Bonjour, bonsoir, ceci est le premier chapitre de ce 'recueil de chapitres' ayant pour thème principal Abbones (et donc, inévitablement, la guerre), soit la relation entre Hannah Abbott et Susan Bones. Cette histoire fait partie d'un recueil plus grand ayant pour sujet les relations f/f dans la saga Harry Potter. Une autre fiction sur ce sujet est déjà en cours de publication, sur Dorcas Meadowes et Marlène McKinnon. Mon but est ici de mettre en avant les ships féminins qui peuvent exister dans l'univers d'Harry Potter :) (puisque les ships m/f et m/m sont beaucoup trop prédominants). Pour ceux et celles que ça intéressent, le titre de cette fiction est tirée d'une chanson de ABBA, 'I have a Dream'.
Elle s'immobilisa une dernière fois face à sa valise.
-Susan ! émergea une voix du rez-de-chaussée. Si on ne part pas maintenant, on ne va pas être à la gare à l'heure !
Tout de même, ses doigts effleurèrent la reliure de cuir du livre ce même livre qui contenait les dizaines et les dizaines de lettres qui lui restaient de ses parents. Des souvenirs qu'elle n'avait même pas vécu et des centaines et des centaines de lignes écrites avec une écriture qu'elle ne verra jamais renaître, posant des questions de plus en plus stupides au fur et à mesure que les lettres se faisaient – des souvenirs et des lignes futiles, c'était tout ce qui lui avait toujours resté de ses parents.
-Susan !
Malgré tout, elle se mit sur ses pieds et jeta son sac sur son dos, traînant sa lourde valise sur le parquet de la chambre. Elle dut s'y prendre à deux fois pour faire entrer la valise dans le couloir du manoir, son regard attiré peu à peu par les photos et les portraits sur les murs aux tentures de velours. Tout à sa droite, il lui semblait que c'était Worth Bones, son arrière-grand-oncle ou quelque chose (en tant que sang-pur, elle avait entendu parlé de chacun des membres de sa famille encore et encore jusqu'à ce qu'elle les connaisse presque autant qu'elle les aurait connu s'ils avaient été en vie). Et sur une petite table, le long du mur, une série de cadres, parmi lesquels Susan reconnaissait la photo du mariage de sa cousine Melinda, quelques années auparavant et elle était persuadée que si elle regardait d'assez près, elle verrait, parmi la masse de sorciers âgés en robe et en cape, sa petite silhouette se détacher sur le côté. Des photos de réunions, des réunions et encore des réunions, auxquelles elle avait seulement réussi à s'habituer et à s'adapter au fil des années.
C'était très fatigant d'être sang-pur. C'était très fatigant de faire partie de la famille Bones, surtout. Susan avait consciente que sa famille était en train de mourir. Si elle voulait être précise – mais sa tante dirait que c'est du sarcasme, et elle n'aime pas le sarcasme – Susan dirait que sa famille avait commencé à mourir dès le début de la première guerre sorcière. Enfin, lorsqu'elle descendait les marches et qu'elle voyait les portraits de ses oncles et tantes, cousins et cousines, membres de sa famille d'un degré ou d'un autre, Susan savait que sa famille était en train de mourir. Elle avait beau avoir grandi avec son cousin et sa cousine, ils avaient toujours près de dix ans de plus qu'elle, et quand Susan s'apercevait des rides sur le visage de chacun de ses proches... elle se disait qu'elle était jeune, et que la jeunesse quittait sa famille petit à petit.
Car c'était surtout très solitaire de faire partie de la famille Bones. Les journées étaient longues et ennuyeuses, les discussions à table portaient sur les affaires que sa tante menait au Magenmagot, et Susan n'avait pas le souvenir d'avoir eu un seul ami. Pas que ça la dérangeait – elle se disait que si elle n'avait jamais eu d'ami, ça ne lui manquerait pas. Mais Susan n'avait jamais été proche de quelqu'un, elle n'avait jamais eu d'ami, elle n'avait jamais eu de parents non plus. Et d'une certaine façon, elle s'attendait à ce que les sept années qu'elle allait passer à Poudlard se dérouleraient de la même manière.
Maintenant, Susan pouvait dire qu'elle était heureuse que ça n'ait pas été le cas.
Elle jeta un regard en biais au garçon, plus petit qu'elle, qui marchait à ses côtés, alors qu'elle suivait son préfet dans les couloirs du château. Dehors, il faisait nuit, à présent, et les flammes des bougies éclairaient simplement les couloirs par leur faible lueur jaune.
-Poufsouffle semble être la meilleure maison de Poudlard, disait le garçon sur un air jovial, à son oreille. Enfin, toutes les maisons de Poudlard sont biens, mais en particulier Poufsouffle. D'après mon frère, l'ambiance est géniale, et...
-Ernie, souffla Susan. C'est... Ernie, c'est ça ?
-Oui, répondit le garçon en relevant les yeux vers elle.
-C'est quoi les caractéristiques de Poufsouffle ? demanda alors Susan.
Ernie parut réfléchir un instant, alors qu'ils s'enfonçaient encore plus profondément dans les cachots du château.
-Tu n'as pas écouté la chanson du Choixpeau ? demanda-t-il enfin, avec l'expression qu'il aurait eu si Susan avait insulté toute sa famille. Il y a la loyauté, le goût du travail, la patience, la justice...
-La justice ? s'exclama Susan, en laissant un rire s'échapper de ses lèvres. Ma tante ne va pas arrêter de m'en parler. Elle est la présidente du Magenmagot.
-La... La présidente de quoi ? s'écria Ernie, comme s'il n'avait pas entendu, sa mâchoire se décrochant.
Ernie paraissait gentil. Un peu collant, sur les bords, mais il était gentil. Susan l'aimait bien et, alors qu'ils découvraient la salle commune de Poufsouffle, c'était lui qui se lança dans un grand monologue sur l'histoire de Poufsouffle, si bien que Susan se demanda s'il avait avalé un livre. Il était gentil, cependant, et c'est que lorsque Susan entra dans son dortoir qu'elle se retrouva seule.
Elle marchait dans les couloirs du château, les grands et larges couloirs dans lesquels elle avait l'impression d'être si petite, son emploi du temps dans une main et une carte dans l'autre. Son sac retombait sur son dos, la frappait régulièrement, et, alors qu'elle luttait pour avancer dans la foule d'élèves de plus en plus clairsemée alors que la certitude d'être en retard était de plus en plus menaçante, Susan voulait prendre sa tête dans ses mains et s'arrêter. Elle ne pouvait pas se permettre d'être en retard, pas une semaine seulement après la rentrée, car être en retard... Susan voulait simplement coller dans le monde sorcier puisqu'elle n'avait jamais vraiment réussi à coller autre part, et elle était persuadée qu'être en retard alors que tout le monde serait à l'heure aller la mettre de côté pour le reste de sa scolarité.
Mais Susan était perdue, aussi. Qui avait décidé de faire un château aussi grand ?
-Hé, excuse-moi, on est bien dans... Susan, c'est ça ?
Elle n'était pas sûre de l'avoir entendu, au début, puisque la fille avait parlé avec une voix si basse, un peu timide, et avec un air si nerveux, que ses mots s'étaient perdus dans la foule. Mais au contact de sa main sur son bras, Susan s'arrêta et se retourna. Elle aussi était plus petite qu'elle (Susan s'était aperçue être plus grande que la moyenne, depuis qu'elle était à Poudlard), et avait un teint un peu rose, de grands yeux clairs, de longs cheveux blonds attachés en deux nattes. Elle semblait essoufflée, aussi, et le poids de son sac à dos, contre son dos, la courbait légèrement.
-Oui, répondit Susan, sans lâcher sa carte et son emploi du temps. Et, hum... désolée, j'ai oublié ton nom, je suis pas douée avec ça.
-Hannah, répondit-elle en luttant à petites enjambées pour rester à côté d'elle. Hannah Abbot. On a... on a bien cours de sortilèges, pas vrai ?
-Oui, s'exclama Susan. Et si tu es venue pour me dire que toi aussi tu es perdue, alors on est...
-Non, je me demandais juste pourquoi tu allais dans la direction opposée à la salle de classe, coupa doucement Hannah. Je t'ai vu de l'autre côté du couloir et je pensais que je devais te prévenir...
Susan s'arrêta et baissa les bras. Enfin, elle se retourna vers Hannah, et, après quelques secondes de silence, eut un rire. Un rire sûrement nerveux et un peu désespéré, mais un rire quand même.
-Le cours de sortilèges, c'est par là ? laissa échapper Susan, en pointant du doigt l'autre bout du couloir, d'où elle venait.
Mais Hannah ne souriait pas, et paraissait plus inquiète que soulagée.
-Oui, et tu lis ta carte à l'envers, je crois, mais... on est en retard, Susan, la pressa-t-elle, parlant très vite et tout bas, avant de se saisir de sa main et de l'entraîner dans le couloir.
Elle se mit à courir à sa suite sans même y prêter attention. Finalement, elles arrivèrent dans le couloir du second étage, et Hannah s'immobilisa, tremblante, sa main à quelques centimètres du pan de bois de la porte.
-Tu vas bien ? demanda alors Susan, en fronçant légèrement les sourcils.
-Oui, c'est juste qu'on a deux minutes de retard et... souffla Hannah, avant de se retourner vers elle. Par Merlin, Susan, tu penses qu'on aura une retenue ? Et si Flitwick nous enlevait des points ? Notre maison nous détestera pour tout le reste de l'année...
-Sincèrement, souffla Susan, doucement, en posant la main sur son épaule pour la rassurer. Je ne pense pas qu'on nous détesterait pour être arriver en retard, Hannah. Ne t'en fais pas.
Elle vit ses épaules s'affaisser, et le poing d'Hannah retomber le long de son corps. Elle prit une profonde inspiration et ferma les yeux.
-Tu peux frapper à ma place ? Je ne suis pas sûre de pouvoir... fit-elle alors.
Mais Susan l'arrêta en donnant quatre coups secs contre la porte de la salle et, en quelques instants, celle-ci fut ouverte, dévoilant la salle de classe et les élèves de leur maison assis sur les tables. Susan balbutia un mot d'excuse, avant de guider Hannah jusqu'aux deux dernières places laissées vacantes, au premier rang. Elle se laissa tomber sur sa chaise, et sortit de son sac son encrier, sa plume et le rouleau de parchemin, alors qu'à côté d'elle, elle entendait Hannah poser son sac sur la table et y plonger ses mains et son regard.
Lentement, le professeur reprit son cours, et, bien que Susan sentait les regards de ses camarades de classe, elle ne s'en souciait pas. Enfin, alors qu'Hannah s'affaler contre sa chaise, elle se pencha vers elle.
-Merci, chuchota Susan. Je ne pense pas que j'aurais trouvé la salle de cours si tu n'avais pas été là.
Un sourire s'esquissa lentement sur les lèvres d'Hannah.
-C'est normal, assura-t-elle.
-Non, je veux dire, reprit Susan, toujours à voix basse. Si j'avais été à ta place, je ne suis pas sûre que j'aurais fait...
-C'est normal, Susan, insista Hannah, toujours doucement. On est dans la même maison et on partage le même dortoir, donc on est... amies, tu sais. C'est normal.
Et elle se détourna d'elle. Lentement, Susan se retourna vers le professeur. 'Amies'. Ce mot laissait une marque étrange dans son esprit et une sensation agréable dans son corps, tout autant qu'il faisait apparaître un sourire sur ses lèvres.
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