Ces petites choses qui vont me manquer…

J'aimais quand John me souriait.

Je me réveillais toujours avant lui, et j'avais pris l'habitude de faire chauffer l'eau, pour le thé, et de l'attendre sur mon fauteuil. C'était une de nos habitudes. Mon John avait toujours l'air d'un enfant au réveil : il gémissait en s'étirant, oubliant sa pudeur habituelle, essayait de remettre ses cheveux blonds ébouriffés en place, et trainait les pieds. Dès qu'il entrait dans son salon, il entrouvrait ses paupières, ses yeux se posaient sur ma place et, comme il voyait que je l'y attendais, son visage s'éclairait. J'avais le droit à son premier regard et son premier sourire de la journée, et pendant un moment, cela me suffisait même à contenter mon besoin de possession.

J'adorais quand il me lançait ce petit sourire complice, quand nous comprenions quelque chose en même temps. Il savait ce que je pensais, et me montrait qu'il attendait mon génie. Et je le satisfaisais.

J'aimais aussi son sourire quand il rentrait à l'appartement. Il m'est arrivé de surveiller son retour à la fenêtre, et de le voir marcher le visage maussade et ennuyé. Ces jours-là, je m'installais sur le canapé, j'attrapais un ordinateur ou un portable, et je prenais un air désintéressé. Quand il entrait, j'attendais quatre secondes, puis levais la tête et lui souriais, et je pouvais voir la tristesse s'effacer de son visage instantanément. Et là aussi, il me faisait son sourire d'enfant.

Au début, je détestais le voir rentrer souriant. Ca sous-entendait que quelqu'un d'autre que moi l'avait mis de bonne humeur, et je détestais ça : c'était à moi qu'appartenait son sourire, c'était mon John ! Mais, plus le temps passait, plus je l'aimais, et j'aimais le voir heureux. Son sourire est passé à mes yeux d'un petit plaisir égoïste à une condition à mon bonheur. Alors quand il arrivait avec un grand sourire, je ne répondais rien, et je le laissais parler car je voyais dans ses yeux qu'il avait tellement de choses à me raconter.

Aujourd'hui, alors que je lui souhaite plus que jamais, il ne sourit plus. Est-ce que c'est parce que je ne suis plus là ? J'ai l'impression d'être parti en lui volant son sourire, et rien que ça me rend obligé de revenir. Je dois revenir pour le faire sourire, et aussi parce qu'il me manque, mon John.