Nouvelle traduction d'une histoire d'Amiable Loner. Il s'agit cette fois non d'un one-shot, mais d'une fanfiction de 5 chapitres. Bonne lecture !
De plus en plus mal à l'aise, Gideon fixait le numéro affiché sur l'écran de son téléphone, alors que l'appareil continuait de sonner. Il ne s'agissait pas d'un membre du BAU, à moins qu'ils n'aient changé de numéro pendant son absence, ni qui que ce soit qu'il connaîtrait en dehors de son ancien lieu de travail. Finalement, tout en étant conscient qu'il le regretterait un jour, Gideon répondit prudemment.
- Gideon.
- L'année n'a pas été très bonne pour vous, n'est-ce pas, Jason ?
Gideon reconnut la voix pleine de mépris. Pourtant, et malgré tous ses efforts, il ne parvint pas à se souvenir de l'identité de son propriétaire.
- De nombreuses années ont passé depuis que nous avons parlé, bien que je suppose que notre dernière conversation n'était pas très différente des interrogatoires que vous avez menés au fil des ans.
- Qui est-ce ? demanda Gideon, n'aimant pas la direction que prenait leur conversation.
- Je suis blessé, Jason, dit l'homme, bien que son ton démente ses paroles. Il y a tant… d'histoire, entre vous et moi, la pensée que vous ayez oublié qui je suis me bouleverse.
Cette petite phrase heurta Jason Gideon avec la force d'un camion, réveillant des souvenirs qu'il croyait avoir enterrés, et oubliés.
- Matheson ? Rick Matheson ? souffla-t-il, souhaitant désespérément avoir tort, tout en sachant que ce n'était pas le cas.
- Voilà ! Je savais que vous vous souviendrez ! s'exclama Matheson d'une voix joyeuse et néanmoins obscurcie par la folie qui donnait des intonations étranges à ses mots. J'ai attendu ce jour pendant des années.
- Et quel est ce jour ? questionna Gideon, retombant inconsciemment dans ses vieilles habitudes de profileur. La dernière fois que j'ai entendu parler de vous, vous étiez enfermé dans une petite cellule capitonnée.
Matheson, cependant, ne mordit pas à l'hameçon.
- J'ai été récemment… relâché, pour m'occuper de quelques affaires personnelles.
- C'est peu probable, Rick. Qui vous a aidé à vous échapper ? Vous n'êtes pas suffisamment sain pour avoir établi votre propre plan d'évasion, c'est la raison pour laquelle vous avez toujours un partenaire.
Gideon entendit un ricanement sourd, à faire froid dans le dos, faire sinistrement écho à travers le téléphone.
- Cela pourrait être le cas, Jason, cela pourrait très bien être le cas. Mais cela ne m'arrêtera pas. Vous m'avez tout pris, ce jour-là, alors maintenant je vais vous retourner la faveur.
Une clochette d'alarme se fit entendre dans la tête de Gideon.
- Cela ne fonctionnera pas, je n'ai pas de famille, je n'ai même aucune fréquentation, contra Gideon en espérant se montrer plus malin que son interlocuteur.
- Jason, Jason, soupira Matheson avec condescendance. Je suis parfaitement au courant de l'existence de votre fils et de sa famille. Mais ne vous inquiétez pas, ce n'est pas lui qui m'intéresse. Je suis davantage intéressé par votre petit protégé du BAU. Le docteur Reid, c'est ça ?
Gideon refoula toute émotion pour répondre :
- Je n'ai plus aucun contact avec l'agent docteur Reid depuis plusieurs années. Il n'est rien pour moi.
Gideon grimaça à ces mots, qui lui furent extrêmement difficiles à prononcer. Le ricanement troublant se fit à nouveau entendre.
- Vous pouvez bien ne pas l'avoir contacté depuis quelques temps, mais je sais qu'il compte beaucoup pour vous. Presque comme votre second fils, si je ne me trompe pas.
Sa voix se fit alors plus dure, et devint plus sinistre.
- Je vais prendre votre « fils » de la même manière que vous avez pris le mien.
- Ne faites pas ça, Rick, tenta de négocier Gideon. Tuer un agent fédéral vous mènera seulement à votre propre mort, cela ne sert à rien.
- J'ai déjà accepté ma mort. Même si vos agents ne me tuent pas, et que le gouvernement décide de ne pas m'envoyer dans le couloir de la mort, je mourrai.
- Vous vous tueriez sans raison ?
- Pas sans raison ! explosa-t-il. Je suis à peine une ombre depuis que vous l'avez tué, j'ai fait mes recherches, planifié ce jour depuis des années. A présent l'opportunité est là, et je vais enfin pouvoir mettre fin à tout ça, une fois pour toute.
- Pourquoi me dites-vous tout cela ?
- Je veux que vous viviez dans la peur qu'à n'importe quel moment, votre précieux docteur Reid puisse vous être arraché et que vous ne pouvez rien y faire. Pour ce que vous en savez, je pourrais très bien l'avoir avec moi en ce moment même.
A ces mots, Gideon dut ravaler la bile qui lui remontait dans la gorge.
- Mais ce n'est pas le cas. Je veux que vous soyez là, je veux voir le désespoir dans vos yeux pendant que vous le voyez mourir, je veux que vous sentiez le monde s'écrouler autour de vous en réalisant que même si vous saviez que cela allait arriver, vous n'avez rien pu faire pour l'empêcher.
Gideon demeurait silencieux, écoutant les halètements âpres de Matheson qui finissait son discours passionné.
- Je vous dis maintenant au revoir, Jason Gideon, continua-t-il, bien plus calme qu'il ne l'avait été une minute auparavant. Je sais que nous nous reverrons bientôt. Vous pourriez avoir envie de voir votre précieux génie une dernière fois, et le supplier de vous pardonner, avant la fin.
Sur ces derniers mots, la tonalité disparut, et Gideon resta là, immobile, pétrifié par la peur. Non, non non non ! Je ne peux pas le voir mourir à nouveau. Pas maintenant, pas après tout ça ! Comme si un interrupteur venait d'être actionné, Gideon se remit en mouvement. Ses doigts, rendus maladroits par l'adrénaline, volèrent sur le clavier tandis qu'il composait le numéro qui, un jour, avait été familier. Il se trouvait dans sa voiture et mettait le contact quand son interlocuteur décrocha.
- Hotchner.
- Hotch, écoute-moi, où est Reid ? demanda Gideon en passant la première vitesse et mettant le pied au plancher.
- Gideon ? fit Hotch, clairement, et à juste titre, stupéfait. Je ne comprends pas, qu'est-ce que…
- Hotch ! Où est Reid ! s'écria purement et simplement Gideon.
- Il est là, à son bureau, répondit Hotch, la perplexité colorant sa voix.
- Il va bien ?
- Oui, pourquoi ce ne serait pas le cas ?
Gideon pouvait entendre l'inquiétude dissimulée dans la voix de Hotch. Il savait combien il serait perdu si leurs rôles étaient inversés.
- Hotch, je t'en supplie, ne le perd surtout pas de vue, d'accord ? Je te vois dès que je peux, répondit Gideon, zigzaguant habillement dans le trafic pour atteindre l'autoroute.
- Gideon, que se passe-t-il ? Est-ce que tu vas bien ?
Cette question comportait un sens plus profond, et si Gideon ne pouvait l'en blâmer, il sentit malgré tout la colère monter.
- Hotch, je suis peut-être pas assez stable mentalement pour être profileur, mais je ne suis pas complètement dément. Je viens de recevoir un appel d'un assassin en fuite qui veut s'en prendre à Reid dans une tentative peu judicieuse de se venger de moi.
Il était conscient que cela paraissait fou, et pourtant c'étaient peut-être les mots les plus cohérents qu'il ait prononcé jusque là.
- De quoi parles-tu ?
- Hotch, Rick Matheson est libre, et il en a après Reid.
Il savait que Hotch connaissait l'affaire comme s'il avait travaillé dessus, bien que ce ne soit pas le cas.
- Tu en es sûr ?
- Hotch, il vient de m'appeler et a menacé de tuer Reid.
- D'accord, d'accord. Que veux-tu que je fasse ?
Gideon sût qu'il ne s'agissait pas d'un tour pour essayer d'apaiser un homme possiblement instable mentalement. Hotch prenait ses paroles au sérieux.
- Pour l'instant et jusqu'à ce que nous en sachions plus, garde-le près de toi. Enferme-le dans ton bureau ou menotte-le à Morgan s'il le faut, mais ne le laisse pas aller où que ce soit tout seul. Je veux que vous revoyiez l'affaire pour que vous sachiez à quoi vous attendre. Je serai là dès que possible.
- Tu as dit « nous », remarqua Hotch. Gideon, tu ne fais plus partie de l'équipe.
- Je sais, mais je connais cet homme mieux qu'aucun d'entre vous, vous aurez besoin de mon aide.
- Très bien, concéda Hotch, avant d'ajouter : je ne sais pas comment il va réagir à cette nouvelle.
- Je sais, murmura Gideon en manœuvrant autour des véhicules qui le gênaient. Gardez-le seulement en sécurité.
- Nous le ferons, promit Hotch en mettant fin à l'appel.
Gideon pria pour que toute cette histoire se termine bien. Il avait cependant le sentiment que cela ne serait pas le cas.
-o-o-o-
- Salle de conférence, tout de suite, ordonna succinctement Hotch.
Les membres de l'équipe levèrent les yeux vers lui, surpris, puis se regardèrent les uns les autres. Echangeant des regards confus, ils se dirigèrent néanmoins vers la salle en question. Puis, alors qu'ils s'installaient, Garcia franchit à son tour la porte avec une pile de dossier. Hotch la remercia, et les leurs distribua.
- Qu'est-ce que c'est ? demanda Morgan. Cette affaire a été résolue avant la naissance de Reid.
- J'avais trois ans à cette époque, protesta celui-ci.
Rossi leva les yeux au ciel.
- Que se passe-t-il ?
- Je viens de recevoir un appel de Gideon, commença-t-il doucement, afin de leur laisser le temps de digérer l'information, et juger de leurs réactions.
Il s'agissait surtout de surprise, mêlée à de la douleur et de l'amertume. L'expression de Morgan trahissait la confusion et un sentiment de trahison, tandis que celle de Reid montrait le mélange le plus déchirant de confusion, de douleur, de colère, de trahison, et même de joie hésitante.
- Il m'a dit avoir reçu un appel de Rick Matheson. L'affaire que vous avez est la sienne.
Immédiatement, leurs yeux parcoururent rapidement le document.
- Il a été reconnu coupable de meurtre, lut Morgan à voix haute. Déclaré fou, il a été enfermé à vie dans un sanatorium.
- Il a torturé à mort dix personnes, lut à son tour Prentiss, l'horreur perceptible dans sa voix. Il utilisait quasiment toutes les formes de tortures connues, de l'époque médiévale jusqu'au temps présent.
- Comment un homme atteint de folie peut faire tout cela à dix personnes sans se faire prendre ? demanda JJ. Est-ce qu'il ne devrait pas lui manquer la capacité de le faire autant de fois ?
- Si, mais il avait un partenaire, expliqua Reid alors que ses yeux survolaient les mots. Son partenaire de 28 ans, Bobby Nells, enlevait les victimes puis s'occupait des corps.
- Matheson prétendait faire des recherches, continua Rossi. Il a été professeur à une université locale pendant un temps, et ses cours portaient sur l'éthique.
Il haussa les sourcils devant l'ironie de cette information, puis continua :
- Il a survécu à un violent cambriolage, mais ce ne fut pas le cas de sa femme. Il a ensuite perdu son travail car il devenait de plus en plus instable, ses cours se concentrant sur la torture et le châtiment.
- Il a disparu pendant un moment, dit Prentiss en prenant la suite du récit. Puis, il a publié des articles sur la torture, et sur ce qu'un être humain est capable d'endurer. C'est à cette époque que Nells a commencé à être fasciné par son travail, pour devenir finalement son élève.
- Son protégé, ajouta Hotch. Nells était en adoration devant Matheson. Il était heureux de lui trouver ses victimes, de prendre en note chacun instant de leur souffrance, puis de s'occuper des corps. La plupart des preuves utilisées contre Matheson lors de son procès étaient les propres notes de Nells. Ils prenaient absolument tout en note, et beaucoup d'éléments furent jugés trop dérangeants pour être révélés au public.
- Qu'est-il arrivé à Nells ? demanda JJ en parcourant les documents.
- Il a été tué pendant l'assaut, répondit Hotch. Matheson refusait de se rendre. Il était armé, et a tiré plusieurs fois sur les officiers, tuant l'un d'eux. Avant que qui que ce soit puisse l'en empêcher, Nells s'est précipité devant Matheson au moment où Gideon pressait la détente. Nells est mort presque aussitôt, et le choc de sa mort a pétrifié Matheson, permettant de l'arrêter. Il a été condamné, mais pas avant d'avoir eu le temps de jurer à Gideon qu'il se vengerait. A l'époque, personne ne l'a pris au sérieux.
Les autres acquiescèrent à cette remarque. Ils avaient tous entendus des criminels jurer vengeance contre ceux qui les arrêtaient, le plus souvent sans que rien n'en découle.
- Qu'est-ce que cela a à voir avec nous ? questionna Garcia.
- Matheson s'est échappé, et à appelé Gideon un peu plus tôt dans la journée. Il est revenu pour faire souffrir Gideon de la manière dont lui-même à souffert, c'est-à-dire en pleurant la perte de quelqu'un qu'il considère comme son fils.
Il fallut un moment pour que l'information pénètre leurs esprits, mais quand ce fut le cas, tous les yeux se tournèrent vers Reid. Le jeune génie ne sut plus où se mettre devant l'intensité des regards qui le dévisageaient.
- Reid, à partir de maintenant, tu ne vas nulle part sans être accompagné d'au moins l'un d'entre nous. Matheson est un tueur sadique, nous ne pouvons pas lui laisser l'opportunité de mettre la main sur toi.
Il laissa Reid absorber la portée de ses ordres, puis passa à la partie difficile :
- Gideon est en route, nous aurons besoin de son aide pour régler cela.
C'en était bien trop pour Reid, qui se leva brusquement et se précipita hors de la salle. Morgan échangea un regard avec Hotch, avant de partir à la suite de son ami.
Il trouva ce dernier dans les toilettes pour hommes, recroquevillé dans un coin, l'air si perdu, si confus, que Morgan sentit son estomac se tordre devant cette vision.
- Hé, gamin, le salua-t-il.
Reid ne répondit pas, continuant simplement de fixer le sol avec un regard vide.
- Ecoute, je sais que c'est beaucoup à gérer d'un coup, mais tu ne vas pas traverser ça tout seul, on est tous là et on assure tes arrières.
- Je sais, marmonna Reid. C'est juste… je ne sais pas.
Il tourna des yeux suppliants vers Morgan.
- Tout finira par s'arranger, n'est-ce pas ?
Morgan fut stupéfait par la supplication enfantine.
- Oui gamin, ça va bien se terminer. Je te le jure.
Il pensait chaque mot qu'il prononçait. Alors pourquoi avait-il la sensation qu'il venait de mentir à son ami ?
Voilà pour le premier chapitre, j'espère que cette histoire vous plaira. N'hésitez pas à donner votre avis !
Je voulais aussi vous informer que j'ai publié la traduction d'un long one-shot sur le site archiveofourown, car le rating m'empêchait de la mettre ici. Il s'agit de La chute d'Icare, et mon nom de compte est aussi Malohkeh. N'hésitez pas à aller voir !
Vous trouverez tous les renseignements relatifs à mes publications passées, en cours, et exclusives au site archiveofourown sur mon profil.
A mercredi pour la suite !
