31. Le prix de l'espoir

Dans une chambre, deux lits séparés. Une couverture lisse et un corps immobile d'un côté, des draps froissés et un corps remuant de l'autre. Les deux ne peuvent dormir. La faute à qui ?

- Duo...

- J'aimerais bien t'y voir toi !

- Hn.

Ambiance feutrée, sombre, intime. Minuit est passé de quelques minutes, et la lune éclaire l'espace au pied des lits jumeaux. Tout est près pour les confidences que des amis en manque de sommeil mais pleins de questions peuvent se faire. Le rideau s'est levé, le décor est planté. Les acteurs entrent en scène...

- Qu'est-ce que tu vas faire plus tard ?

- Quand ?

- Après la guerre, évidemment !

- Hn. J'en sais rien. Je n'y survivrais pas sans doute. Et toi ?

- Dis pas ça ! Il faut savoir rêver parfois... Tu ne rêves jamais ?

- Je ne me souviens pas de mes rêves.

- Ah... Tu n'as pas de but, quelque chose de spécial à accomplir pour être en paix avec toi-même ?

- Je n'ai pas besoin d'être en paix. Je me bats pour la paix des autres.

- Tu penses vraiment ça Heero ?

- Hn.

Déception. Colère de voir l'innocence étouffée dans l'oeuf, d'entendre une voix monocorde parler de choses qui seraient si importantes...

- Tu me fais confiance Heero ?

- ... Ca dépend...

- De quoi ?

- De la situation. Mais dans l'ensemble, tu fais partie des rares personnes en qui je fasse le plus confiance. Même si la confiance est une notion très abstraite.

- Tu réalises que tes phrases ont plus de 5 mots chacune ?

- Hn. Baka. Pourquoi tu m'as posé cette question ?

- Parce que je voudrais que tu continues à me faire confiance, pour que je puisse t'aider à trouver un but. Un peu d'espoir.

- Je ne crois pas en l'espoir. Ca n'apporte que des déceptions. Ca coûte trop cher. Et ça ne vaut rien.

- C'est toi le baka. Comment tu peux dire ça alors que nous apportons l'espoir ? Que les Gundams sont un symbole de liberté future ?

- Nous nous battons parce que personne d'autre que nous ne le peut. C'est Quatre qui l'a dit. Nous nous battons parce nous avons les moyens de le faire. Parce que nous sommes entraînés. Parce que l'homme a besoin de symboles.

- Parce qu'il a besoin de l'espoir ! Croire en la liberté donne une plus grande détermination ! L'espoir rend fort !

- L'espoir, Duo, c'est comme la confiance, c'est abstrait, je te l'ai dit. On peut être fort sans espoir, et sans personne.

- Tout le monde n'est pas toi !

- L'espoir a un prix que l'homme paie chaque jour un peu plus fort, sans voir qu'il coure à sa ruine...

- Tais-toi.

Le silence se fait. Le japonais n'a jamais autant parlé. C'est une preuve de confiance, oui, mais l'américain aurait voulu qu'il se taise plutôt que d'entendre des paroles comme celles-là. C'est un coup à rouvrir la boîte de Pandore et à laisser le dernier bonheur qu'elle contient s'évanouir. Duo a connu autrefois un homme qui avait l"espoir d'un monde en paix et meilleur. Il en a payé le prix, en effet, et Duo paie chaque jour d'avoir eu les mêmes rêves que cet homme. Il tue, bafouant les règles. Mais il continue d'espérer construire les rêves du Père Maxwell, parce l'espoir, quoi qu'il coûte, est dans la nature des Hommes.

- Alors je serais pauvre toute ma vie.

- Oyasumi Duo.