups de griffes et les nombreuses tentatives de morsure. Déjà très épuisé physiquement par sa marche et son manque d'alimentation, le prince déchu finit rapidement à terre, dans la neige, surplombé par l'affreux animal qui allait bientôt le tuer. Il ne se faisait aucune illusion, il savait sa fin proche car la situation ne lui offrait aucune échappatoire et le monstre semblait bien décidé à l'achever pour se repaître de sa carcasse. Dans un dernier élan de courage, il planta ses yeux dans le regard sombre de la bête, prêt à affronter son sort, regrettant sa propre bêtise qui l'avait poussé à s'enfuir sans rien emmener pour se défendre.
Mais alors que l'une des pattes griffues allait s'abattre sur lui pour lui donner le coup de grâce, une masse de fourrure claire se jeta contre l'énorme animal pour l'en empêcher. Un couinement de douleur résonna lorsque le monstre projeta contre un arbre ce qui s'avéra être un chien. D'autres arrivèrent, mordant la bête et grognant pour l'effrayer. Deux vinrent même se poster devant le dieu, comme pour le protéger. Au loin, il reconnut la voix de la midgardienne qui hurlait des ordres en tout sens. Toujours étendu au sol, Loki sentit l'un des chiens l'attraper par le col pour le traîner loin de la bête immense qui tenait tête aux canidés. Une main vient lui saisir le bras pour le pousser à se relever, ce qu'il fit avec difficulté à cause des blessures occasionnées par le monstre. Malgré son agilité à éviter les coups, il n'avait pu s'en épargner complètement. Ainsi, plusieurs entailles lui dévoraient la chair en divers endroits.
Devant eux la bête avait réussi à faire reculer les chiens et grognait maintenant dans leur direction, visiblement très énervée d'être ainsi attaquée. Elle se mit aussitôt à les charger, l'humaine jura et se posta devant lui, brandissant un long objet métallique qu'elle pointa vers le monstre. Une détonation retentit et leur adversaire fut touché à l'épaule. Mais le coup ne fit même pas ralentir l'animal qui s'élançait toujours vers eux, tous crocs dehors.
Un gros chien gris à la fourrure épaisse se jeta sur son dos et mordit violemment dans la chair du gros animal. Un grognement plus profond s'échappa de la gueule du monstre qui réussit à projeter à terre son assaillant d'un violent coup de patte, déchirant fourrure et muscle au passage de ses griffes. Le chien gris finit au sol avec un flanc rougi par le sang. L'immense bête se dressa une nouvelle fois sur ses pattes arrière, debout, dans le but d'écraser l'animal de tous son poids. Mais jamais le monstre ne put achever son adversaire, car une seconde détonation retentit et un trou, duquel jaillissait du sang, apparut sur la tempe gauche de sa large tête, la bête s'effondra sur le flanc dans la neige. La midgardienne abaissa alors son étrange bâton de fer dont l'extrémité fumait et soupira de soulagement.
« C'était moins une. » souffla-t-elle.
Elle s'approcha du chien gris qui couinait toujours de douleur et examina la plaie qu'il avait. Elle passa sa main sur la tête de l'animal dans une caresse tendre avant de se mettre à genoux devant lui, de le tenir par les pattes et de le hisser sur ses épaules. Le chien hurla de douleur durant la manœuvre mais demeura conscient et ne se débattit pas. La midgardienne se redressa lentement avec son nouveau fardeau dont le sang commençait doucement à s'écouler le long de son dos, se mêlant à la fourrure et au cuir de son manteau.
« Allez, on rentre. »
Si tôt les mots prononcés, les chiens se rassemblèrent pour la suivre. Se rendant compte que Loki ne la suivait pas, la midgardienne se stoppa et la meute en fit de même.
« Ça vaut aussi pour toi l'étranger. »
Le groupe de canidés se mit à gronder pour lui faire comprendre qu'il n'avait pas trop le choix, alors l'asgardien se mit en marche, suivant l'humaine qui avait déjà repris sa route.
La midgardienne se repérait aux hurlements canins que l'on pouvait entendre au loin, en réponse à ceux que poussaient les chiens qui les accompagnaient. En moins de vingt minutes, ils sortirent de la forêt pour se retrouver sur le terrain où nichaient les chiens, juste à côté de la maison de l'humaine. Loki fut légèrement vexé d'avoir mis autant de temps pour s'éloigner de si peu du bâtiment. A l'évidence, il avait dû tourner en rond pendant un moment.
De retour dans la cuisine, elle balaya les outils toujours échoués sur la table pour y poser délicatement le chien gris qu'elle avait porté tout du long. L'animal couinait toujours mais plus faiblement, à l'évidence très fatigué par son combat. S'adressant à Loki, elle lui dit calmement :
« Assis-toi. »
C'était un ordre, très clairement, bien que le ton employé soit plutôt doux. Loki s'exécuta, mais ne cessa pas de la fixer avec méfiance.
L'étrange miroir diffusait toujours les images de son combat contre les Avengers et Loki se dit qu'il n'y avait aucun moyen qu'elle ignore qui il était, ni ce qu'il avait fait à New York. Mais curieusement, ce fait ne sembla faire ni chaud, ni froid à la midgardienne qui préférait s'occuper du chien blessé que de s'intéresser aux images mouvantes. Elle banda sommairement l'animal pour stopper l'hémorragie, puis se tourna vers lui. Elle regarda brièvement le tableau animé avant de se saisir de l'étrange objet rectangulaire resté au sol. D'un geste, elle éteignit le miroir qui redevint noir comme tout à l'heure. Elle s'assit ensuite calmement face à lui et prit la parole tout aussi calmement :
« Il y a une règle élémentaire, ici, qui dit que l'on doit toujours accueillir chez soit ceux qui se sont perdus, là-dehors. Tu pourrais être la pire ordure que cette planète est portée que ça n'y changerait rien. Les seules personnes que l'on s'autorise à laisser crever dans le froid du Grand Nord sont celles qui nous ont directement portés préjudice. »
Elle caressa distraitement la tête du chien toujours allongé sur la table en bois et l'animal lui répondit par quelques lèches affectueuses sur le dos de sa main.
« New York se trouve à plusieurs milliers de kilomètres d'ici et je ne porte pas dans mon cœur les rares personnes que j'y connais. De plus, retrouver ton cadavre sur ma propriété risque surtout de m'apporter bons nombres d'emmerdes. Donc. A moins, que tu ne désires refaire un remake des évènements précédents en ces lieux, je propose de t'héberger le temps de trouver un moyen de t'expédier ailleurs. Est-ce que cela te convient ? »
Pour le coup, l'asgardien est extrêmement surpris. Il s'attendait plus à des insultes et à des cris que d'être invité à rester ici. Néanmoins, la proposition aussi tentante soit-elle, cachait forcément quelque chose… La midgardienne attendait toujours une réponse alors il hocha simplement la tête pour montrer son accord.
« Bien. Au moins, tu as la chance que ta petite escapade ait entaillé ton drôle de bâillon en métal : je devrais pouvoir en venir à bout avec une pince. »
Pour illustrer ses dires, elle se leva et récupéra l'outil perdu parmi les autres sur le carrelage de la cuisine. Elle vint à ses côtés et lui expliqua :
« Je vais tenir le bas de ta mâchoire pour que tu ne bouges pas trop. Il est possible que la manœuvre soit un peu douloureuse par contre… »
Il cligna des yeux en guise d'assentiment et laissa la midgardienne le maintenir d'une main pour ensuite approcher la pince coupante vers la droite de son visage, là où la bête l'avait griffé. Sous la pression exercée, le masque se tordit légèrement, lui rentrant un peu dans la peau, avant de finalement céder. Il arracha aussitôt l'objet pour le jeter au sol. Toujours à côté de lui, la midgardienne s'était retournée pour prendre quelque chose dans l'un des meubles. Une bouteille d'eau ouverte fut posée devant lui et le dieu se jeta dessus, assoiffé. Il la vida rapidement avant de regarder la midgardienne qui comprit aussitôt et lui en ressortit une deuxième. Le temps qu'il la termine, une troisième avait fait son apparition sur la table, accompagnée d'une assiette de viandes séchées et de biscuits secs. Elle se réinstalla en face de lui et lui laissa le temps de se sustenter, le regardant avec curiosité tandis qu'elle s'occupait à nouveau du chien en lui resserrant son bandage.
Son repas terminé, il prit le temps de la regarder faire avant de lui demander :
« J'imagine que je dois te remercier. Mais d'abord j'aimerais savoir… Pourquoi ? »
Sa voix sonnait trop rauque à ses oreilles, probablement abîmée par la fatigue et le manque d'eau.
« Pourquoi quoi ? » lui répondit-elle, son regard toujours posé sur son animal.
Le manque d'intérêt qu'elle lui portait le frustra légèrement. Et le fait qu'elle se comporte avec lui comme avec n'importe quel humain froissait son ego de dieu. Alors, dans l'espoir de lui inspirer de la crainte et surtout un peu plus de respect, il lui dit :
« Pourquoi accueillir un monstre sous ton toit ? »
Mais l'effet ne fut pas celui que Loki avait escompté. Au lieu d'être apeurée, la midgardienne laissa échapper un léger rire avant de reporter son attention sur lui :
« Parce que tu crois être un montre peut-être ? »
Le ton était moqueur et Loki ne l'apprécia pas du tout. Rassemblant ses dernières forces, il lutta contre le sortilège de camouflage que lui avait jeté Odin lorsqu'il était enfant, celui qui lui donnait cette apparence d'asgardien. Sa peau bleuit et des lignes apparurent sur son corps et son visage. Il fixa alors froidement de ses yeux rouges la midgardienne qui s'était arrêtée de rire pour le contempler avec surprise.
Sauf qu'elle n'en fut pas du tout effrayée. Au contraire, elle lui souriait à nouveau avec une espèce de sympathie émanant de son regard trouble. Énervé, le dieu allait répliquer lorsque la midgardienne retira le morceau de laine sombre qui lui couvrait la tête.
Ce qu'il avait pris pour du givre n'était en réalité que la véritable couleur des cheveux de la jeune femme. Ils étaient d'un blanc pur rendu éclatant par l'éclairage artificiel de la cuisine et s'accordaient avec le teint crayeux de son visage. Loki n'avait jamais vu pareille chevelure chez les humains, encore moins chez les asgardiens.
Loin de s'arrêter là, elle enleva les gants fins qu'elle portait encore pour révéler la peau de ses mains qui étaient toute aussi blanche que son visage ou ses cheveux. Loki comprit alors que l'entièreté de son corps devait être ainsi : dépourvue de toute couleur. Elle s'adressa ensuite de nouveau à lui avec douceur :
« Les miens ne sont pas aussi sombres, mais beaucoup m'ont dit qu'ils étaient affreux voire effrayants. »
Elle porta alors ses deux mains à ses yeux et sembla retirer une seconde peau transparente qui les couvrait. Elle ancra ensuite son regard dans le sien et c'est là qu'il comprit le sens de ses étranges paroles.
Ses yeux étaient rouges.
On pouvait même y distinguer un peu de bleu derrière la couleur pourtant bien plus pâle que celle du dieu.
Ils se contemplèrent un instant, puis le dieu finit par rire discrètement une fois l'étonnement passé.
« Es-tu au moins humaine ? » lui demanda-t-il après avoir repris son autre apparence.
La question arracha un sourire amer à la midgardienne avant qu'elle ne lui réponde :
« Assurément. Je suis même normalement constituée. La seule chose qui me distingue des autres, est que ce qui devrait colorer ma peau, mes yeux et mes cheveux ne fonctionne pas, bien que je n'en sois pas dépourvue. »
« Tu es malade. » constata le dieu.
« Pas dans le sens que tu donnes à ces mots. Je suis juste née ainsi, c'est tout. Je suis ce que l'on appelle une albinos. » expliqua-t-elle.
« Et bien, Dame "albinos" je doute que tu souhaites m'aider parce que tu es ainsi. » rétorqua le prince déchu.
« Premièrement, je m'appelle Anna, pas "Dame albinos" et deuxièmement je t'ai déjà expliqué pourquoi tu es ici et pas dehors. »
« Et que fais-tu des Avengers ou du SHIELD, Anna ? »
« Eux ? Pff… Pour ce que j'en ai à faire. » souffla la midgardienne.
« Ne sont-ils pas les héros incontestés de ce monde ? » s'étonna avec une once de moquerie le dieu.
« Héros peut-être, incontestés je n'en dirai pas tant. » railla-t-elle.
Devant le regard curieux de son vis-à-vis, elle poursuivit :
« Pour parler franchement, je ne vois pas ce qu'ils ont de si grandiose lorsque l'on voit le nombre de dégâts qu'ils ont causés pour t'arrêter. Je suis presque sûre qu'entre toi, ton armée de singes savants et les six soi-disant sauveurs de la Terre, vous vous partagez équitablement le gâteau concernant les ravages dont New York souffre encore. »
« Voilà un point de vue bien étonnant pour une simple midgardienne. » susurra-t-il.
« Je ne conteste pas leurs motivations, mais leurs méthodes. On ne peut pas dire que l'organisation, ni la protection des populations locales soient leur fort. Je n'ose imaginer ce que ça donnerait s'ils devaient venir ici. La saison de la chasse serait probablement foutue pour les trois années à venir… » réfléchit-elle à voix haute. Elle allait poursuivre ses réflexions mais s'interrompit pour demander avec curiosité : « C'est quoi une midgardienne ? »
« Les midgardiens sont ton peuple. Ça signifie 'humains' si tu préfères. » expliqua patiemment le dieu.
« J'aime bien la consonance. » dit-elle simplement.
Ils furent interrompus par de léger bruit de pas et le grincement que fit la porte lorsqu'elle s'ouvrit pour laisser apparaître un jeune garçon aux cheveux sombres. La midgardienne se leva aussitôt pour le soulever dans ses bras et lui murmurer :
« Pardon, je crois bien que l'on t'a réveillé, mon grand. »
Le petit se contenta de nicher sa tête dans son cou et de frotter ses yeux encore lourd de sommeil. Il finit par demander :
« C'est déjà le matin ? »
Sa voix molle, lourde de fatigue, et la question enfantine firent rire la jeune femme.
« Non pas encore, il est juste très tard. »
« Ah… Dit Tatie, pourquoi il y a le monsieur de la télé dans ta cuisine ? » s'enquit l'enfant qui fixait désormais avec curiosité le dieu toujours attablé.
« Je t'expliquerai demain, pour l'instant je vais te remettre au lit. » lui dit doucement l'humaine.
« Mmmh mmh… »
Il était déjà en train de se rendormir. Loki regarda la midgardienne resserrer sa prise sur lui tandis que le garçon agitait mollement la main dans sa direction pour lui dire au-revoir. En sortant de la pièce, elle dit simplement au dieu :
« Si tu repars, je ne viendrai pas te chercher cette fois. Sauf pour enterrer ton cadavre. »
Au moins ça avait le mérite d'être clair.
...
Elle revint quelques minutes plus tard avec des bandes de tissus blancs et une mallette ornée d'une large croix rouge. Elle posa le tout devant lui et en profita pour le débarrasser de l'assiette désormais vide. Toujours debout, elle lui dit :
« Vu l'état de tes vêtements, je doute que le grizzly t'ait laissé indemne. J'ai donc ramené de quoi nettoyer et panser tes plaies. Pour tes chaînes, je verrais ce que je peux faire demain. »
« Ma condition d'asgardien me rend plus résistant que vous autres midgardiens. Je n'ai pas besoin de soin. » répondit-il avec suffisance.
L'humaine lui lança un regard blasé.
« Moi ce que je crois, c'est que tu es trop fier pour accepter une aide dont tu as besoin et que c'est mon canapé qui va en faire les frais vu que tu vas dormir dessus. Or, il se trouve que je n'apprécie pas l'idée de voir mes meubles tachés par le sang d'un inconnu. Donc, tu vas gentiment te lever de cette chaise et enlever le haut de tes vêtements histoire que je puisse jouer les infirmières et te préparer ensuite un semblant de lit, comme ça je pourrais enfin aller dormir. » rétorqua-t-elle.
La patience de la midgardienne s'était donc épuisée. Si Loki n'apprécia pas le ton autoritaire qu'elle avait adopté, il finit néanmoins par lui obéir. Elle l'aida à se défaire des épaulettes en cuir et des autres protections. Mais ils durent se rendre à l'évidence que le reste ne pouvait lui être retiré à cause de la chaîne reliant ses poignets. La jeune femme se frotta le visage, lasse, et lui déclara :
« Ta grande veste est dans un sale état et ne te sera d'aucune utilité ici-bas. Je propose donc de t'en débarrasser… définitivement, mais de conserver ta chemise à lacet en la passant par dessus ta tête et en la laissant pendre au niveau de tes poignets, tu pourras ainsi la ré-enfiler ensuite. »
Il n'avait pas vraiment le choix, alors il la laisser découper ce qu'il restait de son long manteau avec une grande paire de ciseaux. Le vêtement en lui-même n'était pas une si grande perte, c'était plus la dignité qui allait avec qui importait réellement.
L'étape la plus délicate fut celle de la chemise. Loki avait beau essayer, ses entraves l'empêchait de relever correctement le vêtement. La midgardienne finit par le stopper avant qu'il ne s'acharne trop et ne déchire le tissu.
« Lève les bras, je vais m'en occuper. » dit-elle, lassée de le voir s'agiter pour un manque de résultat flagrant.
Il voulut protester, mais dut se rendre à l'évidence : il ne pouvait y parvenir sans elle. Alors, de mauvaise grâce, il leva les bras au dessus de sa tête. La midgardienne saisit les bords du vêtement pour le remonter vers ses bras, bras qu'il rebaissa une fois que le tissu eut passé sa tête. Il était désormais torse nu devant l'humaine qui ne s'en formalisa pas plus que cela. Le dieu n'était pas non-plus mal à l'aise, mais reconnut que la situation était plutôt cocasse. Et puis, la dernière fois qu'une femme l'avait déshabillé… ça ne s'était certainement pas terminé par lui dormant sur un canapé après avoir été pansé.
Il se laissa inspecter sans broncher, préférant regarder avec amusement les différentes expressions qu'arboraient l'humaine. Elle avait d'abord été étonnée par les nombreux hématomes qui marquaient sa peau, résidus de son combat contre l'affreuse chose verte et incontrôlable qui faisait malgré tout elle aussi partie des Avengers : Hulk. Il perçut ensuite une pointe d'approbation alors qu'elle laissait son regard errer sur son torse glabre. Autant ne pas se mentir, il est vrai que le dieu était plutôt plaisant à regarder avec sa carrure athlétique. Toutefois la midgardienne se reprit rapidement. Elle claqua sa langue contre son palais dans un son de désapprobation lorsqu'elle vit les coupures profondes qui lui barraient les flancs et l'une de ses clavicules. Les plaies n'étaient pas très propres alors elle entreprit d'abord de les nettoyer avec une compresse d'eau tiède. Elle s'attarda également sur la coupure qu'il avait au visage. Le « grizzly » -c'est ainsi qu'elle avait nommé la bête- avait à l'évidence des griffes sales, ce qui augmentait donc le risque d'infection. La midgardienne avait donc eu raison d'insister pour le soigner, chose dont il lui était au final reconnaissant, bien qu'il ne le lui dirait jamais. De toute façon, le regard suffisant qu'elle lui lançait démontrait qu'elle avait suivi le même chemin de pensées que lui.
« Ce n'est pas ta progéniture. » dit-il distraitement pour détourner son attention.
Il parlait de l'enfant.
« C'est mon neveu. Et avant que tu ne poses la question, non, il n'y a personne d'autre à part lui et moi dans cette maison. Ou même à des kilomètres à la ronde, si tu veux tout savoir. »
L'intelligence et la prévenance de l'humaine lui convenaient parfaitement, cela lui évitait de parler pour un rien.
Elle jeta négligemment le morceau de tissu désormais imbibé de sang et de terre dans l'évier de la cuisine. Elle saisit ensuite une bouteille en verre contenant un liquide transparent qu'elle présenta au dieu.
« Ça va piquer, et pas qu'un peu. Je tâcherais de faire vite. » l'informa-t-elle.
La suite fut effectivement beaucoup moins agréable, mais le prince déchu avait déjà connu bien pire. Elle avait versé un peu de liquide sur une nouvelle compresse et répétait les mêmes gestes que précédemment. Il serra juste les dents de temps à autres, quand les picotements se changeaient en brûlures, mais n'émit aucune plainte ou protestation. Le bout de tissu rougi finit par rejoindre son confrère dans l'évier. Elle se nettoya ensuite les mains pour se débarrasser du liquide carmin qui commençait à sécher sur sa peau, formant des débuts de croûtes.
Elle réfléchit quelques instants en regardant avec insistance les larges coupures qui zébraient l'une de ses hanches. Elle finit par murmurer :
« Je crois bien que tu vas avoir besoin de points de sutures pour cette plaie-là. J'ai peur que les strips ne soient pas suffisants… »
Ce que la midgardienne appelait « strips » étaient de petites bandes blanches adhésives, elle les utilisa pour refermer le reste de ses entailles. Le contact de ses doigts délicats contre sa peau était doux, plutôt agréable lorsque les plaies n'étaient pas trop profondes. Une aiguille courbée en crochet et un fil firent ensuite leur apparition dans ses mains. L'humaine noua le second à la première après les avoir rincés avec le liquide incolore dont elle s'était précédemment servie. Elle ancra ensuite son regard dans le sien pour lui demander s'il était prêt. Il acquiesça et la regarda approcher l'objet pointu de sa plaie pour l'enfoncer d'un geste fluide dans sa chair. Elle commença immédiatement son ouvrage et le termina en moins d'une minute. Son habileté et son manque d'hésitation trahissaient une habitude. C'était donc loin d'être la première fois qu'elle soignait ce genre de blessures. Mais était-ce les siennes ou celles d'un autre dont elle avait l'habitude de s'occuper ?
La midgardienne répéta l'opération pour les deux entailles du dessous et le dieu apprécia la propreté et la régularité de son travail. Elle appliqua ensuite un genre de cataplasme verdâtre sur l'ensemble de ses plaies désormais propres et soignées pour ensuite les panser soigneusement de tissus blancs. Pour terminer, elle l'aida à remettre sa chemise mais le retient par les avant-bras lorsqu'il voulut se reculer, pour inspecter ses poignets. Elle regardait avec désapprobation la peau fine, meurtrie par les bracelets en fer. Avec un soupir elle le fit se rasseoir et prit deux compresses qu'elle imbiba de l'épaisse pâte vert pâle. Avec délicatesse, elle s'arrangea pour les loger entre le métal et sa chair à vif. La fraîcheur du produit apaisa le dieu, si bien qu'il laissa échapper un soupir de contentement. Elle couvrit ensuite le côté extérieur de ses épaisses menottes pour qu'elles ne le gênent pas dans son sommeil et pour éviter de mettre du baume partout.
La midgardienne l'invita à aller dans la pièce attenante qui se trouva être un salon, tandis qu'elle rangeait son matériel et s'occupait du chien toujours allongé sur la surface en bois.
…
Elle lui avait aménagé un lit de fortune dans son grand canapé, avec un gros oreiller, une multitudes de coussins et bons nombres de couvertures en laine et de fourrures. L'humaine incolore avait même eu le courage de relancer le feu qui se mourrait dans la cheminée. Elle craignait visiblement qu'il n'ait froid durant la nuit. Il faudra peut-être qu'il lui explique pour sa condition de jötunn…
« Il y a d'autres couvertures dans ce placard. En cas de problème, ma chambre est à l'étage, deuxième porte à droite. Mais tu as intérêt à avoir une bonne excuse pour venir me réveiller au beau milieu de la nuit. Sinon, tu trouveras une salle de bain si tu traverses la salle à manger. Utilise-la comme bon te semble, mais ne touche pas à tes pansements. Tu peux te servir dans la cuisine si tu as faim. » lui indiqua-t-elle.
Elle quitta ensuite la pièce après lui avoir souhaité une bonne nuit. La regardant partir, le prince déchu lui souffla un léger « merci » avec une gratitude non feinte. La midgardienne se retourna pour refermer la porte et lui lança un regard entendu avant de disparaître derrière le panneau de bois.
...
Cette nuit-là, Loki s'endormit sans peine et se surprit à rêver d'une bête immense armée de Mjöllnir et vêtue d'une grande cape rouge, se faisant dévorer par une meute de loups sous le regard lasse d'une sorcière blanche aux pâles yeux rouges.
A vous de me dire si vous souhaitez une suite ou non, le premier chapitre pourrait parfaitement constitué un OS après tout… ;) Et je suis ouverte à toute critique.
Je ne peux que vous conseiller d'aller voir des photos pour mieux comprendre l'aspect des yeux d'Anna. En fait, la plupart des yeux d'albinos sont plus bleus que rouges, mais ça dépend aussi de l'éclairage et des gens. En fait, si vous regardez bien c'est surtout le contour de l'iris qui est rouge. J'avais besoin d'exacerber ce trait pour mon histoire, j'espère que ça ne gêne personne. Et puis ça fait aussi un clin d'oeil à mon autre fic: Au fait, moi c'est Alice.
