Nous voici pour un 25ème défi du Poney. Sujet à la fois très précis et très vague qui m'a donné beaucoup de mal, bien que l'idée soit là depuis pratiquement 3 semaines !
Et tout à coup, ce fut le noir.
Un poisson hors de l'eau. Suffocation. L'air manquait. Et pourtant il tentait désespérément de l'accueillir en ses poumons. Mais rien.
Qu'une brûlure.
Il lui fallait de l'air mais sa gorge semblait s'y refuser. Il paniqua, tenta d'échapper à cette étreinte invisible qui le privait de vie. A bout de forces, il retomba dans les ténèbres.
Autour de lui, tout était calme. Ses voisins se désintéressaient de son sort, tout perdus dans leur agonie qu'ils étaient. Une femme s'approcha toutefois et lui passa un linge frais sur le visage, puis quand il se calma, elle repartit s'occuper de ses autres patients. De ses autres mourants. Ils étaient aux Maisons de Guérison, mais ça, aucun des alités n'en avait conscience. La guerre provoquait tant de morts. Ioreth secoua la tête. Ceux qui avaient l'espoir de survivre faisaient l'objet de soins appropriés dans les salles annexes.
Ici, on tentait de soulager leur souffrance en attendant que la mort vienne les chercher. Une épée dans la poitrine, les flèches empoisonnées, écrasés par ces énormes pachydermes qu'elle avait vus, bien malgré elle, depuis son abri. Tel était leur destin. Elle n'y pouvait rien.
La bataille s'était terminée depuis plus d'une journée et cet homme s'accrochait à la vie comme un désespéré. Il était rarement conscient -et il aurait dû en être soulagé- car la flèche qui transperçait sa gorge avait fait de tels dégâts qu'il aurait dû succomber sur le coup.
Dans la nuit, il s'éveilla une fois de plus. La panique le saisit une fois de plus, mais la main fraîche de Ioreth sur son front l'aida à se calmer. L'air ne parvenait toujours pas à ses poumons. Il lui fallait sortir. Il se traina, il rampa, faisant tomber tout ce qui l'entourait. Mais il était comme attiré par les étoiles au dehors, et s'il devait mourir, il aurait préféré que ce soit au grand air, aux cotés des guerriers et de son roi.
Mais le désespoir qui le guidait fut submergé par la fièvre et il s'écroula aux pieds de son aide soignante, agonisant. Ioreth dût appeler deux jeunes gens qui veillaient un peu plus loin pour remettre le Rohirrim dans son lit.
Le matin venu, alors que le guérisseur recouvrait de draps ceux qui, nombreux, n'avaient pas survécu à la nuit. Il eut cependant la surprise de voir le jeune homme conscient, malgré la fièvre. Et si sa respiration était sifflante et sporadique, il avait réussi. Et pourtant, jamais il n'avait encore vu tant de détresse dans les yeux gris d'un si jeune homme. Le Rohirrim ouvrit la bouche mais aucun son n'en sortit.
Le guérisseur lui prit la main mais lui fit non de la tête. Même s'il réussissait à survivre, il n'aurait plus jamais la chance de parler.
Le Gondorien quitta son chevet sans se douter que le monde de son patient s'était écroulé à l'instant où il avait saisi ce que le hochement de tête signifiait. Il perdit une fois de plus la contrôle de sa respiration et retomba dans l'inconscience.
Quand il s'éveilla à nouveau, il était seul. Et il faisait nuit. Conscient comme il ne l'avait plus été depuis la bataille, le pied léger, il avait cessé de sentir la douleur. Toute crainte l'avait quitté. Sa volonté l'entraîna au dehors.
Il se saisit enfin d'une épée. Et à la lueur des étoiles, il l'enfonça dans son propre abdomen.
Car s'il ne pouvait plus parler ni chanter, le messager et ménestrel Specansibb n'avait plus de raison d'être.
A la lune et à la nuit, il offrit sa vie, son sang et sa voix.
Ce texte paraitra peut-être étrange à certain-e-s mais d'autres auront peut-être reconnu Specansibb, mentionné dans Il faisait nuit qu'un jour, c'est promis, je continuerai.
