Titre : Travesti

Auteur : Lilou Black

Genre : Hurt/confort - Romance

Pairing : Shura/Aphrodite

Rating : T

Disclaimer : Propriété de Masami Kurumada

Note : Initialement posté sur la communauté LiveJournal Méli-Mélo pour le défi "secret honteux"

Bonne lecture


Ils n'étaient que deux à savoir. Le premier parce qu'il lui avait fait confiance et l'autre... il ignorait pourquoi. Pas plus qu'il ne savait pourquoi il avait honte, après tout sa vie n'était pas sensée tourner autour de ça. Encore que les choses auraient été plus simples s'il avait été moins beau.

Il fallait croire que c'était une malédiction liée à son armure. De tout temps, le chevalier d'or des Poissons avait toujours eu un physique à couper le souffle, une beauté des plus meurtrières et, il l'avait appris après des recherches dans les archives, des problèmes de phobie sociale. Lui avait essayé de renverser la vapeur. Né avec le prénom de Stefan, il avait poussé le cynisme jusqu'à adopter le nom de la déesse de l'amour.

Aphrodite.

À l'adolescence, il avait payé le prix de ses manies de séducteur. Quand il ne le répugnait pas, le contact physique d'un autre l'indifférait totalement. Il en avait eu honte parce que ça ne collait absolument pas avec son attitude. Il s'était bâti une réputation de Marie-couche-toi-là mâle, se jouant de ses frères à coups de regards langoureux, de moues sensuelles et de déhanchements presque obscènes. Certains s'étaient pris aux jeu et Aphrodite n'en avait tiré aucun bénéfice, à part du dégoût pour certains et une vague gêne vis-à-vis d'autres.

Sauf eux.

D'abord, il y avait eu Saga.

Le Gémeaux, imposture de grand Pope, bipolaire, assassin et psychopathe avait eu paradoxalement assez de sensibilité pour comprendre que le gardien de la treizième maison supportait difficilement la proximité physique d'autrui. Il n'en avait jamais profité pour le faire souffrir, le traitant comme un sbire ordinaire quand sa folie le possédait et ne réclamant que le refuge de ses bras, sans plus, quand ce qu'il aurait dû rester reprenait le dessus. Saga avait aimé se faire consoler par Aphrodite, lui parler de choses plus ou moins inavouables, lui raconter ses secrets et ses hontes sans réclamer en retour quoi que ce fût d'autre que son silence.

À présent, le Gémeaux avait trouvé d'autres bras pour les confidences et les câlins. Le Suédois le regrettait un peu parfois mais dans le fond, tout ce qui comptait pour lui était le bonheur de son ancien supérieur. Mû pouvait être ennuyeux à pleurer à ses heures mais si Saga était bien avec lui, c'était tant mieux.

Ensuite, il y avait eu cette autre personne, auprès de laquelle il se réfugiait lui-même quand ça n'allait pas.

Shura.

L'homme qui élevait la dévotion au rang d'œuvre d'art.

Shura était amoureux de lui, Aphrodite le savait, mais il respectait sa gêne physique d'autrui, son absence totale de désir, ce problème qu'il considérait comme un tabou et dont il avait honte jusqu'aux larmes, parfois.

Il faisait nuit et chaud, les lucioles voletaient dans le salon éclairé par une chandelle solitaire et le tourne-disque crachotait de la musique, une voix de femme accompagnée au piano. Assis sur le canapé, les yeux clos, la tête renversée en arrière, Shura fumait une cigarette tandis que sa main libre caressait les cheveux d'Aphrodite dont la tête reposait sur ses genoux. C'était le seul contact, à part des câlins fugace, que le Suédois pouvait lui offrir mais ça n'avait aucune importance.

À sa manière, Aphrodite aimait Shura aussi. Suffisamment pour se confier à lui, pour lui montrer cette face fragile, travestie sous les allures de grande folle et le manque de scrupules quand il s'agissait de se battre et de tuer.

Il l'aimait assez pour ne pas ressentir de gêne au contact de ses doigts dans ses cheveux. Il regrettait de ne pas éprouver le moindre désir, il était jaloux quand le Capricorne allait voir ailleurs pour assouvir ses pulsions, il était conscient de le faire souffrir parfois, même si Shura avait bien trop d'orgueil pour l'admettre...

Le disque s'arrêta. Il était temps de rentrer. Rester pour la nuit n'était pas envisageable malgré le déplaisir causé par la perspective de traverser le temple du Verseau où résonnaient sans cesse les cris de Camus et son amant.

Il le fallait pourtant.

Aphrodite se redressa. Shura écrasa sa cigarette.

"Ça va aller ?"

Le Suédois inclina la tête. Timidement, il tendit la main au brun, à l'homme qu'il considérait comme le plus proche de lui malgré tout.

Une étreinte furtive, un remerciement murmuré et ce fut tout.

Réconforté par ce moment de paix mais frustré de ne pouvoir donner plus, Aphrodite s'en alla.

En se promettant de revenir.

Fin