Disclaimer: Albator et son équipage appartiennent à leur créateur, M. Leiji Matsumoto.
Si des inconnus traînent dans le coin, ils sont à bibi.
Chronologie : post Albator 78/UKCH et avant « les promesses de l'avenir »
1.
Alors que l'Atlantis opérait sa rentrée dans l'Oasis III, se posant sur un plateau qui allait le faire pivoter pour le placer sur sa catapulte de sortie, il se rangea alors à côté d'un Arcadia aux touches de rouge aux flotteurs de ses ailes, à ses flancs et au mat entre la tour de commandement et le château arrière. Le Tranchoir de Proue était sorti et il était impressionnant, denté et bien que le vaisseau soit racé comme jamais, il s'en dégageait une terrible impression de puissance et de sauvagerie.
- Tu n'avais parlé que de quelques modifications, remarqua Albator. Là, je lui trouve un petit air mauvais.
- C'est un peu le but, répondit le Grand Ordinateur. Nous sommes des pirates, je te le rappelle et depuis la défaite de l'Armada Sylvidre, nous n'avons plus trouvé d'adversaire à notre mesure !
- Je ne vais pas trop m'en plaindre.
- Ce qui ne t'a nullement empêché de ferrailler à tout va, à la moindre occasion, grinça l'Ame de l'Arcadia. Nous en prendre à tout qui ne pouvait que réagir avec suspicion et charger leurs tourelles de canons par réflexe, ne te donne pas le droit de pratiquement les atomiser en retour !
- Au moins, cela nous a permis de nous garder en forme, au cas où, rétorqua sèchement le pirate balafré. C'est quoi, ça ? ajouta-t-il en désignant un autre vaisseau, à son tribord et qui avait l'allure générale d'une sorte de fusée qui aurait été conçue pour voler à l'horizontal et moitié plus petit que l'Atlantis.
- C'est mon Pirate Queen, renseigna alors Kei Yuki en se levant, sa blondeur illuminant comme toujours la passerelle du vaisseau pirate bleu. Je l'avais demandé à Toshiro, il y a quelques années déjà, il a accédé à ma requête.
- Tu l'as mis à travailler à la commande ? ironisa Albator.
Kei croisa le regard d'une Jurassienne en longue robe rouge et baissa légèrement la tête avant de se rasseoir. Il n'y avait pas eu la chaleur d'avant la réplique de son capitaine, juste de la raillerie pure et simple. Un capitaine qui depuis qu'il avait abandonné les pantalons blancs portés un temps, semblait être devenu d'une humeur aussi noire que sa tenue et ayant apprécié le goût du sang que reflétait la doublure rubis de sa cape de suie.
- Procède à la mise en cale sèche de l'Atlantis, jeta Albator. Nous repartirons avec l'Arcadia, comme prévu. D'ici là, nous allons souffler un peu. On va attendre que ceux qui nous traquent se lassent un peu.
Il ricana à nouveau.
- Ils recherchent un vaisseau bleu, on va leur en offrir un vert de toute beauté ! Maintenant, que tout le monde débarque et prenne du bon temps, autant que possible. Il y a une station spatiale neutre à deux heures de vol en spacewolf, tout qui en aura envie pourra s'y rendre. Personnellement, j'en ai l'intention !
- Avec les avis de recherches Illumidas encore placardés tout partout et surtout ceux plus récents de cet Union Galactique qui semble bien parti pour unifier pacifiquement les systèmes solaires et former dans un futur proche un solide état spatial face à toutes les agressions ? Ce n'est vraiment pas une bonne idée !
- Et moi je n'ai pas réclamé ton avis, aboya Albator en quittant la passerelle dans l'envol de sa cape d'ébène. Mets l'Atlantis en veille et transfère ta mémoire dans le Grand Ordinateur de l'Arcadia.
Clio s'approcha alors de Kei, posant ses mains sur les épaules de la jeune femme dont le regard marron n'avait jamais été aussi éteint.
- Tu es toujours décidée ?
- Plus que jamais ! Il n'y a plus rien en lui qui me fascine ou me fasse l'apprécier. Il me fait peur, comme si toute humanité l'avait quitté !
- Ca en prend effectivement le chemin. Mais il y a toujours de l'espoir. Je te le demande comme une faveur personnelle, Kei : reste !
- Non. J'ai pris ma décision quand nous avons pris à partie ce cargo commercial, sans escorte.
- Nos cales étaient vides…
- On a laissé ce cargo dériver, seuls les dieux savent si les membres d'équipage s'en sont sortis. Qu'est-ce qui a pu le changer ainsi ? J'avais ressenti déjà cela avant que cette Synomarielle en lui n'en fasse son serviteur docile. Mais Toshiro m'avait convaincue de demeurer à bord. Plus maintenant ! Je n'attendrai pas que l'Arcadia reparte, je n'en serai : je prends le commandement de mon Pirate Queen et je peux t'assurer, Clio, que plus d'un ici me suivra.
- Je l'ai deviné, il y a longtemps de cela.
Kei se racla la gorge.
- Et toi… ?
- Je ne quitterai jamais Albator !
- Je n'en doutais pas. Veille sur lui, car moi je ne peux plus, je ne veux plus.
La jeune femme soupira encore.
- Qu'est-ce qui pourrait, justement, lui rendre son humanité ?
- Un avenir.
- Pardon ?
D'incompréhension, Kei battit précipitamment des paupières, fixant Clio et son doux visage, et dont les yeux d'or en amande ne pouvaient que la considérer avec tendresse et compassion.
- Pardon ? répéta-t-elle.
- Albator doit enfin trouver la rose de sa vie et non plus en prendre les épines en plein cœur. Il a perdu cet espoir, s'est blindé et plus rien ne compte pour lui, sa vie moins que jamais. Les lèvres de la femme qui l'aimera, les rires et sourires de ses enfants. Un jour, je suis sûre qu'il y aura droit, il le mérite plus que n'importe qui.
- Il le faut ! décréta Kei. J'espère pouvoir en être témoin. Toi et ton optimisme forcené. Je crois que parfois je te déteste pour cela, et dans le même temps, je t'admire pour cette foi absolue. Est-ce que tes dons te permettent de voir le futur proche du capitaine ?
- En effet. Et il n'est qu'auréolé d'obscurité, comme le lui a prédit Maetel quand nous avons croisé le 999 et qu'il l'a rembarrée !
- Raison de plus pour que je m'éloigne. J'ai besoin d'avoir ma propre vie, de prendre mon destin en mains, que je sache ce dont je suis vraiment capable. J'ai un jour eu la responsabilité entière de l'Arcadia !
- Personne n'a oublié, et Albator le premier. Il t'a sait gré d'avoir sauvé le vaisseau et les membres d'équipage. Ensuite, il a fait enterrer les deux Marins qu'il avait lui-même abattu dans le sol d'une planète comme ils l'avaient demandé dans l'enregistrement de leurs dernières volontés.
- C'est là qu'il a pris un sacré coup, poursuivit Kei. Il avait tué deux hommes qui lui avaient fait entière confiance, s'étaient engagés sous sa bannière qui était alors de liberté. Il ne se pardonnera jamais d'avoir commis cette abomination sous le contrôle de cette ancienne Reine Sylvidre réincarnée sous forme de graine infinitésimale qui avait empoisonné et envahi son corps… Et ces influences ne me sont plus supportables. Il faut que je parte, Clio, absolument, sinon moi aussi j'y perdrai mon âme. A toi de veiller sur celle d'Albator.
- Je t'en donne ma parole.
- Et tâche aussi que Mayu revienne à de meilleurs sentiments. Depuis que l'adolescente qu'elle est cède aux sirènes de l'amour et rejette celui qui lui a consacré sa vie, manquant souvent la perdre, cela contribue à ce qu'il soit parti dans un cycle d'autodestruction qui arrivera bientôt à son terme. Plus rien ne lui importe. Clio, ne veille pas sur lui, sauve-le !
- J'en ai bien l'intention.
Et rassurée, Kei quitta une passerelle dont elle n'avait plus l'intention de fouler le sol.
Ses rêves, ses certitudes et ses idéaux avaient volé en éclats et si elle les regrettait, elle ne voulait plus que songer à son propre avenir – futur dont un pirate balafré ne pouvait faire partie, si tant était qu'il ait encore une longue espérance de vie.
