Bonjour tout le monde !
En ce moment je ne publie pas grand-chose et que je n'ai même pas le temps de lire... Seulement, voici tout de même un projet que je couve depuis plusieurs mois maintenant et dont la publication se devait faire aujourd'hui, le 26 Juin.
Eh oui, je publie une nouvelle histoire. Mais attention, ce n'est pas n'importe laquelle… En effet, celle-ci est dédiée à une personne qui m'est chère : Dupond et Dupont, dont vous avez déjà vu le pseudo dans la presque totalité de mes fanfictions. Au-delà de la bêta, elle est une amie qui me supporte depuis plus d'un an, avec mes crises de stresse, d'angoisse, de manque de confiance en soi (que ce soit du point de vue personnel que professionnel). Toujours là pour moi dans les coups durs, mais aussi dans les moments heureux. Je suis une personne tête en l'air, qui oublie de répondre aux mails, qui n'aime pas envoyer des SMS, qui peut passer des mois sans adresser la parole à des amis sans que cela ne pose problème mais pourtant, j'ai trouvé en Dup' une personne avec qui je peux parler tous les jours. Et maintenant, elle n'arrive plus à se débarrasser de moi. Désolée meuf.
Et ce n'est juste pas un cadeau comme ça, juste une démonstration d'affection. Aujourd'hui est un jour spécial, puisqu'il s'agit de son anniversaire. Alors voilà pour toi, Dup'. Voilà Cobalt. J'espère que cette histoire te plaira et qu'elle n'est pas trop loin de l'idée que tu te faisais de ces récits héroïques de pirateries.
Joyeux anniversaire !
COBALT
(The Great Below)
Disclaimer : Les personnages appartiennent à la CW, à l'exception de quelques OC ! N'étant pas une experte en pirates, j'ai également utilisé le site pirate-corsaires que vous pourrez trouver sur mon profil, ou tout simplement sur Google.
Pairing : Destiel, as usual.
Avertissements : L'histoire est toujours en cours d'écriture donc je ne peux pas vous dire avec certitude ce qui fera partie ou non de celle-ci. Mais, puisque nous sommes dans une histoire de pirates, il faut s'attendre à de la violence et certainement à la mort de personnage (très) secondaires. De plus, il est fort probable que Cas et Dean aillent au-delà de quelques baisers chastes. J'ai donc préféré mettre un rating « M » pour assurer mes arrières (contrairement aux leurs !). Si les avertissements changent en cours de rédaction, je vous le ferai savoir !
Rythme de publication : A ce jour, trois chapitres sont écrits et deux sont prêts à être publiés. Le rythme de publication ne sera pas régulier et je m'en excuse. Je vais tenter de garder un peu d'avance sur l'écriture pour assurer, encore une fois décidément, mes arrières. En ce moment, je suis très occupée sur le plan personnel donc ça mettra un peu de temps. Le deuxième chapitre devrait être publié sous deux semaines !
Aussi, l'histoire ne sera pas très longue. Elle tournera autour des 15 chapitres et ils ne dépasseront jamais les 5000 mots !
Titre : D'abord nommée Cobalt, la parenthèse The Great Below a ensuite été rattachée à cette histoire. The Great Below est une de mes chansons préférées de Nine Inch Nails, que je vous invite à découvrir ! Quant à Cobalt, il s'agit simplement là d'un de mes mots que je préfère.
Remerciements : Si ce texte n'est pas truffé de fautes et a une syntaxe cohérente, c'est grâce à Kate Nightingale qui a pris le temps de lire ce que j'avais écrit, malgré son planning très chargé. Merci à toi, car sans ton aide j'aurai eu du mal à avancer. Tes remarques me sont très utiles et me permettent de continuer et me motive à donner le meilleur de moi-même ! Merci !
Un merci à Nithril et ses gentilles reviews sur mes histoires précédentes. C'est son anniversaire à elle aussi aujourd'hui donc... Bon anniversaire !
Bref, assez parlé ! Place à la lecture. Merci à tous ceux et celles qui me donnent une chance en se laissant apporter dans celle nouvelle aventure maritime ! Bonne lecture !
Chapitre 1 : Ils avaient hurlé « pirates »
« ¡Por favor, por favor! claqua la voix tremblante d'un homme. Por Favor… No tome mis bienes… Son esenciales para mí, para vivir, para alimentar a mis hijos... Ellos son mi vida… »
Tout autour de lui, des hommes l'encerclaient, ne lui laissant aucune issue. Armés de sabres et de pistolets à silex, ces individus vêtus d'étoffes de cuir et de lin dépiécées ne laissaient aucun doute planer quant à leur origine. Et l'équipage avait beau avoir hurlé « pirates » jusqu'à en perdre la voix, ils étaient désormais bien incapables de se défendre, leur corps sans vie souillant le bois du navire d'une épaisse couverture carmin.
« Voy a hacer lo que quieras... »
Les murmures du marchand disparurent dans les rafales aux relents de sang macéré, de vinasse et de poudre à canon. Emportées par le vent, les effluves fétides des cadavres agitaient violemment les voiles du bateau quand un bruit sourd résonna sur le pont. L'homme s'était jeté à terre dans une posture de supplication.
Il était si pathétique, là, avec ses grosses joues rouges et ses lèvres baveuses.
« Por favor, por favor. Le ruego que... Yo... »
Semblant être animé d'un ultime espoir, il agrippa les jambes de l'homme qui lui faisait face et baissa la tête, presque honteux.
« ¡Mi hija! Mi hija es todavía criada. ¿Comprende? Ningún hombre ha estado con ella. »
De son doigt épais, l'homme désigna une jeune enfant dont les longs cheveux bruns et ondulés cachaient la majeure partie de son visage. Ses doigts fins et hâlés s'accrochèrent fermement à sa robe écrue et humide. Elle ne protesta pas. Elle ne tenta même pas de s'enfuir. Pétrifiée par la peur, la pauvre gamine ne devait être âgée que d'une douzaine d'années, tout au plus. Le spectacle était à vomir.
Le père releva la tête, ses prunelles reflétant toute la détresse qui l'habitait. Il s'accrocha plus fortement aux mollets du pirate, comme s'il tentait de lui faire comprendre dans son langage barbare, de le convaincre, qu'il ne devait pas voler le butin de toute sa misérable vie. Il s'apprêta à ouvrir la bouche quand un bruit visqueux lui coupa la chique.
Dean Winchester venait de lui cracher dessus.
L'homme, résigné, étouffa un sanglot et porta sa main sur le sommet dégarni de son crâne, le nettoyant tant bien que mal.
« Tu veux que l'on prenne ton enfant avec nous, c'est ça ? siffla Dean. Tu sais, les femmes sont interdites sur le bateau… Et plutôt crever que copuler avec ce laideron. »
Des éclats de rires fusèrent de part et d'autre du bateau. Un rictus s'afficha sur les lèvres du pirate. Il redressa la tête et scruta un à un ses compagnons.
« Allez, embarquez tout ça, ordonna Dean en désignant les marchandises. Crowley n'aime pas attendre. »
Les pirates s'exécutèrent aussitôt. Certains râlèrent en silence, n'appréciant guère de recevoir des ordres du petit protégé du Capitaine mais Dean s'en contrefichait. Lentement, il posa son pied sur la tête du marchant, écrasant sa joue contre le sol poisseux de son bateau.
« Tu es indigne d'être père. »
Dean murmura ces mots pour que seul le marchand puisse l'entendre. Il n'était pas sûr qu'il puisse le comprendre mais il s'en foutait et continua.
« Amener ta propre fille pour t'assurer une monnaie d'échange… »
Son pied comprima un peu plus le crâne de l'homme en pleurs et sa main effleura le pistolet à silex collé à sa cuisse qu'il retira délicatement.
« Ça me donne tout simplement envie de déverser ma bile sur toi. »
Dean cracha de nouveau sur l'homme avant de retirer son pied. Il scruta son arme avant de porter son regard sur la jeune fille du marchand.
Elle glissa ses cheveux derrière ses oreilles, dévoilant finalement son visage. Dans ses yeux bruns sommeillait une haine que le pirate ne connaissait que trop bien. La gamine lui en voulait à lui, à Dean, et non pas à son père qui avait pourtant tenté de brader sa féminité auprès d'une horde de sauvages affamés de sang et de richesses. Seulement, Dean était un pirate. Il était toujours le méchant dans les histoires, quoi qu'il advienne. Il était de ceux qui hantaient les rêves des enfants et de ceux qui se retrouvaient pendus devant le sourire euphorique et triomphant des gens honnêtes.
Son doigt sur la gâchette, Dean détourna le regard et une mouette apeurée s'envola lorsqu'il pressa l'embout.
De retour sur Lady Juliet, le jeune pirate se rendit directement dans la cabine du Capitaine. Le drapeau écarlate était toujours fièrement dressé, surplombant le pont où les pirates s'activaient pour ranger le butin fraîchement gagné – des caisses d'or et d'épices et quelques vêtements en soie.
Crowley n'avait pas participé à l'attaque du bateau marchand et Dean n'était pas sûr qu'il ait même daigné regarder le spectacle. Le Capitaine ne souhaitait pas se salir les mains. Il avait juste besoin d'une chose : de l'argent. Et s'ils ne le trouvaient pas sous la forme de pièce d'or, les marchandises étaient revendues auprès de marchands et aubergistes. Alors, le Capitaine du Lady Juliet envoyait ses hommes piller les navires qui croisaient leur route, encore et encore, jour après jour, sans jamais être en véritablement satisfait.
« Comment s'est déroulée l'attaque ? » lui demanda Crowley une fois la porte refermée derrière Dean.
Le Capitaine se tenait dos à lui, son habituel long manteau noir sur le dos. Dean plissa les yeux. Le soleil pénétrait difficilement dans la petite pièce, se frayant tant bien que mal son chemin à travers l'épaisse couche de poussière déposée sur les fenêtres, et le jeune pirate avait du mal à y voir clair. A force de perdre les siens suite aux pillages ou aux maladies qui grouillaient çà et là dans le navire, l'équipage s'amenuisait de semaine en semaine et il n'y avait plus assez de bras pour entretenir correctement le Lady Juliet.
« Comme d'habitude, répondit Dean. Nous avons attaqué, les marchands ont ployé sous nos coups et nous avons récupéré le plus possible de marchandises. »
Doucement, Crowley se tourna vers Dean. Un faible éclat ambré caressa son visage, éclairant furtivement ses prunelles grises et sa mâchoire où la naissance d'une barbe se faisait apercevoir. Le Capitaine posa sa main calleuse sur son fauteuil avant de s'y asseoir. Devant-lui se tenait son bureau d'ébène qu'il chérissait plus que tout dans ce bateau. Il caressa le bois avant de plonger son regard dans celui de Dean.
« Tout s'est bien passé ? »
Dean hocha la tête.
« Nous avons volé plusieurs caissons d'or et–
– Tu sais très bien de quoi je veux parler, Dean, coupa Crowley. Il y a des règles dans la piraterie. Des codes. »
Il marqua une courte pause, sa langue glissant légèrement sur sa lèvre inférieure. Le jeune pirate ne détourna pas le regard et avala douloureusement sa salive.
« Le pavillon rouge a bien été respecté. Je m'en suis personnellement chargé. »
Un large sourire bourgeonna sur les lèvres de Crowley à l'entente de cette phrase.
« Bien ! Après le fiasco de la dernière fois…
– Ce qu'il s'est passé la dernière fois ne se reproduira plus, promit à nouveau Dean. J'étais juste…
– Je comprends, Dean. Je comprends. Je t'avoue que je commençais à me demander si te nommer second avait bel et bien été la bonne décision à prendre. Mais je suis soulagé. Je te fais confiance, Dean.
– Merci Capitaine. »
Deux coups résonnèrent dans la cabine. Derrière Dean, un grincement déchira l'atmosphère quand la porte s'ouvrit dévoilant un pirate au sourire timide. Il se glissa dans la pièce, carnet en cuir plaqué contre son torse. Des cernes gris ombraient son visage fatigué et Dean avait l'impression de se retrouver quelques mois plus tôt, lorsqu'il venait à peine de rejoindre l'équipage.
« Parfait ! s'exclama Crowley. Entre Chuck, on n'attendait que toi. Il est temps de s'attaquer à la gestion du butin maintenant. Asseyez-vous tous les deux, on en a pour un petit moment. »
Le soleil se noyait déjà dans l'horizon, suintant dans des nuances de pourpre et d'ocre, quand Dean sortit de la cabine du Capitaine et se dirigea vers le pont. L'air salé fouetta son visage avant de s'engouffrer sous sa mince chemise. Dehors, des histoires de rhum et de femmes de petite vertu, de fortune et d'espoir doré, résonnaient en chœur. Les pirates chantaient tous à l'unisson, d'une seule et même intonation rauque et cassée, pour se donner de l'aplomb dans leurs corvées. Certains remplaçaient les voiles abîmées du navire tandis que d'autres nettoyaient leurs armes utilisées pendant le pillage. Tous connaissaient bien Crowley sur ce bateau et cette mesure était obligatoire. Leurs pistolets devaient être opérationnels, prêts à être utilisés à n'importe quel moment. L'acte de chasse-partie était strict sur point, il n'y avait pas de compromis.
Lèvres closes, Dean observa silencieusement l'équipage avant de s'asseoir sur un vieux tonneau, mouchoir et arme à la main. Il avait beau être le second du Capitaine à présent, son statut ne faisait pas de lui une exception.
Quand le coq sonna l'heure du repas, les pirates lancèrent des cris enthousiastes, affamés par la dure journée qu'ils venaient tous d'affronter. Puisque la mer était calme, il avait pu allumer les fourneaux. Ils allaient enfin manger autre chose que des biscuits ce soir.
Dean faisait la queue comme le reste de l'équipage, assiette en métal cabossé dans la main quand il aperçut Benny du coin de l'œil. Il fit un geste rapide de la main auquel son ami répondit avant de se rapprocher de lui.
« Enfin décidé à sortir de ton trou ? lâcha Dean.
– Un homme doit bien manger quelque chose », rétorqua simplement le pirate.
Dean lui répondit avec un sourire et se demanda ce que Bobby avait bien pu leur préparer pour le dîner. Cela faisait longtemps que les quelques poules et chèvres qu'ils avaient amenées sur le Lady Juliet avait été dévorées par les pirates. Peut-être que la pêche avait été bonne, aujourd'hui.
Seulement, le bruit gluant et pâteux accompagnant la louchée du mélange informe que lui servait Bobby ne présageait rien de bon. Dean tira la moue devant la masse visqueuse et beigeâtre qui trônait dans son assiette avant de se forcer à sourire. En face de lui, Bobby le dévisageait, un air dur voilant son visage. Depuis qu'il avait perdu l'usage de sa jambe droite lors d'un pillage, il était passé du statut de second à celui de coq, simple cuistot du navire, et Dean ne pouvait pas dire que son vieil ami avait été prédestiné à cette voie-là. Il ne savait absolument pas cuisiner.
« Ça a l'air… Bon, mentit Dean en ignorant autant qu'il le pouvait l'odeur infecte qui se dégageait du plat.
– Pas la peine de me mentir, gamin ! pesta aussitôt Bobby. Je sais bien que c'est pas le grand luxe mais eh, je fais avec ce que j'ai ! Pillez plutôt de la bonne nourriture la prochaine fois ! C'est pas de la soie qui va remplir vos fragiles petits estomacs de fillettes ! »
Le coq servit ensuite Benny qui n'affichait pas une meilleur tête que Dean. Bobby grommela dans sa barbe et les deux amis en profitèrent pour s'éclipser et se trouver un coin tranquille sur le pont. Les autres pirates s'étaient attroupés autour du perroquet et Dean n'avait pas la tête à encore entendre l'animal déblatérer des phrases sans queue-ni-tête.
Benny et Dean mangèrent alors en silence, regard rivé vers l'horizon bleuté où la lune commençait à s'éveiller, ne faillant pas à leurs bonnes vieilles habitudes. Et même s'il pouvait sentir le regard insistant de certains pirates – Alastair, Azazel et tous les autres officiers de Crowley étaient certainement de la partie – Dean termina tranquillement son repas. Il avait appris à ne plus s'en inquiéter. Il était le second de Crowley maintenant. Ils ne pouvaient rien lui faire. Et même si l'acte de la chasse-partie ne semblait pas les en empêcher avant qu'il prenne en grade, Dean savait que ces rats de cale avaient suffisamment de respect pour le Capitaine pour ne pas en venir aux coups.
Sans un mot de plus, le jeune pirate accompagna son ami jusqu'à son hamac avant de se rendre dans sa petite cabine que Crowley lui avait léguée lorsqu'il l'avait nommé second. Dean ne savait pas pourquoi le Capitaine le gâtait à ce point mais il n'était pas sûr de vouloir remettre cette étrange affection en péril en s'attardant sur ces questions. L'odeur de merde, de sueur et d'eau croupie était peut-être présente dans tous les recoins du navire, mais ici Dean ne subissait pas les ronflements de ses compagnons alcooliques ou encore les murmures inconscients qui s'échappaient de leurs lèvres lorsque le sommeil les capturait.
Dean referma la porte derrière-lui, accompagné d'un grincement aigu. Il n'y avait de la place que pour son hamac et un bureau qui n'en avait que le nom. Une planche de bois tentait de tenir sur deux tonneaux éventrés où devaient grouiller une multitude d'insectes, ainsi que Dean le soupçonnait fortement sans jamais avoir eu le courage de vérifier. Il alluma plusieurs bougies, éclairant la pièce d'une faible lumière, avant de s'asseoir sur son hamac. D'un mouvement mécanique, Dean retira ses bottes. Dans une autre vie, elles avaient été portées par un pauvre Portugais qui avait eu le malheur de faire la même pointure que Dean. Pour fêter sa nomination en tant que second, Crowley avait demandé à ce qu'on lui coupe les jambes.
Dean essayait de ne pas trop penser à cette histoire, d'oublier les cris de douleur du marchand, lorsque ses yeux se posaient sur ces deux morceaux de cuir.
Il ne s'était peut-être jamais fait d'illusion sur ce qu'allait être la vie de pirate, mais ce n'est pas pour autant qu'il arrivait à s'y habituer. Dean connaissait la violence, la saleté et la nourriture immonde. Tout cela, toutes ces horreurs, il l'avait déjà vécu pendant la guerre des colonies. Mais ici… Ici, c'était différent. Ici, il était de ceux qui avaient choisi cette voie. Ici, il devait être fier de cette vie.
Seulement, il ne l'était pas encore tout à fait.
Pourtant, Dean savait qu'il était mieux sur ce navire, à écumer les mers plutôt que les rues humides de New York. Il gagnait sa vie, même s'il pouvait se retrouver pendu pour cela. Il avait fait le bon choix. Puisque, après tout, ici il pouvait aider Sammy et c'était ce qui importait le plus. C'est ce qui avait toujours compté.
Sans réfléchir, Dean se redressa et se dirigea à l'opposé de la pièce, avant de glisser sa main derrière l'un des tonneaux. Ses doigts effleurèrent des morceaux de papiers soigneusement pliés ou enroulées dans deux amas différents. Dean les avait glissés derrière le fût. Il les retira délicatement, un léger sourire sur les lèvres. L'humidité de la pièce ne les avait pas trop abîmés.
De retour sur son hamac, Dean s'y allongea avant de déplier les morceaux de papier. Des lettres. Une écriture en patte de mouche. Sammy.
Malgré sa situation, Dean et son petit-frère arrivaient à correspondre. Tout cela, c'était grâce à Garth et Dean ne savait pas comment exprimer toute sa reconnaissance. Ces mois, ces années, sur le Lady Juliet, n'auraient jamais été tenables sans le soutien de son petit-frère. Même si Dean ne lui racontait que des mensonges.
Sam ne savait pas ce qu'il faisait. Il le croyait marin, à éventrer et vider du poisson. Dean n'avait jamais pu lui avouer qu'en réalité, c'était des hommes, des marins, qui passaient sous la lame aiguisée de son sabre.
Alors, tandis que Sammy lui contait sa vie à New York, lui disait que son grand-frère lui manquait, le remerciait pour l'or qu'il lui apportait et lui demandait pourquoi seulement Garth pouvait le voir, Dean inventait une vie honnête, avouait que son petit-frère lui manquait à lui aussi et répondait que c'était plus simple ainsi, puisque Garth faisait déjà des allers-retours entre New-York et New Providence. Dean ne voulait pas le voir là-bas, dans cette ville malfamée.
Voilà maintenant des lunes et des lunes que Dean était parti en mer et Sam continuait toujours d'insister pour le voir. Même si un voyage entre New-York et New Providence ne se faisaient pas en un claquement de doigt, son petit-frère avait failli à de nombreuses reprises suivre Garth pour voir son aîné. Jusqu'alors, Dean avait toujours été chanceux. Pourvu que cela dure.
Le pirate porta de nouveau son attention sur ces lettres. Elles étaient toutes en désordre à force d'avoir été lues et relues mais Dean les connaissait par cœur. Il ne pouvait s'empêcher de glisser ses doigts sur leurs contours usagés avant de déchiffrer tant bien que mal le papier abîmé.
L'une parlait de la vie de tous les jours, du petit appartement que son frère avait réussi à dégotter au-dessus de la boulangerie de Gabriel. Ce dernier l'avait complètement formé au métier, offrant à Sammy une voie honnête pour s'en sortir dans la vie. Une autre parlait de sa rencontre avec Jessica Moore et de tout l'amour qu'il portait à la jeune fille du boucher. Entre toutes, la lettre que préférait Dean était celle où son petit-frère se demandait s'il devait lui demander sa main. Ou peut-être était-ce plutôt celle où il lui annonçait qu'elle avait dit oui. Dean avait sauté de joie, ce jour-là. Les marchands de New Providence l'avaient regardé bizarrement mais cela n'avait eu strictement aucune importance à ses yeux. Il avait même pris Garth de lui-même dans ses bras, c'est dire à quel point il avait été heureux.
Dire que l'équipage ne faisait que parler des trésors perdus sur les îles désertes, abandonnés là par un Capitaine bien trop mort pour pouvoir venir récupérer son butin, comme s'il s'agissait des plus belles merveilles du monde. Dire que pour eux, l'or valait plus que tout. Plus que leur famille qu'ils avaient laissé loin derrière-eux. Plus que leur vie même, pour d'autres.
Ils avaient tort. Tellement tort.
Mais Dean n'étaient finalement peut-être pas mieux qu'eux. Il était lui aussi sur ce navire, à dormir avec les rats, à manger des biscuits dans le noir pour ne pas voir tous les insectes qui y grouillaient et à dormir dans un hamac qui puait la pisse et la sueur. Tout cela pour ce même or que les autres pirates enviaient tellement.
Et se dire que tout cela n'était pas vraiment pour lui, qu'il endurait ces mauvais aspects de la vie marine pour autre chose que sa petite personne, qu'il était devenu un hors-la-loi pour son petit-frère, pour Sammy qui voudrait sans doute bientôt devenir père, ne l'aidait pas à mieux dormir la nuit. Puisqu'il le savait pertinemment que son cadet ne serait pas fier de lui s'il en venait à être au courant. Puisqu'il continuait encore et encore à lui cacher la vérité, à lui faire croire qu'il était devenu marin, qu'il pêchait du bon poisson et qu'il était un homme honnête qui avait réussi à s'en sortir.
Puisqu'il était un menteur, doublé d'un foutu pirate.
Dean déposa le monceau de lettres sur ses genoux avant de dénouer le fil qui liait l'autre amas de feuilles soigneusement enroulées. Il étendit la première d'entre elles, dévoilant l'esquisse du port de New-York. Des coups de crayons avaient été griffonnés, çà et là, dévoilant sous l'épaisse couche de graphite les silhouettes des navires ancrés le long des débarcadères et de trois enfants regardant l'horizon, un espoir naïf scintillant dans le regard.
Il n'y connaissait peut-être pas grand-chose en art et ce n'était peut-être tout simplement pas quelque chose pour lui, Dean Winchester, fils d'un modeste marin. Peut-être même que l'on se moquerait de lui s'il avouait qu'il trouvait ce dessin magnifique. Peut-être que l'esquisse ne répondait pas aux bons critères de ces personnes prêtes à des milliers de piastres pour un tableau. Peut-être. Mais lorsque ses doigts effleuraient le papier et ces silhouettes juvéniles, il ne pouvait rester indifférent. Lorsque de ses phalanges Dean caressait la signature de son ancien meilleur ami, de Cas, griffonnée en bas du dessin, son cœur s'arrêtait toujours de battre l'espace de quelques secondes.
Des années après, les dessins de Castiel avaient toujours cet effet sur lui.
Une dizaine de minutes plus tard, Dean cacha les lettres de son frère et les dessins de son enfance sous le tonneau avant de souffler sur les bougies. Il veilla à ce qu'elles refroidissent bien avant de glisser une mince couverture humide sur lui, une boule de regrets coincée dans la gorge.
À suivre
Notes de l'auteur : J'espère que je n'ai crevé les yeux de personne avec mon espagnol. Ma sœur a corrigé cette partie mais… Elle est partie à l'étranger et n'a pas le document sur elle. Dès qu'elle revient, je mettrai la version corrigée. Promis !
Merci à tous ceux et celles qui ont été jusqu'au bout ! Je suis un peu anxieuse de publier ce texte, puisqu'il touche un sujet que je ne maîtrise pas et que je m'y suis plongée depuis un petit moment. J'espère que tout cela vous aura plu tout de même et que je vous retrouverai pour le second chapitre (dans deux semaines !). Ca me ferait plaisir de savoir ce que vous en avez pensé aussi !
Pour ceux qui se posent la question : TSS arrive très bientôt, j'ai terminé d'écrire le dernier chapitre cette semaine !
Merci et à très vite !
Ellen.
